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19/10/2021 | FRANCE | N°19NC01177

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre, 19 octobre 2021, 19NC01177


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... A... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg de condamner l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) à lui verser la somme globale de 6 205 396,59 euros au titre de l'aggravation de la sclérose en plaques induite par la vaccination obligatoire contre l'hépatite B, de prendre acte de son acceptation de la proposition d'indemnisation de l'ONIAM s'agissant du préjudice d'agrément et du préjudice sexuel et de so

n désistement s'agissant de l'indemnisation du déficit fonctionnel temp...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... A... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg de condamner l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) à lui verser la somme globale de 6 205 396,59 euros au titre de l'aggravation de la sclérose en plaques induite par la vaccination obligatoire contre l'hépatite B, de prendre acte de son acceptation de la proposition d'indemnisation de l'ONIAM s'agissant du préjudice d'agrément et du préjudice sexuel et de son désistement s'agissant de l'indemnisation du déficit fonctionnel temporaire.

Par un jugement n° 1604991 du 15 février 2019, rectifié par une ordonnance du 28 mars 2019, le tribunal administratif de Strasbourg a condamné l'ONIAM à verser à Mme A... la somme de 1 170 146,23 euros, sous déduction de la provision de 170 000 euros accordée par une ordonnance du 27 juin 2017, ainsi qu'une rente annuelle au titre de la tierce personne de 54 205 euros revalorisée en application des dispositions de l'article L. 434-17 du code de la sécurité sociale, et à prendre en charge, sur justificatif, une cure thermale annuelle, un lit médicalisé tous les cinq ans et un dispositif de transfert tous les cinq ans. Le tribunal a également mis les frais d'expertise, d'un montant de 2 018 euros, à la charge de l'ONIAM, ainsi que la somme de 2 500 euros à verser à Mme A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 12 avril 2019, 30 octobre 2020, 10 décembre 2020 et 17 septembre 2021, Mme C... A..., représentée par Me Nattier, demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :

1°) de réformer le jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 15 février 2019 ;

2°) de porter la somme que l'ONIAM est condamné à lui verser à 7 428 395,04 euros, assortie des intérêts de droit à compter du 7 février 2012, et à la rembourser, sur justificatifs, des frais afférents au déplacement annuel en cure thermale ;

3°) de déclarer l'arrêt à intervenir commun et opposable à la caisse primaire d'assurance maladie du Bas-Rhin ;

4°) de mettre à la charge de l'ONIAM une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- elle a droit à l'indemnisation des conséquences de la sclérose en plaques dont elle souffre, qui est imputable à la vaccination contre l'hépatite B, sur le fondement des articles L. 3 111-4, L. 3 111-9 et R. 3 111-31 du code de la santé publique ; elle sollicite la réformation du jugement s'agissant de certains postes de préjudice, relatifs à l'aggravation de cette pathologie, survenue à compter du 12 mars 2008 ;

- il y a lieu de retenir une capitalisation au 23 octobre 2014, alors qu'elle était âgée de 39 ans et d'appliquer les coefficients de capitalisation de la Gazette du Palais 2020 ;

- s'agissant des dépenses de santé actuelles, c'est à tort que les premiers juges ont estimé que les frais de pédicurie, podologie et d'acquisition de bas avaient été intégrés dans les dépenses de santé futures au titre de la transaction conclue avec l'ONIAM, alors que cette dernière ne portait que sur les changes et le fauteuil roulant ; elle a droit à des sommes de 32 621,76 euros au titre des frais de change, de 43 931,76 euros au titre des bas de contention restés à charge, nécessités par l'aggravation de son état de santé, et de 9 792 euros pour les soins de pédicurie et de podologie, correspondant à un besoin imputable à l'aggravation de son état de santé, étant précisé qu'il aurait été fait état d'un remboursement par la sécurité sociale, au titre du recours subrogatoire, si des sommes avaient été exposées à ce titre ; c'est à tort que le tribunal a prévu une indemnisation des frais de change seulement à partir du 12 février 2015 ; elle sollicite une somme de 11 310 euros au titre des dépenses de santé actuelles non indemnisées par la transaction ;

- elle renonce à contester les sommes allouées au titre de la perte de gains professionnels actuels ;

- s'agissant de l'assistance par tierce personne temporaire, le taux horaire retenu par les premiers juges est insuffisant au regard de ses besoins, nécessitant une aide technique particulière, et au regard des factures qu'elle produit pour les années 2013 et 2014, faisant état d'un coût horaire réel compris entre 19 et 29 euros, et même supérieur pour les gardes de nuit ; elle a droit, sur la base d'un montant de 24 euros par heure et après déduction des indemnités perçues, à 289 287,09 euros ;

- elle sollicite, au titre des frais divers avant consolidation, des sommes de 925,20 euros et 972 euros au titre de l'intervention d'une ergothérapeute, qui a évalué les possibilités de logement sur préconisation du docteur D..., ainsi que 9 216 euros liés à l'intervention d'un expert-comptable pour déterminer le montant réel de ses pertes de gains professionnels ;

- une somme de 185 666,20 euros doit lui être versée s'agissant des frais de change, après déduction du solde positif sur les dépenses de santé avant consolidation de l'aggravation ;

