Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C... A... B... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg de prononcer l'annulation de la note de service du 28 avril 2017 par laquelle le directeur de l'Institution nationale des invalides a créé un département de recherche au sein du centre d'études et de recherche sur l'appareillage des handicapés.
Le jugement de cette affaire a été attribué au tribunal administratif de Nancy en application de l'article R. 351-8 du code de justice administrative par une ordonnance du président de la section du contentieux du Conseil d'Etat du 26 mars 2019.
Par un jugement numéro 1723276 du 26 septembre 2019, le tribunal administratif de Nancy a fait droit à cette demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 2 décembre 2019 ainsi qu'un mémoire enregistré le 3 décembre 2019, l'Institution nationale des invalides, représentée par Me Delvolvé demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de rejeter la demande de M. A... B... présentée devant le tribunal administratif de Nancy.
Elle soutient que :
- le jugement est irrégulier en ce que les conclusions de la rapporteure publique n'ont pas été portées à la connaissance des parties en temps utile ; en ce qu'il n'a pas été répondu au moyen invoqué tiré de ce que M. A... B... continuait de participer aux opérations de recherche dans le cadre de la nouvelle organisation du service ;
- c'est à tort que le jugement a estimé que la décision attaquée faisait grief à M. A... B... en ce que d'une part, la note de service n'a entraîné aucune diminution sensible des responsabilités de l'intéressé qui n'était pas chargé à titre principal de la supervision de la recherche, une telle attribution ne figurant pas sur sa fiche de poste, ni dans son contrat de travail, d'autre part, il demeure chargé de fonctions d'enseignant-chercheur et responsable d'un centre d'essai et du génie médical ; à cet égard la note de service n'entraîne aucun déclassement, l'intéressé demeurant chargé de recherche à titre transversal ; par suite, c'est à tort que le jugement attaqué a estimé que cette note de service faisait grief à l'intéressé alors qu'il s'agit d'une simple mesure d'organisation générale du service qui ne porte pas atteinte à ses droits ;
- le projet d'établissement du 25 octobre 2016 a été soumis à l'avis du comité technique et la note de service n'a donc pas été adoptée à l'issue d'une procédure irrégulière.
Par un mémoire enregistré le 19 juin 2020, M. A... B..., représenté par Me Maetz, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de l'Institution nationale des invalides une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient qu'aucun des moyens soulevés n'est fondé.
Vu :
- les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ;
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat ;
- le décret n° 86-83 du 17 janvier 1986 relatif aux dispositions générales applicables aux agents contractuels de l'Etat pris pour l'application de l'article 7 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat ;
- le décret n° 92-105 du 30 janvier 1992 fixant les modalités de fonctionnement de l'Institution nationale des invalides ;
- le décret n° 2011-184 du 15 février 2011 modifié relatif aux comités techniques dans les administrations et les établissements publics de l'Etat ;
- l'arrêté du 23 mai 2014 portant création du comité technique d'établissement public de l'Institution nationale des invalides ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement convoquées à l'audience publique.
Ont été entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Agnel ;
- et les conclusions de Mme Haudier, rapporteure publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A... B..., agent contractuel recruté par l'Institution nationale des invalides (INI) le 23 août 2000, exerce ses fonctions d'enseignant-chercheur au centre d'études et de recherche sur l'appareillage des handicapés (Cerah) à Woippy (Moselle), où il assure les fonctions de responsable du département du génie biomédical. Par une note de service du 28 avril 2017, le directeur de l'Institution nationale des invalides a créé au sein du Cerah un département de la recherche. L'Institution nationale des invalides relève appel du jugement du 26 septembre 2019 par lequel le tribunal administratif de Nancy, à qui l'affaire a été attribuée par l'ordonnance ci-dessus visée du 26 mars 2019, a fait droit à la demande de M. A... B... tendant à l'annulation de cette note de service.
