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22/12/2020 | FRANCE | N°17NC03061

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre, 22 décembre 2020, 17NC03061


Vu la procédure suivante :

Par un arrêt du 26 février 2019, la cour, avant dire droit sur la requête de Mme G... B... dirigée contre le jugement n° 1602922 du 5 décembre 2017 par lequel le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la commune de Villers-lès-Moivrons à lui verser la somme de 49 234,15 euros en réparation des préjudices subis à raison des conséquences, sur l'état de sa maison, de l'absence d'étanchéité d'un dalot de pierre collectant les eaux de surface, a ordonné une expertise.

L'expert désigné a remis le

12 août 2020 son rapport, et les parties ont été invitées à présenter leurs obse...

Vu la procédure suivante :

Par un arrêt du 26 février 2019, la cour, avant dire droit sur la requête de Mme G... B... dirigée contre le jugement n° 1602922 du 5 décembre 2017 par lequel le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la commune de Villers-lès-Moivrons à lui verser la somme de 49 234,15 euros en réparation des préjudices subis à raison des conséquences, sur l'état de sa maison, de l'absence d'étanchéité d'un dalot de pierre collectant les eaux de surface, a ordonné une expertise.

L'expert désigné a remis le 12 août 2020 son rapport, et les parties ont été invitées à présenter leurs observations.

Par des mémoires, enregistrés les 9 et 21 septembre 2020, Mme B... conclut aux mêmes fins que ses précédentes écritures.

Elle soutient que :

- l'expert a estimé qu'une partie significative des infiltrations provient des fuites des réseaux d'eaux publics si bien que la responsabilité de la commune est engagée ;

- le contentieux engagé avant le transfert de la compétence assainissement à la communauté de communes Seille et Grand Couronné demeure de la responsabilité de la commune.

Par un mémoire, enregistré le 21 septembre 2020, la commune de Villers-lès-Moivrons conclut aux mêmes fins que précédemment.

Elle soutient que :

- la réalité des fuites du réseau et le lien de causalité entre ces fuites et les désordres affectant l'immeuble de Mme B... ne sont pas établis ;

- la responsabilité de la commune ne pourrait être engagée que dans la mesure où le réseau public d'assainissement aggraverait les effets des causes naturelles ;

- dès lors que la compétence en matière d'assainissement, d'eau potable et de gestion des eaux pluviales incombe à la communauté de communes Seille et Grand Couronné, seule la responsabilité de cet établissement public pourra être retenue.

Par ordonnance du 21 septembre 2020, la clôture d'instruction a été fixée au 6 octobre 2020 à 12h00.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Antoniazzi, premier conseiller,

- les conclusions de M. Michel, rapporteur public,

- les observations de Me C..., pour Mme B...,

- et les observations de Me D..., pour la commune de Villers-lès-Moivrons.

Considérant ce qui suit :

1. Mme B... est propriétaire, au 11, rue de Gonhaye, à Villers-lès Moivrons, d'une maison d'habitation dont le rez-de-chaussée se trouve régulièrement inondé depuis 2001, à chaque épisode pluvieux intense, en raison d'infiltrations d'eau. A sa demande, une première expertise a été ordonnée par le juge des référés du tribunal de grande instance de Nancy, le 25 juin 2002, afin de déterminer les causes de ces désordres. Après avoir prescrit une nouvelle expertise par jugement du 19 juin 2013, et au vu des conclusions déposées le 2 juin 2004, le tribunal de grande instance a, par jugement du 16 décembre 2004, estimé que les infiltrations d'eau litigieuses trouvaient leur cause dans la réalisation de travaux par M. E..., propriétaire du terrain voisin, et a condamné ce dernier à indemniser Mme B... de divers chefs de préjudice. Ce jugement a été confirmé par un arrêt du 7 mai 2007, devenu définitif, de la cour d'appel de Nancy qui a fixé le montant de l'indemnisation à 10 500 euros. A l'issue d'une troisième expertise judiciaire organisée, à la demande de M. E... afin de déterminer de manière plus globale l'origine des différents désordres affectant les parcelles situées aux numéros 11, 13, 15 et 17 de la rue de Gonhaye à Villers-lès-Moivrons, a été émise, dans le rapport déposé le 3 octobre 2014, l'hypothèse de l'implication dans les infiltrations affectant la propriété de Mme B..., de la présence d'un dalot non étanche appartenant à la commune de Villers-lès-Moivrons. Mme B..., dont la demande tendant à la désignation, en référé, d'une nouvelle expertise a été rejetée par le juge des référés du tribunal administratif de Nancy, a demandé à ce tribunal de condamner la commune de Villers-lès-Moivrons à l'indemniser des préjudices subis à raison des désordres affectant sa maison d'habitation. Elle relève appel du jugement n°1602922 du 5 décembre 2017 qui a rejeté cette demande. Par un arrêt du 26 février 2019, la cour a, avant dire droit sur la requête de Mme B..., ordonné un supplément d'instruction.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. Le maître de l'ouvrage est responsable, même en l'absence de faute, des dommages que les ouvrages publics dont il a la garde peuvent causer aux tiers tant en raison de leur existence que de leur fonctionnement. Il ne peut dégager sa responsabilité que s'il établit que ces dommages résultent de la faute de la victime ou d'un cas de force majeure. Ces tiers ne sont pas tenus de démontrer le caractère grave et spécial du préjudice qu'ils subissent lorsque le dommage présente un caractère accidentel. Il leur appartient toutefois d'apporter la preuve de la réalité des préjudices allégués et du lien de causalité entre la présence ou le fonctionnement de l'ouvrage et lesdits préjudices.