- les soins de pédicurie et de podologie ainsi que les bas de contention n'ont pas été indemnisés en 2010 ; elle a droit à 58 477,82 euros au titre des soins de podologie et de pédicurie et à 9 066 euros au titre des frais de bas de contention demeurés à sa charge ; elle souscrit à l'analyse du tribunal s'agissant du système de transfert, du lit médicalisé et des frais de cure thermale ; elle sollicite 42 022,80 euros, au titre de l'échu, et 244 789 euros, pour l'avenir, sous réserve de déduction de l'indemnité versée par l'ONIAM pour un montant de 36 802,99 euros, s'agissant du fauteuil roulant, dont les caractéristiques ont évolué compte tenu de l'aggravation de sa pathologie ; elle sollicite, en outre, le remboursement des frais de transport pour se rendre en cure thermale, cette demande étant connexe à ses conclusions initiales et ne pouvant être regardée comme une prétention nouvelle ;

- elle sollicite une somme de 179 413,75 euros au titre des frais de logement adapté liés à l'achat et à l'aménagement de son appartement ; l'obligation de réparer l'entier dommage n'est ni subsidiaire, ni conditionnée à une demande d'aide financière préalable ;

- elle sollicite la somme de 253 380 euros au titre des frais de véhicule adapté, correspondant à un transport par semaine à compter du 1er janvier 2018, à titre viager, rendu nécessaire par son déménagement ; ces conclusions, connexes à la demande d'indemnisation au titre de l'aggravation de sa pathologie, sont recevables ;

- elle sollicite 648 970 euros au titre des arrérages acquis pour l'assistance future par tierce personne, sur les mêmes bases de calcul que précédemment, et 4 266 556 euros pour la capitalisation ou, subsidiairement, une rente de 104 634 euros, déduction faite de la majoration pour tierce personne qu'elle perçoit ;

- elle sollicite 500 505,58 euros au titre de la perte de gains professionnels futurs ; les premiers juges ont méconnu le principe de réparation intégrale, en ne tenant compte ni d'une évolution de carrière ni de l'inflation ; il y a lieu de tenir compte du rapport réalisé par un expert-comptable, sur la base de l'évolution de sa carrière dans la fonction publique comme technicienne de recherche et de formation, sauf à ordonner la désignation d'un expert judiciaire ; elle aurait pu faire valoir ses droits à la retraite à l'âge de 67 ans, alors qu'elle a débuté sa carrière en 2003 ;

- elle demande 100 000 euros au titre du préjudice moral lié à l'incidence professionnelle, dès lors qu'elle est dans un état d'inactivité totale, étant en inaptitude depuis 2013 et que les 30 000 euros alloués par le tribunal sont insuffisants ; il est sollicité 258 468,10 euros au titre des droits à la retraite ;

- elle a droit à une indemnisation complémentaire de 30 000 euros au titre des souffrances endurées, estimées à 6 sur une échelle de 7 par l'expert, la somme allouée par le tribunal est insuffisante ;

- elle sollicite 246 859 euros au titre du déficit fonctionnel permanent, correspondant à la différence entre l'indemnisation d'un déficit de 85 %, soit 382 500 euros, et l'indemnité versée en 2010 sur ce chef de préjudice, déduction faite du déficit fonctionnel temporaire, soit 135 641 euros ;

- elle demande 37 500 euros au titre du préjudice esthétique permanent, évalué à 6 sur une échelle de 7, compte tenu de l'indemnité de 12 500 euros qui lui avait été précédemment allouée ;

- elle a droit à 30 000 euros au titre du préjudice lié à une pathologie évolutive, compte tenu de la modicité de l'indemnité versée.

Par des mémoires enregistrés les 27 septembre 2019 et 22 novembre 2020, l'ONIAM, représenté par Me Joliff, demande à la cour de confirmer le jugement attaqué, dans sa rédaction rectifiée, et de rejeter les conclusions de Mme A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- il n'est pas justifié de sommes liées à l'aggravation au titre des dépenses de santé avant consolidation, ni même d'un reste à charge ; c'est à juste titre que les premiers juges ont estimé que ces dépenses avaient été indemnisées dans le cadre de la transaction conclue avec la victime, parmi les frais futurs ;

- le préjudice invoqué au titre d'un emploi comme sage-femme est hypothétique, dès lors que l'intéressée était seulement inscrite sur liste d'attente et qu'elle n'a jamais exercé cette profession ; il y a déjà eu indemnisation au titre de la transaction, les demandes formulées par Mme A... méconnaissent le principe de la réparation intégrale et conduisent à une violation de l'exception de transaction au sens de l'article 2044 du code civil ; c'est à juste titre que les premiers juges ont retenu une somme de 8 328,30 euros, qui n'est plus contestée dans les dernières écritures de la requérante ;

- c'est à juste titre que les premiers juges ont accordé une somme de 144 326,21 euros au titre de l'assistance par tierce personne avant consolidation, alors que le montant demandé par Mme A... est excessif au regard des missions nécessaires et qu'il y a lieu de déduire les indemnités reçues de la part de la maison départementale des personnes handicapées ;

