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01/07/2021 | FRANCE | N°19NC02314

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2ème chambre, 01 juillet 2021, 19NC02314


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... C... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales, auxquelles il a été assujetti au titre des années 2010 et 2011.

Par un jugement n° 1702406 du 14 mai 2019, le tribunal administratif de Strasbourg a partiellement fait droit à la demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 22 juillet 2019, M. C..., représenté par Me A..., demande à la co

ur :

1°) d'annuler ce jugement du 14 mai 2019 en tant qu'il n'a pas entièrement fait droit à s...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... C... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales, auxquelles il a été assujetti au titre des années 2010 et 2011.

Par un jugement n° 1702406 du 14 mai 2019, le tribunal administratif de Strasbourg a partiellement fait droit à la demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 22 juillet 2019, M. C..., représenté par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 14 mai 2019 en tant qu'il n'a pas entièrement fait droit à sa demande ;

2°) de prononcer la décharge des impositions restées à sa charge ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- les propositions de rectification des 9 décembre 2013 et 2 avril 2014 sont insuffisamment motivées dès lors qu'elles n'indiquent pas précisément la nature des dépenses passées en charge par la société Sorim qui ont été rejetées par le service ;

- il apporte la preuve que l'intégralité des charges en litige a été exposée dans le seul intérêt de la société Sorim ;

- le service n'a pas remis en cause les charges afférentes aux frais de déplacement de son frère qui travaillait dans la même société ;

- dans sa décision de rejet de la réclamation contentieuse, l'administration reconnaît que des éléments produits dans la réclamation n'ont pas été examinés lors de la vérification de comptabilité de la société ;

- il incombait à l'administration, dans le cadre de l'instruction de la réclamation contentieuse, de prendre en compte ces documents et d'indiquer pour quelles raisons ils ne permettaient pas de justifier que les dépenses avaient été exposées dans l'intérêt de la société ;

- c'est à tort que les premiers juges ont écarté comme inopérant le moyen tiré de ce que le caractère professionnel des indemnités kilométriques en litige a été reconnu par l'union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales (URSSAF) lors de son contrôle.

Par un mémoire en défense, enregistré le 4 février 2020, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. C... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme B...,

- et les conclusions de Mme Haudier, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. C... était le gérant de l'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée (EURL) Sorim, laquelle a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er janvier 2009 au 31 décembre 2011. Par une proposition de rectification du 11 juin 2013, établie selon la procédure de rectification contradictoire, le service a soumis cette entreprise à des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période vérifiée et des cotisations supplémentaires d 'impôt sur les sociétés résultant, notamment, de la réintégration, dans son résultat imposable, de charges considérées comme injustifiées ou non exposées dans l'intérêt de l'entreprise ainsi que des indemnités kilométriques versées à M. C... au titre des années 2010 et 2011. Parallèlement à ce contrôle, le service a procédé à un examen de la situation fiscale personnelle de M. et Mme C..., portant sur la même période. Au terme de ce contrôle, par deux propositions de rectification des 9 décembre 2013 et 2 avril 2014, établies selon la procédure de rectification contradictoire, l'administration a notifié aux contribuables des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales au titre des années 2010 et 2011, après avoir considéré que les charges susmentionnées, réintégrées dans le résultat imposable l'EURL Sorim, constituaient des revenus distribués, imposables entre leurs mains, sur le fondement des dispositions du c) de l'article 111 du code général des impôts. La réclamation présentée le 22 octobre 2015 par M. C... a été rejetée par l'administration par une décision du 9 mars 2017. M. C... relève appel du jugement du 14 mai 2019 en tant que le tribunal administratif de Strasbourg n'a pas entièrement fait droit à sa demande tendant à la décharge de ces impositions.

Sur la régularité du jugement :

2. Le requérant soutient que, s'agissant de la déductibilité des indemnités kilométriques qui lui avaient été allouées, c'est à tort que les premiers juges ont estimé que le moyen tiré de ce que le caractère professionnel desdites indemnités en litige a été reconnu par l'union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales (URSSAF) du Haut-Rhin était inopérant. Toutefois, les erreurs de droit éventuellement commises par les premiers juges sont sans incidence sur la régularité du jugement et seraient uniquement de nature à en entacher le bien-fondé. Par ailleurs, si le défaut de réponse à un moyen entache la régularité du jugement, il est constant que le tribunal administratif a effectivement répondu à ce moyen au fond. Par suite, à supposer même que le requérant ait entendu contester la régularité du jugement attaqué, ces moyens ne peuvent qu'être écartés.

