Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme E... D... a demandé au tribunal administratif de
Châlons-en-Champagne d'annuler les décisions du 28 août 2017 par lesquelles la rectrice de l'académie de Reims a prononcé sa mutation d'office dans l'intérêt du service et l'a affectée au collège Eva-Thomé d'Attigny à compter du 1er septembre 2017, ainsi que la décision de rejet née du silence gardé par le ministre de l'éducation nationale sur son recours hiérarchique du 28 octobre 2017.
Par un jugement n° 1800446 du 17 décembre 2019, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 19 février 2020 et 8 avril 2021, Mme E... D..., représentée par Me C..., demande à la cour :
1°) d'annuler ou, subsidiairement, réformer le jugement n° 1800446 du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne du 17 décembre 2019 ;
2°) d'annuler les décisions contestées ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le tribunal a insuffisamment motivé son jugement en ne répondant pas à l'intégralité de son argumentation relative aux vices entachant l'avis émis par la commission administrative paritaire, en dénaturant son moyen tiré du défaut d'information des membres de cette commission au sujet des caractéristiques de son poste d'affectation, et en omettant de répondre à ses moyens tirés de la méconnaissance de l'article 6 quinquies de la loi du 13 juillet 1983, de l'erreur de fait et de l'erreur manifeste d'appréciation, du détournement de pouvoir et du détournement de procédure ;
- sa demande dirigée contre le courrier du 28 août 2017 a été présentée dans le délai de recours contentieux devant le tribunal ;
- la décision, qui constitue une sanction déguisée, est entachée d'un défaut de motivation ;
- elle a été prise à l'issue d'une procédure viciée : alors qu'elle constitue une sanction déguisée, elle n'a pas été précédée de la communication de son dossier ; la commission administrative paritaire n'a pas été régulièrement convoquée, ses membres ne disposaient pas de tous les éléments leur permettant de se prononcer, et elle ne s'est pas prononcée dans des conditions régulières ; le poste sur lequel elle a été affectée n'a fait l'objet d'aucune déclaration de vacance, en méconnaissance de l'article 61 de la loi du 11 janvier 1984 ;
- elle a été prise en méconnaissance de l'article 6 quinquies de la loi du 13 juillet 1983 ;
- elle est entachée d'erreur de fait et d'appréciation, et n'est pas motivée par l'intérêt du service ;
- elle est entachée de détournement de procédure et de détournement de pouvoir.
Par un mémoire en défense, enregistré le 28 juillet 2020, la rectrice de l'académie de Reims conclut au rejet de la requête.
Elle soutient que la requête est irrecevable dès lors que les conclusions dirigées contre le courrier du 28 août 2017 sont tardives et que, pour le reste, aucun des moyens soulevés par la requérante n'est fondé.
Par ordonnance du 8 avril 2021, l'instruction a été close le 23 avril 2021.
Le 28 mai 2021, Mme D... a déposé un mémoire, qui n'a pas été communiqué.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;
- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat ;
- le décret n° 82-451 du 28 mai 1982 relatif aux commissions administratives paritaires ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. B...,
- les conclusions de Mme Seibt, rapporteure publique,
- et les observations de Me C... pour Mme D....
Une note en délibéré, présentée par Me A... pour Mme D..., a été enregistrée le 18 juin 2021.
Une note en délibéré, présentée par Mme D..., a été enregistrée le 21 juin 2021.
Considérant ce qui suit :
1. Par un arrêté du 28 août 2017, la rectrice de l'académie de Reims a procédé à la mutation d'office de Mme D..., professeure certifiée de documentation, alors affectée au collège de Grandpré-Buzancy, au collège Eva Thomé d'Attigny à compter du 1er septembre 2017. Mme D... a demandé au tribunal administratif de
Châlons-en-Champagne d'annuler cet arrêté, ainsi que la décision implicite née du silence gardé par le ministre de l'éducation nationale sur son recours hiérarchique du 28 octobre 2017. Elle relève appel du jugement du 17 décembre 2019 par lequel le tribunal a rejeté sa demande.