3. Il appartient au juge, saisi d'un litige relevant du plein contentieux indemnitaire, de se prononcer d'après l'ensemble des circonstances de droit et de fait applicables à la date de sa décision.

4. Il résulte de l'instruction, et notamment du rapport d'expertise de M. A..., que les venues d'eau infiltrant le soubassement de la maison d'habitation de Mme B... sont dues principalement à l'écoulement des eaux souterraines circulant sous la propriété des consorts E...-I..., phénomène accentué par son interruption par le mur mitoyen nécessitant la mise en place d'un drainage d'évacuation des eaux vers le réseau public. L'expert note également, sans cependant avoir pu le vérifier, que les infiltrations pourraient également être aggravées par des fuites du réseau public d'évacuation des eaux pluviales de la rue de Gonhaye et l'absence d'un dispositif de captage du trop-plein d'eau de l'ancienne source de captage d'eau potable.

5. Or, d'une part, aux termes du III de l'article L. 5211-5 du code général des collectivités territoriales, relatif à la création des établissements publics de coopération intercommunale : " Le transfert des compétences entraîne de plein droit l'application à l'ensemble des biens, équipements et services publics nécessaires à leur exercice, ainsi qu'à l'ensemble des droits et obligations qui leur sont attachés à la date du transfert, des dispositions des trois premiers alinéas de l'article L. 1321-1, des deux premiers alinéas de l'article L. 1321-2 et des articles L. 1321-3, L. 1321-4 et L. 1321-5 (...) L'établissement public de coopération intercommunale est substitué de plein droit, à la date du transfert des compétences, aux communes qui le créent dans toutes leurs délibérations et tous leurs actes ".

6. Il résulte de ces dispositions que le transfert par une commune de compétences à un établissement public de coopération intercommunale implique le transfert des biens, équipements et services nécessaires à l'exercice de ces compétences, ainsi que les droits et obligations qui leur sont attachés y compris lorsque ces obligations trouvent leur origine dans un événement antérieur au transfert.

7. Dès lors que depuis le 1er janvier 2017, les compétences optionnelles " assainissement " et " eau potable " ont été transférées à la communauté de communes Seille et Grand Couronné, la commune de Villers-lès-Moivrons ne peut, en tout état de cause, plus voir sa responsabilité recherchée à raison de dommages causés aux tiers par les réseaux humides situés sous la chaussée de la rue de Gonhaye alors même que tout ou partie du dommage résultant de l'exercice de cette compétence aurait été occasionné antérieurement au transfert.

8. D'autre part, le captage du trop-plein d'eau de l'ancienne source de captage d'eau potable relève du syndicat mixte des eaux de Seille et Moselle depuis 1976. La commune ne peut ainsi pas plus voir sa responsabilité recherchée à ce titre.

9. Il résulte de tout ce qui précède que les conclusions indemnitaires de Mme B... sont mal dirigées et doivent être pour ce motif rejetées. Elle n'est par suite pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la commune de Villers-lès-Moivrons.

Sur les dépens :

10. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre les frais d'expertise, taxés et liquidés à la somme de 5 053 euros TTC par une ordonnance de la présidente de la cour administrative d'appel de Nancy du 20 octobre 2020, à la charge pour moitié de la commune de Villers-lès-Moivrons et pour l'autre moitié à la charge de Mme B....

Sur les frais liés à l'instance :

11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de commune de Villers-lès-Moivrons, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que Mme B... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. En outre, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme B... la somme demandée au même titre par la commune de Villers-lès-Moivrons.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.

Article 2 : Les frais d'expertise, taxés et liquidés à la somme de 5 053 euros, sont mis à la charge de la commune de Villers-lès-Moivrons pour moitié et pour l'autre moitié à la charge de Mme B....

Article 3 : Les conclusions de la commune de Villers-lès-Moivrons présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme G... B... et à la commune de Villers-lès-Moivrons.

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N° 17NC03061


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 17NC03061
Date de la décision : 22/12/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

67-02-05 Travaux publics. Règles communes à l'ensemble des dommages de travaux publics. Personnes responsables.


Composition du Tribunal
Président : M. KOLBERT
Rapporteur ?: M. Olivier DI CANDIA
Rapporteur public ?: M. MICHEL
Avocat(s) : RICHARD

Origine de la décision
Date de l'import : 16/01/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2020-12-22;17nc03061 ?
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