Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne, d'une part, d'annuler l'arrêté du 29 juillet 2020 par lequel le préfet des Ardennes l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination et, d'autre part, d'enjoindre au préfet de réexaminer sa situation dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement à intervenir, sous astreinte de 500 euros par jour de retard.
Par un jugement n° 2001664 du 1er octobre 2020, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée sous le n° 20NC03015 le 13 octobre 2020, M. B... A..., représenté par Me E..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne du 1er octobre 2020 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet des Ardennes du 29 juillet 2020 ;
3°) d'enjoindre au préfet des Ardennes de réexaminer sa situation dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 500 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à Me E... sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- l'arrêté contesté est insuffisamment motivé ;
- il méconnaît les stipulations de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ainsi que celles de l'article 3 § 1 de la Convention internationale des droits de l'enfant du 26 janvier 1990.
La requête a été communiquée au préfet des Ardennes, qui n'a pas présenté de mémoire en défense.
M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision en date du 15 octobre 2020.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale des droits de l'enfant du 26 janvier 1990 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Le rapport de M. Favret, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. B... A..., ressortissant albanais né le 20 mars 1999, est entré en France le 22 octobre 2016, pour y solliciter l'asile. L'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) lui a refusé la qualité de réfugié par une décision du 29 septembre 2017, confirmée par une décision de la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) du 18 juillet 2018. Par un arrêté en date du 29 juillet 2020, le Préfet des Ardennes l'a alors obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. M. A... fait appel du jugement du 1er octobre 2020 par lequel le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté.
Sur la légalité de l'arrêté du 29 juillet 2020 :
2. En premier lieu, l'arrêté du préfet des Ardennes obligeant M. A... à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination mentionne les textes dont il fait application, notamment l'article L. 741-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et précise que la demande d'asile de l'intéressé ayant été rejetée par une décision de l'OFPRA du 29 septembre 2017, confirmée par une décision de la CNDA du 18 juillet 2018, M. A... ne remplit pas les conditions fixées par le 8° de l'article L. 314-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile lui permettant d'obtenir de plein droit une carte de résident. Alors que le préfet n'était pas tenu de mentionner dans sa décision l'ensemble des éléments caractérisant la situation du requérant, l'arrêté contesté souligne également que M. A... n'entre dans aucun autre cas d'attribution d'un titre de séjour, qu'il n'entre pas davantage dans les catégories d'étrangers définies à l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne pouvant faire l'objet d'une mesure d'éloignement, qu'il n'a présenté aucun élément justifiant de circonstances humanitaires et que sa décision ne contrevient pas aux stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. L'arrêté litigieux précise enfin que même si l'intéressé déclare vivre avec Mme C... et avoir un enfant à charge, il reconnaît ne pas être dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine. Il comporte, dès lors, les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de cet arrêté doit être écarté.
3. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
4. Il ressort des pièces du dossier que M. A... est entré en France le 22 octobre 2016, à l'âge de 17 ans. S'il résidait ainsi sur le territoire français depuis près de quatre ans, à la date de l'arrêté préfectoral contesté, la durée de sa présence sur le territoire français s'explique pour l'essentiel par les démarches vaines qu'il avait entreprises pour obtenir le statut de réfugié. En outre, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il serait dépourvu de toute attache familiale dans son pays d'origine, où il a vécu jusqu'à son arrivée en France. Par ailleurs, s'il soutient vivre en concubinage avec Mlle D... C..., ressortissante kosovare titulaire d'une carte de résident de dix ans valable jusqu'au 21 juillet 2026, et avoir eu avec elle une enfant née le 29 octobre 2019, le courrier d'EDF en date du 10 mars 2020, et les quelques pièces qu'il produit intitulées " Preuves de communauté de vie " datés des 12 octobre 2020, 7 août 2020 et 9 octobre 2020 ne sont pas de nature à établir l'ancienneté et la stabilité, à la date de l'arrêté litigieux, de la communauté de vie qu'il allègue, ni que l'intéressé participerait effectivement à l'entretien et à l'éducation de sa fille. Par suite, le moyen tiré de ce que l'arrêté contesté méconnaît l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.
5. En troisième lieu, aux termes des stipulations de l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ".
6. Il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant.
7. Ainsi qu'il a été dit plus haut, M. A... n'établit pas par les pièces produites qu'il participe effectivement à l'entretien et à l'éducation de sa fille. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3-1 de la convention précitée ci-dessus doit être écarté.
8. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à annuler l'arrêté du préfet des Ardennes du 29 juillet 2020. Ses conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet des Ardennes de réexaminer sa situation dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 500 euros par jour de retard, doivent être rejetées, par voie de conséquence.
Sur les frais liés à l'instance :
9. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens, ou à défaut la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ".
10. Ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que le conseil de M. A... demande au titre des dispositions précitées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B... A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet des Ardennes.
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N° 20NC03015