Vu les procédures suivantes :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme A... C... et M. E... C... ont demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler les arrêtés du 6 novembre 2019 par lesquels le préfet du Bas-Rhin les a obligés à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de destination et leur a interdit de retourner en France pendant un an.
Par un jugement nos 1908871, 1908872 du 12 juin 2020, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leur demande.
Procédures devant la cour :
I - Par une requête, enregistrée sous le n° 20NC03295, le 11 novembre 2020, Mme C..., représentée par Me D..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 12 juin 2020 du tribunal administratif de Strasbourg ;
2°) d'annuler l'arrêté du 6 novembre 2019 du préfet du Bas-Rhin ;
3°) d'enjoindre au préfet du Bas-Rhin de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation et de lui délivrer un récépissé de titre de séjour dans cette attente, le tout dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
- sa requête est recevable ;
- le jugement attaqué n'est pas suffisamment motivé et est entaché d'omission à statuer sur les moyens soulevés à l'encontre de l'interdiction de retour en France ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français n'est pas suffisamment motivée ;
- le préfet n'a pas procédé à un examen suffisant de sa situation ;
- le préfet a commis une erreur de droit en s'estimant en situation de compétence liée en raison du rejet de sa demande d'asile ;
- elle n'a pas été en mesure de présenter ses observations avant l'édiction de la décision portant obligation de quitter le territoire français et ainsi d'obtenir un titre de séjour en qualité d'accompagnante d'un étranger malade ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur sa vie personnelle ;
- la décision fixant le pays de destination est illégale en raison de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;
- elle méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'interdiction de retour édictée est illégale en raison de l'illégalité des décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination ;
- elle est entachée d'erreur de droit, dès lors que le préfet s'est estimé à tort en situation de compétence liée ;
- elle est insuffisamment motivée dans son principe et sa durée ;
- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur sa situation ;
- le préfet n'a pas procédé à un examen suffisamment approfondi de sa situation et n'a pas pris en compte les considérations humanitaires dont elle fait état faisant obstacle à ce qu'une interdiction de retour soit prononcée.
La requête a été communiquée au préfet du Bas-Rhin qui n'a pas produit de mémoire en défense.
II - Par une requête, enregistrée sous le n° 20NC03297, le 11 novembre 2020, M. C..., représenté par Me D..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 12 juin 2020 du tribunal administratif de Strasbourg ;
2°) d'annuler l'arrêté du 6 novembre 2019 du préfet du Bas-Rhin ;
3°) d'enjoindre au préfet du Bas-Rhin de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation et de lui délivrer un récépissé de titre de séjour dans cette attente, le tout dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- sa requête est recevable ;
- le jugement attaqué n'est pas suffisamment motivé et est entaché d'omission à statuer sur les moyens soulevés à l'encontre de l'interdiction de retour en France ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français n'est pas suffisamment motivée ;
- le préfet n'a pas procédé à un examen suffisant de sa situation ;
- le préfet a commis une erreur de droit en s'estimant en situation de compétence liée en raison du rejet de sa demande d'asile ;
- il n'a pas été en mesure de présenter ses observations avant l'édiction de la décision portant obligation de quitter le territoire français et ainsi d'obtenir un titre de séjour en qualité d'accompagnant d'un étranger malade ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur sa vie personnelle ;
- la décision fixant le pays de destination est illégale en raison de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;
- elle méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'interdiction de retour édictée est illégale en raison de l'illégalité des décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination ;
- elle est entachée d'erreur de droit, dès lors que le préfet s'est estimé à tort en situation de compétence liée ;
- elle est insuffisamment motivée dans son principe et sa durée ;
- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur sa situation ;
- le préfet n'a pas procédé à un examen suffisamment approfondi de sa situation et n'a pas pris en compte les considérations humanitaires dont il fait état faisant obstacle à ce qu'une interdiction de retour soit prononcée.
La requête a été communiquée au préfet du Bas-Rhin qui n'a pas produit de mémoire en défense.
