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21/12/2021 | FRANCE | N°21NC00011

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre, 21 décembre 2021, 21NC00011


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler les décisions en date des 2 mars et 26 mai 2020 par lesquelles le préfet de Meurthe-et-Moselle a refusé de lui délivrer un titre de séjour et d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, et à titre subsidiaire, de procéder à un nouvel examen de sa situation.

Par un jugement n° 2002093 du 3

décembre 2020, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande.

Procédure d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler les décisions en date des 2 mars et 26 mai 2020 par lesquelles le préfet de Meurthe-et-Moselle a refusé de lui délivrer un titre de séjour et d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, et à titre subsidiaire, de procéder à un nouvel examen de sa situation.

Par un jugement n° 2002093 du 3 décembre 2020, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée sous le n° 21NC00011 le 3 janvier 2021, et un mémoire enregistré le 27 avril 2021, M. A..., représenté par Me Pelzer, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nancy du 3 décembre 2020 ;

2°) d'annuler les décisions en date des 2 mars et 26 mai 2020 par lesquelles le préfet de Meurthe-et-Moselle a refusé de lui délivrer un titre de séjour ;

3°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, et à titre subsidiaire, de procéder à un nouvel examen de sa situation, sous la même astreinte ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- sa requête, formée dans le délai d'appel et présentée par un avocat, est recevable ;

- en écartant, au point 4 de son jugement, les éléments nouveaux portés à sa connaissance en cours d'instruction, le tribunal a méconnu le principe du contradictoire, le principe de sécurité juridique reconnu par le droit de l'Union européenne, ainsi que ses pouvoirs en matière d'instruction et d'injonction ;

- pour l'appréciation du caractère suffisant de ses ressources, il devait être tenu compte des contraintes de la crise sanitaire liée au virus du Covid 19, du caractère libéral de son activité, qui implique que ses revenus sont fluctuants, ainsi enfin que les subsides de l'Etat auxquels il a eu droit.

Par un mémoire en défense, enregistré le 14 avril 2021, le préfet de Meurthe-et-Moselle conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de M. Goujon-Fischer, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant algérien, entré en France le 8 septembre 2015 sous couvert d'un visa de long séjour l'autorisant à poursuivre des études, et s'est vu délivrer un certificat de résidence algérien en qualité d'étudiant, qui lui a été renouvelé jusqu'au 3 novembre 2019. Le 14 octobre 2019, il a sollicité du préfet de Meurthe-et-Moselle l'attribution d'un titre de séjour en vue de l'exercice d'une activité libérale. Par décision du 2 mars 2020, confirmée, sur recours gracieux, le 26 mai 2020, le préfet de Meurthe-et-Moselle a refusé de faire droit à sa demande, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. M. A... relève appel du jugement du 3 décembre 2020 par lequel le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces décisions des 2 mars et 26 mai 2020.

Sur la régularité du jugement :

2. Il appartient au juge de l'excès de pouvoir, eu égard au caractère objectif de son contrôle, d'apprécier la légalité d'une décision administrative au regard des circonstances de droit et de fait existant à la date à laquelle celle-ci est intervenue, y compris de faits dont l'auteur de cette décision n'avait pas connaissance à cette date. Il lui revient dès lors d'examiner tout élément de fait ou pièce qui lui sont soumis par les parties, quand bien même ils auraient été jusqu'alors ignorés de l'administration, dès lors qu'ils se rapportent à la situation qui prévalait effectivement à la date de la décision contestée.

3. Le tribunal a certes contredit cette règle en indiquant, au point 4 de son jugement, qu'" il appartient au juge de la légalité d'un acte administratif de statuer au vu des informations dont disposait effectivement l'autorité administrative au jour de sa décision " et que les éléments nouveaux portés à la connaissance de l'administration postérieurement à la décision contestée, " alors même qu'ils seraient relatifs à la situation de fait prévalant à la date de cette décision ne pouvaient pas être utilement invoqués devant le juge à l'appui de la contestation de la légalité de celle-ci ". Toutefois, l'erreur de droit dont sont entachées ces assertions ne constitue pas une irrégularité de nature à entraîner l'annulation du jugement. Il appartient seulement au juge d'appel, dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel, de se prononcer sur le bien-fondé du moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation qu'aurait commise le préfet en estimant que M. A... ne justifiait pas de ressources suffisantes au sens du a) de l'article 7 de l'accord franco-algérien, en se fondant sur les circonstances de droit et de fait existant effectivement à la date d'édiction des décisions du préfet de Meurthe-et-Moselle contre lesquelles ce moyen est invoqué.

