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09/12/2021 | FRANCE | N°20NC03425

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2ème chambre, 09 décembre 2021, 20NC03425


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler l'arrêté du 28 juillet 2020 par lequel le préfet de Meurthe-et-Moselle a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être éloigné d'office.

Par un jugement numéro 2001891 du 30 octobre 2020, le tribunal administratif de Nancy a rejeté ces demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregist

rée le 26 novembre 2020, M. B..., représenté par Me Coissard, demande à la cour :

1°) d'annuler ce...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler l'arrêté du 28 juillet 2020 par lequel le préfet de Meurthe-et-Moselle a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être éloigné d'office.

Par un jugement numéro 2001891 du 30 octobre 2020, le tribunal administratif de Nancy a rejeté ces demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 26 novembre 2020, M. B..., représenté par Me Coissard, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler l'arrêté attaqué ;

3°) de faire injonction à l'autorité préfectorale de Meurthe-et-Moselle de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de deux mois à compter de l'arrêt ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son avocat d'une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- l'arrêté litigieux ne constitue pas l'un des actes pour lesquels son signataire avait reçu délégation du préfet ;

- le refus de séjour : est entaché d'erreur de fait en ce son état civil et sa nationalité sont parfaitement établis par les documents officiels qu'il a produits et il ne s'est rendu coupable d'aucune fraude et alors qu'il justifie de son intégration en France où il a vécu la totalité de sa vie d'adulte et a eu deux enfants ; méconnaît l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant ; porte atteinte à son droit à la vie privée et familiale en méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits humains et des libertés fondamentales et repose sur une erreur manifeste d'appréciation.

Par un mémoire en défense enregistré le 10 novembre 2021, le préfet de Meurthe-et-Moselle conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés.

M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du bureau d'aide juridictionnelle du 4 février 2021.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits humains et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le décret 91-1266 du 19 décembre 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Agnel ;

- et les observations de Me Coissard, représentant M. B....

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., de nationalité nigériane né le 2 juin 1994, est entré en France, selon ses déclarations en septembre 2011, à l'âge de dix-sept ans. A sa majorité, il a sollicité un titre de séjour sur le fondement du 2° bis de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 30 mai 2013, le préfet de Meurthe-et-Moselle a rejeté sa demande, lui a fait obligation de quitter le territoire et a fixé le Nigéria pour destination de cette mesure si elle devait être exécutée d'office. Par un jugement du 21 janvier 2014, le tribunal administratif de Nancy a rejeté son recours dirigé contre cette décision qui a été confirmé par un arrêt de la cour administrative d'appel de Nancy du 20 novembre 2014. Il a alors présenté une demande d'asile qui a été rejeté par une décision de l'Office français de protection des apatrides et des réfugiés (OFPRA) du 21 avril 2015 qui a été confirmée par une décision de la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) du 7 octobre 2015. Il a sollicité son admission exceptionnelle au séjour et obtenu une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler, renouvelée plusieurs fois et ce jusqu'au 5 décembre 2018. Le 24 décembre 2018, M. B... a, de nouveau, sollicité, son admission exceptionnelle au séjour. Par un arrêté du 28 juillet 2020, l'autorité préfectorale a refusé de lui délivrer le titre de séjour sollicité, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il est susceptible d'être reconduit. M. B... relève appel du jugement du 30 octobre 2020 par lequel le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la légalité de l'arrêté prise dans son ensemble :

2. M. B... reprend en appel le moyen tiré de ce que le signataire de l'arrêté attaqué ne disposait pas d'une délégation régulière à cet effet. Il y a lieu d'écarter ce moyen par les mêmes motifs que ceux retenus à juste titre par les premiers juges.

Sur la légalité du refus de séjour :

3. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits humains et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ". Aux termes du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors en vigueur: " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L.313-2 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ". Aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors en vigueur : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2 ". Aux termes enfin de l'article 3-1 de la convention internationale sur les droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ".

