Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... D... a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler l'arrêté du 28 décembre 2019 par lequel le préfet du Haut-Rhin l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de renvoi à destination duquel il sera reconduit et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'un an.
Par un jugement n° 1903807 du 3 janvier 2020, la magistrate désignée du tribunal administratif de Nancy a rejeté sa requête.
Procédures devant la cour :
I- Par une requête, enregistrée sous le n° 20NC01790, le 13 juillet 2020, M. D... demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 3 janvier 2020 de la magistrate désignée du tribunal administratif de Nancy ;
2°) d'annuler l'arrêté du 28 décembre 2019 par lequel le préfet du Haut-Rhin l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de renvoi à destination duquel il sera reconduit et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'un an ;
3°) d'enjoindre au préfet du Haut-Rhin de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et de lui délivrer, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour.
Il soutient que :
- la compétence du signataire de l'arrêté litigieux n'est pas établie ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnaît le 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle méconnaît l'intérêt supérieur de ses enfants ;
- elle méconnaît son droit à une vie privée et familiale normale garanti par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la décision fixant le pays de renvoi méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la décision portant interdiction de retour est illégale, eu égard à la durée de sa présence en France depuis 2012 et à la circonstance qu'il est le père de deux enfants.
Par un mémoire en défense, enregistré le 21 mai 2021, le préfet du Haut-Rhin conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. D... ne sont pas fondés.
II- Par une requête et un mémoire, enregistrés sous le n° 20NC02052, les 20 juillet 2020 et 15 juin 2021, M. D..., représenté par Me A..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 3 janvier 2020 de la magistrate désignée du tribunal administratif de Nancy ;
2°) d'annuler l'arrêté du 28 décembre 2019 par lequel le préfet du Haut-Rhin l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de renvoi à destination duquel il sera reconduit et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'un an ;
3°) d'enjoindre au préfet du Haut-Rhin de réexaminer sa situation dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et de lui délivrer, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 400 euros au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ou, à défaut d'attribution de l'aide juridictionnelle au requérant, la somme de 1 800 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- sa requête est recevable ;
- le jugement attaqué est irrégulier, dès lors que l'intérêt supérieur de ses filles n'est pas pris en compte ;
- la compétence du signataire de l'arrêté litigieux n'est pas établie ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français n'est pas suffisamment motivée ;
- elle est entachée d'une erreur de fait en ce que le préfet a estimé que son comportement constituait une menace pour l'ordre public ;
- elle est entachée d'un défaut d'examen suffisamment approfondi de sa situation ;
- elle méconnaît son droit à une vie privée et familiale normale garanti par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle méconnaît l'intérêt supérieur de ses enfants ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- elle méconnaît son droit à un procès équitable ;
- la décision fixant le pays de destination est illégale en raison de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;
- elle est entachée d'un défaut d'examen suffisamment approfondi de sa situation ;
- elle méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;
- la décision portant interdiction de retour en France méconnaît l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne et le principe général du droit de l'Union européenne d'être entendu ;
- elle n'est pas suffisamment motivée ;
- elle est illégale en raison de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;
- elle est entachée d'une erreur de fait et d'erreur de droit, dès lors qu'il ne présente pas une menace pour l'ordre public ;
- elle méconnaît le III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle méconnaît son droit à une vie privée et familiale normale garanti par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;
- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;
- elle méconnaît son droit à un procès équitable.
Par un mémoire en défense, enregistré le 21 mai 2021, le préfet du Haut-Rhin conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. D... ne sont pas fondés.
