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29/12/2020 | FRANCE | N°18NC00443

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2ème chambre, 29 décembre 2020, 18NC00443


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme A... C... ont demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne de prononcer la réduction des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2011 à 2013, ainsi que des pénalités correspondantes, à concurrence d'un montant de 105 509 euros ainsi que les intérêts de retard correspondants.

Par un jugement n° 1600287 du 21 décembre 2017, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté la demande.

Procé

dure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 21 février 2018, M. et Mme C..., repré...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme A... C... ont demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne de prononcer la réduction des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2011 à 2013, ainsi que des pénalités correspondantes, à concurrence d'un montant de 105 509 euros ainsi que les intérêts de retard correspondants.

Par un jugement n° 1600287 du 21 décembre 2017, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté la demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 21 février 2018, M. et Mme C..., représentés par Me B..., demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 21 décembre 2017 ;

2°) de prononcer la décharge de ces impositions et des pénalités correspondantes pour un montant de 105 509 euros ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 800 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- les dépenses des travaux réalisés dans l'immeuble de Branscourt sont déductibles au regard des dispositions de l'article 31-1 du code général des impôts dès lors qu'il s'agit de travaux de rénovation et non pas de travaux de reconstruction ;

- ils se prévalent des énonciations des doctrines administratives référencées BOI-RFPI 20-30-20 du 30 mai 2016 et BOI-RFPI-BASE-30-30-20 du 3 février 2012 n°110 ;

- le dispositif dit " Besson ancien " était applicable à l'appartement situé au 1er étage du 42 rue Passe Demoiselles à Reims au titre des années 2011 à 2013 ;

- ils se prévalent de la doctrine administrative référencée BOI-RFPI-SPEC-20-10-30 du 21 mai 2015.

Par un mémoire en défense, enregistré le 31 mai 2018, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. et Mme C... ne sont pas fondés.

Vu :

- les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- l'ordonnance n° 2020-1402 et le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme D...,

- et les conclusions de Mme Haudier, rapporteur public,

Considérant ce qui suit :

1. M. et Mme C... sont propriétaires de plusieurs immeubles leur procurant des revenus fonciers. Par une proposition de rectification du 19 décembre 2014, l'administration leur a notifié, selon la procédure contradictoire, des rehaussements en matière d'impôt sur le revenu et de contributions sociales pour les années 2011 à 2013 résultant de la remise en cause d'une part, du caractère déductible des dépenses de travaux réalisés dans une maison leur appartenant sise à Branscourt et d'autre part, de la déduction de 26 % prévue au j) du 1° du I de l'article 31 du code général des impôts concernant notamment un appartement dont ils sont propriétaires à Reims. M. et Mme C... relèvent appel du jugement du 21 décembre 2017 par lequel le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté leur demande tendant à la réduction des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2011 à 2013, ainsi que des pénalités correspondantes, à concurrence d'un montant de 105 509 euros.

Sur le bien-fondé de l'imposition :

En ce qui concerne le caractère déductible des travaux effectués dans la maison sise à Branscourt :

S'agissant de l'application de la loi fiscale :

2. Aux termes de l'article 31 du code général des impôts : " I. Les charges de la propriété déductibles pour la détermination du revenu net comprennent : / 1° Pour les propriétés urbaines : / a) Les dépenses de réparation et d'entretien effectivement supportées par le propriétaire ; (...) / b) Les dépenses d'amélioration afférentes aux locaux d'habitation, à l'exclusion des frais correspondant à des travaux de construction, de reconstruction ou d'agrandissement (...) ". Au sens de ces dispositions, doivent être regardés comme des travaux de reconstruction, ceux qui comportent la création de nouveaux locaux d'habitation, ou qui ont pour effet d'apporter une modification importante au gros oeuvre, ainsi que les travaux d'aménagement interne qui, par leur importance, équivalent à des travaux de reconstruction, et, comme des travaux d'agrandissement, ceux qui ont pour effet d'accroître le volume ou la surface habitable des locaux existants. Des travaux d'aménagement interne, quelle que soit leur importance, ne peuvent être regardés comme des travaux de reconstruction que s'ils affectent le gros oeuvre ou s'il en résulte une augmentation du volume ou de la surface habitable.