- s'agissant des dépenses de santé futures, la condamnation demandée par Mme A... engloberait les dépenses de santé futures initiales ainsi que celles liées à l'aggravation ; il avait indemnisé la prise en charge des fauteuils, incluant leur renouvellement, et des changes ; c'est à juste titre que les premiers juges ont mis à sa charge une somme de 128 006,56 euros au titre des changes ; s'agissant des frais de séjour annuel en établissement spécialisé, il n'est pas justifié d'un reste à charge ni d'une fréquence annuelle et la requérante ne semble plus revendiquer de somme à ce titre en appel ; le jugement doit être confirmé s'agissant du fauteuil roulant, du système de transfert et du lit médicalisé, ainsi que des frais de cure thermale ; en revanche, la demande au titre des frais de transport pour se rendre à la cure constitue une prétention nouvelle, non chiffrée et non étayée, ne permettant pas d'établir un reste à charge, et doit dès lors être rejetée ;

- une somme de 40 237,40 euros a été versée à Mme A... au titre des frais de logement adapté ; le jugement doit être confirmé en tant qu'il rejette ces prétentions, d'autant que la demande de prise en charge des frais d'acquisition est une demande nouvelle ; les coûts d'aménagement du logement peuvent être pris en charge par les aides du conseil départemental ;

- les conclusions relatives aux frais de véhicule adapté sont irrecevables car présentées pour la première fois en appel ; seul le surcoût serait indemnisable ; l'évaluation d'une sortie par semaine n'est pas justifiée, son accompagnant lui permet de se déplacer ;

- le jugement doit être confirmé s'agissant des frais divers ;

- le jugement doit être confirmé s'agissant de l'assistance par tierce personne permanente ;

- s'agissant de la perte des gains professionnels futurs, c'est à tort que l'expert-comptable raisonne sur la base des ressources que l'intéressée aurait pu percevoir en tant que sage-femme, dans le cadre d'une évaluation qui n'a pas été réalisée contradictoirement et qui se base sur une évolution de carrière hypothétique ; il y a lieu de raisonner jusqu'à l'âge de 62 ans ; l'intéressée a déjà été indemnisée à titre amiable ; la pension d'invalidité doit être déduite ; alors qu'il proposait d'allouer 118 813,17 euros, il y a lieu de confirmer le raisonnement des premiers juges, accordant une somme de 127 393,66 euros ;

- c'est à juste titre que les premiers juges ont accordé 30 000 euros au titre de l'incidence professionnelle et 173 806 euros au titre de la perte des droits à la retraite ;

- le jugement doit être confirmé en tant qu'il a acté le désistement de la requérante s'agissant du déficit fonctionnel temporaire, ainsi que l'accord des parties sur les sommes dues au titre du préjudice d'agrément et du préjudice sexuel ;

- c'est à juste titre, compte tenu de l'indemnité déjà octroyée antérieurement, que le tribunal a accordé une somme de 18 000 euros au titre des souffrances endurées ;

- les montant de 15 000 euros retenus par les premiers juges au titre du préjudice esthétique doit être confirmé ;

- il en va de même s'agissant de 50 000 euros accordés au titre du préjudice d'établissement ;

- le jugement doit être confirmé s'agissant du déficit fonctionnel permanent ;

- c'est à juste titre que le tribunal a refusé d'octroyer une somme à la requérante au titre du préjudice lié à une pathologie évolutive, sauf à accorder une double indemnisation.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code civil ;

- le code de la santé publique ;

- le code de la sécurité sociale ;

- le code du travail ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme E...,

- les conclusions de M. Barteaux, rapporteur public,

- et les observations de Me Nattier pour Mme A....

Considérant ce qui suit :

1. Mme A..., née le 11 novembre 1975, a fait l'objet d'une vaccination contre le virus de l'hépatite B et a développé des troubles évocateurs de la sclérose en plaques. Après avoir bénéficié d'une indemnisation à titre amiable par l'ONIAM à la suite de deux offres d'indemnisation les 28 janvier 2008 et 19 février 2010, elle a sollicité la réparation du préjudice lié à l'aggravation de sa pathologie. Elle relève appel du jugement du tribunal administratif de Strasbourg en tant qu'il n'a pas fait droit à l'intégralité de ses prétentions, tout en sollicitant de nouvelles indemnités. L'ONIAM, pour sa part, demande à la cour de confirmer le jugement.

Sur les fins de non-recevoir opposées par l'ONIAM :

2. La personne qui a demandé, en première instance, la réparation des conséquences dommageables d'un fait qu'elle impute à une administration est recevable à détailler ces conséquences devant le juge d'appel en invoquant, le cas échéant, des chefs de préjudice dont elle n'avait pas fait état devant les premiers juges, dès lors que ces chefs de préjudice se rattachent au même fait générateur. Cette personne n'est toutefois recevable à majorer ses prétentions en appel que si le dommage s'est aggravé ou s'est révélé dans toute son ampleur postérieurement au jugement qu'elle attaque. Il suit de là qu'il appartient au juge d'appel d'évaluer, à la date à laquelle il se prononce, les préjudices invoqués, qu'ils l'aient été dès la première instance ou le soient pour la première fois en appel, et de les réparer dans la limite du montant total demandé devant les premiers juges. Il ne peut mettre à la charge du responsable une indemnité excédant ce montant que si le dommage s'est aggravé ou révélé dans toute son ampleur postérieurement au jugement attaqué.