Sur la recevabilité de la demande :
2. Il ressort du contrat de travail signé le 23 août 2000 que M. A... B... a été recruté par l'Institution nationale des invalides en qualité d'enseignant-chercheur, affecté au centre d'études et de recherche sur l'appareillage des handicapés (Cerah), situé à Woippy. Il ressort de sa fiche de poste que l'intéressé a été désigné au sein du Cerah comme responsable du département du génie biomédical avec pour première mission de superviser la recherche. La note de service du 28 avril 2017 a pour objet de créer au sein du Cerah, à compter du 9 mai 2017, un département de la recherche, implanté à Créteil, placé sous l'autorité d'un agent de catégorie A et auquel le Cerah devra apporter son soutien. La mise en œuvre de ce nouvel organigramme a eu pour effet de retirer à M. A... B... la supervision de la recherche ainsi que le confirme au demeurant les échanges tenus lors d'une réunion du 20 avril 2017. Dès lors, en dépit de ce que M. A... B... a conservé son activité de chercheur, fut-ce de manière " transversale " comme le soutient l'établissement requérant, la note de service du 28 avril 2017 a emporté pour l'intéressé une perte substantielle de ses responsabilités et a ainsi affecté les conditions d'emploi et d'exercice des fonctions de cet agent. Par suite, dès lors que l'intéressé avait intérêt à agir contre une telle mesure, l'Institution nationale des invalides n'est pas fondée à soutenir que la note de service litigieuse serait une simple mesure d'organisation du service insusceptible de faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir et n'est pas fondée à se plaindre de ce que les premiers juges ont écarté la fin de non-recevoir soulevée à ce titre devant eux.
Sur la légalité de la décision attaquée :
En ce qui concerne le moyen d'annulation retenu par le jugement attaqué :
3. Aux termes de l'article 15 de la loi du 11 janvier 1984 : " I-Dans toutes les administrations de l'Etat et dans tous les établissements publics de l'Etat ne présentant pas un caractère industriel et commercial, il est institué un ou plusieurs comités techniques paritaires. Les comités connaissent des problèmes relatifs à l'organisation et au fonctionnement des services et des projets de statuts particuliers (...) ". Aux termes de l'article L. 621-1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre : "L'Institution nationale des invalides est un établissement public d'Etat à caractère administratif. Elle est placée sous la tutelle du ministre chargé des anciens combattants et victimes de guerre ". Aux termes de l'article 34 du décret n° 2011-184 du 15 février 2011 ci-dessus visé : " Les comités techniques sont consultés, dans les conditions et les limites précisées pour chaque catégorie de comité par les articles 35 et 36 sur les questions et projets de textes relatifs : 1° A l'organisation et au fonctionnement des administrations, établissements ou services (...) ". Et aux termes de l'article 2 de l'arrêté du 23 mai 2014 ci-dessus visé : " Le comité technique d'établissement public de l'Institution nationale des invalides est compétent pour examiner, dans le cadre des dispositions du titre III du décret du 15 février 2011 susvisé, les questions et projets de textes intéressant cet établissement public ".
4. Si les actes administratifs doivent être pris selon les formes et conformément aux procédures prévues par les lois et règlements, un vice affectant le déroulement d'une procédure administrative préalable n'est de nature à entacher d'illégalité la décision prise que s'il ressort des pièces du dossier qu'il a été susceptible d'exercer, en l'espèce, une influence sur le sens de la décision prise ou s'il a privé les intéressés d'une garantie.
5. L'Institution nationale des invalides produit pour la première fois en appel le procès-verbal d'une réunion du comité technique d'établissement du 10 mai 2016 consacrée au projet d'établissement en cours d'élaboration. Il ressort des débats retranscrits que les membres du comité technique ont bien été consultés, dans le cadre de l'élaboration du projet d'établissement, sur le projet de création d'un département de la recherche au sein du Cerah implanté à Créteil, correspondant à la note de service signée le 28 avril 2017. Si M. A... B... soutient que le projet d'établissement était subordonné à la finalisation du projet médical en cours d'élaboration rendant nécessaire une nouvelle consultation du comité d'établissement, il ressort du calendrier indiqué dans le procès-verbal du 10 mai 2016, que ce projet médical devait être soumis au conseil d'administration de l'établissement le 17 juin 2016 pour adoption définitive tandis que le projet d'établissement le serait lui-même au mois d'octobre 2016. Il se déduit de ces éléments que le comité technique d'établissement a pu examiner l'ensemble du projet d'établissement dans sa version finale avant son adoption définitive par le conseil d'administration sans qu'il ait été nécessaire de prévoir une nouvelle consultation. Dès lors, M. A... B... n'est pas fondé à soutenir que le comité technique n'a pas examiné préalablement le nouvel organigramme du Cerah correspondant à la note de service du 28 avril 2017. Par suite, l'Institution nationale des invalides est fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Nancy a annulé la décision attaquée au motif qu'elle a été adoptée à la suite d'une procédure irrégulière.
6. Il appartient toutefois à la cour, saisie par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens invoqués par M. A... B... devant le tribunal administratif de Strasbourg et non expressément abandonné par lui en appel.