M. D... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 14 mai 2020.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale des droits de l'enfant ;
- la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Grenier, présidente assesseure, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. D..., ressortissant de la république démocratique du Congo, né le 15 décembre 1980, est entré sur le territoire français le 24 décembre 2012. Sa demande d'admission au séjour au titre de l'asile a été rejetée. Un titre de séjour en qualité de ressortissant étranger malade lui a été délivré pour la période du 5 août 2013 au 4 août 2017. Sa demande de renouvellement de titre de séjour a été rejetée par un arrêté du 23 avril 2018 qui était assorti d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours. Cet arrêté est devenu définitif à la suite du rejet du recours contentieux de M. D... tendant à son annulation. Le 27 décembre 2019, le requérant a été interpellé. Par un arrêté du 28 décembre 2019, le préfet du Haut-Rhin l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays à destination duquel il sera reconduit et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'un an. M. D... a été placé en rétention administrative. Par un jugement du 3 janvier 2020, dont M. D... relève appel par deux requêtes qu'il y a lieu de joindre pour statuer par un seul arrêt, la magistrate désignée du tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 28 décembre 2019.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Il ne ressort pas des écritures présentées par M. D... devant le tribunal administratif de Nancy que ce dernier ait soulevé le moyen tiré de l'atteinte portée à l'intérêt supérieur de ses enfants garanti par l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire litigieuse. Par suite, en ne statuant pas sur ce moyen, qui n'est pas d'ordre public, le jugement attaqué n'est pas entaché d'irrégularité.
Sur le moyen commun aux décisions contestées :
3. Par un arrêté du 18 avril 2017 régulièrement publié au recueil des actes administratifs du département, le préfet du Haut-Rhin a donné à M. C..., sous-préfet de l'arrondissement de Thann-Guebwiller, délégation pour signer, lorsqu'il assure les permanences, les décisions telles que celles en litige. Ainsi que l'énonce l'arrêté du 28 décembre 2019 et que le tableau d'organisation des permanences préfectorales produit en première instance l'établit, M. C... était le sous-préfet de permanence à la date des décisions contestées. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence de M. C... pour signer les décisions litigieuses, qui manque en fait, doit être écarté.
Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :
4. Aux termes du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors en vigueur : " L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : / 1° Si l'étranger ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité (...) / 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré (...) / 7° Si le comportement de l'étranger qui ne réside pas régulièrement en France depuis plus de trois mois constitue une menace pour l'ordre public (...) ".
5. En premier lieu, la décision portant obligation de quitter le territoire français du 28 décembre 2019, qui rappelle les conditions d'entrée et de séjour de M. D..., vise les 1° et 3° de l'article L. 511-1 I du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, précise sa situation familiale et relève notamment qu'il est séparé de sa compagne avec laquelle il ne vivait que depuis six mois, qu'il a été interpellé pour des faits de violence aggravée et menaces de mort sur sa compagne et qu'il n'a reconnu que deux des trois enfants de cette dernière, sans établir avoir constitué une vie privée et familiale stable sur le territoire français. Elle mentionne également précisément les faits pour lesquels le requérant peut être regardé comme présentant une menace pour l'ordre public. La seule circonstance qu'elle ne vise pas le 7° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, deuxième fondement légal de la décision attaquée, ne saurait suffire à démontrer l'insuffisance de motivation, dès lors que M. D... était, au regard des énonciations de fait, à même de comprendre les motifs de la décision litigieuse. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la décision portant obligation de quitter le territoire français ne peut qu'être écarté.
6. En deuxième lieu, il ressort des termes de la décision portant obligation de quitter le territoire français qu'elle a été prise aux motifs d'une part que M. D... est entré irrégulièrement en France, qu'il se maintient en situation irrégulière sans avoir exécuté une précédente obligation de quitter le territoire français devenue définitive et d'autre part, que son comportement constitue une menace pour l'ordre public. A supposer que le comportement du requérant ne puisse être regardé comme constituant une menace à l'ordre public, le motif tiré de son entrée irrégulière suffisait à lui seul à justifier qu'une mesure d'éloignement soit prononcée à son encontre sur le fondement du 1° de l'article L. 511-1 I. Le moyen tiré de l'erreur de fait quant à l'appréciation de l'atteinte à l'ordre public ne peut, par suite, qu' être écarté.
7. En troisième lieu, il ressort des pièces du dossier que le préfet du Haut-Rhin a pris en compte la situation privée, professionnelle et familiale de M. D... et en particulier la présence de ses deux enfants sur le territoire français, avant de prononcer la décision litigieuse. Il a également relevé que le requérant ne pouvait prétendre à l'obtention d'un titre de séjour de plein droit. Par suite, le moyen tiré du défaut d'examen suffisamment approfondi de sa situation ne peut qu'être écarté.