4. Il ressort des pièces du dossier que M. B... est entré en France sous couvert d'un faux passeport établi sous une identité d'emprunt. Il s'est ensuite prévalu de sa véritable identité et a produit des documents d'identité dont l'authenticité a été remise en cause par un rapport de la police aux frontières du 25 juillet 2016 mettant en lumière plusieurs anomalies affectant l'acte d'état civil présenté. L'autorité administrative s'est notamment fondée sur ce motif afin de refuser, sur le fondement des articles R. 311-2-2 et R. 313-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le titre de séjour sollicité. M. B... a produit devant les premiers juges un acte de naissance authentifié daté du 11 novembre 2016 de nature à établir son état civil et à justifier de son identité. Par suite, M. B... est fondé à soutenir que le motif de refus tenant au défaut de justification de son état civil est entaché d'une erreur de fait. Mais, l'autorité préfectorale s'est également fondée sur les autres motifs exposés ci-après afin de refuser au requérant un titre de séjour.

5. Il ressort des pièces du dossier que M. B... a depuis son arrivée en France suivi des études professionnelles sanctionnées par un diplôme dans le domaine de la restauration et a presque constamment travaillé dans ce domaine. Il est employé en contrat de travail à durée indéterminée à temps complet depuis le 3 octobre 2018 en qualité de vendeur dans une boulangerie. En dépit de ces éléments, compte tenu de la nature de l'emploi occupé, il ne ressort pas des pièces du dossier que son admission au séjour répondrait à des considérations humanitaires ou se justifierait par des motifs exceptionnels au regard des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

6. Si M. B... soutient qu'il vit maritalement avec une ressortissante nigérienne dont il a eu deux enfants qu'il a reconnus, il ne produit aucune pièce, y compris en appel, de nature à démontrer une communauté de vie avec cette dernière et ne justifie pas contribuer à l'entretien et l'éducation de ses deux enfants mineurs ainsi que l'a fait valoir l'administration en défense devant le tribunal administratif. Par suite, M. B... n'est pas fondé à soutenir que le refus de séjour attaqué porterait une atteinte disproportionnée à son droit à la vie privée et familiale en violation de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits humains et des libertés fondamentales et méconnaîtrait l'intérêt supérieur de ses enfants en méconnaissance de l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant.

7. Si M. B... fait valoir qu'il réside en France depuis l'année 2011, y a fait ses études et y travaille, sous couvert d'autorisations de séjour l'autorisant à occuper un emploi, il ressort des pièces du dossier que l'intéressé est venu en France muni d'un faux passeport, n'a pas déféré à de précédentes mesures d'éloignement, ne s'est vu délivrer des autorisations de séjour que pour les besoins de l'instruction de ses demandes et a fait l'objet d'une procédure dans laquelle il a été mis en cause pour violences volontaires. Compte tenu de l'absence de liens personnels et familiaux en France, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, le refus de séjour qui lui a été opposé ne méconnaît pas, dans les circonstances de l'espèce, les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et ne porte pas à sa vie privée une atteinte disproportionnée en violation de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits humains et des libertés fondamentales.

8. Il ressort des pièces du dossier qu'en se fondant sur les seuls motifs ci-dessus, reposant sur les dispositions de l'article L. 313-14 et sur le 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, au regard des stipulations de la convention européenne de sauvegarde des droits humains et des libertés fondamentales et de la convention relative aux droits de l'enfant, l'autorité préfectorale aurait pris la même décision de refus de titre de séjour. Par suite, la circonstance que le motif relatif à l'état civil de l'intéressé est entaché d'erreur de fait demeure sans incidence sur la légalité de cette décision.

9. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande. Par suite, sa requête doit être rejetée en toutes ses conclusions y compris celles tendant à l'application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur.

Copie du présent arrêt sera adressée au préfet de Meurthe-et-Moselle.

N° 20NC03425 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 20NC03425
Date de la décision : 09/12/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. - Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. AGNEL
Rapporteur ?: M. Marc AGNEL
Rapporteur public ?: Mme HAUDIER
Avocat(s) : SCP LEBON et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 21/12/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2021-12-09;20nc03425 ?
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