Vu les procédures suivantes :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme D... B... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 13 mai 2020 par lequel le préfet du Bas-Rhin lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle sera éloignée.
Par un jugement n° 2003261 du 5 août 2020, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 21 décembre 2020, Mme B..., représentée par Me A..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 5 août 2020 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet du Bas-Rhin du 13 mai 2020 ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 200 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, à verser à son conseil en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.
Elle soutient que :
s'agissant du refus de titre de séjour :
- le préfet a méconnu les articles L. 313-11 7° et L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la décision litigieuse méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
s'agissant de l'obligation de quitter le territoire français :
- elle est illégale par voie de conséquence de l'illégalité du refus de séjour ;
- la décision litigieuse méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
s'agissant de la décision fixant le pays de destination :
- elle est illégale par voie de conséquence de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français.
La requête a été communiquée au préfet du Bas-Rhin qui n'a pas présenté de mémoire en défense.
Mme B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 24 novembre 2020.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Le rapport de Mme C..., première conseillère, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme B..., ressortissante gabonaise née le 7 mai 1987, est entrée en France régulièrement sous couvert d'un visa de long séjour étudiant le 27 septembre 2010 afin d'y poursuivre des études. Elle a obtenu la délivrance de cartes de séjour temporaire portant la mention " étudiant " annuellement renouvelées, dont la dernière a expiré le 30 novembre 2017. Par un arrêté du 20 décembre 2017, le préfet du Doubs a refusé de lui renouveler son titre de séjour en raison de l'absence de sérieux dans les études poursuivies et l'a obligée à quitter le territoire français. Le 8 octobre 2019, elle a sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions des articles L. 313-11 7° et L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 13 mai 2020, le préfet du Bas-Rhin a refusé de faire droit à sa demande, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être éloignée. Mme B... fait appel du jugement du 5 août 2020 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur la légalité de la décision portant refus de séjour :
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2. (...) ".
3. En présence d'une demande de régularisation présentée sur le fondement de ces dispositions par un étranger qui ne serait pas en situation de polygamie et dont la présence en France ne présenterait pas une menace pour l'ordre public, il appartient à l'autorité administrative de vérifier, dans un premier temps, si l'admission exceptionnelle au séjour par la délivrance d'une carte portant la mention " vie privée et familiale " répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard de motifs exceptionnels, et à défaut, dans un second temps, s'il est fait état de motifs exceptionnels de nature à permettre la délivrance, dans ce cadre, d'une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire ".
4. Si Mme B... était présente en France depuis presque dix ans à la date de la décision attaquée, elle s'est maintenue irrégulièrement sur le territoire français malgré la mesure d'éloignement édictée à son encontre en 2017. En outre, elle ne démontre pas une insertion particulière en France en se bornant à se prévaloir de l'obtention en juillet 2019 d'une licence en " Administration économique et sociale ", des emplois qu'elle a exercés lorsqu'elle était étudiante et de son activité associative. Par suite, la requérante ne fait état d'aucun élément de sa vie personnelle pouvant constituer des considérations humanitaires ou des motifs exceptionnels au sens des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
5. En second lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors applicable : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) / 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée (...) ".
6. Mme B... est entrée en France en septembre 2010 en vue d'y réaliser ses études et y a séjourné en qualité d'étudiante, sans avoir nécessairement vocation à rester en France à l'issue de celles-ci. Il ressort des pièces du dossier qu'alors même qu'une tante et son demi-frère résident en France, elle conserve des attaches familiales au Gabon où elle a vécu jusqu'à l'âge de vingt-trois ans. Majeure et célibataire, elle ne fait, en outre, pas état de liens personnels ou familiaux en France d'une intensité, d'une stabilité et d'une ancienneté particulières. Dans ces conditions, en dépit de la durée de sa résidence en France, le préfet du Bas-Rhin n'a pas porté au droit au respect de la vie privée et familiale de Mme B... une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels la décision contestée a été prise. Par suite, les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que de l'erreur manifeste d'appréciation des conséquences de cette décision sur sa situation personnelle doivent être écartés.
Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :
7. En premier lieu, la requérante n'établit pas l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour. Dès lors, le moyen tiré, par la voie de l'exception, de l'illégalité du refus de titre de séjour ne peut être que rejeté.
8. En second lieu, compte tenu de ce qui a été dit au point 6 du présent arrêt, les moyens tirés de l'erreur manifeste d'appréciation et de la méconnaissance des stipulations des articles 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peuvent qu'être écartés.
Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :
9. Il résulte de ce qui vient d'être dit que Mme B... n'établit pas que la décision portant obligation de quitter le territoire français serait entachée d'illégalité. Par suite, le moyen tiré, par la voie de l'exception, de l'illégalité de cette décision ne peut qu'être rejeté.
10. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions tendant au bénéfice des dispositions des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent également qu'être rejetées.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... B... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet du Bas-Rhin.
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N° 20NC03708