8. En quatrième lieu, l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales stipule que : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) ". Aux termes du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors applicable : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) / 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) ".
9. Il ressort des pièces du dossier que M. D... est entré en France en décembre 2012 et justifiait ainsi d'une présence de sept ans sur le territoire français à la date de la décision litigieuse. Il s'est cependant maintenu en situation irrégulière après la décision portant refus de renouvellement de son titre de séjour et l'obligeant à quitter le territoire français du 23 avril 2018, devenue définitive. Il ressort également des pièces du dossier qu'à la date de la décision litigieuse, il était dépourvu d'emploi et n'avait pas de ressources propres. En outre, malgré la durée de sa présence en France et alors même qu'il a exercé un emploi de cariste de manière régulière de juin 2015 à juin 2018, il ne justifie d'aucune insertion professionnelle pérenne. Il ressort également des pièces du dossier qu'il s'est séparé de sa compagne, elle-même alors en situation irrégulière, après une vie commune de six mois. S'il a reconnu les deux filles jumelles de cette dernière, nées le 27 mars 2018, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il vit avec elles ou contribue à leur entretien et à leur éducation. Il ne fournit aucun élément sur la nature de ses relations avec ses deux filles. Par ailleurs, M. D... a été interpellé, le 27 décembre 2018, pour des faits de violence aggravée et menaces de mort sur son ancienne compagne, pour lesquels il a d'ailleurs été condamné à une peine d'emprisonnement de six mois avec sursis par un jugement du tribunal correctionnel de Mulhouse du 14 février 2020, certes postérieur à la décision litigieuse, mais qui établit toutefois la réalité de ces faits. Il ressort enfin des pièces du dossier que M. D... a une compagne et deux enfants dans son pays d'origine. Par suite, la décision portant obligation de quitter le territoire français ne porte pas, au regard de ses objectifs, une atteinte disproportionnée au droit du requérant à une vie privée et familiale normale, garanti notamment par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Pour les mêmes motifs, le requérant n'est pas fondé à soutenir qu'une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " aurait dû lui être délivrée de plein droit en application du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors applicable, faisant ainsi obstacle à ce que soit prise la mesure d'éloignement contestée.
10. En cinquième lieu, aux termes des stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale. ".
11. Il n'est pas contesté que M. D... ne vit pas avec ses filles, nées en mars 2018 de sa relation avec une ressortissante congolaise, elle-même alors en situation irrégulière. S'il soutient qu'il s'occupe d'elles, il ne l'établit pas. Par suite, la décision portant obligation de quitter le territoire français ne porte pas, dans les circonstances de l'espèce, atteinte à l'intérêt supérieur de ses filles.
12. En sixième lieu, M. D... établit qu'il a occupé un emploi de cariste pendant plusieurs mois entre juin 2015 et juin 2018 et soutient qu'il sera en mesure de trouver du travail dès qu'un titre de séjour lui sera délivré. Il ne saurait cependant utilement invoquer les orientations figurant dans la circulaire du 28 novembre 2012 dite " circulaire Valls " commentant l'application des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile relatives aux conditions de délivrance d'un titre de séjour, qui est dépourvue de valeur réglementaire, pour contester la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français litigieuse. Ainsi qu'il a été dit, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il pourrait prétendre à la délivrance d'un titre de séjour de plein droit au regard de sa situation privée et familiale et de la durée de son séjour en France. Le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation dont serait entachée la décision portant obligation de quitter le territoire français litigieuse au regard de ses conséquences sur la vie personnelle de M. D... ne peut, en conséquence, qu'être écarté.
13. En dernier lieu, si M. D... soutient que la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnaît son droit à un procès équitable et son droit de se défendre garantis par l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article 47 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne en ce qu'il n'a pas été en mesure de comparaître à l'audience du tribunal correctionnel du 14 février 2020, cette décision ne faisait, en tout état de cause, pas obstacle à ce qu'il soit représenté devant cette juridiction.
Sur la décision fixant le pays de destination :
14. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que les conclusions à fin d'annulation de la décision portant obligation de quitter le territoire français présentées par M. D... doivent être rejetées. Par suite, le requérant n'est pas fondé à soutenir, par voie d'exception, que la décision fixant le pays de destination serait illégale en raison de l'illégalité de cette décision.
