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22/06/2021 | FRANCE | N°21NC00086

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3eme chambre - formation a 3, 22 juin 2021, 21NC00086


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 9 septembre 2020 du préfet de la Moselle en tant qu'il lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an.

Par un jugement no 2005601 du 29 septembre 2020, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 12 janvier 2021, M. C... A..., représenté par Me B..., demande à la cour :

1°) d'an

nuler ce jugement du tribunal administratif du 29 septembre 2020 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 9 sept...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 9 septembre 2020 du préfet de la Moselle en tant qu'il lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an.

Par un jugement no 2005601 du 29 septembre 2020, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 12 janvier 2021, M. C... A..., représenté par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif du 29 septembre 2020 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 9 septembre 2020 du préfet de la Moselle en tant qu'il lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Moselle de lui délivrer un titre de séjour ou à défaut de réexaminer sa situation administrative et, dans cette attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans les délais respectivement d'un mois et de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser à son conseil, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- la décision contestée est insuffisamment motivée ;

- le préfet n'a pas pris en compte les circonstances humanitaires tenant à sa situation ;

- la décision contestée méconnait l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- elle méconnait l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

Par un mémoire en défense, enregistré le 25 mai 2020, le préfet de la Moselle conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 15 décembre 2020.

Les parties ont été informées le 25 mai 2021, en application des dispositions de l'article R. 6117 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur le moyen relevé d'office tiré de l'irrecevabilité du moyen tiré de l'insuffisance de motivation soulevé par l'appelant qui relève d'une cause juridique nouvelle en appel.

Le préfet de la Moselle a présenté des observations le 26 mai 2021.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant, signée à New-York le 26 janvier 1990 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

M. A... a produit un mémoire enregistré le 29 mai 2021, postérieurement à la clôture d'instruction.

La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. D... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant albanais, est entré en France, selon ses déclarations, en 2017, pour solliciter la reconnaissance du statut de réfugié. Sa demande d'asile a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides et la Cour nationale du droit d'asile. Le 26 février 2019, il a sollicité la délivrance d'un titre de séjour en invoquant l'état de santé de son enfant mineur. Par un arrêté du 14 février 2020, le préfet de la Moselle a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit. Par une ordonnance du 5 mars 2021, la cour administrative d'appel de Nancy a confirmé le jugement du 7 août 2020, par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté. Par un arrêté du 9 septembre 2020, le préfet de la Moselle a assigné à résidence M. A... et lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an. M. A... fait appel du jugement du 29 septembre 2020 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté son recours tendant à l'annulation de la décision portant interdiction de retour sur le territoire français.

Sur le bien-fondé du jugement :

2. En premier lieu, M. A... soulève pour la première fois en appel le moyen tiré de l'insuffisante motivation de la décision portant interdiction de retour sur le territoire français. Il ressort de la demande de première instance enregistrée au greffe du tribunal administratif que l'intéressé s'était borné à soulever des moyens de légalité interne. Par suite, ce moyen de légalité externe, fondé sur une cause juridique distincte nouvelle en appel, qui n'est pas d'ordre public, doit être écarté comme irrecevable.

3. En deuxième lieu, aux termes des sixième et huitième alinéas du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsque l'étranger ne faisant pas l'objet d'une interdiction de retour s'est maintenu irrégulièrement sur le territoire au-delà du délai de départ volontaire, l'autorité administrative prononce une interdiction de retour pour une durée maximale de deux ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français. Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative ne prononce pas d'interdiction de retour. (...) / La durée de l'interdiction de retour mentionnée aux premier, sixième et septième alinéas du présent III ainsi que le prononcé et la durée de l'interdiction de retour mentionnée au quatrième alinéa sont décidés par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français ".

4. Si M. A... se prévaut de l'état de santé de sa fille aînée, souffrant de troubles du spectre autistiques, de la durée de sa présence en France et de ses efforts d'insertion, il ne conteste pas avoir fait l'objet d'une mesure d'éloignement qu'il n'a pas exécutée et ne justifie pas avoir tissé des liens particuliers et intenses en France où il réside depuis moins de trois ans à la date de la décision en litige. Les circonstances, notamment l'état de santé de son enfant, dont il se prévaut ne caractérisent pas des circonstances humanitaires faisant obstacle à l'édiction d'une telle décision. Dans ces conditions, le préfet de la Moselle n'a commis aucune erreur d'appréciation dans l'application des dispositions du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en prononçant une interdiction de retour d'un an à l'encontre de M. A....

5. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bienêtre économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

6. Il est constant que l'épouse de M. A... fait l'objet d'une mesure d'éloignement. L'intéressé, présent en France depuis trois ans seulement à la date de la décision en litige, ne fait état d'aucune circonstance qui s'opposerait à ce qu'il reconstitue sa cellule familiale dans son pays d'origine, ni à ce que l'aîné de ses enfants y poursuive sa scolarité. Il ne ressort d'aucune pièce du dossier que le cadet, âgé de deux ans à la date de la décision en litige, ne pourrait pas s'intégrer en Albanie. Enfin, en se bornant à soutenir que la maladie de son enfant, atteint de troubles du spectre autistique, n'a pas été décelée en Albanie, le requérant n'établit pas, alors que le diagnostic est désormais posé, qu'il ne pourrait pas y bénéficier des soins que requiert son état de santé. Dans ces conditions, M. A... n'est pas fondé à soutenir que le préfet de la Moselle aurait méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en lui interdisant le retour sur le territoire français pour une durée d'un an.

7. En quatrième lieu, pour les mêmes motifs que ceux mentionnés au point 6, le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation doit être écarté.

8. En dernier lieu, aux termes de l'article 31 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant du 26 janvier 1990 : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". Il résulte de ces stipulations que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant.

9. Il n'est pas établi que M. A... ne pourrait pas reconstituer la cellule familiale dans son pays d'origine avec ses enfants, dès lors que son épouse fait également l'objet d'une obligation de quitter le territoire français. En outre, il n'établit pas, par la seule production de certificats médicaux et des décisions de la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées, que l'aîné de ses enfants ne pourrait pas être soigné en Albanie et y suivre une scolarité normale. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des articles 31 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doit être écarté.

10. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, les conclusions présentées par le requérant à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent qu'être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée pour information au préfet de la Moselle.

N° 21NC00086 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3eme chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 21NC00086
Date de la décision : 22/06/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Exces de pouvoir

Analyses

335-01-03-01 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour. Questions générales.


Composition du Tribunal
Président : Mme VIDAL
Rapporteur ?: M. Stephane BARTEAUX
Rapporteur public ?: Mme SEIBT
Avocat(s) : CISSE

Origine de la décision
Date de l'import : 29/06/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2021-06-22;21nc00086 ?
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