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16/02/2021 | FRANCE | N°19NC03348

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre, 16 février 2021, 19NC03348


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... C..., Mme E... C... et M. G... C... ont demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler les arrêtés du 2 mai 2019 par lesquels le préfet de Meurthe-et-Moselle leur a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de 30 jours et a fixé le pays à destination duquel ils sont susceptibles d'être éloignés.

Par un jugement n°s 1901484, 1901485 et 1901486 du 9 juillet 2019, la magistrate désignée par la présidente du tribunal administratif de Nancy a rejeté leur demand

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Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 20 novembre 2019, le...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... C..., Mme E... C... et M. G... C... ont demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler les arrêtés du 2 mai 2019 par lesquels le préfet de Meurthe-et-Moselle leur a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de 30 jours et a fixé le pays à destination duquel ils sont susceptibles d'être éloignés.

Par un jugement n°s 1901484, 1901485 et 1901486 du 9 juillet 2019, la magistrate désignée par la présidente du tribunal administratif de Nancy a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 20 novembre 2019, les consorts C..., représentés par Me H..., demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nancy du 9 juillet 2019 ;

2°) d'annuler les arrêtés du 2 mai 2019 du préfet de Meurthe-et-Moselle ;

3°) d'enjoindre au préfet de Meurthe-et-Moselle, à titre principal, de leur délivrer un titre de séjour les autorisant à travailler et, à titre subsidiaire, de réexaminer leur situation administrative et de leur délivrer pendant cet examen une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, à verser à leur conseil en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

Ils soutiennent que :

- le jugement attaqué est insuffisamment motivé et est rédigé de manière stéréotypée ;

- le premier juge a omis de statuer sur les moyens tirés du défaut de motivation et d'examen de leur situation personnelle ;

- les arrêtés contestés sont insuffisamment motivés ;

- le préfet n'a pas procédé à un examen particulier de leur situation personnelle ;

- ces arrêtés méconnaissent les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- ils méconnaissent également les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile eu égard à l'état de santé des deux enfants ;

- ils sont entachés d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des conséquences d'une exceptionnelle gravité compte tenu de l'état de santé de E... et de Vladislav C....

Par un mémoire en défense, enregistré le 20 janvier 2021, le préfet de Meurthe-et-Moselle conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par les requérants ne sont pas fondés.

Les consorts C... ont été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 1er octobre 2019.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 2011-672 du 16 juin 2011 relative à l'immigration, à l'intégration et à la nationalité ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de Mme D... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme A... C..., ressortissante géorgienne, née le 14 juillet 1966, est entrée en France au mois de mai 2016, accompagnée de ses deux enfants majeurs, M. G... C..., né le 12 août 1988 et Mme E... C..., née le 18 mai 1990, afin de solliciter la qualité de réfugié. Leurs demandes d'asile ont, chacune, été rejetées le 24 septembre 2018 par l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides (OFPRA), dont les décisions ont été confirmées le 15 février 2019 par la Cour nationale du droit d'asile (CNDA). Par trois arrêtés du 2 mai 2019, le préfet de Meurthe-et-Moselle leur a fait obligation de quitter le territoire dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel ils sont susceptibles d'être éloignés. Les consorts C... relèvent appel du jugement du 9 juillet 2019 par lequel la magistrate désignée par la présidente du tribunal administratif de Nancy a rejeté leur demande tendant à l'annulation des arrêtés du 2 mai 2019.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. La magistrate désignée par la présidente du tribunal administratif de Nancy, qui n'était pas tenue de répondre à tous les arguments des parties, a répondu, de manière suffisamment étayée et non stéréotypée, au moyen tiré du défaut de motivation des arrêtés attaqués. Si les requérants soutiennent également que le premier juge aurait omis de statuer sur le moyen tiré du défaut d'examen de leur situation personnelle, il ne ressort pas des écritures de première instance qu'un tel moyen ait été soulevé. Dès lors, le jugement n'est pas entaché d'irrégularité.

Sur les conclusions à fin d'annulation des décisions du 2 mai 2019 du préfet de Meurthe-et-Moselle :

En ce qui concerne les moyens communs soulevés à l'encontre des obligations de quitter le territoire :

3. En premier lieu, les décisions portant obligation de quitter le territoire comportent les considérations de fait et de droit qui en constituent le fondement. Elles rappellent notamment le parcours des intéressés, le rejet de leur demande d'admission au titre de l'asile et leur situation familiale. Par suite, elles sont suffisamment motivées.