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

3. En premier lieu, aux termes des dispositions de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation (...) ". Aux termes de l'article R. 57-1 du même livre : " La proposition de rectification prévue par l'article L. 57 fait connaître au contribuable la nature et les motifs de la rectification envisagée. L'administration invite, en même temps, le contribuable à faire parvenir son acceptation ou ses observations dans un délai de trente jours à compter de la réception de la proposition, prorogé, le cas échéant, dans les conditions prévues au deuxième alinéa de cet article ". Il résulte de ces dispositions que, pour être régulière, une proposition de rectification doit comporter la désignation de l'impôt concerné, de l'année d'imposition et de la base d'imposition, et énoncer les motifs sur lesquels l'administration entend se fonder pour justifier les rectifications envisagées, de façon à permettre au contribuable de formuler utilement ses observations. En revanche, sa régularité ne dépend pas du bien-fondé de ces motifs.

4. Il résulte de l'instruction que les propositions de rectification des 9 décembre 2013 et 2 avril 2014 comportent la désignation des impôts concernés, des années d'imposition et de la base d'imposition. Contrairement à ce qu'affirme le requérant dans sa requête d'appel, elles mentionnent, de manière suffisamment précise, la nature des dépenses en litige ainsi que les motifs sur lesquels l'administration a entendu se fonder pour justifier les rectifications envisagées, de façon à permettre au contribuable de formuler utilement ses observations. En outre, et comme le relève l'administration en défense, était jointe à la proposition de rectification du 2 avril 2014, la proposition de rectification du 11 juin 2013, adressée à l'EURL Sorim, dont le requérant était le gérant, laquelle présente explicitement le détail des charges rejetées dans des tableaux annexés. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisante motivation en droit et en fait des propositions de rectification précitées ne peut qu'être écarté comme manquant en fait.

5. En deuxième lieu, les vices affectant la décision de rejet de la réclamation contentieuse sont sans influence sur la légalité des décisions d'imposition. Ainsi, le moyen tiré de ce que, dans sa décision de rejet de la réclamation contentieuse prise le 9 mars 2017, l'administration n'aurait pas procédé à une instruction suffisante de ladite réclamation ou encore aurait reconnu que certains documents n'auraient pas été examinés par le service vérificateur lors du contrôle de la société Sorim, ce qui au demeurant manque en fait, est en tout état de cause inopérant.

Sur le bien-fondé de l'imposition :

6. En vertu du 3 de l'article 158 du code général des impôts, sont notamment imposables à l'impôt sur le revenu, dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, les revenus considérés comme distribués en application des articles 109 et suivants du même code. Aux termes de l'article 111 de ce code : " Sont notamment considérés comme revenus distribués : / (...) / c. Les rémunérations et avantages occultes ; / (...) ". Aux termes de l'article 54 bis du code général des impôts : " Les contribuables visés à l'article 53 A (...) doivent obligatoirement inscrire en comptabilité, sous une forme explicite, la nature et la valeur des avantages en nature accordés à leur personnel ". Il résulte de ces dispositions que doivent être imposées comme avantages occultes mentionnés au c de l'article 111 précité les dépenses effectivement exposées et concourant au financement d'un avantage en nature qui n'a pas été explicitement inscrit en comptabilité, en méconnaissance des dispositions de l'article 54 bis du même code.

En ce qui concerne les dépenses de frais de voyage et de fournitures administratives :

7. Il résulte de l'instruction que l'administration a remis en cause d'une part, à hauteur de 9 778 euros au titre de l'année 2010 et de 21 386 euros au titre de l'année 2011, la déductibilité de certaines dépenses relatives à des frais de voyage inscrites au compte 625101 de la société Sorim et d'autre part, à hauteur de 5 524 euros pour 2011, des dépenses concernant des fournitures administratives, inscrites au compte 6064 de cette société comme exposées par son gérant, M. C..., au motif que la réalité de ces charges n'était pas justifiée et qu'il n'était pas établi qu'elles avaient été engagées dans l'intérêt de l'entreprise. L'administration a également relevé que ces frais n'avaient pas été explicitement inscrits en comptabilité comme un avantage en nature versé à M. C... conformément aux dispositions de l'article 54 bis du code général des impôts. En outre, la société Sorim n'a apporté aucun élément complémentaire à la demande de renseignements émise par l'administration le 26 mars 2013 et n'a formulé aucune observation consécutivement à l'envoi de la proposition de rectification du 11 juin 2013.