M. et Mme C... ont été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 29 septembre 2020.
Vu les autres pièces des dossiers.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Grenier, présidente assesseure, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. et Mme C..., ressortissants géorgiens, nés respectivement les 29 janvier 1971 et 31 mai 1973, sont entrés sur le territoire français le 14 janvier 2018 avec leur fils B.... Leur demande d'asile a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA), le 26 octobre 2018. La Cour nationale du droit d'asile (CNDA) a confirmé les décisions de l'OFPRA, le 7 mars 2019. Par des arrêtés du 6 novembre 2019, le préfet du Bas-Rhin leur a fait obligation de quitter le territoire dans un délai de trente jours, a fixé le pays à destination duquel ils sont susceptibles d'être éloignés et leur a interdit de retourner en France pendant une durée d'un an. Par un jugement du 12 juin 2020, dont M. et Mme C... relèvent appel par deux requêtes qu'il y a lieu de joindre pour statuer par un seul arrêt, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leur demande tendant à l'annulation des arrêtés du 6 novembre 2019.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. En se bornant à soutenir que le jugement attaqué est entaché d'omission à statuer sur les moyens soulevés à l'encontre des décisions portant interdiction de retour en France sans préciser à quel(s) moyen(s) le tribunal n'aurait pas répondu, M. et Mme C... ne mettent pas la cour à même d'apprécier le bien-fondé du moyen qu'ils soulèvent en appel. En outre, le point 15 du jugement attaqué, qui écarte les moyens d'erreur de droit, d'erreur d'appréciation et d'erreur manifeste d'appréciation soulevés à l'encontre des décisions portant interdiction de retour est suffisamment motivé.
Sur les décisions portant obligation de quitter le territoire français :
3. Aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors applicable : " I. ' L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) / 6° Si la reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé à l'étranger ou si l'étranger ne bénéficie plus du droit de se maintenir sur le territoire français en application des articles L. 743-1 et L. 743-2 , à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité. (...) ".
4. En premier lieu, les décisions portant obligation de quitter le territoire français litigieuses, après avoir mentionné les dispositions juridiques sur lesquelles elles se fondent, rappellent que la demande d'asile de M. et Mme C... a été rejetée. Elles font également état de leur situation familiale et en particulier du rejet de la demande de titre de séjour pour motifs de santé de leur fils. Elles permettent ainsi aux requérants de connaître les éléments de fait sur lesquels le préfet s'est fondé pour les obliger à quitter le territoire français. Le moyen tiré de l'insuffisance de motivation des décisions portant obligation de quitter le territoire français doit, par suite, être écarté.
5. En deuxième lieu, aux termes du paragraphe 1 de l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne : " Toute personne a le droit de voir ses affaires traitées impartialement, équitablement et dans un délai raisonnable par les institutions et organes de l'Union ". Aux termes du paragraphe 2 de ce même article : " Ce droit comporte notamment : / - le droit de toute personne d'être entendue avant qu'une mesure individuelle qui l'affecterait défavorablement ne soit prise à son encontre (...) ".
6. Si le moyen tiré de la violation de l'article 41 précité par un Etat membre de l'Union européenne est inopérant, dès lors qu'il résulte de la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne que cet article ne s'adresse qu'aux organes et aux organismes de l'Union, le droit d'être entendu, qui fait partie intégrante du respect des droits de la défense, principe général du droit de l'Union, implique que l'autorité préfectorale, avant de prendre à l'encontre d'un étranger une décision défavorable à ses intérêts, mette l'intéressé à même de présenter ses observations écrites et lui permette, sur sa demande, de faire valoir des observations orales, de telle sorte qu'il puisse faire connaître, de manière utile et effective, son point de vue sur la mesure envisagée avant qu'elle n'intervienne. Toutefois dans le cas prévu au 6° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, où la décision faisant obligation de quitter le territoire français est prise après que la reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé à l'étranger ou si l'étranger ne bénéficie plus du droit de se maintenir sur le territoire français en application de l'article L. 743-2 du même code, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité, l'obligation de quitter le territoire français découle nécessairement du défaut de reconnaissance de cette qualité ou de ce bénéfice. Le droit d'être entendu n'implique alors pas que l'administration ait l'obligation de mettre l'intéressé à même de présenter ses observations de façon spécifique sur la décision l'obligeant à quitter le territoire français, dès lors qu'il a pu être entendu à l'occasion de l'examen de sa demande de reconnaissance de sa qualité de réfugié. Lorsqu'il sollicite la reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire, en raison même de l'accomplissement de cette démarche qui tend à son maintien régulier sur le territoire français, l'intéressé ne saurait ignorer qu'en cas de refus, il pourra faire l'objet d'une mesure d'éloignement. A l'occasion du dépôt de sa demande, il est conduit à préciser à l'administration les motifs pour lesquels il demande que lui soit délivré un titre de séjour et à produire tous éléments susceptibles de venir au soutien de cette demande. Il lui appartient, lors du dépôt de cette demande, d'apporter à l'administration toutes les précisions qu'il juge utiles. Il lui est loisible, au cours de l'instruction de sa demande, de faire valoir auprès de l'administration toute observation complémentaire utile, au besoin en faisant état d'éléments nouveaux. Le droit de l'intéressé d'être entendu, ainsi satisfait avant que n'intervienne le refus de la reconnaissance de la qualité de réfugié, n'impose pas à l'autorité administrative de le mettre à même de réitérer ses observations ou de présenter de nouvelles observations, de façon spécifique, sur l'obligation de quitter le territoire français qui est prise en conséquence du refus définitif de reconnaissance de la qualité de réfugié ou de l'octroi du bénéfice de la protection subsidiaire.