3. L'ensemble des préjudices dont Mme A... sollicite la réparation se rattache au fait générateur qu'elle avait invoqué devant le tribunal, à savoir l'aggravation de la sclérose en plaques liée à la vaccination obligatoire contre l'hépatite B qu'elle avait subie. L'ONIAM n'est donc pas fondé à soutenir que certains chefs de préjudice, nouvellement invoqués, sont irrecevables en appel, pour autant que le montant que le présent arrêt met à la charge de l'ONIAM demeure inférieur au montant total qui avait été demandé devant les premiers juges.

4. En outre, la circonstance que Mme A... ne chiffre pas le montant des sommes qu'elle demande au titre du remboursement des frais de déplacement pour se rendre en cure thermale est sans incidence, par elle-même, sur la recevabilité de ses conclusions indemnitaires, alors que ses conclusions sont globalement chiffrées et qu'elle sollicite, pour ce poste spécifique, un remboursement sur justificatif.

5. Il suit de là que les fins de non-recevoir opposées par l'ONIAM doivent être écartées.

Sur l'engagement de la solidarité nationale :

6. Il résulte de l'instruction, et il n'est d'ailleurs pas contesté, que la sclérose en plaques dont est atteinte la requérante doit être regardée comme imputable à la vaccination contre l'hépatite B subie par Mme A... les 11 février 1994, 16 mars 1994 et 28 mars 1995, à titre obligatoire dans le cadre de ses études médicales, alors que les premiers symptômes sont apparus dans un bref délai après les injections. La requérante est, par suite, fondée à demander à l'ONIAM de l'indemniser, sur le fondement des dispositions de l'article L. 3 111-4 du code de la santé publique, des conséquences dommageables liées à l'aggravation de sa pathologie, tenant notamment à l'accroissement significatif des troubles moteurs, sphinctériens et visuels et à l'apparition de troubles cognitifs, selon le rapport d'expertise, non contesté, du docteur D..., désigné par le juge des référés du tribunal administratif de Strasbourg.

Sur les préjudices indemnisables :

En ce qui concerne les préjudices patrimoniaux temporaires :

7. En premier lieu, s'agissant des dépenses de santé actuelles, il résulte de l'instruction que, contrairement à ce qu'ont retenu les premiers juges, la transaction signée en 2010 entre Mme A... et l'ONIAM ne prévoyait pas l'indemnisation des soins de pédicure, de podologue et d'achat de bas de contention. Dès lors, la requérante est fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal a rejeté, pour ce motif, sa demande d'indemnisation au titre des dépenses de santé antérieures à la consolidation de l'aggravation, survenue, selon les énonciations non contestées du rapport d'expertise du docteur D..., le 23 octobre 2014.

8. S'il n'est pas sérieusement contesté que ces dépenses sont liées à l'aggravation de la pathologie, la requérante ne justifie, pour la période antérieure à la consolidation, que d'une facture concernant une prestation de soin de pédicure datée du 3 février 2014, pour un montant de 34 euros. Cette somme doit être regardée comme demeurée à la charge de l'intéressée, dès lors que la caisse primaire d'assurance maladie n'a pas indiqué, dans ses écritures devant les premiers juges, avoir effectué des remboursements à ce titre et que Mme A... produit un courriel de sa mutuelle indiquant que ces dépenses ne sont pas prises en charge. Pour le surplus, il n'est pas établi que les prestations en cause auraient été effectivement été réalisées, ou que Mme A... aurait acquis des bas de contention avant la consolidation.

9. En deuxième lieu, il résulte de l'instruction, en particulier du rapport du docteur D..., qu'en raison de l'aggravation de sa pathologie, Mme A... a désormais besoin de dix heures d'aide humaine active par jour et deux heures d'assistance passive par jour, soit un total de douze heures journalières depuis le 7 février 2012.

10. Lorsque le juge administratif indemnise dans le chef de la victime d'un dommage corporel la nécessité de recourir à l'aide d'une tierce personne, il détermine le montant de l'indemnité réparant ce préjudice en fonction des besoins de la victime et des dépenses nécessaires pour y pourvoir. Il doit à cette fin se fonder sur un taux horaire déterminé, au vu des pièces du dossier, par référence, soit au montant des salaires des personnes à employer augmentés des cotisations sociales dues par l'employeur, soit aux tarifs des organismes offrant de telles prestations, en permettant le recours à l'aide professionnelle d'une tierce personne d'un niveau de qualification adéquat et sans être lié par les débours effectifs dont la victime peut justifier. Il n'appartient notamment pas au juge, pour déterminer cette indemnisation, de tenir compte de la circonstance que l'aide a été ou pourrait être apportée par un membre de la famille ou un proche de la victime.

11. Il résulte de l'instruction qu'au regard de la gravité du handicap de Mme A... et du besoin d'assistance qu'il génère, il y a lieu de retenir un taux horaire de 20 euros, lui permettant d'avoir recours à un prestataire, contrairement à ce qu'ont retenu les premiers juges. Il n'y a pas lieu, dans ces conditions, de calculer l'indemnisation sur la base d'une année de 412 jours pour tenir compte des congés payés et des jours fériés prévus par l'article L. 3133-1 du code du travail, ainsi que le demande Mme A..., dans la mesure où le surcoût correspondant est intégré dans le tarif permettant le recours à un prestataire. Par suite, le préjudice de Mme A..., pour la période comprise entre le 7 février 2012 et la date de consolidation, s'établit à 237 120 euros, dont doivent être déduits le montant versé par la maison départementale des personnes handicapées, soit 8 172,34 euros, ainsi que la majoration pour tierce personne, pour un montant de 23 650,45 euros. La somme que l'ONIAM doit être condamné à verser à Mme A... s'établit, par suite, à 205 297,21 euros.

