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20/07/2021 | FRANCE | N°20NC00178

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre, 20 juillet 2021, 20NC00178


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... C... a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler la décision de la ministre des armées du 26 septembre 2017 portant refus de régularisation d'indice de solde et d'enjoindre à la ministre des armées de faire droit au recours qu'il a formé devant la commission des recours des militaires et d'infirmer la décision du 21 novembre 2016 portant refus de régularisation d'indice de solde ou, à titre subsidiaire, d'enjoindre à la ministre des armées de procéder à un nouvel examen du recours q

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... C... a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler la décision de la ministre des armées du 26 septembre 2017 portant refus de régularisation d'indice de solde et d'enjoindre à la ministre des armées de faire droit au recours qu'il a formé devant la commission des recours des militaires et d'infirmer la décision du 21 novembre 2016 portant refus de régularisation d'indice de solde ou, à titre subsidiaire, d'enjoindre à la ministre des armées de procéder à un nouvel examen du recours qu'il a formé devant la commission des recours des militaires et de prendre une nouvelle décision, le tout dans un délai de deux mois à compter du jugement à intervenir.

Par un jugement n° 1726208 du 26 novembre 2019, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 21 janvier 2020, M. C..., représenté par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 26 novembre 2019 du tribunal administratif de Nancy ;

2°) d'annuler la décision du 26 septembre 2017 de la ministre des armées ;

3°) d'enjoindre à la ministre des armées, à titre principal, de faire droit à son recours devant la commission des recours des militaires et d'infirmer la décision du 21 novembre 2016 portant refus de régularisation d'indice de solde et à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation, le tout dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le tribunal a entaché son jugement d'une erreur manifeste d'appréciation en estimant que son recours était dirigé contre son acte d'engagement du 14 avril 2008, alors qu'il demandait une réévaluation indiciaire à compter de son intégration dans le corps des militaires infirmiers et techniciens des hôpitaux des armées ;

- sa demande tendant à la réévaluation de la grille indiciaire n'était pas tardive ;

- son recours devant la commission des recours des militaires n'est pas tardif ;

- sa demande doit être assimilée à une demande indemnitaire, qui pouvait être engagée sans condition de délai ;

- la décision litigieuse est entachée d'erreur de droit ;

- le contrat du 14 avril 2008, qui n'a pas été regardé comme un engagement initial pour le versement des primes d'engagement, ne pouvait être regardé comme un recrutement initial pour son reclassement indiciaire ;

- l'instruction du 7 février 2008 est entachée d'illégalité pour défaut de compétence.

Par un mémoire en défense, enregistré le 11 juin 2021, la ministre des armées conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que :

- la demande présentée par M. C... devant le tribunal administratif était tardive et, en conséquence, irrecevable ;

- les moyens soulevés par M. C... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la défense ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Grenier, présidente,

- les conclusions de M. Michel, rapporteur public,

- et les observations de Me A... pour M. C....

Considérant ce qui suit :

1. M. C... a souscrit un contrat d'engagement pour une durée de quatre ans et deux mois au sein du service de santé de l'armée de terre le 3 mars 1998 et a été affecté au 1er régiment médical de Metz. Il a renouvelé cet engagement en mai 2002 pour une durée de cinq ans, puis pour un an à compter du 3 mai 2007. Le 14 avril 2008, il a signé un contrat d'engagement en qualité d'aide-soignant, au grade d'aide-soignant de classe normale à l'échelon 1 au sein du corps des militaires infirmiers et techniciens des hôpitaux des armées (MITHA) pour une durée de cinq ans. Cet engagement a été renouvelé à deux reprises, pour une durée respectivement de cinq ans puis de trois ans à compter des 14 avril 2011 et 2016. A compter du 1er septembre 2017, il a été placé en position de détachement pour effectuer un stage probatoire en qualité de gardien de la paix et affecté auprès de la compagnie de CRS de Chatel-Saint-Germain à compter du 1er décembre 2017. A l'occasion de son détachement, M. C... s'est rendu compte que son ancienneté n'avait pas été convenablement reprise lors de son engagement au sein du corps des MITHA à compter du 14 avril 2008. Le 4 octobre 2016, M. C... a alors demandé à la direction centrale du service de santé des armées (DCSSA) de bien vouloir régulariser sa situation en reprenant l'ancienneté acquise dans ses précédentes fonctions. Sa demande a été rejetée le 21 novembre 2016. M. C... a saisi, le 5 janvier 2017, la commission des recours des militaires afin d'obtenir la régularisation de sa situation. Sa réclamation a été rejetée par une décision de la ministre des armées du 26 septembre 2017. Par un jugement du 26 novembre 2019, dont M. C... relève appel, le tribunal administratif de Nancy a rejeté pour tardiveté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 26 septembre 2017 par laquelle la ministre des armées a refusé de régulariser son indice de solde.