4. En tout état de cause, il ne ressort ni du jugement attaqué, ni du dossier de la procédure conduite devant le tribunal administratif de Nancy que les premiers juges se seraient prononcés au vu d'éléments sur lesquels les parties n'auraient pas été mises à même de présenter préalablement leurs observations ou qu'ils n'auraient pas pris connaissance des éléments qui leur avaient été soumis. M. A... n'est dès lors pas fondé à soutenir que la réponse du tribunal faite au point 4 de son jugement contreviendrait au principe du caractère contradictoire de la procédure, au principe de sécurité juridique reconnu par le droit de l'Union européenne ou aux pouvoirs d'instruction et d'injonction reconnus au juge.

Sur la légalité des décisions des 2 mars et 26 mai 2020 :

5. Aux termes de l'article 5 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " Les ressortissants algériens s'établissant en France pour exercer une activité professionnelle autre que salariée reçoivent, après le contrôle médical d'usage et sur justification, selon le cas, qu'ils sont inscrits au registre du commerce ou au registre des métiers ou à un ordre professionnel, un certificat de résidence dans les conditions fixées aux articles 7 et 7 bis ". Par ailleurs, aux termes de l'article 7 du même accord : " (...) a) Les ressortissants algériens qui justifient de moyens d'existence suffisants et qui prennent l'engagement de n'exercer, en France, aucune activité professionnelle soumise à autorisation reçoivent après le contrôle médical d'usage un certificat valable un an renouvelable et portant la mention " visiteur " (...) ".

6. Il ressort des pièces du dossier que M. A... a créé en 2019 une micro-entreprise spécialisée dans le conseil en recherche en développement en sciences humaines et sociales et ayant pour activité secondaire l'organisation événementielle et la gestion de réceptions. Son avis d'imposition relatif aux revenus perçus en 2019 mentionne des salaires pour un montant de 16 540 euros ainsi que des bénéfices industriels et commerciaux, tirés de son activité de micro-entrepreneur, d'un montant cumulé de 2 642 euros. Il justifie par ailleurs, au titre de cette activité, un montant de bénéfices de 1 175 euros en janvier 2020 et de 850 euros en février 2020, tandis qu'il n'a perçu aucun bénéfice en mars, avril et mai 2020 en raison de la crise sanitaire du Covid 19. Le montant cumulé des bénéfices ainsi réalisés entre novembre 2019 et février 2020 était inférieur au salaire minimum interprofessionnel de croissance. En outre, en l'absence de revenus constatée en mars, avril et mai 2020, liée à la crise sanitaire, dont le préfet pouvait légalement tenir compte dans son appréciation des moyens d'existence de l'intéressé, et alors que les projections d'évolution de son entreprise, produites par celui-ci, ne permettaient pas à elles seules à justifier des revenus escomptés, M. A..., qui n'allègue pas non plus avoir disposé des mêmes ressources salariales que celles constatées en 2019, n'établit pas que le préfet de Meurthe-et-Moselle a inexactement appliqué les stipulations du a) de l'article 7 de l'accord franco-algérien en estimant, à la date des décisions contestés, que ses moyens d'existence n'étaient pas suffisants.

7. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande.

Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte :

8. L'exécution du présent arrêt n'implique aucune mesure d'exécution. Par suite, il y a lieu de rejeter les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte présentées par M. A....

Sur les frais liés à l'instance :

9. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens, ou à défaut la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ".

10. Ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que M. A... demande au titre des frais non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de Meurthe-et-Moselle.

4

N° 21NC00011


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 21NC00011
Date de la décision : 21/12/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. REES
Rapporteur ?: M. Jean-François GOUJON-FISCHER
Rapporteur public ?: Mme ANTONIAZZI
Avocat(s) : DP AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 28/12/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2021-12-21;21nc00011 ?
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