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06/04/2021 | FRANCE | N°20NC00686

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre, 06 avril 2021, 20NC00686


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... A... B... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 12 avril 2019 par lequel le préfet du Bas-Rhin lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1904932 du 2 octobre 2019, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 16 mars 2020, M. A...

B..., représenté par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... A... B... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 12 avril 2019 par lequel le préfet du Bas-Rhin lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1904932 du 2 octobre 2019, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 16 mars 2020, M. A... B..., représenté par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 2 octobre 2019 ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 12 avril 2019 du préfet du Bas-Rhin ;

3°) d'enjoindre au préfet du Bas-Rhin de lui délivrer un titre de séjour, sous astreinte de cent euros par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, subsidiairement, de réexaminer sa situation dans le délai d'un mois à compter de la décision à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative au titre de la procédure de première instance et de celle d'appel.

Il soutient que :

s'agissant de la décision portant refus de séjour :

- le tribunal n'a pas pris en considération le pouvoir d'appréciation du préfet qui, nonobstant l'absence de visa de long séjour, pouvait faire droit à sa demande compte tenu de sa situation ;

- le jugement attaqué est entaché d'une erreur de fait en jugeant que les pièces produites relatives à son séjour se limitent pour l'essentiel à des relevés de compte ;

- le tribunal a conclu à tort que la décision ne méconnaissait pas l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- il pouvait se prévaloir des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

s'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- elle est illégale en raison de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour ;

s'agissant de la décision fixant le pays de destination :

- elle est illégale en raison de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour.

Par un mémoire en défense, enregistré le 26 mai 2020, le préfet du Bas-Rhin conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Antoniazzi, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A... B..., ressortissant tunisien né le 21 mars 1978, est entré sur le territoire français selon ses déclarations en 2010. Le 26 juillet 2013, le préfet de l'Isère l'a obligé à quitter le territoire français sans délai et a fixé le pays à destination duquel il sera éloigné. Le 19 juillet 2015, il a été éloigné à destination de la Tunisie. Le 14 décembre 2018, il a sollicité la délivrance d'une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " en se prévalant de sa nouvelle entrée en France en 2015 et de son mariage avec une ressortissante française, célébré le 30 novembre 2018. Par un arrêté du 12 avril 2019, le préfet du Bas-Rhin a rejeté sa demande, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office à l'expiration de ce délai. M. A... B... fait appel du jugement du 2 octobre 2019 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la légalité de la décision de refus de séjour :

2. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : / (...) 4° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que la communauté de vie n'ait pas cessé depuis le mariage, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français ; (...) ". Aux termes de l'article L. 313-2 du même code : " Sous réserve des engagements internationaux de la France et des exceptions prévues par les dispositions législatives du présent code, la première délivrance de la carte de séjour temporaire (...) sont subordonnées à la production par l'étranger du visa de long séjour mentionné aux 1° ou 2° de l'article L. 311-1. (...) ". Aux termes de l'article L. 211-2-1 de ce code : " (...) Lorsque la demande de visa de long séjour émane d'un étranger entré régulièrement en France, marié en France avec un ressortissant de nationalité française et que le demandeur séjourne en France depuis plus de six mois avec son conjoint, la demande de visa de long séjour est présentée à l'autorité administrative compétente pour la délivrance d'un titre de séjour. ".

3. Si ces dispositions subordonnent la délivrance de la carte de séjour " vie privée et familiale " au conjoint d'un ressortissant français à la condition d'être en possession d'un visa de long séjour, elles n'impliquent pas que celui-ci fasse l'objet d'une demande expresse distincte de la demande du titre de séjour sollicitée auprès de l'autorité préfectorale, compétente pour procéder à cette double instruction. La délivrance d'un visa de long séjour demeure toutefois subordonnée au respect des conditions auxquelles cette délivrance est soumise, parmi lesquelles figure l'entrée régulière sur le territoire français.

4. M. A... B... ne justifie pas être entré régulièrement sur le territoire français. Dans ces conditions, le préfet pouvait, sans méconnaître les dispositions précitées, lui refuser, pour ce motif, la délivrance sur place d'un visa de long séjour et, par conséquent, lui opposer l'absence de visa de long séjour pour lui refuser la délivrance d'un titre de séjour en qualité de conjoint de français, qui est subordonnée à la présentation d'un tel visa. La circonstance que le préfet dispose d'un large pouvoir d'appréciation et aurait pu, compte tenu de la situation du requérant, lui délivrer un titre est sans incidence sur l'appréciation de la régularité du motif opposé à l'intéressé, tiré du défaut de son entrée régulière sur le territoire, qui fait obstacle, en application des dispositions précitées, à la délivrance d'un visa long séjour sur place.

5. En deuxième lieu, M. A... B... ne peut pas utilement se prévaloir des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'il n'a pas présenté de demande de titre de séjour sur ce fondement.

6. En dernier lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

7. Il ressort des pièces du dossier que M. A... B... est entré une première fois en France en 2010 et y a résidé jusqu'à son éloignement à destination de la Tunisie le 19 juillet 2015. S'il produit des documents démontrant qu'il a séjourné en France après une nouvelle entrée en 2015, qu'il mentionnait d'ailleurs dans sa demande de titre de séjour, il ressort toutefois des pièces du dossier que l'intéressé résidait en Italie et effectuait des séjours entre la France et l'Italie sans toutefois démontrer une résidence stable et continue en France avant l'année 2017. En outre, sa relation avec une ressortissante française, qu'il a épousée le 20 novembre 2018, était récente à la date de la décision litigieuse, l'intéressé mentionnant lui-même une vie commune depuis le 1er juin 2018, sans toutefois apporter plus de précision sur le commencement de cette relation. Au surplus, il ne démontre pas être dans l'impossibilité de retourner en Tunisie le temps d'obtenir un visa de long séjour en qualité de conjoint d'une ressortissante française, alors que sa séparation d'avec son épouse ne durera que le temps de l'obtention de ce visa. Enfin, il n'est pas dépourvu d'attache familiale dans son pays d'origine, où vivent encore sa mère et ses quatre frères et soeurs. Dans ces conditions, eu égard à la durée et aux conditions de séjour en France de M. A... B..., il ne ressort pas des pièces du dossier que la décision de refus de séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard du but poursuivi. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision contestée méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.

Sur la légalité des décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination :

8. Il résulte de ce qui a été dit précédemment que le moyen tiré par voie d'exception de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour à l'encontre des décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination ne peut qu'être écarté.

9. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et d'astreinte ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. A... B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... A... B... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet du Bas-Rhin.

2

N° 20NC00686


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 20NC00686
Date de la décision : 06/04/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme GHISU-DEPARIS
Rapporteur ?: Mme Sandrine ANTONIAZZI
Rapporteur public ?: M. MICHEL
Avocat(s) : SULTAN

Origine de la décision
Date de l'import : 20/04/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2021-04-06;20nc00686 ?
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