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09/12/2021 | FRANCE | N°21NC01242

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2ème chambre, 09 décembre 2021, 21NC01242


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler l'arrêté du 23 mars 2021 par lequel le préfet de la Meurthe-et-Moselle lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de renvoi et lui a interdit le retour sur le territoire français pour une durée de trente-six mois.

Par un jugement n° 2100856 du 9 avril 2021, la magistrate désignée par la présidente du tribunal administratif de Nancy a annulé cet arrêté du 23 mars 2021.

Procédure

devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 29 avril 2021, le préfet de la Meurthe-et...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler l'arrêté du 23 mars 2021 par lequel le préfet de la Meurthe-et-Moselle lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de renvoi et lui a interdit le retour sur le territoire français pour une durée de trente-six mois.

Par un jugement n° 2100856 du 9 avril 2021, la magistrate désignée par la présidente du tribunal administratif de Nancy a annulé cet arrêté du 23 mars 2021.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 29 avril 2021, le préfet de la Meurthe-et-Moselle demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 9 avril 2021 ;

2°) de rejeter la demande de M. A....

Il soutient que :

Sur la régularité du jugement :

- le tribunal a omis de se prononcer sur le second fondement de l'arrêté attaqué, qui était également fondé sur les dispositions du 1° de l'article L. 511-3-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le tribunal a omis de viser les dispositions applicables aux décisions fixant le pays de renvoi et interdisant le retour sur le territoire français, et a commis une erreur dans la désignation des dispositions de l'article L. 511-3-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Sur le motif d'annulation retenu par le premier juge :

- l'arrêté pouvait légalement se fonder sur l'existence d'une menace réelle et suffisamment grave à l'encontre d'un intérêt fondamental de la société au sens du 3° de l'article L. 511-3-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Lambing a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., né en 1974 et de nationalité roumaine, serait entré irrégulièrement en France en 2019 selon ses déclarations. Il a été condamné à une peine de quatre mois d'emprisonnement pour vol avec destruction ou dégradation par jugement du tribunal correctionnel de Nancy du 9 janvier 2020. Il a été écroué le 23 janvier 2021 au centre pénitentiaire de Nancy-Maxéville. Sa levée d'écrou devant intervenir le 25 avril 2021, par arrêté du 23 mars 2021, le préfet de la Meurthe-et-Moselle lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de renvoi et lui a interdit le retour sur le territoire français pour une durée de trente-six mois. Le préfet relève appel du jugement du 9 avril 2021 par lequel la magistrate désignée par la présidente du tribunal administratif de Nancy a annulé cet arrêté du 23 mars 2021.

Sur les conclusions à fin d'annulation de l'arrêté du 23 mars 2021 :

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

2. Aux termes de l'article L. 511-3-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors en vigueur : " L'autorité administrative compétente peut, par décision motivée, obliger un ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse, ou un membre de sa famille à quitter le territoire français lorsqu'elle constate : 1° Qu'il ne justifie plus d'aucun droit au séjour tel que prévu par les articles L. 121-1, L. 121-3 ou L. 121-4-1 ; (...) 3° Ou que son comportement personnel constitue, du point de vue de l'ordre public ou de la sécurité publique, une menace réelle, actuelle et suffisamment grave à l'encontre d'un intérêt fondamental de la société. / L'autorité administrative compétente tient compte de l'ensemble des circonstances relatives à sa situation, notamment la durée du séjour de l'intéressé en France, son âge, son état de santé, sa situation familiale et économique, son intégration sociale et culturelle en France, et de l'intensité de ses liens avec son pays d'origine. (...) ".

3. Il appartient à l'autorité administrative, qui ne saurait se fonder sur la seule existence d'une infraction à la loi, d'examiner, d'après l'ensemble des circonstances de l'affaire, si la présence de l'intéressé sur le territoire français est de nature à constituer une menace réelle, actuelle et suffisamment grave pour un intérêt fondamental de la société française, ces conditions étant appréciées en fonction de sa situation individuelle, notamment de la durée de son séjour en France, de sa situation familiale et économique et de son intégration.