Sur la recevabilité de la requête :
2. La rectrice fait valoir que, seul l'arrêté du 28 août 2017 ayant fait l'objet du recours hiérarchique le 28 octobre 2017, le délai de recours contentieux n'a pas été conservé en ce qui concerne la lettre de la même date accompagnant cet arrêté. Toutefois, l'irrecevabilité partielle, ainsi alléguée, de la demande présentée devant le tribunal, est sans incidence sur la recevabilité de la présente requête d'appel.
3. Au surplus, la lettre du 28 août 2017, qui ne comporte aucune décision distincte de la décision contenue dans l'arrêté du même jour, prononçant la mutation d'office de Mme D... au collège Eva Thomé d'Attigny à compter du 1er septembre 2017, constitue un simple courrier d'accompagnement de cet arrêté.
Sur la régularité du jugement :
4. Aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ".
5. Il ressort des pièces du dossier que, devant les premiers juges, Mme D... a notamment fait valoir que les décisions contestées ont été prises en méconnaissance de l'article 6 quinquies de la loi du 13 juillet 1983 et sont entachées d'une erreur manifeste d'appréciation, d'un détournement de pouvoir et d'un détournement de procédure. Or, le tribunal n'a pas répondu expressément à ces moyens, qui ne sont pas inopérants, et il ne les a d'ailleurs même pas visés. En outre, ces moyens étant distincts de celui tiré de ce que les décisions contestées ont le caractère d'une sanction déguisée, la rectrice ne peut pas utilement soutenir que le tribunal y aurait répondu en se prononçant sur ce dernier.
6. Par suite, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens qu'elle soulève à ce titre, Mme D... est fondée à soutenir que le jugement attaqué est insuffisamment motivé. Par suite, il doit être annulé.
7. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par Mme D... devant le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne.
Sur la légalité de la décision du 28 août 2017 :
En ce qui concerne le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de la décision :
8. Il ressort des pièces du dossier que la décision contestée est au nombre de celles pour lesquelles M. Philippe, secrétaire général d'académie, en vertu d'un arrêté du 17 juillet 2017 régulièrement publié le 31 juillet suivant au recueil des actes administratifs de la préfecture de la région Grand Est, bénéficiait d'une délégation de signature de la part de la rectrice de l'académie de Reims. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté en litige doit être écarté.
En ce qui concerne les moyens tirés du défaut de motivation de la décision, du défaut de communication préalable du dossier individuel et du défaut de procédure contradictoire préalable :
9. Mme D... soutient que la décision contestée ne constitue pas une mutation dans l'intérêt du service, mais une sanction déguisée, à ce titre soumise à l'obligation de motivation en vertu de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration, et préalablement à laquelle elle aurait dû être mise à même de consulter son dossier en application de l'article 65 de la loi du 22 avril 1905, et de présenter des observations.
10. Selon les énonciations de l'arrêté en litige et de son courrier d'accompagnement, la décision contestée a été prise en raison du climat conflictuel régnant au sein du collège de Grandpré-Buzancy et des dysfonctionnements y affectant l'organisation du service et la communauté éducative, et compte tenu du rapport établi le 9 juin 2017 par la mission d'enquête académique diligentée par la rectrice à la suite d'un signalement de danger grave et imminent par Mme D..., lequel conclut, en cas de retour de cette dernière dans son emploi, à l'existence d'un risque pour sa santé et sa sécurité ainsi que celles de plusieurs autres agents de l'établissement. Cette poursuite de l'intérêt du service est corroborée par le procès-verbal de la séance de la commission administrative paritaire académique compétente à l'égard des professeurs certifiés et des adjoints d'enseignement du 25 août 2017, dont il ressort que la mutation contestée a pour objectif de permettre à Mme D... de reprendre son métier dans un lieu neutre qui lui permettra de participer au projet de son nouvel établissement, et de protéger les autres personnels du collège de Grandpré-Buzancy. S'il est vrai que, par ailleurs, l'administration impute cette situation au comportement de Mme D..., le même procès-verbal fait expressément état de sa volonté d'examiner séparément ce comportement dans le cadre de la procédure disciplinaire en cours d'instruction, et il ne ressort d'aucune autre pièce du dossier qu'il aurait néanmoins été pris en considération pour fonder la décision contestée. Il ressort ainsi des pièces du dossier que la décision contestée a été prise dans l'intérêt du service, et qu'elle est exempte de toute intention de sanctionner la requérante. Dès lors, à supposer même qu'elle ait porté atteinte à sa situation professionnelle, cette décision n'a pas le caractère d'une sanction déguisée. Par suite, les moyens de Mme D... tirés du défaut de motivation de la décision contestée, de l'absence de procédure contradictoire et de communication préalables de son dossier ne peuvent qu'être écartés comme inopérants.