3. L'administration a considéré que les charges déduites par les contribuables au titre des années 2011 à 2013, correspondant aux travaux dans une maison d'habitation située 26 rue du Haut de Ville à Branscourt dont ils sont propriétaires, réalisés durant trois années pour un montant global de 239 068 euros, devaient être regardées comme correspondant à des travaux de reconstruction, non déductibles en application des dispositions du b du 1° du I de l'article 31 précité eu égard à leur importance et à la nécessité pour les intéressés d'obtenir préalablement un permis de construire, s'agissant de travaux de " rénovation " modifiant l'aspect extérieur de l'immeuble. Il résulte de l'instruction que les travaux ainsi réalisés par les requérants sur cet immeuble, composé initialement d'une habitation principale de 58 m², comme en atteste la déclaration modèle H1 déposée le 22 juin 1970 par l'ancien propriétaire, et de combles non aménagés dont le caractère habitable n'est pas démontré par les pièces produites, ont conduit, après d'importants travaux tels que le remplacement de la toiture et de la zinguerie, la démolition totale des parois intérieures et l'enlèvement de l'ancien escalier, l'abattage de cloisons existantes et d'un mur porteur, l'aménagement des combles et la création d'une terrasse, à la création d'ouvertures et à la redistribution de l'espace intérieur désormais formé d'un espace habitable de 101 m² et d'un studio indépendant d'une surface de 45 m², aménagé dans une dépendance qui n'était pas initialement affectée à l'usage d'habitation . Eu égard à leur nature et à leur ampleur, les travaux dont il s'agit qui ont affecté le gros oeuvre et entraîné une redistribution de l'aménagement intérieur, doivent être regardés comme des travaux de reconstruction, nonobstant la circonstance, au demeurant non établie, que le service des impôts de la commune dans laquelle résident les requérants leur aurait garanti le caractère déductible des dépenses en litige. Par ailleurs, à supposer même que certains travaux de rénovation de l'espace d'habitation existant, pris isolément, puissent être regardés comme des travaux ayant généré des charges déductibles au sens des dispositions citées, ils ne sont toutefois pas dissociables de l'opération globale de reconstruction de l'immeuble. Enfin, la circonstance que c'est en raison de l'hospitalisation de M. C... que le bien en litige n'était toujours pas loué en 2016 est inopérante. Par suite, c'est par une exacte application des dispositions citées de l'article 31 du code général des impôts que l'administration a réintégré ces dépenses dans les bases imposables de M. et Mme C... à l'impôt sur le revenu au titre des années 2011 à 2013.

S'agissant de l'interprétation administrative de la loi fiscale :

4. Aux termes de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales : " Il ne sera procédé à aucun rehaussement d'impositions antérieures si la cause du rehaussement poursuivi par l'administration est un différend sur l'interprétation par le redevable de bonne foi du texte fiscal et s'il est démontré que l'interprétation sur laquelle est fondée la première décision a été, à l'époque, formellement admise par l'administration./ Lorsque le redevable a appliqué un texte fiscal selon l'interprétation que l'administration avait fait connaître par ses instructions ou circulaires publiées et qu'elle n'avait pas rapportée à la date des opérations en cause, elle ne peut poursuivre aucun rehaussement en soutenant une interprétation différente. Sont également opposables à l'administration, dans les mêmes conditions, les instructions ou circulaires publiées relatives au recouvrement de l'impôt et aux pénalités fiscales ".

5. M. et Mme C... ne sauraient se prévaloir des énonciations des doctrines administratives référencées BOI-RFPI-20-30-20 du 30 mai 2016 et BOI-RFPI-BASE-30-30-20 du 3 février 2012 n°110 qui ne contiennent pas d'interprétation de la loi fiscale différente de celle dont il est ici fait application.