15. En deuxième lieu, l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales stipule que : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ". Selon l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors en vigueur : " (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ".
16. En se bornant à produire un courrier de juin 2016, soit plus de trois ans avant la décision litigieuse, de l'avocat de son frère, selon lequel ce dernier serait poursuivi en raison des activités politiques passées du requérant dans l'opposition au gouvernement de la République démocratique du Congo, M. D... n'établit pas qu'il est exposé à des risques personnels, actuels et réels pour sa vie et sa liberté en cas de retour dans son pays d'origine, alors au surplus, que sa demande d'admission au titre de l'asile a été rejetée en 2014. Le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit, en conséquence, être écarté.
17. En troisième lieu, il ressort des termes mêmes de la décision fixant le pays de renvoi que le préfet du Haut-Rhin a procédé à un examen suffisamment approfondi de la situation du requérant et en particulier des risques pour sa vie ou sa liberté en cas de retour dans son pays d'origine.
18. En dernier lieu, le moyen d'erreur manifeste d'appréciation dont serait entachée cette décision ne peut qu'être écarté pour les motifs exposés au point 16 du présent arrêt.
Sur la décision portant interdiction de retour en France :
19. En premier lieu, aux termes du paragraphe 1 de l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne : " Toute personne a le droit de voir ses affaires traitées impartialement, équitablement et dans un délai raisonnable par les institutions et organes de l'Union ". Aux termes du paragraphe 2 de ce même article : " Ce droit comporte notamment : / - le droit de toute personne d'être entendue avant qu'une mesure individuelle qui l'affecterait défavorablement ne soit prise à son encontre (...) ".
20. Si le moyen tiré de la violation de l'article 41 précité par un Etat membre de l'Union européenne est inopérant, dès lors qu'il résulte de la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne que cet article ne s'adresse qu'aux organes et aux organismes de l'Union, le droit d'être entendu, qui fait partie intégrante du respect des droits de la défense, principe général du droit de l'Union, implique que l'autorité préfectorale, avant de prendre à l'encontre d'un étranger une décision défavorable à ses intérêts, mette l'intéressé à même de présenter ses observations écrites et lui permette, sur sa demande, de faire valoir des observations orales, de telle sorte qu'il puisse faire connaître, de manière utile et effective, son point de vue sur la mesure envisagée avant qu'elle n'intervienne. Le droit d'être entendu n'implique toutefois pas que l'administration ait l'obligation de mettre l'intéressé à même de présenter ses observations de façon spécifique sur la décision portant interdiction de retour, prise concomitamment à l'obligation de quitter le territoire français, dès lors qu'il a pu être entendu avant que n'intervienne la décision d'éloignement.
21. Il ressort des pièces du dossier qu'interpellé le 27 décembre 2019, M. D... a été auditionné et a été en mesure de présenter ses observations, le 28 décembre 2019, sur l'obligation de quitter le territoire français envisagée à son encontre. Le prononcé d'une interdiction de retour ne nécessitait pas une procédure contradictoire supplémentaire.
22. En deuxième lieu, aux termes du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors en vigueur : " III. ' L'autorité administrative, par une décision motivée, assortit l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français, d'une durée maximale de trois ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français, lorsque aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger. / Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative ne prononce pas d'interdiction de retour (...) / Lorsqu'elle ne se trouve pas en présence du cas prévu au premier alinéa du présent III, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, assortir l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée maximale de deux ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français (...) / La durée de l'interdiction de retour mentionnée aux premier, sixième et septième alinéas du présent III ainsi que le prononcé et la durée de l'interdiction de retour mentionnée au quatrième alinéa sont décidés par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français (...) ".