12. En troisième lieu, Mme A... ne conteste plus, dans ses dernières écritures, le montant des indemnités qui lui ont été allouées par les premiers juges, à hauteur de 8 328,30 euros, pour la perte de gains professionnels actuels.

En ce qui concerne les préjudices patrimoniaux permanents :

S'agissant des dépenses de santé futures et des frais divers :

13. En premier lieu, s'agissant des dépenses de santé futures, il n'est pas contesté que l'accroissement des troubles sphinctériens dont souffre Mme A..., en raison de l'aggravation de sa pathologie, a entraîné, pour cette dernière, un besoin supplémentaire pour l'acquisition de changes. Alors même que l'intéressée produit une prescription à compter du 2 février 2015, ce besoin doit être regardé comme ayant existé dès le 23 octobre 2014, date de consolidation. Il résulte de l'instruction que la requérante justifie d'une dépense demeurant à sa charge de 4 077,72 euros par an. Il est par ailleurs constant que l'indemnité qui lui a été versée par l'ONIAM à ce titre indemnise un besoin de 1 802,27 euros par an, de sorte que le besoin restant à indemniser s'établit à 2 275,45 euros par an. Mme A... a donc, par suite, droit à une somme de 15 928,15 euros jusqu'à la date du présent arrêt puis, au regard du coefficient tiré du barème de capitalisation de la Gazette du Palais pour 2020 applicable en l'espèce à une femme de 45 ans, soit 40,776, à une somme de 92 783,75 euros pour l'avenir.

14. En deuxième lieu, la requérante justifie seulement avoir exposé des frais de pédicure réalisés par un podologue par la production de deux factures datées des 2 février 2015 et 18 février 2018, pour des montants de 34 et 48 euros. Ces frais doivent être regardés comme étant demeurés à sa charge ainsi qu'il a été dit au point 8. Elle a droit, en outre, à être indemnisée des sommes restées à sa charge pour l'acquisition de bas de contention, dont il n'est justifié qu'à hauteur de 47,44 euros. Pour l'avenir, Mme A... est fondée à solliciter le remboursement de ces dépenses, sur justificatif des sommes effectivement demeurées à sa charge et dans la limite d'une fois par mois pour les soins de podologue, selon la périodicité retenue par l'ordonnance la plus récente prescrivant ces soins en date du 2 février 2015, et d'une paire de bas tous les trois mois.

15. En troisième lieu, Mme A... demande un complément d'indemnisation des frais d'acquisition et de renouvellement de fauteuil roulant. Il résulte de l'instruction, notamment du rapport du docteur D... et de la note rédigée par un ergothérapeute dont se prévaut la requérante, que l'aggravation de son handicap implique non seulement un recours à un fauteuil roulant électrique, mais aussi l'acquisition de certains accessoires indispensables à une installation correcte de l'intéressée. Mme A... justifie ainsi d'un besoin supplémentaire par rapport à celui qui avait été indemnisé à titre amiable, à supposer même que cette indemnisation précédente inclurait déjà un fauteuil roulant électrique. Il ressort du devis produit, s'agissant d'un équipement qui n'a pas encore été acquis à la date du présent arrêt, que le coût restant à la charge de la victime pour l'acquisition de ce fauteuil et de ses accessoires, après déduction des sommes ayant vocations à être versées par la caisse primaire d'assurance maladie, s'établit à 30 016,30 euros. L'ONIAM lui a versé une indemnité de 36 802,99 euros pour l'acquisition de précédents fauteuils, ainsi que pour leur renouvellement. La requérante justifie avoir acquitté, pour l'acquisition de précédents dispositifs, les sommes de 4 987,31 euros et de 1 188,99 euros, au titre de son besoin avant aggravation. Le reliquat des sommes déjà versées à ce titre, d'un montant de 30 626,69 euros, étant supérieur au coût d'acquisition du nouveau dispositif ayant vocation à rester à la charge de l'intéressée, de 30 016,30 euros, Mme A... n'est pas fondée à solliciter une indemnisation supplémentaire pour l'achat du premier fauteuil adapté à l'aggravation de sa pathologie. L'ONIAM devra en revanche être condamné à lui verser, sur production de justificatif des montants demeurés à sa charge, une indemnité au titre des frais de renouvellement, au plus tôt cinq ans après l'acquisition du nouveau fauteuil, sous réserve de la déduction, lors du premier renouvellement, d'un montant de 610,39 euros correspondant à la différence entre les sommes versées à titre amiable par l'office pour les frais de fauteuil roulant et les dépenses acquittées par Mme A..., incluant l'acquisition des deux premiers fauteuils et du futur nouveau fauteuil.

16. En quatrième lieu, il résulte du rapport d'expertise du docteur D... que l'aggravation de l'état de santé de Mme A... justifie la prescription d'une cure thermale par an avec une prise en charge adaptée à la sclérose en plaques. Si le tribunal a, à bon droit, condamné l'ONIAM à prendre en charge une telle cure à raison d'une fois par an sur présentation d'une prescription médicale, d'un devis et d'une facture attestant de sa réalisation, il y a également lieu de condamner le défendeur à indemniser Mme A... des frais de déplacement afférents, dans la même limite, ainsi que la requérante le demande pour la première fois en appel.

