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20/07/2021 | FRANCE | N°20NC03296

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre, 20 juillet 2021, 20NC03296


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 6 novembre 2019 par lequel le préfet du Bas-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il est susceptible d'être renvoyé.

Par un jugement n° 1909583 du 29 mai 2020, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enr

egistrée le 11 novembre 2020, M. A..., représenté par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler l...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 6 novembre 2019 par lequel le préfet du Bas-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il est susceptible d'être renvoyé.

Par un jugement n° 1909583 du 29 mai 2020, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 11 novembre 2020, M. A..., représenté par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 29 mai 2020 du tribunal administratif de Strasbourg ;

2°) d'annuler l'arrêté du 6 novembre 2019 du préfet du Bas-Rhin ;

3°) d'enjoindre au préfet du Bas-Rhin de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation et de lui délivrer un récépissé de demande de titre de séjour dans cette attente, le tout dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- sa requête est recevable ;

- il a été privé d'une garantie liée au défaut de garantie d'authenticité sur les signatures électroniques figurant sur l'avis de l'Office français de l'immigration et de l'intégration ;

- le préfet s'est estimé à tort en situation de compétence liée par l'avis de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, sans examiner sérieusement sa situation et en particulier s'il pouvait prétendre à une admission exceptionnelle au séjour et sans solliciter ses observations, alors que sa demande de titre de séjour avait été déposée plus de six mois auparavant ;

- la décision portant refus de titre de séjour méconnaît le 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors qu'il ne sera pas en mesure de bénéficier d'une prise en charge multidisciplinaire adaptée en Géorgie ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français n'est pas suffisamment motivée ;

- elle est entachée d'erreur de droit et d'erreur manifeste d'appréciation en application du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors qu'il ne sera pas en mesure de bénéficier d'un accès effectif aux soins en Géorgie ;

- le préfet a commis une erreur de droit en s'estimant en situation de compétence liée pour l'obliger à quitter le territoire français ;

- la décision fixant le pays de destination est illégale en raison de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;

- elle méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

La requête a été communiquée au préfet du Bas-Rhin qui n'a pas produit de mémoire en défense.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 29 septembre 2020.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- le code civil ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- l'ordonnance n° 2005-1516 du 8 décembre 2005 relative aux échanges électroniques entre les usagers et les autorités administratives et entre les autorités administratives ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Grenier, présidente assesseure, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant géorgien, né le 30 septembre 1995, est entré sur le territoire français, le 14 janvier 2018, avec ses parents. Il a sollicité la délivrance d'un titre de séjour pour motifs de santé, le 12 avril 2019. Par un arrêté du 6 novembre 2019, le préfet du Bas-Rhin a refusé la délivrance de ce titre de séjour, lui fait obligation de quitter le territoire dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il est susceptible d'être éloigné. Par un jugement du 29 mai 2020, dont M. A... relève appel, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 6 novembre 2019.

Sur la décision portant refus de titre de séjour :

2. En premier lieu, aux termes de l'article 6 de l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, " (...) Le collège peut délibérer au moyen d'une conférence téléphonique ou audiovisuelle. / L'avis émis à l'issue de la délibération est signé par chacun des trois médecins membres du collège. ". Selon l'article 1367 du code civil : " La signature nécessaire à la perfection d'un acte juridique identifie son auteur. Elle manifeste son consentement aux obligations qui découlent de cet acte. Quand elle est apposée par un officier public, elle confère l'authenticité à l'acte. / Lorsqu'elle est électronique, elle consiste en l'usage d'un procédé fiable d'identification garantissant son lien avec l'acte auquel elle s'attache. La fiabilité de ce procédé est présumée, jusqu'à preuve contraire, lorsque la signature électronique est créée, l'identité du signataire assurée et l'intégrité de l'acte garantie, dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat. ". En vertu du I de l'article 9 de l'ordonnance du 8 décembre 2005 relative aux échanges électroniques entre les usagers et les autorités administrative : " I. - Un référentiel général de sécurité fixe les règles que doivent respecter les fonctions des systèmes d'information contribuant à la sécurité des informations échangées par voie électronique telles que les fonctions d'identification, de signature électronique, de confidentialité et d'horodatage. Les conditions d'élaboration, d'approbation, de modification et de publication de ce référentiel sont fixées par décret. ".

3. Il ressort des pièces du dossier, et en particulier de l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) du 6 août 2019 produit en première instance par le préfet du Bas-Rhin, que les signatures figurant sur cet avis sont des fac-similés qui ne constituent pas des signatures électroniques et ne relèvent, de ce fait, ni de l'ordonnance du 8 décembre 2005 relative aux échanges électroniques entre les usagers et les autorités administratives et entre les autorités administratives, ni du deuxième alinéa de l'article 1367 du code civil. En tout état de cause, aucun élément du dossier ne permet de douter que les signatures apposées au bas de l'avis du 6 août 2019 ne seraient pas celles des trois médecins composant le collège de médecins de l'OFII, dont l'identité est précisée. Par suite, le moyen tiré de ce que M. A... aurait été privé d'une garantie en raison du vice de procédure résultant du défaut de garantie d'authenticité des " signatures électroniques " figurant sur cet avis doit être écarté.