7. M. et Mme C... ont sollicité leur admission au séjour au titre de l'asile. Il leur appartenait, lors du dépôt de leur demande, d'apporter à l'administration toutes les précisions qu'ils estimaient nécessaires. Il n'est pas contesté qu'ils ont pu faire valoir leurs observations dans ce cadre y compris celles relatives à leur enfant majeur lourdement handicapé, ainsi que cela résulte des décisions litigieuses qui font état de la situation de leur fils. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de leur droit à être entendu doit être écarté comme manquant en fait, sans que ne puisse être utilement invoquée une insuffisance de renseignement au guichet quant aux différentes possibilités de demandes de titres de séjour.
8. En troisième lieu, les demandes d'asile de M. et Mme C... ont été rejetées et ils ne bénéficiaient plus du droit de se maintenir sur le territoire français. Par suite, le préfet, qui a procédé à un examen suffisamment approfondi de leur situation notamment familiale au regard de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales a pu les obliger à quitter le territoire français sans s'estimer, à tort, en situation de compétence liée.
9. En quatrième lieu, l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales stipule que : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) ".
10. Il ressort des pièces du dossier et n'est pas contesté que M. et Mme C..., entrés en France en novembre 2018, y résidaient depuis moins de dix-huit mois à la date des décisions litigieuses. Ils ne justifient d'aucune insertion particulière. S'ils font valoir que leur fils majeur, lourdement handicapé, a besoin de leur présence et de leur aide pour les gestes quotidiens, il ressort des pièces du dossier que la demande de titre de séjour pour motifs de santé de ce dernier a été rejetée et assortie d'une obligation de quitter le territoire français et que rien ne fait ainsi obstacle à ce qu'il suive ses parents en cas de retour dans leur pays d'origine. En outre, il ne ressort pas des pièces du dossier que M. et Mme C... seraient dépourvus d'attaches familiales dans leur pays d'origine, dans lequel ils ont vécu respectivement 48 et 46 ans. Par suite, dans les circonstances de l'espèce, les décisions portant obligation de quitter le territoire français ne portent pas une atteinte disproportionnée à leur droit à une vie privée et familiale normale, garanti notamment par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
11. En dernier lieu, le moyen tiré de ce que les décisions portant obligation de quitter le territoire français seraient entachées d'erreur manifeste quant à l'appréciation de leurs conséquences sur la vie personnelle des intéressés doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux exposés au point précédent.
Sur les décisions fixant le pays de destination :
12. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que les conclusions à fin d'annulation des décisions portant obligation de quitter le territoire français présentées par M. et Mme C... doivent être rejetées. Par suite, ils ne sont pas fondés à soutenir que les décisions fixant le pays de destination seraient illégales à raison de l'illégalité de ces décisions.
13. En second lieu, l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales stipule que : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ". Selon l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors en vigueur : " (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ".
14. En se prévalant de l'impossibilité de dispenser des soins adaptés à leur fils majeur et de la circonstance qu'ils se trouveraient dans une situation de détresse financière en cas de retour dans leur pays d'origine en raison du coût des soins nécessaires pour soigner leur fils, M. et Mme C... n'apportent aucun élément de nature à établir qu'ils seraient personnellement exposés à un risque pour leur vie ou leur liberté en cas de retour en Géorgie. Le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit, en conséquence, être écarté.
Sur l'interdiction de retour en France :
15. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que les décisions portant obligation de quitter le territoire français édictées à l'encontre de M. et Mme C... ne sont pas illégales. Par suite, le moyen, soulevé par voie d'exception, tiré de leur illégalité à l'encontre des décisions portant interdiction de retour ne peut qu'être écarté.
16. En deuxième lieu, aux termes du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors en vigueur : " III. ' L'autorité administrative, par une décision motivée, assortit l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français, d'une durée maximale de trois ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français, lorsque aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger. / Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative ne prononce pas d'interdiction de retour (...) / Lorsqu'elle ne se trouve pas en présence du cas prévu au premier alinéa du présent III, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, assortir l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée maximale de deux ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français (...) / La durée de l'interdiction de retour mentionnée aux premier, sixième et septième alinéas du présent III ainsi que le prononcé et la durée de l'interdiction de retour mentionnée au quatrième alinéa sont décidés par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français (...) ".
