Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme D... C... a demandé au tribunal administratif de
Châlons-en-Champagne d'annuler l'arrêté du 19 octobre 2018 par lequel le préfet de l'Aube a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination elle pourra être reconduite d'office à l'expiration de ce délai.
Par un jugement n° 1901639 du 1er octobre 2019, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 29 juin 2020, Mme D... C..., représentée par Me B..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1901639 du tribunal administratif de
Châlons-en-Champagne du 1er octobre 2019 ;
2°) d'annuler l'arrêté contesté ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Aube de lui délivrer une carte de séjour temporaire dans le délai de 15 jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard, subsidiairement de réexaminer sa situation dans le même délai et sous la même astreinte, et de lui délivrer durant cet examen une autorisation provisoire de séjour ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser à son avocat en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
En ce qui concerne le refus de séjour :
- la décision est entachée d'incompétence, en l'absence d'une délégation de signature au profit de sa signataire ;
- elle est insuffisamment motivée ;
- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :
- elle est entachée d'incompétence, en l'absence d'une délégation de signature au profit de sa signataire ;
- elle est illégale du fait de l'illégalité du refus de séjour ;
En ce qui concerne la décision relative au délai de départ volontaire :
- elle est entachée d'incompétence, en l'absence d'une délégation de signature au profit de sa signataire ;
- elle n'est pas motivée, en méconnaissance des articles 7 et 12 de la directive n° 2008/115/CE du 16 décembre 2008, du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration ;
- elle est illégale du fait de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français ;
En ce qui concerne la décision relative au pays de destination :
- elle est entachée d'incompétence, en l'absence d'une délégation de signature au profit de sa signataire ;
- elle est illégale du fait de l'illégalité du refus de séjour et de l'obligation de quitter le territoire français ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.
Par un mémoire en défense, enregistré le 9 octobre 2020, le préfet de l'Aube conclut au rejet de la requête.
Il soutient qu'aucun des moyens soulevés par la requérante n'est fondé.
Mme C... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 11 mars 2020.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Le rapport de M. A... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
Sur le moyen commun à l'ensemble des décisions contestées :
1. Par un arrêté du 4 septembre 2017, publié le jour même au recueil des actes administratifs de la préfecture de l'Aube, le préfet de l'Aube a donné délégation à Mme Cendre, secrétaire générale de la préfecture, aux fins de signer toutes décisions relatives aux attributions de l'Etat dans ce département, à l'exception de certaines décisions au nombre desquelles ne figurent pas celles que conteste la requérante. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence de la signataire de l'arrêté contesté doit être écarté.
Sur les autres moyens :
En ce qui concerne les moyens dirigés contre le refus de séjour :
2. En premier lieu, l'arrêté contesté comporte un énoncé des considérations de droit et de fait constituant le fondement de la décision de refus de séjour. En particulier, il vise l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et énonce les raisons pour lesquelles le préfet a estimé que la situation de la requérante ne justifie pas qu'elle soit admise au séjour à titre exceptionnel. Par suite, et alors même que l'arrêté ne comporte pas les termes " considérations humanitaires ", le moyen tiré de son défaut de motivation ne peut qu'être écarté.
3. En deuxième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier, et ne saurait être déduit de la seule circonstance que l'arrêté ne comporte pas les termes " considérations humanitaires ", que le préfet aurait procédé à un examen tronqué de la demande d'admission exceptionnelle au séjour présentée par Mme C... sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
4. En troisième lieu, aux termes de l'article 3 de la convention relative aux droits de l'enfant : " 1. Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ".
5. Si Mme C... fait valoir que la décision de refus de séjour a pour conséquence de perturber la scolarité de ses enfants, il ne ressort pas des pièces du dossier que sa cellule familiale ne pourra pas être reconstituée au Nigéria, ni que ses enfants ne pourront pas y poursuivre leur scolarité. Dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées ne peut, en tout état de cause, qu'être écarté.
En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :
6. Il résulte de ce qui précède que la requérante n'est pas fondée à soutenir que l'obligation de quitter le territoire français est illégale du fait de l'illégalité du refus de séjour.
En ce qui concerne la décision relative au délai de départ volontaire :
7. En premier lieu, aux termes du II de l'article L. 5111 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction issue de la loi n° 2011672 du 16 juin 2011, qui a entièrement transposé la directive n° 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008, laquelle n'est ainsi plus directement invocable : " Pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, l'étranger dispose d'un délai de trente jours à compter de sa notification (...). Eu égard à la situation personnelle de l'étranger, l'autorité administrative peut accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours (...) ". Par ailleurs, aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. (...) ".
8. Si une décision de retour prévoyant un délai de départ volontaire doit être motivée, les dispositions précitées n'impliquent pas que l'autorité administrative, lorsqu'elle prend une telle décision, comme c'est le cas en l'espèce, démontre l'absence de circonstances particulières qui auraient pu, le cas échéant, justifier une prolongation de ce délai. Lorsqu'elle accorde le délai de trente jours, l'autorité administrative n'a, par suite, pas à motiver spécifiquement cette décision, à moins que l'étranger ait expressément demandé le bénéfice d'une telle prolongation ou justifie avoir informé l'autorité administrative d'éléments suffisamment précis sur sa situation personnelle susceptibles de rendre nécessaire, au sens des dispositions précitées, une telle prolongation.
9. Il ne ressort pas des pièces du dossier et n'est pas soutenu que Mme C... aurait sollicité le bénéfice d'un délai de départ volontaire supérieur à trente jours ou qu'elle ait transmis, au préfet, des éléments susceptibles de rendre nécessaire la prolongation de ce délai. Par suite, la décision par laquelle le préfet a accordé à la requérante un délai de départ volontaire de trente jours ne peut être regardée comme une décision individuelle défavorable, et le moyen tiré de son défaut de motivation ne peut qu'être écarté.
10. En second lieu, il résulte de ce qui précède que la requérante n'est pas fondée à soutenir que cette décision est illégale du fait de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français.
En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :
11. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que la requérante n'est pas fondée à soutenir que la décision fixant le pays de destination est illégale du fait de l'illégalité du refus de séjour et de l'obligation de quitter le territoire français.
12. En second lieu, Mme C... soutient qu'un renvoi dans son pays d'origine porterait atteinte à l'intérêt supérieur de ses enfants, en particulier ses deux filles, nées en 2004 et 2015, qui risqueraient de subir l'excision. Toutefois, les éléments qu'elle produit concernent pour la plupart le Mali et non le Nigéria et ceux relatifs à ce dernier sont antérieurs à la loi adoptée par ce pays en 2015, interdisant et pénalisant la pratique des mutilations sexuelles féminines. Compte tenu de cette interdiction et en l'absence d'élément plus récent relatif à cette pratique au Nigéria, il ne ressort pas des pièces du dossier que les filles de la requérante risqueraient d'en être victimes en cas de retour dans ce pays. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3-1 de la convention de New-York ne peut qu'être écarté.
13. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que les conclusions à fin d'annulation de Mme C..., ainsi que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction, d'astreinte et d'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, ne peuvent qu'être rejetées.
D E C I D E :
Article 1 : La requête de Mme C... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Me B... pour Mme D... C... en application des dispositions de l'article 6 du
décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de l'Aube.
N° 20NC01372 2