2. Aux termes de l'article R. 421-1 du code de justice administrative, dans sa rédaction applicable en l'espèce : " La juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée. ". Selon l'article R. 421-5 du même code : " Les délais de recours contre une décision administrative ne sont opposables qu'à la condition d'avoir été mentionnés, ainsi que les voies de recours, dans la notification de la décision. ". Aux termes de l'article R. 4125-1 du code de la défense, dans sa rédaction applicable en l'espèce : " I.- Tout recours contentieux formé par un militaire à l'encontre d'actes relatifs à sa situation personnelle est précédé d'un recours administratif préalable, à peine d'irrecevabilité du recours contentieux. / Ce recours administratif préalable est examiné par la commission des recours des militaires, placée auprès du ministre de la défense. / La saisine de la commission est seule de nature à conserver le délai de recours contentieux jusqu'à l'intervention de la décision prévue à l'article R. 4125-10 (...) ". En vertu de l'article R. 4125-2 du même code : " A compter de la notification ou de la publication de l'acte contesté, ou de l'intervention d'une décision implicite de rejet d'une demande, le militaire dispose d'un délai de deux mois pour saisir la commission par lettre recommandée avec avis de réception adressée au secrétariat permanent placé sous l'autorité du président de la commission. (...) / Lorsque le recours est formé après l'expiration du délai de recours mentionné au premier alinéa, le président de la commission constate la forclusion et en informe l'intéressé ".

3. D'une part, il résulte de ces dispositions qu'à peine d'irrecevabilité de son recours contentieux à l'encontre d'un acte relatif à sa situation personnelle, un militaire doit former un recours administratif préalable obligatoire devant la commission des recours des militaires, dans un délai de deux mois à compter de la notification ou de la publication de cet acte. Le délai de deux mois pour exercer ce recours administratif préalable obligatoire ne peut cependant lui être opposé si la décision n'a pas été notifiée avec l'indication des voies et délais de recours.

4. D'autre part, le principe de sécurité juridique, qui implique que ne puissent être remises en cause sans condition de délai des situations consolidées par l'effet du temps, fait obstacle à ce que puisse être contestée indéfiniment une décision administrative individuelle qui a été notifiée à son destinataire, ou dont il est établi, à défaut d'une telle notification, que celui-ci a eu connaissance. En une telle hypothèse, si le non-respect de l'obligation d'informer l'intéressé sur les voies et les délais de recours, ou l'absence de preuve qu'une telle information a bien été fournie, ne permet pas que lui soient opposés les délais de recours fixés par le code de justice administrative, le destinataire de la décision ne peut exercer de recours juridictionnel au-delà d'un délai raisonnable. En règle générale et sauf circonstances particulières dont se prévaudrait le requérant, ce délai ne saurait, sous réserve de l'exercice de recours administratifs pour lesquels les textes prévoient des délais particuliers, excéder un an à compter de la date à laquelle une décision expresse lui a été notifiée ou de la date à laquelle il est établi qu'il en a eu connaissance. Dans le cas où le recours juridictionnel doit obligatoirement être précédé d'un recours administratif, celui-ci doit être exercé, comme doit l'être le recours juridictionnel, dans un délai raisonnable. Toutefois, cette règle ne trouve pas à s'appliquer aux recours tendant à la mise en jeu de la responsabilité d'une personne publique qui, s'ils doivent être précédés d'une réclamation auprès de l'administration, ne tendent pas à l'annulation ou à la réformation de la décision rejetant tout ou partie de cette réclamation mais à la condamnation de la personne publique à réparer les préjudices qui lui sont imputés.