8. Pour imposer entre les mains de M. et Mme C... les sommes réintégrées au résultat imposable de la société Sorim sur le fondement du c) de l'article 111 du code général des impôts, le service a relevé qu'en l'absence d'observations de la société concernant les rectifications indiquées dans la proposition de rectification du 11 juin 2013 entraînant les distributions faisant l'objet de la proposition de rectification du 9 décembre 2013, ces rectifications doivent être considérées comme acceptées. Elle rappelle que plusieurs dépenses ont été considérées comme injustifiées ou non engagées dans l'intérêt de la société SORIM et qu'au cours du contrôle de cette dernière, il a été constaté que son organisation comptable ne permettait pas de justifier la nature et le caractère professionnel de ces dépenses. Pour remettre en cause cette appréciation, M. C... se borne à produire, par " des notes plus lisibles et plus exhaustives ", les mêmes documents que ceux qu'il avait déjà communiqués au vérificateur lors du contrôle et en première instance devant le tribunal administratif de Strasbourg, consistant en des " notes de frais " mensuelles, des tickets de caisse ou de paiement par carte bancaire, ainsi que des relevés de comptes bancaires, comportant diverses annotations manuscrites relatives au client invité ou rencontré. Toutefois, ces documents, dont certains demeurent illisibles, ne sont pas de nature à établir, compte tenu de leur imprécision, la réalité et le caractère professionnel des dépenses précitées. La circonstance que le service n'aurait pas remis en cause les charges afférentes aux frais de déplacement de son frère qui travaillait dans la même société pendant les années en litige est inopérante. Dans ces conditions, c'est à bon droit que, sur le fondement du c) de l'article 111 du code général des impôts, l'administration a imposé entre les mains de M. et Mme C..., qui n'en contestent pas l'appréhension, les sommes en litige dans la catégorie des revenus mobiliers.

En ce qui concerne les indemnités kilométriques :

9. Il résulte de l'instruction que l'administration a remis en cause, s'agissant du résultat imposable de l'Eurl Sorim, la déductibilité des indemnités kilométriques allouées au requérant, d'un montant de 27 570 euros pour l 'année 2010 et de 20 001 euros pour l'année 2011 et a imposé ces sommes entre les mains de M. et Mme C... sur le fondement du c) de l'article 111 du code général des impôts. Le service a ainsi relevé les incohérences existant entre le montant des frais déclarés par l'entreprise et le kilométrage réellement parcouru par le véhicule que M. C... a déclaré utiliser, tel que cela ressort du certificat d'immatriculation produit et des " carnets de route " établis, lesquels ne présentent aucune précision sur le lieu et le motif des déplacements. L'administration a également relevé que le barème kilométrique appliqué par la société Sorim n'avait pas été communiqué au service vérificateur et que les frais en litige n'avaient pas été explicitement inscrits en comptabilité comme un avantage en nature versé à M. C... conformément aux dispositions de l'article 54 bis du code général des impôts.

10. Pour contester cette appréciation, le requérant persiste à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont considéré comme inopérant le moyen tiré de ce que le caractère professionnel des indemnités kilométriques en litige a été reconnu par l'union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales (URSSAF) du Haut-Rhin dans une lettre d'observations du 29 mai 2012. Mais, en tout état de cause, et comme cela est indiqué dans le jugement attaqué, ce document ne permet pas en l'espèce d'établir la réalité de la distance parcourue et le caractère professionnel des indemnités kilométriques en litige. Dans ces conditions, c'est à bon droit, que sur le fondement du c) de l'article 111 du code général des impôts, l'administration a imposé entre les mains de M. et Mme C..., qui n'en contestent pas non plus l'appréhension, les sommes en litige dans la catégorie des revenus mobiliers.

11. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg n'a pas entièrement fait droit à sa demande.

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2: Le présent arrêt sera notifié à M. D... C... et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

2

N° 19NC02314


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 19NC02314
Date de la décision : 01/07/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Analyses

19-04-02-03-01-01-02 Contributions et taxes. - Impôts sur les revenus et bénéfices. - Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. - Revenus des capitaux mobiliers et assimilables. - Revenus distribués. - Notion de revenus distribués. - Imposition personnelle du bénéficiaire.


Composition du Tribunal
Président : M. MARTINEZ
Rapporteur ?: Mme Laurence STENGER
Rapporteur public ?: Mme HAUDIER
Avocat(s) : JUDICIA CONSEILS

Origine de la décision
Date de l'import : 10/07/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2021-07-01;19nc02314 ?
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