11. Au surplus, la décision contestée comporte un énoncé suffisant des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement, Mme D... a été régulièrement informée de son droit à consultation de son dossier par un courrier du 10 juillet 2017 lui faisant part de la mesure de mutation d'office envisagée et elle a pu présenter ses observations à ce sujet lors d'un entretien avec le directeur académique des services de l'éducation nationale le 23 août 2017, ainsi que dans un courrier du 24 août 2017, dans lequel, du reste, elle exprime son accord pour cette mutation et son souhait, en définitive exaucé, d'être affectée dans un collège rural de petite taille et de préférence dans le département des Ardennes.
En ce qui concerne le moyen tiré de l'irrégularité de l'avis de la commission administrative paritaire :
12. Aux termes de l'article 60 de la loi du 11 janvier 1984 susvisée : " L'autorité compétente procède aux mouvements des fonctionnaires après avis des commissions administratives paritaires. (...) ". Aux termes de l'article 39 du décret du 28 mai 1982 susvisé : " Toutes facilités doivent être données aux commissions administratives paritaires par les administrations pour leur permettre de remplir leurs attributions. En outre, communication doit leur être donnée de toutes pièces et documents nécessaires à l'accomplissement de leur mission huit jours au moins avant la date de la séance. (...) ".
13. Il ressort des pièces du dossier que la commission administrative paritaire académique compétente à l'égard des professeurs certifiés et des adjoints d'enseignement s'est réunie le 25 août 2017 pour se prononcer dans le cadre de la procédure de mutation dans l'intérêt du service de Mme D..., et a émis un avis favorable.
14. En premier lieu, si Mme D... soutient que la commission n'était pas régulièrement composée, elle n'assortit cette allégation d'aucune précision permettant d'en apprécier le bien-fondé.
15. En deuxième lieu, les membres de la commission ont été informés de sa réunion du 25 août 2017, par un courrier 13 juillet 2017 précisant les conditions de consultation du dossier de l'intéressée et leur indiquant que l'ordre du jour de la séance leur serait ultérieurement adressé par courrier électronique. Ces courriers électroniques leur ont été adressés le 17 août 2017, soit huit jours avant la date de la séance, accompagnés d'une convocation et d'un ordre du jour. S'il est constant que seuls sept des membres de la commission ont pris connaissance du dossier individuel de Mme D... avant la séance, il n'est pas établi que les autres auraient été empêchés de le faire. En outre, le procès-verbal de la séance du 25 août 2017 ne fait état d'aucune plainte ou observation au sujet des informations préalablement fournies aux membres de la commission, et il en ressort que la situation de l'intéressée a été discutée de manière précise et circonstanciée. Dans ces conditions, il ne ressort pas des pièces du dossier que les éléments communiqués à ces derniers huit jours au moins avant la séance étaient insuffisants pour leur permettre d'accomplir leur mission.
16. En troisième lieu, il ressort des pièces du dossier qu'à la date de la séance de la commission, aucun poste de professeur certifié de documentation n'était vacant dans l'académie. Dans ces conditions, et eu égard à la nature et à la finalité de la mutation en litige, qui était nécessaire dans l'intérêt du service en dépit de l'absence de vacance préalable d'un poste, la circonstance que les membres de la commission n'ont pas été préalablement informés des caractéristiques du poste d'affectation de Mme D... ne saurait avoir d'incidence sur la régularité de son avis. Au surplus, il ressort du procès-verbal de la séance du 25 août 2017 que les membres de la commission n'ont pas négligé ce point, puisqu'ils ont évoqué l'absence de poste vacant et les perspectives d'affectation de l'intéressée, en particulier compte tenu de son souhait d'être affectée dans un collège rural de petite taille et de préférence dans le département des Ardennes.