17. La décision d'interdiction de retour doit comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement, de sorte que son destinataire puisse à sa seule lecture en connaître les motifs. Si cette motivation doit attester de la prise en compte par l'autorité compétente, au vu de la situation de l'intéressé, de l'ensemble des critères prévus par la loi, aucune règle n'impose que le principe et la durée de l'interdiction de retour fassent l'objet de motivations distinctes, ni que soit indiquée l'importance accordée à chaque critère. Il incombe ainsi à l'autorité compétente qui prend une décision d'interdiction de retour d'indiquer dans quel cas susceptible de justifier une telle mesure se trouve l'étranger. Elle doit par ailleurs faire état des éléments de la situation de l'intéressé au vu desquels elle a arrêté, dans son principe et dans sa durée, sa décision, eu égard notamment à la durée de la présence de l'étranger sur le territoire français, à la nature et à l'ancienneté de ses liens avec la France et, le cas échéant, aux précédentes mesures d'éloignement dont il a fait l'objet. Elle doit aussi, si elle estime que figure au nombre des motifs qui justifie sa décision une menace pour l'ordre public, indiquer les raisons pour lesquelles la présence de l'intéressé sur le territoire français doit, selon elle, être regardée comme une telle menace. En revanche, si, après prise en compte de ce critère, elle ne retient pas cette circonstance au nombre des motifs de sa décision, elle n'est pas tenue, à peine d'irrégularité, de le préciser expressément.
18. Il ressort des termes mêmes des décisions portant interdiction de retour sur le territoire français d'un an, prises sur le fondement du quatrième alinéa du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qu'elles visent, que le préfet du Bas-Rhin a examiné les quatre critères mentionnés par ces dispositions, en relevant que M. et Mme C... étaient arrivés en France récemment et ne justifiaient pas de l'intensité de leurs liens en France, hormis la présence de leur fils qui fait également l'objet d'une mesure d'éloignement et que, s'ils ne présentaient pas de menace pour l'ordre public et n'avaient fait l'objet d'aucune précédente mesure d'éloignement, il y avait cependant lieu de prononcer une interdiction de retour en France d'une durée d'un an à leur encontre. Il ressort des termes mêmes de ces décisions que le préfet du Bas-Rhin a notamment pris en compte l'état de santé du fils de M. et Mme C... en rappelant l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration du 6 août 2019 faisant état de ce que l'accès aux soins est possible dans leur pays d'origine. Les décisions litigieuses, qui mentionnent les dispositions juridiques sur lesquelles elles se fondent et font état des éléments de la situation des intéressés au vu desquels le préfet les a arrêtées, dans leur principe et dans leur durée, sont, par suite, suffisamment motivées.
19. En troisième lieu, M. et Mme C... soutiennent que des considérations humanitaires tenant à l'état de santé de leur fils font obstacle à ce qu'une interdiction de retour sur le territoire français soit prononcée à leur encontre. Toutefois, dès lors qu'un refus de titre pour motifs de santé a été opposé à leur fils, lequel a, en conséquence, vocation à être soigné dans son pays d'origine, les requérants n'établissent pas l'existence de circonstances humanitaires qui auraient pu faire obstacle au prononcé des interdictions de retour.
20. En dernier lieu, ainsi qu'il a été dit, M. et Mme C... résidaient depuis moins de deux ans en France à la date des décisions litigieuses. Ils ne justifient d'aucune insertion particulière en France et n'établissent pas l'intensité et l'ancienneté de leurs liens, hormis la présence de leur fils majeur lourdement handicapé. Ce dernier fait cependant également l'objet d'une mesure d'éloignement du territoire français. Alors même qu'ils ne présentent pas de menace pour l'ordre public et n'ont pas fait l'objet d'une précédente mesure d'éloignement, les interdictions de retour d'un an prononcées à l'encontre de M. et Mme C... ne sont pas entachées d'erreur d'appréciation dans leur principe ou leur durée. Pour les mêmes motifs, elles ne sont pas davantage entachées d'erreur manifeste d'appréciation quant à leurs conséquences sur leur vie personnelle.
21. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme C... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leur demande tendant à l'annulation des arrêtés du 6 novembre 2019 du préfet du Bas-Rhin. Les conclusions qu'ils présentent aux fins d'injonction et d'astreinte et au titre des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent, en conséquence, qu'être rejetées.
D E C I D E :
Article 1er : Les requêtes de M. et Mme C... sont rejetées.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... C..., à M. E... C... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée pour information au préfet du Bas-Rhin.
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Nos 20NC03295, 20NC03297