En ce qui concerne les moyens tirés de l'existence d'une sanction disciplinaire déguisée :
7. Il ressort des pièces du dossier, notamment du procès-verbal du comité technique et de la réunion du 20 avril 2017, que la création d'un département recherche au sein du Cerah s'inscrit dans la réorganisation d'ensemble de l'institution et répond à un objectif primordial du projet d'établissement consistant à développer la recherche. Cette mesure de portée générale qui revêt un caractère réglementaire a ainsi été prise dans l'intérêt du service. S'il ressort des propos du directeur de l'Institution nationale des invalides, tenue à l'occasion de cette réunion, qu'il était reproché à M. A... B... une faible activité dans le domaine de la recherche, il ne ressort pas des pièces du dossier que la création d'un département recherche, soustrait à sa supervision, ait eu pour objet de le sanctionner alors qu'une telle modification de l'organigramme répond à l'intérêt du service ainsi qu'il vient d'être dit, ni qu'elle ait été prise en considération de sa personne. Par suite, M. A... B... n'est pas fondé à soutenir que la note de service du 28 avril 2017 constituerait une sanction déguisée en méconnaissance des droits de la défense et qu'il aurait dû au préalable être mis à même de consulter son dossier.
En ce qui concerne les moyens tirés de la modification du contrat de travail :
8. Aux termes de l'article 45-4 du décret ci-dessus visé du 17 janvier 1986 : " En cas de transformation du besoin ou de l'emploi qui a justifié le recrutement de l'agent contractuel recruté pour un besoin permanent, l'administration peut proposer la modification d'un élément substantiel du contrat de travail tel que la quotité de temps de travail de l'agent, ou un changement de son lieu de travail. Elle peut proposer dans les mêmes conditions une modification des fonctions de l'agent, sous réserve que celle-ci soit compatible avec la qualification professionnelle de l'agent. Lorsqu'une telle modification est envisagée, la proposition est adressée à l'agent par lettre recommandée avec avis de réception ou par lettre remise en main propre contre décharge. / Cette lettre informe l'agent qu'il dispose d'un mois à compter de sa réception pour faire connaître, le cas échéant, son acceptation. /A défaut de réponse dans le délai d'un mois, l'agent est réputé avoir refusé la modification proposée ". Aux termes de l'article 3 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires : " Sauf dérogation prévue par une disposition législative, les emplois civils permanents de l'Etat, des régions, des départements, des communes et de leurs établissements publics à caractère administratif sont (...) occupés (...) par des fonctionnaires ". Aux termes de l'article 4 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat : " Par dérogation au principe énoncé à l'article 3 du titre Ier du statut général, des agents contractuels peuvent être recrutés dans les cas suivants : / 1° Lorsqu'il n'existe pas de corps de fonctionnaires susceptibles d'assurer les fonctions correspondantes ; / 2° Pour les emplois du niveau de la catégorie A et, dans les représentations de l'Etat à l'étranger, des autres catégories, lorsque la nature des fonctions ou les besoins des services le justifient ". Aux termes de l'article 45-3 du décret ci-dessus visé du 17 janvier 1986 : " Sans préjudice des dispositions relatives au licenciement pour faute disciplinaire, pour insuffisance professionnelle ou pour inaptitude physique, le licenciement d'un agent contractuel recruté pour répondre à un besoin permanent doit être justifié par l'un des motifs suivants : /(...) 4° Le refus par l'agent d'une modification d'un élément substantiel du contrat proposée dans les conditions prévus à l'article 45-4 ".
9. Il ressort des pièces du dossier que la note de service litigieuse n'a pas pour effet de modifier un élément substantiel du contrat de travail de M. A... B... dès lors que la supervision de la recherche ne constitue pas l'un des objets de cette convention signée le 23 août 2000. Par suite, M. A... B... n'est pas fondé à invoquer les dispositions ci-dessus reproduites applicables dans les cas de modification du contrat de travail d'un agent contractuel.
10. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les moyens relatifs à l'irrégularité du jugement, que l'Institution nationale des invalides est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy a annulé la note de service du 28 avril 2017 et que la demande de M. A... B... présentée devant le tribunal administratif doit être rejetée.
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Institution nationale des invalides, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, verse à M. A... B... la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui.
D E C I D E :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Nancy du 26 septembre 2019 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. A... B... devant le tribunal administratif de Nancy est rejetée.
Article 3 : Les conclusions de M. A... B... tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A... B... et au directeur de l'Institution nationale des invalides.
N° 19NC03505
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