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23/02/2021 | FRANCE | N°20NC00343

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre, 23 février 2021, 20NC00343


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme H... doit être regardée comme ayant demandé d'annuler la décision du 5 avril 2018 par laquelle le maire de Colmar a rejeté sa demande tendant au bénéfice d'un congé bonifié pour se rendre en Guadeloupe du 27 juin au 31 août 2018, ensemble la décision du 11 juin 2018 portant rejet de son recours gracieux formé le 1er juin 2018.

Par un jugement n° 1804135 du 11 décembre 2019, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requ

ête, enregistrée le 10 février 2020, Mme H..., représentée par Me D... et Me E..., doit être reg...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme H... doit être regardée comme ayant demandé d'annuler la décision du 5 avril 2018 par laquelle le maire de Colmar a rejeté sa demande tendant au bénéfice d'un congé bonifié pour se rendre en Guadeloupe du 27 juin au 31 août 2018, ensemble la décision du 11 juin 2018 portant rejet de son recours gracieux formé le 1er juin 2018.

Par un jugement n° 1804135 du 11 décembre 2019, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 10 février 2020, Mme H..., représentée par Me D... et Me E..., doit être regardée comme demandant à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1804135 du tribunal administratif de Strasbourg du 11 décembre 2019 ;

2°) d'annuler les décisions du maire de Colmar des 5 avril et 11 juin 2018.

Elle soutient que le maire de Colmar a commis une erreur d'appréciation en refusant de faire droit à sa demande d'octroi d'un congé bonifié.

Par un mémoire en défense, enregistré le 23 octobre 2020, la commune de Colmar, représentée par Me C..., doit être regardée comme concluant au non-lieu à statuer, subsidiairement, au rejet de la requête et, en tout état de cause, à la mise à la charge de la requérante de la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que la requête de Mme F... est devenue sans objet, dès lors qu'elle n'est plus en mesure de se rendre en Guadeloupe du 27 juin au 31 août 2018, qu'elle est irrecevable faute de comporter une critique du jugement de première instance et qu'elle est mal fondée.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n°84-53 du 26 janvier 1984 ;

- le décret n°78-399 du 20 mars 1978 ;

- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. B...,

- et les conclusions de Mme Seibt, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Adjointe territoriale du patrimoine, Mme G... est affectée au service " lecture publique " de la commune de Colmar. Par des courriers des 16 janvier et du 4 avril 2018, elle a sollicité, pour elle-même et pour l'un de ses enfants, l'octroi d'un congé bonifié pour se rendre en Guadeloupe du 27 juin au 31 août 2018. Par une décision du 5 avril 2018, le maire de Colmar a refusé de faire droit à cette demande. Le 1er juin 2018, Mme F... a formé, contre cette décision, un recours gracieux qui a également été rejeté le 11 juin 2018. La requérante doit être regardée comme ayant saisi le tribunal administratif de Strasbourg d'une demande tendant à l'annulation des décisions des 5 avril et 11 juin 2018. Elle relève appel du jugement n° 1804135 du 11 décembre 2019 qui rejette sa demande.

Sur l'exception de non-lieu à statuer opposée en défense par la commune de Colmar :

2. Un recours pour excès de pouvoir dirigé contre un acte administratif n'a d'autre objet que d'en faire prononcer l'annulation avec effet rétroactif. Si, avant que le juge n'ait statué, l'acte attaqué est rapporté par l'autorité compétente et si le retrait ainsi opéré acquiert un caractère définitif faute d'être critiqué dans le délai du recours contentieux, il emporte alors disparition rétroactive de l'ordonnancement juridique de l'acte contesté, ce qui conduit à ce qu'il n'y ait lieu pour le juge de la légalité de statuer sur le mérite du pourvoi dont il était saisi. Il en va ainsi, quand bien même l'acte rapporté aurait reçu exécution. Dans le cas où l'administration se borne à procéder à l'abrogation de l'acte attaqué, cette circonstance prive d'objet le pourvoi formé à son encontre, à la double condition que cet acte n'ait reçu aucune exécution pendant la période où il était en vigueur et que la décision procédant à son abrogation soit devenue définitive.

3. Il est constant que la décision en litige du 5 avril 2018 n'a pas été retirée, ni abrogée par le maire de Colmar. Dans ces conditions et alors que le juge administratif de l'excès de pouvoir apprécie la légalité d'un acte administratif au regard des circonstances de droit et de fait existant à la date de son édiction, la présente requête n'a pas perdu son objet. Par suite, l'exception de non-lieu à statuer opposée en défense par la commune de Colmar ne peut qu'être écartée.

