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20/07/2021 | FRANCE | N°20NC03606

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre, 20 juillet 2021, 20NC03606


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... C... a demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler la décision du 11 septembre 2018 par laquelle le préfet du Doubs a rejeté sa demande de regroupement familial au profit de sa fille.

Par un jugement n° 1900451 du 8 juillet 2020, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 12 décembre 2020 et 30 avril 2021, M. C..., représenté par Me A..., demande à la cour, dans le der

nier état de ses écritures :

1°) d'annuler le jugement du 8 juillet 2020 du tribunal administra...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... C... a demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler la décision du 11 septembre 2018 par laquelle le préfet du Doubs a rejeté sa demande de regroupement familial au profit de sa fille.

Par un jugement n° 1900451 du 8 juillet 2020, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 12 décembre 2020 et 30 avril 2021, M. C..., représenté par Me A..., demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :

1°) d'annuler le jugement du 8 juillet 2020 du tribunal administratif de Besançon ;

2°) d'annuler la décision du 11 septembre 2018 par laquelle le préfet du Doubs a rejeté sa demande de regroupement familial au profit de sa fille ;

3°) d'enjoindre au préfet du Doubs de faire droit à sa demande de regroupement familial ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- sa requête est recevable ;

- sa fille était âgée de 15 ans à la date de l'enregistrement de sa demande de regroupement familial ;

- l'article L. 411-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'exclut pas l'enfant naturel du bénéfice du regroupement familial ;

- pour refuser sa demande, le préfet n'invoque aucun des motifs prévus par l'article L. 411-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- il satisfait aux conditions de l'article L. 411-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- il est de l'intérêt supérieur de sa fille de le rejoindre en France, dès lors qu'elle est désormais isolée en Côte d'Ivoire en raison du décès de sa mère le 20 novembre 2018 ;

- la décision litigieuse méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense, enregistré le 22 février 2021, le préfet du Doubs conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- le décès de la mère de la jeune fille est postérieur à la décision litigieuse ;

- les autres moyens soulevés par M. C... ne sont pas fondés.

M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 15 octobre 2020.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale des droits de l'enfant ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Grenier, présidente assesseure, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. C..., ressortissant ivoirien, s'est marié avec Mme B..., le 8 septembre 2016. Il réside régulièrement en France. M. C... a demandé, le 14 novembre 2016, le bénéfice du regroupement familial au profit de sa fille, D..., née le 25 mars 2001 d'une précédente union. Par une décision du 11 septembre 2018, le préfet du Doubs a rejeté sa demande de regroupement familial. Par un jugement du 8 juillet 2020, dont M. C... relève appel, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision.

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 411-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors en vigueur : " Le ressortissant étranger qui séjourne régulièrement en France depuis au moins dix-huit mois, sous couvert d'un des titres d'une durée de validité d'au moins un an prévus par le présent code ou par des conventions internationales, peut demander à bénéficier de son droit à être rejoint, au titre du regroupement familial, par son conjoint, si ce dernier est âgé d'au moins dix-huit ans, et les enfants du couple mineurs de dix-huit ans. ". Aux termes des dispositions combinées de l'article L. 411-4 et du dernier alinéa de l'article L. 314-11 du même code, dans leur rédaction alors en vigueur, l'enfant pouvant bénéficier du regroupement familial " s'entend de l'enfant ayant une filiation légalement établie, y compris l'enfant adopté, en vertu d'une décision d'adoption, sous réserve de la vérification par le ministère public de la régularité de cette décision lorsqu'elle a été prononcée à l'étranger. ".

3. Il ressort des pièces du dossier qu'alors même qu'elle était mineure à la date de la demande de regroupement familial, la jeune D..., qui n'est pas la fille du couple formé par M. C... et Mme B..., mais l'enfant d'une précédente union de M. C... avec une ressortissante ivoirienne, ne pouvait bénéficier des dispositions de l'article L. 411-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

4. Ainsi, en examinant la demande de M. C... au regard de son droit à une vie privée et familiale normale, le préfet du Doubs a implicitement mais nécessairement estimé, sans entacher sa décision d'erreur de droit, que sa fille D... ne relevait pas des dispositions des articles L. 411-1 et suivant du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile autorisant le regroupement familial.

5. En deuxième lieu, dès lors qu'il ne satisfaisait pas aux conditions prévues par l'article L. 411-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile pour bénéficier du regroupement familial en faveur de sa fille, le moyen tiré de ce que le préfet a méconnu les dispositions de l'article L. 411-5 du même code, selon lesquelles le regroupement familial ne peut être refusé que si le demandeur ne justifie pas de ressources stables et suffisantes pour subvenir aux besoins de sa famille ou qu'il ne dispose pas ou ne disposera pas à la date d'arrivée de sa famille en France d'un logement considéré comme normal pour une famille comparable vivant en France, qu'il n'appartient au préfet d'examiner que si la demande est présentée en faveur d'un enfant pouvant bénéficier du regroupement familial en vertu des dispositions des articles L. 411-1 à L. 411-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, est inopérant.

6. En troisième lieu, l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant stipule que : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale. ". Il résulte des stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant.

7. Il ressort des pièces du dossier qu'à la da te de la décision litigieuse, la jeune D... vivait en Côte d'Ivoire avec sa mère avec laquelle elle a toujours vécu. Alors même qu'elle aurait conservé des relations avec son père, ce dernier est entré en France, selon ses déclarations, en 2008, et ne vivait donc plus quotidiennement avec sa fille depuis dix ans à la date de la décision litigieuse. Si M. C... fait valoir qu'il a des ressources suffisantes et dispose d'un logement assez grand pour loger sa fille ainsi que le reste de sa famille, cette circonstance ne permet pas d'établir que le préfet du Doubs, qui a examiné la demande de M. C... dans le cadre de son pouvoir discrétionnaire, aurait entaché sa décision d'une erreur d'appréciation en rejetant sa demande au motif que l'intérêt supérieur de la jeune D... de rejoindre son père en France, sans sa mère, n'était pas établi. En outre, la circonstance que sa fille serait isolée depuis le décès de sa mère, le 20 novembre 2018, et n'aurait plus de famille en Côte d'Ivoire, au demeurant non établie, qui est postérieure à la décision litigieuse, ne peut être prise en compte pour apprécier sa légalité. Par suite, en rejetant la demande de regroupement familial de M. C..., dont la légalité doit être appréciée à la date de cette décision, le préfet du Doubs n'a pas méconnu les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant.

8. En dernier lieu, l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales stipule que : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) ".

9. Alors même qu'il se rend régulièrement en Côte d'Ivoire, M. C... n'établit pas avoir conservé des liens réguliers avec la jeune D..., ni avoir contribué à son éducation. Comme il a été dit, celle-ci vivait aux côtés de sa mère en Côte d'Ivoire. M. C... a reconstitué sa propre cellule familiale en France. Par suite, il ne ressort pas des pièces du dossier que la décision portant refus de regroupement familial en faveur de la jeune D... porterait au droit de M. C... à une vie privée et familiale normale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été édictée.

10. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 11 septembre 2018 du préfet du Doubs. Ses conclusions à fin d'injonction et celles qu'il présente au titre des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent, en conséquence, qu'être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... C... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée pour information au préfet du Doubs.

5

N° 20NC03606


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 20NC03606
Date de la décision : 20/07/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. - Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : Mme GHISU-DEPARIS
Rapporteur ?: Mme Christine GRENIER
Rapporteur public ?: M. MICHEL
Avocat(s) : HAKKAR

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2021-07-20;20nc03606 ?
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