4. En deuxième lieu, il ressort des termes mêmes de la décision portant refus de titre de séjour litigieuse que le préfet du Bas-Rhin, qui a examiné l'ensemble de la situation privée, familiale et médicale du requérant, ne s'est pas estimé, à tort, en situation de compétence liée par l'avis du 6 août 2019 du collège de médecins de l'OFII. Il a notamment examiné la possible régularisation du requérant au regard de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Par suite, le moyen tiré ce que le préfet du Bas-Rhin aurait commis une erreur de droit en s'estimant, à tort, en situation de compétence liée pour refuser de délivrer un titre de séjour à M. A..., sans procéder à un examen suffisamment approfondi de sa situation, doit être écarté.

5. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors applicable : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) / 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. Sous réserve de l'accord de l'étranger et dans le respect des règles de déontologie médicale, les médecins de l'office peuvent demander aux professionnels de santé qui en disposent les informations médicales nécessaires à l'accomplissement de cette mission. Les médecins de l'office accomplissent cette mission dans le respect des orientations générales fixées par le ministre chargé de la santé. Si le collège de médecins estime dans son avis que les conditions précitées sont réunies, l'autorité administrative ne peut refuser la délivrance du titre de séjour que par une décision spécialement motivée (...) ".

6. Sous réserve des cas où la loi attribue la charge de la preuve à l'une des parties, il appartient au juge administratif, au vu des pièces du dossier, et compte tenu, le cas échéant, de l'abstention d'une des parties à produire les éléments qu'elle est seule en mesure d'apporter et qui ne sauraient être réclamés qu'à elle-même, d'apprécier si l'état de santé d'un étranger nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse pas bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, eu égard à son offre de soins et aux caractéristiques de son système de santé.

7. La partie qui justifie d'un avis du collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration venant au soutien de ses dires doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour. Dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, l'existence ou l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires.

8. Il ressort des pièces du dossier que, par son avis du 6 août 2019, le collège de médecins de l'OFII a estimé que l'état de santé de M. A... nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut était susceptible d'entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité pour lui, mais qu'il était cependant en mesure de bénéficier effectivement d'un traitement approprié à sa pathologie, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé en Géorgie.

9. D'une part, il ressort des pièces du dossier et notamment des certificats médicaux produits par M. A..., qu'il souffre d'une tétraplégie post-traumatique depuis 2014, qui génère une spasticité généralisée et invalidante, un état d'incontinence et une ankylose pelvienne des hanches. M. A... a bénéficié, postérieurement toutefois à l'arrêté litigieux, de la pose d'une pompe pour l'injection de baclofène, le 17 décembre 2019. Il a également été opéré aux hanches. Un certificat médical du 13 août 2020, lequel, s'il est postérieur à la décision litigieuse, fait état de circonstances antérieures et peut être pris en compte, précise que sa situation de handicap est définitive.

10. D'autre part, M. A... soutient qu'il ne sera pas en mesure de bénéficier d'une prise en charge pluridisciplinaire de même nature que celle mise en place en France en cas de retour dans son pays d'origine. Il produit, à cet égard, un rapport médical d'un neurologue géorgien du 11 juillet 2017 précisant qu'il bénéficie d'un " certain potentiel de réadaptation " et qu'une réadaptation avec un appareil type lokomat pourrait être efficace, sans cependant être disponible en Géorgie. Ce certificat, qui ne fait état que d'une hypothèse quant à l'efficacité d'un tel traitement, n'est toutefois pas de nature à remettre en cause le certificat médical du 13 août 2020 quant au caractère irréversible de son handicap. Un certificat médical du 17 décembre 2020 d'un autre neurologue géorgien précise que des spécialistes en médecine de la rééducation mais également des neurochirurgiens et chirurgiens orthopédistes, ergothérapeutes et psychothérapeutes dont M. A... a besoin pour sa prise en charge médicale exercent en Géorgie, mais qu'il ne sera pas en mesure d'y bénéficier d'une prise en charge par une équipe pluridisciplinaire travaillant de manière coordonnée au sein d'un même hôpital ou d'une même clinique. En outre, il ressort des pièces du dossier et notamment du rapport de l'Organisation suisse d'aide aux réfugiés (Osar) sur le système de santé en Géorgie d'août 2018 que la population géorgienne a accès à une assurance maladie universelle depuis 2013. Il ressort de ce même rapport que ce système a fait l'objet d'une réforme en 2017 pour garantir l'accès des personnes les plus vulnérables, et notamment des personnes handicapées, à l'assurance maladie universelle sans contribution financière pour les soins primaires et certains soins secondaires. Ces personnes peuvent également bénéficier de certains programmes spécifiques. Ce rapport précise également que les personnes vulnérables constituent le public prioritaire pour la prise en charge par l'assurance maladie universelle. Il relève toutefois que les patients doivent assurer une partie du financement pour l'accès à certains soins et aux médicaments, dont la prise en charge s'est améliorée depuis 2017. Il n'est cependant pas suffisamment circonstancié pour établir que les soins spécifiques dont M. A... a besoin, lesquels, à la date de l'arrêté litigieux, consistaient principalement en des soins de rééducation, ne seraient pas pris en charge par l'assurance maladie universelle. Par suite, les éléments produits par M. A... ne sont pas de nature à remettre en cause l'avis du collègue de médecins de l'OFII du 6 août 2019 selon lequel il sera en mesure de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans son pays d'origine, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé en Géorgie.