17. En quatrième lieu, si Mme D... soutient que, selon deux des membres de la commission, cette dernière n'aurait procédé à aucun vote à l'issue de sa séance, elle n'apporte aucun élément concret à l'appui de cette allégation, alors qu'il ressort, au contraire, des énonciations du procès-verbal de la séance du 25 août 2017 que les 24 membres présents se sont prononcés, à l'unanimité, en faveur de sa mutation dans l'intérêt du service.
En ce qui concerne le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 61 de la loi du 11 janvier 1984 :
18. Aux termes de l'article 61 de la loi du 11 janvier 1984 susvisée : " Les autorités compétentes sont tenues de faire connaître au personnel, dès qu'elles ont lieu, les vacances de tous emplois, sans préjudice des obligations spéciales imposées en matière de publicité par la législation sur les emplois réservés ".
19. Ces dispositions ne s'imposent pas à l'administration dans le cas où elle prononce une mutation dans l'intérêt du service. Par suite, le moyen tiré de leur méconnaissance ne peut être utilement invoqué à l'encontre de la décision contestée.
En ce qui concerne le moyen tiré de l'erreur de fait :
20. Mme D... soutient qu'il n'est pas établi que la situation conflictuelle qui régnait alors au collège de Grandpré-Buzancy soit imputable à son comportement.
21. Ainsi qu'il a été dit au point 10, la décision contestée a été prise en vue de remédier au climat conflictuel régnant au sein du collège de Grandpré-Buzancy et aux dysfonctionnements y affectant l'organisation du service et la communauté éducative, dont la requérante ne discute pas la réalité. En revanche, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'elle ait également été prise au motif que Mme D... serait responsable de la situation régnant dans l'établissement. L'erreur de fait alléguée par la requérante étant ainsi étrangère aux motifs de la décision, elle ne peut qu'être sans incidence sur sa légalité.
En ce qui concerne le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 6 quinquies de la loi du 13 juillet 1983 :
22. Aux termes de l'article 6 quinquies de la loi du 13 juillet 1983 susvisée : " Aucun fonctionnaire ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. Aucune mesure concernant notamment le recrutement, la titularisation, la formation, la notation, la discipline, la promotion, l'affectation et la mutation ne peut être prise à l'égard d'un fonctionnaire en prenant en considération : / 1° Le fait qu'il ait subi ou refusé de subir les agissements de harcèlement moral visés au premier alinéa ; / 2° Le fait qu'il ait exercé un recours auprès d'un supérieur hiérarchique ou engagé une action en justice visant à faire cesser ces agissements ; / 3° Ou bien le fait qu'il ait témoigné de tels agissements ou qu'il les ait relatés. / Est passible d'une sanction disciplinaire tout agent ayant procédé ou ayant enjoint de procéder aux agissements définis ci-dessus. (...) ".
23. Mme D... soutient que la décision contestée a été prise dans le but de l'évincer de son établissement alors qu'elle avait dénoncé des agissements de harcèlement moral qu'elle y aurait subis, et qu'elle a entraîné une dégradation de sa situation professionnelle et de son état de santé.
24. Toutefois, les dispositions précitées ne font pas obstacle, par elles-mêmes et du seul fait qu'il a dénoncé des agissements de harcèlement moral dont il serait la victime, à ce qu'un agent fasse l'objet d'une mutation d'office dans l'intérêt du service. Par ailleurs, ainsi qu'il a été dit au point 10, la décision en litige a été prise dans l'intérêt du service, indépendamment de toute considération relative au comportement de Mme D.... En particulier, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'elle a, en outre, été prise en considération de la dénonciation, par Mme D..., des agissements de harcèlement moral dont elle allègue avoir été la victime. Enfin, une mutation d'office légalement justifiée par l'intérêt du service ne saurait constituer un agissement de harcèlement moral au sens des dispositions précitées.
En ce qui concerne le moyen tiré de l'erreur commise dans l'appréciation de l'intérêt du service :
25. Mme D... soutient que la rectrice s'est livrée à une appréciation erronée de l'intérêt du service en lui imposant de quitter son collège, alors que la situation conflictuelle qui y régnait ne lui était pas imputable mais résultait des agissements de la principale de l'établissement qui, avec le soutien de onze autres agents, lui avait fait subir un harcèlement moral, et que son retour n'aurait pas affecté le bon fonctionnement du service.