Sur le bien-fondé du jugement :

4. Aux termes de l'article 57 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984, portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, dans sa rédaction alors applicable : " Le fonctionnaire en activité a droit : 1° A un congé annuel avec traitement dont la durée est fixée par décret en Conseil d'Etat. / Le fonctionnaire territorial originaire des départements de Guadeloupe, de Guyane, de Martinique, de Mayotte, de La Réunion et de la collectivité territoriale de Saint-Pierre-et-Miquelon exerçant en métropole bénéficie du régime de congé institué pour les fonctionnaires de l'Etat ; (...) ". Aux termes de l'article 1er du décret n°78-399 du 20 mars 1978, relatif, pour les départements d'outre-mer, à la prise en charge des frais de voyage de congés bonifiés accordés aux magistrats et fonctionnaires civils de l'Etat, dans sa rédaction alors applicable : " Les dispositions du présent décret s'appliquent aux magistrats et aux fonctionnaires relevant du statut général des fonctionnaires de l'Etat qui exercent leurs fonctions : (...) b) Sur le territoire européen de la France si leur lieu de résidence habituelle est situé dans un département d'outre-mer. ". Aux termes de l'article 3 du même décret alors en vigueur, dans sa rédaction alors en vigueur : " Le lieu de résidence habituelle est (...) le département d'outre-mer où se trouve le centre des intérêts moraux et matériels de l'intéressé. ". Aux termes de l'article 4 du même décret, dans sa rédaction alors applicable : " Les personnels mentionnés à l'article 1er peuvent bénéficier, dans les conditions déterminées par le présent décret, de la prise en charge par l'Etat des frais d'un voyage de congé, dit Congé bonifié. Ce voyage comporte : (...) 2° Pour les personnels visés au b de l'article 1er ci-dessus, un voyage aller et retour entre le territoire européen de la France où l'intéressé exerce ses fonctions et le département d'outre-mer où il a sa résidence habituelle. ".

5. Pour apprécier la localisation du centre des intérêts matériels et moraux d'un fonctionnaire, il peut être tenu compte de son lieu de naissance, du lieu où se trouvent sa résidence et celle des membres de sa famille, du lieu où le fonctionnaire est soit propriétaire ou locataire de biens fonciers, soit titulaire de comptes bancaires, de comptes d'épargne ou de comptes postaux, ainsi que d'autres éléments d'appréciation parmi lesquels le lieu du domicile avant l'entrée dans la fonction publique de l'agent, celui où il a réalisé sa scolarité ou ses études, la volonté manifestée par l'agent à l'occasion de ses demandes de mutation et de ses affectations ou la localisation du centre des intérêts moraux et matériels de son conjoint ou partenaire au sein d'un pacte civil de solidarité. Cette localisation s'apprécie à la date de la décision prise sur chaque demande d'octroi du congé bonifié. La circonstance que le fonctionnaire a déjà bénéficié d'un tel congé est sans incidence sur la légalité de la décision en litige.

6. Mme F..., qui est née en Guadeloupe le 8 janvier 1970 et y a effectué toute sa scolarité, fait valoir que la plupart des membres de sa famille proche réside dans ce département d'outre-mer, qu'elle y retourne régulièrement, en dernier lieu du 2 décembre 2019 au 12 janvier 2020, et qu'elle y a conservé un compte bancaire. Elle produit, en outre, diverses attestations mettant en exergue l'importance de ses liens avec sa mère et, plus largement, avec l'île dont elle est originaire. Toutefois, il est constant que la requérante est arrivée en métropole à l'âge de dix-huit ans et qu'elle y vit et y travaille depuis trente ans. Elle exerce ses fonctions depuis février 2002 au sein des services municipaux de Colmar, s'est remariée à Ingersheim en 2015 et est actuellement domiciliée à Sainte-Marie-aux-Mines. Ses trois enfants sont nés et résident sur le territoire métropolitain de la France. Mme F..., qui est hébergée par sa mère lorsqu'elle se rend en Guadeloupe, ne justifie pas y disposer d'un bien immobilier en location ou dont elle serait propriétaire. Par suite, alors même que la requérante a déjà bénéficié par le passé d'un congé bonifié en 2009, 2012 et 2015, le maire de Colmar n'a pas commis d'erreur d'appréciation en considérant que la localisation du centre des intérêts matériels et moraux de l'intéressée ne se trouvait pas en Guadeloupe.

7. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée en défense par la commune de Colmar, que Mme F... n'est pas fondée à demander l'annulation des décisions des 5 avril et 11 juin 2018. Par suite, elle n'est pas davantage fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Sur les frais de justice :

8. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme F... la somme réclamée par la commune de Colmar en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de Mme F... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par la commune de Colmar en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Me D... pour Mme H... en application des dispositions de l'article 6 du décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 et à la commune de Colmar.

Délibéré après l'audience du 2 février 2021, à laquelle siégeaient :

- Mme A..., présidente de la chambre,

- M. Rees, président assesseur,

- M. B..., premier conseiller,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 23 février 2021.

Le rapporteur,

Signé : E. B...

La présidente,

Signé : S. A...

Le greffier,

Signé : F. LORRAIN

La République mande et ordonne au préfet du Haut-Rhin, en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier :

F. LORRAIN

N° 20NC00343 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 20NC00343
Date de la décision : 23/02/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-05-04-04 Fonctionnaires et agents publics. Positions. Congés. Congés divers.


Composition du Tribunal
Président : Mme VIDAL
Rapporteur ?: M. Eric MEISSE
Rapporteur public ?: Mme SEIBT
Avocat(s) : BERGMANN - CONEIN

Origine de la décision
Date de l'import : 16/03/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2021-02-23;20nc00343 ?
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