23. La décision d'interdiction de retour doit comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement, de sorte que son destinataire puisse à sa seule lecture en connaître les motifs. Si cette motivation doit attester de la prise en compte par l'autorité compétente, au vu de la situation de l'intéressé, de l'ensemble des critères prévus par la loi, aucune règle n'impose que le principe et la durée de l'interdiction de retour fassent l'objet de motivations distinctes, ni que soit indiquée l'importance accordée à chaque critère. Il incombe ainsi à l'autorité compétente qui prend une décision d'interdiction de retour d'indiquer dans quel cas susceptible de justifier une telle mesure se trouve l'étranger. Elle doit par ailleurs faire état des éléments de la situation de l'intéressé au vu desquels elle a arrêté, dans son principe et dans sa durée, sa décision, eu égard notamment à la durée de la présence de l'étranger sur le territoire français, à la nature et à l'ancienneté de ses liens avec la France et, le cas échéant, aux précédentes mesures d'éloignement dont il a fait l'objet. Elle doit aussi, si elle estime que figure au nombre des motifs qui justifie sa décision une menace pour l'ordre public, indiquer les raisons pour lesquelles la présence de l'intéressé sur le territoire français doit, selon elle, être regardée comme une telle menace. En revanche, si, après prise en compte de ce critère, elle ne retient pas cette circonstance au nombre des motifs de sa décision, elle n'est pas tenue, à peine d'irrégularité, de le préciser expressément.
24. Il ressort des termes mêmes de la décision litigieuse que pour prononcer une interdiction de retour d'une durée d'un an à l'encontre de M. D..., le préfet du Haut-Rhin a pris en compte l'ancienneté de son séjour en France, son maintien en situation irrégulière malgré une précédente mesure d'éloignement, l'absence de liens familiaux intenses et stables en France et la circonstance qu'il présente une menace pour l'ordre public. Les motifs pour lesquels M. D... doit être regardé comme présentant une menace pour l'ordre public étaient précisés dans le même arrêté. M. D... était ainsi à même de comprendre les raisons pour lesquelles sa présence sur le territoire français devait être regardée comme une telle menace. Enfin, cette décision indique qu'aucune circonstance humanitaire ne fait obstacle à ce qu'une interdiction de retour soit prononcée à l'encontre de M. D.... Par suite le requérant n'est pas fondé à soutenir que la décision litigieuse n'est pas suffisamment motivée.
25. En troisième lieu, il résulte de ce qui précède que la décision portant obligation de quitter le territoire français édictée à l'encontre de M. D... n'est pas illégale. Par suite, le moyen, soulevé par voie d'exception, tiré de son illégalité à l'encontre de la décision portant interdiction de retour ne peut qu'être écarté.
26. En quatrième lieu, il résulte des dispositions précitées qu'hormis circonstances humanitaires, une décision portant obligation de quitter le territoire français sans délai de départ volontaire est nécessairement assortie d'une interdiction de retour. Ainsi, la circonstance, au demeurant non établie, que le requérant ne présenterait pas une menace à l'ordre public est sans incidence sur le principe de l'interdiction. Par ailleurs, il ne ressort pas des pièces du dossier que M. D... entretient des relations stables et intenses avec ses enfants qui vivent avec leur mère. Leur présence en France ne peut être regardée, en l'état des pièces du dossier, comme une circonstance humanitaire de nature à faire obstacle au prononcé de l'interdiction de retour. La décision d'interdiction n'est, par suite, entachée ni d'erreur de droit, ni d'erreur de fait, ni d'erreur d'appréciation.
27. En dernier lieu, les moyens tirés de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentale, de l'absence de prise en compte de l'intérêt supérieur de ses enfants garanti par l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant et de l'erreur manifeste d'appréciation entachant la décision portant interdiction de retour doivent être écartés pour les mêmes motifs que ceux exposés aux points 9, 11 et 12 du présent arrêt. En outre, le moyen tiré de ce que la décision portant interdiction de retour méconnaît son droit à un procès équitable et son droit de se défendre garantis par l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article 47 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne doit être écarté pour les motifs exposés au point 13 du présent arrêt.
28. Il résulte de tout ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité de la requête, M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, la magistrate désignée du tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 28 décembre 2019 du préfet du Haut-Rhin. Ses conclusions à fin d'injonction et celles qu'il présente au titre des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent, en conséquence, qu'être rejetées.
D E C I D E :
Article 1er : Les requêtes de M. D... sont rejetées.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... D... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée pour information au préfet du Haut-Rhin.
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Nos 20NC01790, 20NC02052