La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

08/07/2021 | FRANCE | N°20NC01309

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre, 08 juillet 2021, 20NC01309


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... A... et Mme C... A... née B... ont demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler les arrêtés du 19 août 2019 par lesquels le préfet de Meurthe-et-Moselle les a obligés à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 1902551-1902552 du 21 novembre 2019, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Nancy a rejeté leurs demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregist

rée sous le n° 20NC01309 le 24 juin 2020, M. et Mme A..., représentés par Me D..., demandent à la ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... A... et Mme C... A... née B... ont demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler les arrêtés du 19 août 2019 par lesquels le préfet de Meurthe-et-Moselle les a obligés à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 1902551-1902552 du 21 novembre 2019, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Nancy a rejeté leurs demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée sous le n° 20NC01309 le 24 juin 2020, M. et Mme A..., représentés par Me D..., demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 21 novembre 2019 ;

2°) d'annuler les arrêtés du 29 mai 2019 pris à leur encontre par le préfet de Meurthe-et-Moselle ;

3°) d'enjoindre au préfet de Meurthe-et-Moselle, à titre principal, de leur délivrer des titres de séjour avec autorisations de travailler, et, à titre subsidiaire, de réexaminer leur situation administrative et dans cette attente, de leur délivrer des autorisations provisoires de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à leur conseil de la somme de 1500 euros en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Ils soutiennent que :

s'agissant de la régularité du jugement attaqué :

- le premier juge a omis de statuer sur le moyen tiré du défaut d'examen de leur situation personnelle ;

- le jugement est insuffisamment motivé.

s'agissant des décisions portant obligation de quitter le territoire français :

- elles sont insuffisamment motivées ;

- le préfet de Meurthe-et-Moselle n'a pas procédé à un examen personnalisé et circonstancié de leur situation personnelle ;

- les décisions méconnaissent le 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elles méconnaissent l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elles méconnaissent l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.

s'agissant des décisions fixant le pays de renvoi :

- elles sont insuffisamment motivées ;

- le préfet de Meurthe-et-Moselle n'a pas procédé à un examen personnalisé et circonstancié de leur situation personnelle.

- ces décisions méconnaissent l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'hommes et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense, enregistré le 8 avril 2021, le préfet de Meurthe-et-Moselle conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés par les requérants ne sont pas fondés.

M. et Mme A... ont été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par deux décisions du bureau d'aide juridictionnelle du 11 mars 2020.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale des droits de l'enfant ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de M. Goujon-Fischer premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. et Mme A..., ressortissants albanais, sont entrés sur le territoire français, selon leurs déclarations, le 14 août 2018, accompagnés de leur enfant mineur. Leurs demandes d'asile ont été rejetées par deux décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 9 janvier 2019, notifiées aux intéressés le 22 janvier 2019. Par deux arrêtés du 19 août 2019, le préfet de Meurthe-et-Moselle les a obligés à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. M et Mme A... font appel du jugement du 21 novembre 2019 par lequel le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Nancy a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation de ces arrêtés.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. En premier lieu, si, dans la requête présentée devant le tribunal administratif de Nancy, M. et Mme A... ont rappelé que l'administration disposait toujours de la faculté discrétionnaire d'accorder un titre de séjour à l'étranger qui ne remplit pas les conditions prévues par la loi et qu'elle devait procéder à un examen particulier de la demande avant de la rejeter, ce rappel constituait une simple argumentation au soutien du moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation dont étaient, selon les requérants, entachés les arrêtés du 19 août 2019 pris à leur encontre. Par suite, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Nancy, qui a répondu à ce dernier moyen, n'a pas entaché son jugement d'irrégularité en ne répondant pas en outre au moyen, non soulevé, tiré de ce que le préfet n'aurait pas procédé à un examen particulier de leur situation.

