Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme B... D... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 2 juin 2020 par lequel le préfet du Haut-Rhin l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.
Par un jugement n° 203380 du 23 septembre 2020, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et des mémoires enregistrés les 23 octobre 2020, 2 décembre 2020 et le 31 janvier 2021, Mme D..., représentée par Me Galland, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 23 septembre 2020 ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du préfet du Haut-Rhin du 2 juin 2020 ;
3°) d'enjoindre au préfet du Haut-Rhin de réexaminer sa situation administrative et dans l'attente de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- elle est recevable à exciper de l'illégalité du refus de titre de séjour qui n'est pas devenu définitif ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français est illégale en raison de l'illégalité de la décision de refus de titre dès lors que le préfet n'a pas envisagé une régularisation pourtant justifiée par ses conditions de séjour en France ;
- au regard du temps passé en France entre 1991 et 2011, de sa parfaite intégration notamment professionnelle ainsi que de son rôle auprès de son père malade, le refus de titre de séjour est entaché d'une erreur manifeste quant à ses conséquences sur sa situation personnelle ;
- en rejetant implicitement son recours gracieux contre le refus de titre de séjour, le préfet n'a pas examiné sérieusement sa demande ;
- elle peut se prévaloir des dispositions de l'article L. 314-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile puisqu'elle est revenue plusieurs fois en France et a été retenue dans son pays de force par son mari.
Par un mémoire en défense, enregistré le 20 janvier 2021, le préfet du Haut-Rhin conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Le rapport de Mme Ghisu-Deparis, présidente, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme D..., ressortissante turque née le 22 février 1981, est entrée en France en 1991, a obtenu un titre de séjour à sa majorité et a bénéficié en dernier lieu d'une carte de résident valable du 22 février 2009 au 21 février 2019. Résidant en Turquie depuis 2011 avec son époux et leur fille A... C..., née le 8 mai 2008 en France, elle est revenue sur le territoire français le 31 octobre 2018 et a demandé, en février 2019, le renouvellement de son titre de séjour. Par une décision du 3 octobre 2019, le préfet du Haut-Rhin a opposé un refus à cette demande au motif que l'intéressée s'était absentée pour une période de plus de trois ans consécutifs. Mme D... a formé contre cette décision un recours gracieux dans lequel elle sollicitait, au regard de sa situation particulière, sa régularisation, qui a été implicitement rejeté. Par un arrêté du 2 juin 2020, le préfet du Haut-Rhin a pris à son encontre une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Mme D... relève appel du jugement du 23 septembre 2020 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté.
Sur l'exception d'illégalité de l'arrêté du 3 octobre 2019 :
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 314-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors en vigueur : " La carte de résident est valable dix ans. Sous réserve des dispositions des articles L. 314-5 et L. 314-7, elle est renouvelable de plein droit ". Aux termes de l'article L. 314-7 du même code : " La carte de résident d'un étranger qui a quitté le territoire français et résidé à l'étranger pendant une période de plus de trois ans consécutifs est périmée / La période mentionnée ci-dessus peut être prolongée si l'intéressé en a fait la demande soit avant son départ de France, soit pendant son séjour à l'étranger (...) ".
3. Le préfet du Haut-Rhin a rejeté la demande de renouvellement de carte de résident de Mme D... au motif que l'intéressée ayant quitté le territoire et résidé à l'étranger depuis une période de plus de trois ans consécutifs, son précédent titre était périmé. Il ressort des pièces du dossier que Mme D... a quitté le territoire français en 2011. Elle atteste être revenue en France en 2013 et 2014 mais pas en 2015. Par suite, elle ne justifie pas ne pas avoir quitté la France pendant une période de plus de trois ans consécutifs. Au regard du caractère périmé de son précédent titre de séjour, le préfet du Haut-Rhin a pu légalement, sur le fondement des dispositions précitées, refuser son renouvellement.
4. En second lieu, lorsqu'il est saisi d'une demande de délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'une des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il est loisible au préfet d'examiner d'office si l'intéressé peut prétendre à une autorisation sur le fondement d'une autre disposition de ce code. Il peut, en outre, exercer le pouvoir discrétionnaire qui lui appartient, dès lors qu'aucune disposition expresse ne le lui interdit, de régulariser la situation d'un étranger en lui délivrant le titre qu'il demande ou un autre titre, compte tenu de l'ensemble des éléments de sa situation personnelle, dont il justifierait. Il n'a cependant aucune obligation de régularisation.
5. Il ne ressort pas des termes de la décision du 3 octobre 2019, que le préfet se soit interrogé sur la possible régularisation de Mme D.... Toutefois, saisi d'une demande d'un titre de séjour sur le fondement l'article L. 314-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, s'il était loisible au préfet de s'interroger sur la possible régularisation de Mme D..., il n'y était pas tenu. En s'abstenant de le faire le préfet du Haut-Rhin n'a, par suite, commis aucune erreur de droit et n'a pu, dès lors qu'il n'a pas examiné cette possibilité, commettre une erreur manifeste dans l'appréciation de la situation de l'intéressée.
6. Le moyen tiré de l'exception d'illégalité de la décision du 3 octobre 2019 ne peut ainsi qu'être écarté.
Sur l'exception d'illégalité du rejet du recours gracieux en tant qu'il porte refus de régularisation :
7. Il ne ressort pas des termes de l'arrêté du 2 juin 2020 contesté que, pour prononcer la mesure d'éloignement, le préfet se soit fondé sur le refus implicite qu'il a opposé à Mme D... à sa demande tendant à ce qu'elle soit régularisée. Par suite, Mme D... ne peut utilement, à l'appui de la contestation de l'arrêté du 2 juin 2020, exciper de l'illégalité de ce refus.
8. Le moyen tiré de l'exception d'illégalité de la décision implicite de refus de régularisation ne peut ainsi qu'être écarté.
9. Il résulte de tout ce qui précède que Mme D... n'est pas fondée à se plaindre du rejet, par le jugement attaqué, de sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 2 juin 2020. Les conclusions aux fins d'injonction et celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761 -1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées par voie de conséquence.
DECIDE :
Article 1er : La requête de Mme D... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... D... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet du Haut-Rhin.
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N° 20NC03111