17. En cinquième lieu, Mme A... a exposé des frais, qui se sont avérés utiles à la résolution du litige, pour la réalisation d'études par un ergothérapeute pour évaluer les aménagements nécessités par son état de santé, pour un montant de 1 897,20 euros, ainsi que par un expert-comptable pour déterminer les rémunérations auxquelles elle aurait pu prétendre si elle avait pu continuer à exercer ses fonctions d'assistante de laboratoire, pour un montant de 9 216 euros. L'ONIAM doit être condamné à lui rembourser les montants correspondants.

18. En sixième lieu, pour le surplus, Mme A... ne conteste pas le montant des indemnités qui lui ont été allouées par les premiers juges, à hauteur de 6 000 euros s'agissant d'autres frais divers, ainsi que des remboursements sur justificatifs s'agissant du système de transfert de fauteuil et de l'acquisition d'un lit médicalisé.

S'agissant des frais de logement adapté :

19. Mme A... sollicite, dans le dernier état de ses écritures, des indemnités au titre de l'acquisition et de l'aménagement d'un nouveau logement, compte tenu de l'inadaptation de l'appartement dont elle était locataire, et non plus pour la réfection de son ancien lieu de vie, ainsi qu'elle l'avait demandé aux premiers juges.

20. Il résulte de l'instruction, notamment du rapport du docteur D..., que le logement que louait l'intéressée était inadapté à son handicap, compte tenu de sa configuration, de sa salle de bain et des pannes affectant l'ascenseur qui le desservait. Pour autant, dans les circonstances de l'espèce, ces circonstances ne justifient pas que Mme A... soit indemnisée de l'intégralité des frais d'acquisition de son nouveau domicile, alors qu'elle aurait dû exposer des frais pour se loger même en l'absence de handicap. Il sera fait une juste appréciation du préjudice lié à la nécessité d'acquérir un logement en condamnant l'ONIAM à lui verser 20 000 euros.

21. Par ailleurs, si les frais d'installation d'une rampe d'accès, d'un portail et d'une porte automatisés, d'aménagement de la salle de bain et de la cuisine de la pose de carrelage et de réalisation de plans pour aménager le futur logement doivent être regardés comme en lien avec l'aggravation de la pathologie de Mme A..., il n'en va pas de même, en l'absence d'éléments suffisants pour établir une telle nécessité, s'agissant des l'intégralité des travaux de menuiserie, de la peinture ou de l'acquisition d'éléments électroménagers pour la cuisine. Il sera, par suite, fait une juste appréciation du préjudice indemnisable au titre des travaux d'aménagements, qui sont distincts de ceux qui avaient été indemnisés à titre amiable, en les évaluant à 50 000 euros.

22. En outre, si l'ONIAM évoque la faculté pour Mme A... d'obtenir des aides de la part du conseil départemental, ce moyen n'est pas assorti des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé. Il suit de là que l'ONIAM doit être condamné à verser la somme globale de 70 000 euros à Mme A... au titre des frais de logement adapté.

S'agissant des frais de transport :

23. Mme A... sollicite le versement d'une somme correspondant à un trajet par semaine, à faire réaliser par un prestataire, pour un montant de 109,26 euros, à titre viager à compter du 1er janvier 2018. Toutefois, en l'absence de précisions suffisantes sur les besoins effectifs de Mme A... en terme de transport, notamment s'agissant de leur destination ou de leur fréquence, le préjudice dont elle demande l'indemnisation ne peut être regardé comme présentant un caractère certain. Elle n'est, par suite, pas fondée à demander, pour la première fois en appel, une somme à ce titre.

S'agissant de l'assistance par tierce personne :

24. Compte tenu de ce qui a été dit aux points 9 à 11, Mme A... a droit à être indemnisée de son besoin d'assistance par tierce personne, pour la période après consolidation, sur la base de douze heures par jour à un montant horaire de 20 euros. Elle est, par suite, fondée à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont retenu un taux horaire inférieur. Son préjudice s'établit donc pour la période comprise entre le 23 octobre 2014, date de consolidation, et la date du présent arrêt, à 612 720 euros. Il y a lieu de déduire les sommes qu'elle a perçues au titre de la majoration pour tierce personne, représentant 14 022 euros par an, soit 98 077,16 euros pour la période comprise entre la consolidation et la date du présent arrêt. La somme que l'ONIAM est condamné à lui verser doit donc être portée à 514 642,84 euros.

25. Pour l'avenir, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce et ainsi que l'ont retenu à bon droit les premiers juges, de condamner l'ONIAM à verser une rente à Mme A.... Compte tenu de ce qui précède, et de l'allocation perçue par l'intéressée, le montant de cette rente s'établit à 73 578 euros par an. Cette somme, à verser à chaque trimestre échu, sera revalorisée par application des coefficients prévus à l'article L. 434-17 du code de la sécurité sociale et sera ajustée sur la base de justificatifs établis par la caisse de sécurité sociale relatifs à la majoration pour tierce personne.