4. En deuxième lieu, il ressort des termes mêmes des arrêtés litigieux que le préfet de Meurthe-et-Moselle a procédé à un examen approfondi de la situation des consorts C... et en particulier de leur situation familiale et de leur insertion en France. Si les requérants font valoir que le préfet Meurthe-et-Moselle n'a pas examiné l'état de santé de M. G... C... et de Mme E... C..., qui seraient atteints de pathologies graves, il ne ressort pas des pièces du dossier que ces derniers, qui n'ont d'ailleurs pas demandé leur admission au séjour pour des motifs de santé, auraient fait état de ces affections au cours de la procédure administrative. Le moyen tiré du défaut d'examen particulier de la situation des requérants ne peut, en conséquence, qu'être écarté.

5. En dernier lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

6. Il ressort des pièces des dossiers que les consorts C... étaient présents en France depuis trois ans à la date des décisions attaquées. Ils ne justifient pas d'autres attaches familiales ou personnelles sur le territoire français, alors qu'ils ont vécu dans leur pays d'origine respectivement jusqu'aux âges de 50, 26 et 28 ans. Ils n'apportent également aucun élément s'agissant de leur intégration en France. Dans ces conditions, au regard tant de la faible durée que des conditions du séjour des intéressés en France, en obligeant les consorts C... à quitter le territoire français, le préfet de Meurthe-et-Moselle n'a pas porté au droit au respect de leur vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels les décisions d'éloignement ont été prises. Par conséquent, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées ne peut être qu'écarté.

En ce qui concerne les obligations de quitter le territoire prises à 1'encontre de Mme E... C... et de M. G... C... :

7. En premier lieu, aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile: " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...) / 10° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié (...) ".

8. Si Mme E... C... et M. G... C..., qui ont entendu lever le secret médical, sont tous les deux suivis au centre psychothérapique de Nancy depuis le mois de septembre 2016, il ne ressort d'aucune pièce des dossiers qu'un défaut de prise en charge médicale pourrait avoir pour eux des conséquences d'une exceptionnelle gravité ni, en tout état de cause, qu'ils ne pourraient pas bénéficier effectivement d'un traitement approprié à leur état de santé en Géorgie. Les pièces produites se bornent à préciser que M. G... C... est suivi depuis le 22 août 2016 au centre psychothérapique de Nancy et que Mme E... souffre d'un retard mental et de troubles psychotiques chroniques, qu'elle doit suivre un traitement médicamenteux et bénéficie d'une prise en charge psychothérapique. Par suite le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du 10° de 1'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.

9. En second lieu, au regard de ce qui vient d'être dit, il ne ressort pas des pièces des dossiers qu'en obligeant les intéressés à quitter le territoire français, le préfet de Meurthe-et-Moselle aurait manifestement inexactement apprécié les conséquences de ses décisions sur la situation personnelle de Mme E... C... et de M. G... C....

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire prise à 1'encontre de Mme A... C... :

10. En premier lieu, Mme C... n'établit pas entrer personnellement dans l'une des catégories d'étrangers visés par les dispositions de 1'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile faisant obstacle à son éloignement. Dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions doit être écarté.

11. En second lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'en obligeant l''intéressée à quitter le territoire français, le préfet de Meurthe-et-Moselle aurait manifestement inexactement apprécié les conséquences de sa décision sur sa situation personnelle.

12. Il résulte de tout ce qui précède que les consorts C... ne sont pas fondés à demander l'annulation des arrêtés du 2 mai 2019 du préfet de Meurthe-et-Moselle. Par voie de conséquence, leurs conclusions aux fins d'injonction sous astreinte ainsi que celles présentées sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent qu'être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête présentée par les consorts C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... C..., à Mme E... C..., à M. G... C... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de Meurthe-et-Moselle.

2

N° 19NC03348


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 19NC03348
Date de la décision : 16/02/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : Mme GRENIER
Rapporteur ?: Mme Sophie ROUSSAUX
Rapporteur public ?: M. MICHEL
Avocat(s) : ANNIE LEVI-CYFERMAN - LAURENT CYFERMAN

Origine de la décision
Date de l'import : 26/02/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2021-02-16;19nc03348 ?
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