En ce qui concerne les déductions dans le cadre du dispositif dit " Besson ancien " :

6. Aux termes de l'article 31 du code général des impôts, dans sa version applicable au litige : " I. Les charges de la propriété déductibles pour la détermination du revenu net comprennent : / 1° Pour les propriétés urbaines : (...) j) Une déduction fixée à 26 % des revenus bruts au titre des six premières années de location des logements qui ne peuvent donner lieu à l'un ou l'autre des régimes prévus au f, g et h et qui, répondant aux normes d'habitabilité telles que définies par décret, sont loués par une personne physique ou une société non soumise à l'impôt sur les sociétés en vertu d'un bail conclu entre le 1er janvier 1999 et le 30 septembre 2006. Le contribuable ou la société propriétaire doit s'engager à louer le logement nu pendant une durée de six ans au moins à des personnes qui en font leur habitation principale. Cet engagement prévoit, en outre, que le loyer et les ressources du locataire appréciés à la date de conclusion du bail ne doivent pas excéder des plafonds fixés par décret (...) Tant que la condition de loyer prévue au premier alinéa demeure remplie, le bénéfice de la déduction est prorogé par périodes de trois ans, en cas de poursuite, de reconduction ou de renouvellement du contrat de location. / Sous réserve que les conditions de loyer et de ressources du nouveau locataire prévues au premier alinéa soient remplies, la déduction demeure également applicable en cas de changement de titulaire du bail. (...) ".

7. Par la proposition de rectification du 19 décembre 2014, l'administration a remis en cause les déductions opérées par M. et Mme C..., dans le cadre du dispositif dit " Besson ancien ", de leurs revenus fonciers procurés par divers appartements situés à Reims en estimant que les contribuables n'apportaient aucun élément de nature à établir que les revenus locatifs étaient encore éligibles à ce régime de faveur. Seule demeure en litige la contestation concernant le refus du service d'admettre la déduction de 26% du montant des loyers d'un appartement situé au 1er étage de l'immeuble situé au 42 rue Passe Demoiselle à Reims et référencé 4540279057 V. Le service a en effet estimé que le locataire avait quitté le logement en 2010 à l'issue de la période d'engagement initial du contrat de bail conclu avant le 1er octobre 2006, à savoir le 30 octobre 2010, et que le nouveau contrat de bail conclu le 18 décembre 2010 avec une autre locataire, signé postérieurement au terme de la période d'engagement initial, n'entrait pas dans le cadre du dispositif Besson ancien prorogé. Il résulte toutefois de l'instruction, qu'en appel, les requérants ont produit pour la première fois le contrat de bail paraphé et signé qu'ils ont conclu avec des locataires le 3 juillet 2010 avec une prise d'effet au 16 juillet 2010, l'acte de caution solidaire du 3 juillet 2010 établi au bénéfice de ces locataires ainsi que l'état des lieux de sortie réalisé le 18 décembre 2010. Ce faisant, les requérants justifient que le bénéfice de la déduction spécifique prévue par les dispositions précitées a été prorogé par le changement de locataires intervenu en juillet 2010. Par conséquent, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur l'interprétation de la loi fiscale par la doctrine administrative référencée BOI-RFPI-SPEC-20-10-30 du 21 mai 2015, en tout état de cause postérieure aux années d'imposition en litige, M. et Mme C... sont fondés à demander le bénéfice de la déduction prévue au j) du 1° du I de l'article 31 du code général des impôts.

8. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme C... sont seulement fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a refusé de leur accorder, au titre des années 2011 à 2013, la déduction spécifique prévue aux dispositions du j) du 1° du I de l'article 31 du code général des impôts pour ce qui concerne la location du logement situé au 42 rue Passe Demoiselle à Reims, référencé 4540279057 V.

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante à titre principal dans la présente instance, verse une somme à M. et Mme C... au titre des frais exposés par lui.

D E C I D E :

Article 1er : La base de l'impôt sur le revenu, assignée à M. et Mme C... au titre des années 2011 à 2013, est réduite à concurrence de la prise en compte, pour le calcul de leurs revenus fonciers, de la déduction prévue au j) du 1° du I de l'article 31 du code général des impôts pour ce qui concerne la location de l'appartement situé au 42 rue Passe Demoiselle à Reims, référencé 4540279057 V.

Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne du 21 décembre 2017 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme C... et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

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N° 18NC00443


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Analyses

19-04-01-02 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Règles générales. Impôt sur le revenu.


Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : M. MARTINEZ
Rapporteur ?: Mme Laurence STENGER
Rapporteur public ?: Mme HAUDIER
Avocat(s) : SOCIETE D'AVOCATS FIDAL DE CHAMPIGNY

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre
Date de la décision : 29/12/2020
Date de l'import : 12/03/2021

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 18NC00443
Numéro NOR : CETATEXT000043204766 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2020-12-29;18nc00443 ?
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