S'agissant des préjudices professionnels :

26. En premier lieu, il résulte de l'instruction que Mme A... était fonctionnaire titulaire, dans le corps des techniciens de recherche et de laboratoire. Il est constant qu'elle a dû cesser d'exercer son activité professionnelle, compte tenu de l'aggravation de sa pathologie, alors qu'elle avait, auparavant, été notamment placée en mi-temps thérapeutique. Elle se prévaut, pour la première fois en appel, d'un rapport réalisé par un expert-comptable, exposant, au regard des avancements d'échelon et de grade auxquels elle pouvait prétendre, la rémunération qu'elle aurait été susceptible de percevoir. Si l'ONIAM critique ce rapport, le défendeur ne démontre pas, au regard de la généralité de son propos, que ce document circonstancié, détaillé et argumenté reposerait sur des hypothèses d'avancement ne présentant pas un caractère de certitude suffisant pour permettre une indemnisation au titre de la perte de gains professionnels alors, en particulier, qu'il retient uniquement un passage du grade des techniciens de recherche et de laboratoire de classe normale à celui de classe supérieure, excluant ainsi l'hypothèse d'une promotion en classe exceptionnelle. Au regard de ce nouvel élément, Mme A... est fondée à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont déterminé sa perte de rémunération uniquement sur la base d'un revenu de 21 181 euros par an, correspondant à son traitement pour l'année 2008.

27. En revanche, il ne résulte pas de l'instruction que l'intéressée aurait effectivement été susceptible de poursuivre sa carrière jusqu'à l'âge de 67 ans, alors que les relevés d'information retraite produits prouvent qu'elle justifiait de 19 trimestres validés pour les années comprises entre 1996 et 2000, avant de travailler comme assistante de laboratoire à partir au cours de l'année 2003, année pour laquelle elle avait validé quatre trimestres. Il lui restait, dans ces conditions, à partir de 2003, 153 trimestre d'activité à réaliser pour justifier du nombre de trimestre requis, soit 172, pour bénéficier d'une retraite à taux plein, ce qui lui imposait de travailler jusqu'à la fin du premier trimestre de l'année 2041, à l'âge de 65 ans.

28. Au regard des rémunérations nettes mentionnées dans le tableau réalisé par l'expert-comptable, la requérante aurait ainsi eu vocation à percevoir, entre la date de consolidation et la fin du premier trimestre de l'année 2041, une rémunération nette de 758 150,75 euros. Il y a lieu de déduire les montants de 197 025,92 euros au titre des pensions de retraite perçues par l'intéressée et de 95 920,71 euros correspondant aux pensions d'invalidité et au capital invalidité, sur lesquels s'accordent les parties. Il y a lieu, en outre, de déduire la somme de 15 869,60 euros, correspondant à la différence entre 19 699,81 euros, montant accordé par l'ONIAM au titre de la perte des gains professionnels postérieurs à la consolidation de la pathologie, dans son état initial, et 3 830,21 euros déduits par les premiers juges comme correspondant à la part de cette indemnisation couvrant la période antérieure à la consolidation de l'aggravation. La somme que l'ONIAM doit être condamné à verser au titre de la perte de revenus d'activité s'élève ainsi à 449 334,52 euros.

29. En deuxième lieu, il résulte de l'instruction, en particulier du rapport d'expert-comptable produit par Mme A..., qu'elle avait vocation à bénéficier d'une retraite correspondant à 75 % du traitement qu'elle aurait pu percevoir à la fin du premier trimestre 2041, qui doit être évalué, au regard des éléments produits, à un montant annuel de 33 383 euros. Elle avait ainsi vocation à bénéficier d'une retraite de 25 037,25 euros par an, à compter du deuxième trimestre de l'année 2041, alors qu'il est constant qu'elle ne perçoit effectivement que 10 176 euros par an. Sa perte de revenus imputable à l'aggravation de la sclérose en plaques s'établit, dès lors, à 14 861,25 euros par an. Après application du coefficient de capitalisation publié à la Gazette du Palais pour 2020 pour une femme âgée de 65 ans, soit 22,658, le préjudice indemnisable s'agissant de la perte des droits à retraite s'établit donc à 335 388,69 euros.

30. En troisième lieu, l'aggravation de la sclérose en plaques dont est atteinte Mme A... ayant conduit cette dernière à abandonner toute activité professionnelle, les premiers juges ont fait une juste appréciation du préjudice subi au titre de l'incidence professionnelle, s'agissant de sa composante morale, en l'évaluant à 30 000 euros. La requérante n'est, dans ces conditions, pas fondée à solliciter une indemnisation supérieure.

En ce qui concerne les préjudices extrapatrimoniaux :

31. En premier lieu, il résulte de l'instruction que les souffrances endurées avant consolidation, évaluées à 5 sur une échelle de 7 et ayant donné lieu à une indemnisation amiable à hauteur de 10 000 euros, doivent désormais, en raison de l'aggravation de la pathologie, être évaluées à 6 sur la même échelle. En accordant 18 000 euros à Mme A... en réparation du pretium doloris imputable à l'aggravation de sa pathologie, les premiers juges ont procédé à une juste appréciation.

