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01/06/2021 | FRANCE | N°20NC00904

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre, 01 juin 2021, 20NC00904


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... D..., épouse B... a demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler l'arrêté du 26 août 2019 par lequel le préfet du Doubs a refusé de lui renouveler son titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle sera éloignée.

Par un jugement n°1901883 du 30 janvier 2020, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requêt

e et un mémoire, enregistrés les 9 et 15 avril 2020, Mme B..., représentée par Me C..., demande à la...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... D..., épouse B... a demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler l'arrêté du 26 août 2019 par lequel le préfet du Doubs a refusé de lui renouveler son titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle sera éloignée.

Par un jugement n°1901883 du 30 janvier 2020, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 9 et 15 avril 2020, Mme B..., représentée par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Besançon du 30 janvier 2020 ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du préfet du Doubs du 26 août 2019 ;

3°) à titre principal, d'enjoindre au préfet du Doubs de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, et dans l'attente de lui délivrer, dans le délai de cinq jours, une autorisation provisoire de séjour avec autorisation de travailler ;

4°) à titre subsidiaire, d'enjoindre au préfet du Doubs de procéder au réexamen de sa situation dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et de lui délivrer, durant cet examen, une autorisation provisoire de séjour avec autorisation de travailler dans un délai de huit jours ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil de la somme de 1 500 euros sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- le tribunal a écarté à tort le moyen tiré de la méconnaissance du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- compte tenu de son intégration et de celle de sa fille, les moyens tirés de la méconnaissance de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'erreur manifeste d'appréciation des conséquences de l'arrêté sur sa situation personnelle sont fondés ;

- le tribunal a écarté à tort le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.

Par un mémoire en défense, enregistré le 10 septembre 2020, le préfet du Doubs conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.

Mme B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 14 mai 2020.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme E..., première conseillère, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme B..., ressortissante géorgienne née en 1976, est entrée en France, selon ses déclarations, le 20 septembre 2011, accompagnée de son époux, dont elle a depuis divorcé et de ses deux enfants mineurs. Elle a présenté une demande d'asile qui a été successivement rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et la Cour nationale du droit d'asile, les 31 août 2012 et 8 avril 2013. Par un arrêté du 19 novembre 2013, le préfet du Doubs lui a refusé le séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Le 29 avril 2014, Mme B... a demandé au préfet du Doubs de lui délivrer une carte de séjour temporaire sur le fondement de l'article L. 311-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un jugement du 20 septembre 2016, le tribunal administratif de Besançon a annulé l'arrêté du 17 mars 2016 rejetant cette demande. Le préfet du Doubs lui a alors délivré une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " valable du 24 janvier 2017 au 23 janvier 2018. Le 8 décembre 2017, l'intéressée a sollicité le renouvellement de son titre de séjour. Par un arrêté du 26 août 2019 le préfet du Doubs a rejeté sa demande et l'a obligée à quitter le territoire dans un délai de trente jours en fixant le pays de renvoi. Mme B... fait appel du jugement du 30 janvier 2020 par lequel le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur le bien-fondé du jugement :

2. Aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors en vigueur : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2 ".

3. En présence d'une demande de régularisation présentée sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'autorité administrative doit d'abord vérifier si des considérations humanitaires ou des motifs exceptionnels justifient la délivrance d'une carte portant la mention "vie privée et familiale", ensuite, en cas de motifs exceptionnels, si la délivrance d'une carte de séjour temporaire portant la mention "salarié" ou "travailleur temporaire" est envisageable.

4. Il ressort des pièces du dossier qu'à la date de la décision attaquée, Mme B... séjournait en France depuis presque huit années et justifiait d'une bonne intégration par les emplois qu'elle a occupés, en contrats à durée à indéterminée, de février 2015 à février 2016 puis d'avril 2017 à avril 2019 dans une blanchisserie. Sa fille, née le 21 juin 2005, est scolarisée depuis son entrée en France en 2011 et était en classe de 4ème au collège Diderot de Besançon à la date de la décision contestée. Il ressort en particulier des attestations du corps éducatif que cette enfant est une excellente élève qui fait preuve de sérieux efforts d'intégration. Elle est par ailleurs investie dans une formation de violoniste et de danse au conservatoire. Dans ces circonstances, au regard de l'ancienneté du séjour de l'intéressée, de la scolarisation exemplaire de sa fille, et de leur bonne intégration en France, le préfet du Doubs a manifestement inexactement apprécié la situation de Mme B... en refusant de lui délivrer un titre de séjour " vie privée et familiale " sur le fondement de l'article L. 313- 14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Dès lors, Mme B... est fondée à en demander, pour ce motif, l'annulation.

5. Les décisions portant obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et fixant le pays de renvoi doivent, par voie de conséquence, être annulées.

6. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que Mme B... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa requête tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet du Doubs du 26 août 2019 portant refus d'admission au séjour, obligation de quitter le territoire français et fixation du pays de destination.

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

7. Eu égard au motif d'annulation de la décision portant refus de titre de séjour, l'exécution du jugement implique nécessairement, en application de l'article L. 911-1 du code de justice administrative, et en l'absence de changement de circonstances de droit ou de fait y faisant obstacle et ressortant des pièces du dossier, qu'il soit enjoint au préfet du Doubs de délivrer à Mme B... un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement. Dans cette attente, du fait de l'annulation par voie de conséquence de l'obligation de quitter le territoire français, le préfet délivrera immédiatement à Mme B... une autorisation provisoire de séjour sur le fondement de l'article L. 614-16 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Sur les frais liés à l'instance :

8. Il y lieu de mettre à la charge de l'Etat le versement à l'avocate de Mme B... d'une somme de 1 500 euros en application des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve qu'elle renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle.

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 1901883 du tribunal administratif de Besançon du 30 janvier 2020 et l'arrêté du préfet du Doubs du 26 août 2019 sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet du Doubs, sous réserve de changement de circonstances de droit ou de fait, de délivrer à Mme B... une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, et dans cette attente, de lui délivrer immédiatement une autorisation provisoire de séjour.

Article 3 : L'Etat versera à Me C..., avocate de Mme B..., la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve qu'elle renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... D..., épouse B... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet du Doubs.

2

N° 20NC00904


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 20NC00904
Date de la décision : 01/06/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : Mme GRENIER
Rapporteur ?: Mme Sandrine ANTONIAZZI
Rapporteur public ?: M. MICHEL
Avocat(s) : DRAVIGNY

Origine de la décision
Date de l'import : 09/07/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2021-06-01;20nc00904 ?
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