26. Le rapport, établi le 9 juin 2017, par la mission d'enquête académique diligentée par la rectrice à la suite d'un signalement de danger grave et imminent effectué par Mme D..., au vu duquel la décision contestée a été prise, relève qu'il serait impossible à l'intéressée de reprendre son travail au collège, compte tenu de sa perception subjective d'une situation de danger résultant de la présence de deux agents, la principale du collège et la conseillère principale d'éducation, qu'elle identifie comme auteur et complice, respectivement, du harcèlement moral dont elle se dit la victime. Toutefois, ce même rapport relève également la souffrance et le mal-être des sept autres agents entendus par la mission, en lien notamment avec la présence de Mme D..., et il souligne que quatre d'entre eux ne souhaitent plus travailler avec elle et craignent pour leur santé ou leur sécurité si elle revenait dans l'établissement. C'est au vu de ces deux séries de constats, qui ne concernent pas que les relations entre Mme D... et la direction du collège, mais également ses relations avec les agents de l'établissement, que les auteurs du rapport indiquent que la reprise de fonction de cette dernière " semble incompatible avec un fonctionnement serein du collège ".
27. Par ailleurs, ce rapport ne se prononce que sur la perception subjective du harcèlement moral par Mme D..., et non sur sa réalité, que cette dernière reproche à la rectrice d'avoir ignorée. Or, la réalité du harcèlement moral allégué par Mme D... est expressément écartée par la première mission d'enquête académique dans son rapport établi le 14 octobre 2016. Elle y relève que les nombreux faits dénoncés par la requérante ont toujours été consécutifs à des agissements excessifs ou à des demandes répétées ou comminatoires de sa part. Il en ressort que le comportement de Mme D... est particulièrement inapproprié, tant vis-à-vis de ses collègues qu'envers sa hiérarchie. Il en ressort également qu'en dépit de quelques maladresses ponctuelles devant être regardées comme résultant du climat particulièrement tendu créé et entretenu par l'intéressée, le comportement et les décisions de la principale en réaction aux agissements de cette dernière ont, dans leur ensemble été mesurés et justifiés par des considérations étrangères à tout harcèlement, et n'ont pas excédé les limites de l'exercice normal du pouvoir hiérarchique. Ces différents constats, qui résultent de l'audition des personnels enseignants et administratifs de l'établissement, et qui sont corroborés notamment par les nombreux témoignages écrits, particulièrement précis et circonstanciés, de ces mêmes personnels, ne sont remis en cause par aucune des autres pièces du dossier. Ils sont, en outre, cohérents avec ceux effectués par la mission d'enquête académique dans son rapport du 9 juin 2017, s'agissant notamment de la souffrance des autres agents de l'établissement et du refus de plusieurs d'entre eux de travailler à nouveau avec l'intéressée.
28. Dans ces conditions, la rectrice ne s'est pas livrée à une appréciation erronée de la situation et de l'intérêt du service en estimant que ce dernier commandait d'éloigner Mme D... du collège de Grandpré-Buzancy.
En ce qui concerne les moyens tirés du détournement de pouvoir et du détournement de procédure :
29. La décision contestée étant, ainsi qu'il vient d'être dit, justifiée par l'intérêt du service, les moyens tirés du détournement de procédure et du détournement de pouvoir ne peuvent qu'être écartés.
30. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité de la demande présentée devant le tribunal, que les conclusions de Mme D... tendant à l'annulation de la décision du 28 août 2017 ne peuvent qu'être rejetées. Par voie de conséquence, il en va de même de ses conclusions tendant à l'annulation de la décision implicite de rejet de son recours hiérarchique, ainsi que de ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
Article 1 : Le jugement n° 1800446 du tribunal administratif de
Châlons-en-Champagne du 17 décembre 2019 est annulé.
Article 2 : Le surplus des conclusions présentées par Mme D..., tant devant le tribunal que devant la cour, est rejeté.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme E... D... et au ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports.
N° 20NC00456 4