32. En deuxième lieu, il résulte de l'instruction que Mme A... subit, en raison des conséquences de la sclérose en plaque dont elle est atteinte et notamment de son aggravation, un déficit fonctionnel permanent pouvant être évalué à 85 %, selon le rapport d'expertise du docteur D..., ce qui ouvrirait droit à une indemnité de l'ordre de 391 985 euros, eu égard notamment à l'âge de la victime à la date de consolidation de l'aggravation, soit 39 ans. Compte tenu de la somme de 196 984,88 euros allouée initialement au titre de l'incapacité permanente partielle, alors estimée à 65 % dans le cadre de la transaction précédemment mentionnée, il sera fait une juste appréciation du préjudice spécifiquement imputable à l'aggravation en condamnant l'ONIAM à verser à la requérante la somme de 195 000 euros.

33. En troisième lieu, il résulte de l'instruction, notamment du rapport d'expertise du docteur D..., que l'aggravation précédemment mentionnée a occasionné un accroissement du préjudice esthétique permanent, devant être évalué à 6 sur une échelle de 7 alors qu'il avait été évalué à 5 dans le rapport d'expertise du docteur B... réalisé en 2008 et sur la base duquel il avait été procédé à l'indemnisation amiable pour un montant de 12 000 euros s'agissant de ce chef de préjudice. L'indemnité accordée par les premiers juges au titre de l'aggravation, pour un montant de 15 000 euros, n'est pas insuffisante.

34. En quatrième lieu, il ne résulte pas de l'instruction que l'aggravation de la sclérose en plaques dont souffre Mme A... occasionnerait spécifiquement pour cette dernière un préjudice d'anxiété, distinct de celui résultant de la pathologie elle-même, pour lequel elle a été indemnisée à titre amiable.

35. En cinquième lieu, Mme A... ne conteste pas le montant des indemnités qui lui ont été allouées par les premiers juges, à hauteur de 19 000 euros pour le préjudice d'agrément, de 20 000 euros pour le préjudice sexuel et de 50 000 euros pour le préjudice d'établissement.

36. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que Mme A... est seulement fondée à demander que l'indemnité que le tribunal administratif a condamné l'ONIAM à lui verser soit portée à la somme de 2 055 980,10 euros, sous réserve de déduction de la provision de 170 000 euros accordée par ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Strasbourg du 27 juin 2017, outre la rente et les paiements sur justificatifs mentionnés aux points 14, 15, 16, 18 et 25.

Sur les conclusions accessoires :

37. Tout d'abord, en application de l'article 1231-6 du code civil, Mme A... a droit, ainsi qu'elle le demande pour la première fois en appel, aux intérêts au taux légal sur la somme de 2 055 980,10 euros à compter du 8 février 2012, date de réception par l'ONIAM de sa réclamation indemnitaire afférente à l'aggravation de sa pathologie.

38. Ensuite, Mme A... demande à la cour de déclarer le présent arrêt commun et opposable à la caisse primaire d'assurance maladie du Bas-Rhin. Toutefois, les tiers payeurs n'ont pas à être appelés à la cause dans un litige concernant la mise en œuvre de la solidarité nationale par l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales. Dès lors, ces conclusions ne peuvent qu'être rejetées.

39. Enfin, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'ONIAM, partie perdante, la somme de 3 000 euros à verser à Mme A..., sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, s'agissant de la procédure d'appel.

D E C I D E :

Article 1er : La somme que l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales a été condamné à verser à Mme A... par le jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 15 février 2019 est portée à 2 055 980,10 euros, sous réserve de déduction de la provision de 170 000 euros accordée par ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Strasbourg en date du 27 juin 2017. Cette somme portera intérêt au taux légal à compter du 8 février 2012.

Article 2 : La rente que l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales a été condamné à verser à Mme A... par le jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 15 février 2019 est portée à 73 578 euros par an. Cette rente sera revalorisée en application des dispositions de l'article L. 434-17 du code de la sécurité sociale et sera ajustée sur la base de justificatifs établis par la caisse de sécurité sociale relatifs à la majoration pour tierce personne.

Article 3 : L'ONIAM est condamné à prendre en charge, sur justificatif, les frais exposés par Mme A... et restés à sa charge, s'agissant du déplacement pour se rendre en cure thermale, dans la limite d'une fois par an, des soins de podologue à domicile, dans la limite d'une séance par mois, et d'achat de bas de contention, dans la limite d'une paire tous les trois mois.

Article 4 : L'ONIAM est condamné à prendre en charge, sur justificatif, les frais exposés par Mme A... et restés à sa charge, s'agissant du renouvellement du nouveau fauteuil roulant dont elle fera l'acquisition et de ses accessoires, sous réserve de déduction d'une somme de 610,39 euros à l'occasion du premier renouvellement.

Article 5 : Le jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 15 février 2019, rectifié par une ordonnance du 28 mars 2019, est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 6 : L'ONIAM versera la somme de 3 000 euros à Mme A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 7 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 8 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... A..., à l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales et à la caisse primaire d'assurance maladie du Bas-Rhin.

3

N° 19NC01177


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 19NC01177
Date de la décision : 19/10/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

60-02-01-01-005 Responsabilité de la puissance publique. - Responsabilité en raison des différentes activités des services publics. - Service public de santé. - Établissements publics d'hospitalisation. - Responsabilité sans faute.


Composition du Tribunal
Président : M. WURTZ
Rapporteur ?: Mme la Pdte. Aline SAMSON-DYE
Rapporteur public ?: M. BARTEAUX
Avocat(s) : BJMR Avocats

Origine de la décision
Date de l'import : 26/10/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2021-10-19;19nc01177 ?
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