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18/02/2021 | FRANCE | N°20NC00110

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2ème chambre, 18 février 2021, 20NC00110


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 13 mai 2019 par lequel le préfet de Haut-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter sans délai le territoire et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office.

Par un jugement numéro 1903745 du 23 août 2019, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 16 ja

nvier 2020, M. D..., représenté par Me C... demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°)...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 13 mai 2019 par lequel le préfet de Haut-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter sans délai le territoire et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office.

Par un jugement numéro 1903745 du 23 août 2019, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 16 janvier 2020, M. D..., représenté par Me C... demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler l'arrêté du 13 mai 2019 ;

3°) de faire injonction au préfet de Haut-Rhin de réexaminer sa situation dans un délai de quinze jours à compter de l'arrêt, sous couvert d'une autorisation provisoire de séjour et sous astreinte de cent euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son avocat d'une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- l'arrêté attaqué a été pris par une autorité incompétente ;

- la décision lui refusant un titre de séjour est entachée d'erreur de droit en ce que le

défaut de visa et d'entrée régulière ne faisaient pas obstacle à ce que le préfet puisse délivrer un titre conjoint de français sur le fondement du 4° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- les décisions lui refusant le séjour et lui faisant obligation de quitter le territoire portent une atteinte disproportionnée à son droit à la vie privée et familiale en violation de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits humains et des libertés fondamentales, violent le 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et reposent sur une appréciation manifestement erronée de sa situation.

Par un mémoire en défense enregistré le 7 janvier 2021, le préfet de Haut-Rhin conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. D... ne sont pas fondés.

M. D... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du bureau d'aide juridictionnelle du 17 décembre 2019.

Vu :

-les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits humains et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le décret 91-1266 du 19 décembre 1991 ;

- l'ordonnance n°2020-1402 et le décret n°2020-1406 du 18 novembre 2020 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. B... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. D..., ressortissant marocain, né le 3 janvier 1992, déclare être entré en France le 15 juillet 2015 en provenance d'Italie, pays vers lequel il avait fait l'objet d'une décision de réadmission le 13 mars 2013. Il a sollicité le 11 septembre 2017 la délivrance d'un titre de séjour en qualité de conjoint de français. Par un arrêté du 10 octobre 2017, le préfet du Haut-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire dans un délai de 30 jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être renvoyé. La légalité de cet arrêté a été confirmée par un jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 29 décembre 2017 et une ordonnance de la cour du 31 mai 2018. Le 7 février 2019, l'intéressé a de nouveau sollicité la délivrance d'un titre de séjour. Par un arrêté du 13 mai 2019, le préfet de Haut-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter sans délai le territoire et a fixé le pays à destination duquel il pourra être renvoyé. Par le jugement attaqué du 23 août 2019, dont M. D... relève appel, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté la demande de l'intéressé tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la compétence du signataire de l'arrêté attaqué :

2. Par un arrêté du 20 septembre 2016, régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture du 21 septembre 2016, le préfet du Haut-Rhin a donné à M. Christophe A..., secrétaire général de la préfecture, délégation à l'effet de signer tous arrêtés, décisions, circulaires relevant des attributions de l'État dans le département du Haut-Rhin, à l'exception de certains actes au nombre desquels ne figurent pas les décisions prises en matière de séjour et d'éloignement des étrangers. Par suite, le moyen tiré de ce que l'arrêté en litige, signé par M. A..., serait entaché d'incompétence doit être écarté.

Sur la légalité de la décision de refus de titre de séjour :

3. En premier lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) / 4° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que la communauté de vie n'ait pas cessé depuis le mariage, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français ; (...) ". Aux termes de l'article L. 311-1 de ce code : " Sous réserve des engagements internationaux de la France ou de l'article L. 121-1, tout étranger âgé de plus de dix-huit ans qui souhaite séjourner en France pour une durée supérieure à trois mois doit être titulaire de l'un des documents de séjour suivants : 1° Un visa de long séjour, d'une durée maximale d'un an ; (...) ". Aux termes enfin du 6ème alinéa de l'article L. 211-2-1 du même code : " Lorsque la demande de visa de long séjour émane d'un étranger entré régulièrement en France, marié en France avec un ressortissant de nationalité française et que le demandeur séjourne en France depuis plus de six mois avec son conjoint, la demande de visa de long séjour est présentée à l'autorité administrative compétente pour la délivrance d'un titre de séjour ".