3. En second lieu, il ressort de la lecture du jugement attaqué que le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Nancy, qui n'était pas tenu de répondre à tous les arguments avancés par les parties, a répondu, avec une motivation suffisante, à l'ensemble des moyens soulevés par les requérants, mettant à même le juge d'appel d'exercer son contrôle. Par suite, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que le jugement serait insuffisamment motivé.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne le moyen tiré du défaut de motivation des arrêtés du 19 août 2019 :

4. Les arrêtés du 19 août 2019 comportent l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement et satisfont dès lors à l'obligation de motivation. Il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet aurait pris ces arrêtés sans procéder préalablement à un examen particulier de la situation de M. et Mme A....

En ce qui concerne les moyens propres aux décisions portant obligation de quitter le territoire français :

5. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que M. et Mme A... sont entrés en France, selon leurs déclarations, le 14 août 2018, accompagnés de leur fils mineur soit depuis un an à la date des arrêtés contestés. Un deuxième enfant est né de cette union en septembre 2018. Toutefois, ni la scolarisation de l'aîné des enfants du couple, ni son état de santé, dont il n'est pas établi qu'il ne pourrait pas être pris en charge en Albanie, ni enfin la grossesse de Mme A... ne font en l'espèce obstacle à ce que la vie familiale se poursuive dans ce pays, où M. et Mme A... ne sont pas dépourvus d'autres attaches familiales et où ils ont vécu jusqu'à l'âge respectivement de trente-cinq et de vingt-et-un ans. Dès lors, compte tenu des circonstances de l'espèce, notamment de la durée et des conditions du séjour en France des intéressés, le préfet de Meurthe-et-Moselle n'a pas porté au droit de ceux-ci au respect de leur vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels les décisions portant obligation de quitter le territoire français ont été prises. Par suite, les arrêtés du 19 août 2019 n'ont méconnu ni l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni le 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

6. En second lieu, ainsi qu'il a été dit au point précédent, il ne ressort pas des pièces du dossier que les enfants des requérants seraient dans l'impossibilité de poursuivre ou d'entamer une scolarité dans le pays d'origine de leurs parents où ils ont vocation à les accompagner, ni que l'aîné ne pourrait pas y bénéficier d'un suivi médical adapté à son état de santé. La circonstance que les enfants de M. et Mme A... ne connaissent que la France et ne parlent que le français, à la supposer établie, ne suffit pas à démontrer que leur intérêt supérieur n'a pas été pris en compte, notamment au regard de leur jeune âge. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doit être écarté.

En ce qui concerne le moyen propre aux décisions fixant le pays de renvoi :

7. Les requérants soutiennent qu'ils seraient exposés à des risques en cas de retour en Albanie en raison d'une vendetta déclenchée à la suite du meurtre commis par M. A... sur la personne d'un homme qu'il pensait coupable de la mort de son frère. Ils font notamment valoir que M. A... aurait été victime de plusieurs agressions armées et aurait retrouvé un explosif dans sa voiture en 2018. Toutefois, ni leur récit des faits, ni les pièces qu'ils produisent composées notamment d'une attestation du comité de réconciliation nationale du 5 juin 2014 et d'un certificat d'hospitalisation du 16 mai 2012, ne permettent d'établir la réalité des risques qu'ils allèguent encourir en cas de retour en Albanie, ni qu'ils ne pourraient se prévaloir de la protection des autorités albanaises. Au demeurant, leurs demandes d'asile ont été rejetées par deux décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 9 janvier 2019. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.

8. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme A... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Nancy a rejeté leurs demandes.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

9. L'exécution du présent arrêt n'implique aucune mesure d'exécution. Par suite, il y a lieu de rejeter les conclusions à fin d'injonction présentées par M. et Mme A....

Sur les frais liés à l'instance :

10. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens, ou à défaut la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ".

11. Ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que M. et Mme A... demandent au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... A... et Mme C... A... née B... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de Meurthe-et-Moselle.

N° 20NC01309 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 20NC01309
Date de la décision : 08/07/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. WURTZ
Rapporteur ?: M. Jean-François GOUJON-FISCHER
Rapporteur public ?: Mme PETON
Avocat(s) : ANNIE LEVI-CYFERMAN - LAURENT CYFERMAN

Origine de la décision
Date de l'import : 20/07/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2021-07-08;20nc01309 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award