4. Il ressort des pièces du dossier que l'arrêté attaqué vise les dispositions du 1° et du 3° de l'article L. 511-3-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Dans ses motifs, l'arrêté reproche à M. A... d'être démuni de titre de séjour et de ne justifier d'aucun droit au séjour. L'arrêté relève également que son comportement personnel constitue, du point de vue de l'ordre public ou de la sécurité publique, une menace réelle, actuelle et suffisamment grave à l'encontre d'un intérêt fondamental de la société. Le préfet de la Meurthe-et-Moselle doit être regardé comme ayant fondé la décision attaquée sur les dispositions précitées du 1° et du 3° de l'article L. 511-3-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, applicables aux ressortissants des Etats membres de l'Union européenne, des Etats parties à l'accord sur l'espace économique européen ou de la Confédération suisse.

5. D'une part, par jugement du tribunal correctionnel de Nancy du 9 janvier 2020, M. A... a été condamné à une peine de quatre mois d'emprisonnement pour vol avec destruction ou dégradation. Il a exécuté sa peine à compter du 23 janvier 2021 et a bénéficié du 1er au 25 avril 2021, d'une libération avec surveillance électronique. Eu égard au caractère isolé des faits et à leur faible gravité, le comportement de M. A... ne représente pas une menace réelle, actuelle et suffisamment grave à la sécurité publique des biens et des personnes, laquelle constitue un intérêt fondamental de la société, de nature à justifier à son encontre une mesure d'éloignement.

6. D'autre part, M. A... ne justifie pas qu'il satisfait aux conditions posées par les articles L. 121-1, L. 121-3 ou L. 121-4-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile afin de bénéficier d'un droit au séjour, en n'établissant notamment pas qu'il exercerait une activité professionnelle en France ou qu'il disposerait de ressources suffisantes. Le préfet de la Meurthe-et-Moselle pouvait, par suite, légalement se fonder sur ce motif pour prendre l'arrêté attaqué.

7. Enfin, il résulte de l'instruction que le préfet aurait pris la même décision s'il s'était fondé sur la seule circonstance que M. A... ne justifiait pas d'un droit au séjour tel que prévu par les articles L. 121-1, L. 121-3 et L. 121-4-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et pouvait ainsi faire l'objet d'une mesure d'éloignement en application du 1° de l'article L. 511-3-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

8. Il s'ensuit que le préfet de la Meurthe-et-Moselle est fondé à soutenir que sa décision obligeant M. A... à quitter le territoire français, fondée sur les dispositions du 1° de l'article L. 511-3-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'était pas entachée d'illégalité.

En ce qui concerne l'interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de trente-six mois :

9. Aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " III. ' L'autorité administrative, par une décision motivée, assortit l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français, d'une durée maximale de trois ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français, lorsque aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger./Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative ne prononce pas d'interdiction de retour./ (...) Lorsqu'elle ne se trouve pas en présence du cas prévu au premier alinéa du présent III, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, assortir l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée maximale de deux ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français./ La durée de l'interdiction de retour mentionnée aux premier, sixième et septième alinéas du présent III ainsi que le prononcé et la durée de l'interdiction de retour mentionnée au quatrième alinéa sont décidés par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français ".

10. M. A... n'apporte aucune précision permettant d'apprécier la portée de ses conclusions tendant à l'annulation de la décision lui faisant interdiction de retour sur le territoire. Par suite, ces conclusions ne peuvent qu'être rejetées.

11. Il résulte de tout ce qui précède que le préfet de la Meurthe-et-Moselle est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, la magistrate désignée par la présidente du tribunal administratif de Nancy a annulé son arrêté du 23 mars 2021.

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Nancy du 9 avril 2021 est annulé.

Article 2 : La demande de M. A... est rejetée.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à M. B... A....

Une copie du présent arrêt sera adressée au préfet de la Meurthe-et-Moselle.

2

N° 21NC01242


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 21NC01242
Date de la décision : 09/12/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. MARTINEZ
Rapporteur ?: Mme Stéphanie LAMBING
Rapporteur public ?: Mme HAUDIER
Avocat(s) : STOCCO

Origine de la décision
Date de l'import : 21/12/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2021-12-09;21nc01242 ?
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