4. Il résulte de la combinaison de ces dispositions que la production d'un visa de long séjour, délivré, le cas échéant, selon les modalités fixées au sixième alinéa de l'article L. 211-2-1 du code et du séjour des étrangers et du droit d'asile, est au nombre des conditions auxquelles est subordonnée la délivrance d'une carte de séjour temporaire sur le fondement du 4° de l'article L. 313-11 du même code. Si ces dispositions impliquent que l'autorité préfectorale, saisie d'une demande de titre de séjour sur le fondement du 4° de l'article L. 313-11 dudit code, procède à l'instruction de la demande implicite de délivrance d'un visa de long séjour en application des dispositions de l'article L. 211-2-1 du même code, il résulte de ces mêmes dispositions que le préfet n'est compétent pour délivrer un visa de long séjour que lorsque toutes les conditions qu'elles prévoient sont remplies, notamment celle d'une entrée régulière en France du demandeur.

5. Il ressort des pièces du dossier que M. D..., ressortissant marocain né en 1992, est entré irrégulièrement en France le 15 juillet 2015 en provenance d'Italie. Il a épousé le

1er juillet 2017 une ressortissante française et a sollicité le 7 février 2019 la délivrance d'un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " en invoquant son mariage. Toutefois, il est constant que le requérant ne justifiait, à la date de la décision attaquée, ni d'un visa de long séjour ni, pour l'application des dispositions de l'article L. 211-2-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, d'une entrée régulière sur le territoire français. Par suite, c'est sans commettre d'erreur de droit que le préfet a pu lui refuser la délivrance du titre de séjour qu'il sollicitait sur le fondement de l'article L. 313-11 4° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

6. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ". Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits humains et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

7. M. D... se prévaut de sa présence en France depuis près de quatre ans, de ce qu'il a quitté le Maroc depuis plus de quinze ans et de son mariage. Toutefois, d'une part, il est constant que le requérant n'a aucun enfant avec son épouse ; d'autre part, il ne démontre pas être dans l'impossibilité de retourner au Maroc le temps d'obtenir un visa de long séjour en qualité de conjoint d'une ressortissante française. Enfin, il ressort des pièces du dossier que l'intéressé n'est pas isolé dans son pays où réside son père. Dans ces conditions, et compte tenu notamment de ce que la séparation du requérant d'avec son épouse ne durera que le temps de l'obtention d'un visa de long séjour, M. D... n'est pas fondé à soutenir que le refus de séjour porterait une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale au regard des motifs de ce refus. De surcroît le préfet a soutenu sans être contredit que M. D... était connu en Italie pour des faits de vols aggravés. Dès lors, les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 313-11, 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits humains et des libertés fondamentales doivent être écartés. Pour les mêmes motifs, le préfet n'a commis aucune erreur manifeste d'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle du requérant.

Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire :

8. Il résulte de ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à invoquer par la voie de l'exception, à l'appui de ses conclusions dirigées contre l'obligation de quitter le territoire, l'illégalité de la décision de refis de titre de séjour.

9. Par les mêmes motifs que ci-dessus, les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 313-11, 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits humains et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation doivent être écartés.

10. Il résulte de tout ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande. Par suite, sa requête d'appel doit être rejetée en toutes ses conclusions y compris celles tendant à l'application de l'article 37 de la loi ci-dessus visée du 10 juillet 1991.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. D... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... D... et au ministre de l'intérieur.

Copie du présent arrêt sera adressée au préfet du Haut-Rhin.

N° 20NC00110 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 20NC00110
Date de la décision : 18/02/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. AGNEL
Rapporteur ?: M. Marc AGNEL
Rapporteur public ?: Mme HAUDIER
Avocat(s) : BERRY

Origine de la décision
Date de l'import : 16/03/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2021-02-18;20nc00110 ?
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