11. Par ailleurs, le Dr. Gault indique, par un certificat médical du 13 janvier 2020, que le suivi et le remplissage de la pompe à baclofène nécessitent des rendez-vous réguliers en milieu spécialisé. M. A... établit, en produisant un certificat médical du 17 décembre 2020 d'un neurologue géorgien, que le baclofène n'est pas disponible en Géorgie. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que la pose d'une pompe à baclofène, le 17 décembre 2019, est postérieure à l'avis du collège de médecins et à l'édiction de l'arrêté litigieux, à la date duquel sa légalité doit être appréciée. Cet élément nouveau qui n'a en conséquence pas pu être pris en compte par le collège de médecins pourrait justifier, le cas échéant, si le requérant s'y croit fondé, une nouvelle demande de titre de séjour pour motifs de santé.

12. Il résulte de ce qui précède qu'en l'état des pièces du dossier, à la date de la décision contestée, le moyen tiré de la méconnaissance du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

13. En premier lieu, lorsqu'un refus de titre de séjour est assorti d'une obligation de quitter le territoire français, la motivation de cette dernière se confond avec celle du refus de titre de séjour dont elle découle nécessairement et n'implique pas, par conséquent, dès lors que ce refus est lui-même motivé, de motivation spécifique. En l'espèce, après avoir rappelé que la demande d'asile de M. A... avait été rejetée, la décision portant refus de titre de séjour, qui mentionne les dispositions juridiques sur lesquelles elle se fonde, précise les motifs pour lesquels la demande de titre de séjour pour motifs de santé de M. A... ne peut être accueillie. Elle examine également sa situation privée et familiale. Ainsi, la décision portant refus de titre de séjour comporte l'énoncé des éléments de fait et de droit sur lesquels le préfet s'est fondé. Par conséquent, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la décision portant obligation de quitter le territoire français, qui mentionne les dispositions juridiques sur lesquelles elle se fonde, doit être écarté.

14. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 511-4 de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors en vigueur : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : / 10° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. ". Le moyen tiré de ce que la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnaît ces dispositions et de l'erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur la vie personnelle de M. A..., en raison de l'absence de possibilité d'un accès effectif aux soins en Géorgie, doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux énoncés aux points 10 et 11 du présent arrêt.

15. En dernier lieu, il ne ressort pas des termes mêmes de l'arrêté litigieux que le préfet du Bas-Rhin, qui a procédé à un examen suffisamment approfondi de la situation, tant médicale que privée et familiale de M. A..., aurait entaché la décision portant obligation de quitter le territoire français d'une erreur de droit en s'estimant, à tort, en situation de compétence liée par l'avis du 6 août 2019 du collège de médecins de l'OFII.

Sur la décision fixant le pays de destination :

16. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que les conclusions à fin d'annulation de la décision portant obligation de quitter le territoire français présentées par M. A... doivent être rejetées. Par suite, le requérant n'est pas fondé à soutenir, par voie d'exception, que la décision fixant le pays de destination serait illégale en raison de l'illégalité de cette décision.

17. En second lieu, l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales stipule que : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ". Selon l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors en vigueur : " (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ".

18. Ainsi qu'il est dit au point 10 du présent arrêt, il n'est pas établi que M. A... ne sera pas en mesure de bénéficier d'un accès effectif aux soins nécessaires à la prise en charge de son handicap en Géorgie. Le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit, en conséquence, être écarté.

19. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 6 novembre 2019 du préfet du Bas-Rhin. Ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte et celles qu'il présente au titre des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent, en conséquence, qu'être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée pour information au préfet du Bas-Rhin.

2

N° 20NC03296


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 20NC03296
Date de la décision : 20/07/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme GHISU-DEPARIS
Rapporteur ?: Mme Christine GRENIER
Rapporteur public ?: M. MICHEL
Avocat(s) : ELSAESSER

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2021-07-20;20nc03296 ?
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