5. En premier lieu, ainsi qu'il ressort des termes mêmes du recours gracieux adressé par M. C... le 4 octobre 2016 et de son recours administratif préalable obligatoire, enregistré le 5 janvier 2017, devant la commission des recours des militaires, M. C... demandait la régularisation de sa situation administrative avec la revalorisation de son indice majoré à compter du 14 avril 2008, date à laquelle il a été engagé au sein du corps des militaires infirmiers et techniciens des hôpitaux des armées (MITHA) en faisant valoir que l'ancienneté dont il bénéficiait à la fin de son contrat au sein de l'armée de terre n'avait pas été entièrement reprise. Par suite, M. C... n'est pas fondé à soutenir que les principes énoncés au point précédent ne s'appliquent pas à sa situation, dès lors que sa demande ne tendait pas à la mise en jeu de la responsabilité de l'Etat.

6. En deuxième lieu, il ressort des pièces du dossier que le contrat d'engagement du 14 avril 2008 de M. C... au sein du corps de MITHA mentionnait expressément son recrutement au 1er échelon du grade des aides-soignants de classe normale au sein du corps des aides-soignants des MITHA. Alors même que le contrat d'engagement du 14 avril 2008 ne mentionne pas les voies et délais de recours, M. C..., qui l'a signé, a nécessairement eu connaissance du grade et de l'échelon auxquels il a été recruté et de l'indice en découlant. Il en a été de même à l'occasion de son bulletin de paie du mois d'avril 2008 indiquant expressément son indice au sein du corps des MITHA.

7. En dernier lieu, en faisant valoir qu'il a réalisé, en 2016 seulement, que l'ancienneté liée à ses précédentes fonctions en qualité d'engagé volontaire n'avait pas été correctement prise en compte, M. C... n'invoque aucune circonstance particulière de nature à établir qu'il n'aurait pas été en mesure de contester dans un délai raisonnable les modalités selon lesquelles son ancienneté a été reprise à l'occasion de son engagement dans le corps des MITHA. Par suite, le recours qu'il a introduit le 5 janvier 2017 devant la commission des recours des militaires tendant à la revalorisation de son indice majoré à compter de son engagement dans le corps des MITHA, le 14 avril 2008, excédait le délai raisonnable dont il disposait pour contester les modalités de reprise de l'ancienneté liée à ses fonctions en qualité d'engagé volontaire au sein de l'armée de terre. Ainsi que l'a jugé le tribunal, qui ne s'est pas mépris sur l'objet de sa demande, le recours de M. C... était, en conséquence, tardif et, par suite, irrecevable.

8. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 26 septembre 2017 de la ministre des armées comme irrecevable. Ses conclusions à fin d'injonction et celles qu'il présente au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent, en conséquence, être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... C... et à la ministre des armées.

5

N° 20NC00178


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 20NC00178
Date de la décision : 20/07/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Actes législatifs et administratifs - Validité des actes administratifs - violation directe de la règle de droit - Principes généraux du droit - Principes intéressant l'action administrative.

Armées et défense - Personnels militaires et civils de la défense - Questions communes à l'ensemble des personnels militaires.


Composition du Tribunal
Président : Mme GRENIER
Rapporteur ?: Mme Christine GRENIER
Rapporteur public ?: M. MICHEL
Avocat(s) : AMBROSI

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2021-07-20;20nc00178 ?
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