Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société par actions simplifiée (SAS) Sotraro, la SAS TCP Développement et la SAS TCP Logistique ont demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne la restitution des créances de crédit d'impôt compétitivité emploi (CICE) constatées au titre de l'année 2017.
Par un jugement n°s 1801551, 1801554 et 1801555 du 20 juin 2019, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a fait droit à leurs demandes.
Procédure devant la cour :
I. Par une requête, enregistrée le 24 juillet 2019, sous le numéro 1902371, le ministre de l'action et des comptes publics demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 20 juin 2019 ;
2°) de rétablir à la charge de la SAS Sotraro les impositions dont le tribunal administratif a prononcé la décharge et de mettre en conséquence à leur charge la restitution des crédits d'impôt remboursés.
Il soutient que :
- conformément à la décision 2012/838/UE Euratom du 18 décembre 2012, la définition des petites et moyennes entreprises (PME) figurant à l'annexe I du règlement UE n° 651/2014/UE de la commission du 17 juin 2014, reprenant la définition donnée à l'article 4 § 2 de l'annexe I de la recommandation de la commission n° 2003/361/CE du 6 mai 2003, doit être interprétée en ce sens que le délai de deux exercices consécutifs durant laquelle les entreprises qui dépassent les seuils conservent la qualité de petites et moyennes entreprises ne s'appliquait pas dans le cas où l'entreprise avait fusionné ou était rachetée par un plus grand groupe, un tel évènement lui faisant perdre son caractère de PME à compter de la date de la transaction ; cette interprétation a été confirmée par le guide de l'utilisateur édité par la commission en 2015 ;
- c'est donc à tort que le tribunal a écarté ces règles alors que la SAS TCP Logistique est détenue à 100 % par la SAS TCP Développement qui a également acquis 100 % du capital de la SAS Sotraro et que ces trois sociétés se trouvent donc liées dans des conditions de dépassement des seuils des PME dès l'année 2017.
Par un mémoire en défense enregistré le 2 octobre 2019 la SAS Sotraro, représentée par Me C..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que les moyens soulevés ne sont pas fondés.
II. Par une requête, enregistrée le 24 juillet 2019, sous le numéro 1902372 le ministre de l'action et des comptes publics demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 20 juin 2019 ;
2°) de rétablir à la charge de la SAS TCP Développement les impositions dont le tribunal administratif a prononcé la décharge et de mettre en conséquence à leur charge la restitution des crédits d'impôt remboursés.
Il soutient que :
- conformément à la décision 2012/838/UE Euratom du 18 décembre 2012, la définition des petites et moyennes entreprises (PME) figurant à l'annexe I du règlement UE n° 651/2014/UE de la commission du 17 juin 2014, reprenant la définition donnée à l'article 4 § 2 de l'annexe I de la recommandation de la commission n° 2003/361/CE du 6 mai 2003, doit être interprétée en ce sens que le délai de deux exercices consécutifs durant laquelle les entreprises qui dépassent les seuils conservent la qualité de petites et moyennes entreprises ne s'appliquait pas dans le cas où l'entreprise avait fusionné ou était rachetée par un plus grand groupe, un tel évènement lui faisant perdre son caractère de PME à compter de la date de la transaction ; cette interprétation a été confirmée par le guide de l'utilisateur édité par la commission en 2015 ;
- c'est donc à tort que le tribunal a écarté ces règles alors que la SAS TCP Logistique est détenue à 100 % par la SAS TCP Développement qui a également acquis 100 % du capital de la SAS Sotraro et que ces trois sociétés se trouvent donc liées dans des conditions de dépassement des seuils des PME dès l'année 2017.
Par un mémoire en défense, enregistré le 2 octobre 2019, la SAS TCP Développement, représentée par Me C..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que les moyens soulevés ne sont pas fondés.
III. Par une requête, enregistrée le 24 juillet 2019, sous le numéro 1902373 le ministre de l'action et des comptes publics demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 20 juin 2019 ;
2°) de rétablir à la charge de la SAS TCP Logistique les impositions dont le tribunal administratif a prononcé la décharge et de mettre en conséquence à leur charge la restitution des crédits d'impôt remboursés.
Il soutient que :
- conformément à la décision 2012/838/UE Euratom du 18 décembre 2012, la définition des petites et moyennes entreprises (PME) figurant à l'annexe I du règlement UE n° 651/2014/UE de la commission du 17 juin 2014, reprenant la définition donnée à l'article 4 § 2 de l'annexe I de la recommandation de la commission n° 2003/361/CE du 6 mai 2003, doit être interprétée en ce sens que le délai de deux exercices consécutifs durant laquelle les entreprises qui dépassent les seuils conservent la qualité de petites et moyennes entreprises ne s'appliquait pas dans le cas où l'entreprise avait fusionné ou était rachetée par un plus grand groupe, un tel évènement lui faisant perdre son caractère de PME à compter de la date de la transaction ; cette interprétation a été confirmée par le guide de l'utilisateur édité par la commission en 2015 ;
- c'est donc à tort que le tribunal a écarté ces règles alors que la SAS TCP Logistique est détenue à 100 % par la SAS TCP Développement qui a également acquis 100 % du capital de la SAS Sotraro et que ces trois sociétés se trouvent donc liées dans des conditions de dépassement des seuils des PME dès l'année 2017.
Par un mémoire en défense, enregistré le 2 octobre 2019, la SAS TCP Logistique, représentée par Me C..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que les moyens soulevés ne sont pas fondés.
Vu :
- les autres pièces du dossier.
Vu :
- le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ;
- le traité instituant la communauté européenne de l'énergie atomique du 17 avril1957 modifié ;
- le règlement (UE) n° 651/2014 de la commission du 17 juin 2014 ;
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- l'ordonnance n° 2020-1402 et le décret n° 2020-1405 du 18 novembre 2020 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement convoquées à l'audience publique.
Ont été entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. A... ;
- les conclusions de Mme Haudier, rapporteur public,
- et les observations de Me B..., représentant les sociétés Sotraro, TCP Logistique et TCP Développement.
Considérant ce qui suit :
1. La SAS TCP Logistique, la SAS TCP Développement et la SAS Sotraro ont déposé au titre de l'année 2017 une demande de restitution anticipée du crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE) visé à l'article 244 quater C du code général des impôts. Ces demandes ont fait l'objet de décisions de rejet les 9 juillet et 28 juin 2018. Par un jugement du 20 juin 2019, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a fait droit aux demandes des trois sociétés tendant à la restitution de leurs créances de crédit d'impôt. Par les trois requêtes ci-dessus visées, qu'il y a lieu de joindre afin de statuer par un seul arrêt dès lors qu'elle présentent à juger des questions similaires, le ministre de l'économie, des finances et de la relance relève appel de ce jugement.
Sur le bien-fondé de l'imposition :
2. D'une part, aux termes de l'article 199 ter C du code général des impôts, dans sa version applicable au litige, du même code : " I.-Le crédit d'impôt défini à l'article 244 quater C est imputé sur l'impôt sur le revenu dû par le contribuable au titre de l'année au cours de laquelle les rémunérations prises en compte pour le calcul du crédit d'impôt ont été versées. L'excédent de crédit d'impôt constitue, au profit du contribuable, une créance sur l'Etat d'égal montant. Cette créance est utilisée pour le paiement de l'impôt sur le revenu dû au titre des trois années suivant celle au titre de laquelle elle est constatée, puis, s'il y a lieu, la fraction non utilisée est remboursée à l'expiration de cette période. (...) / II.-La créance mentionnée au premier alinéa du I est immédiatement remboursable lorsqu'elle est constatée par l'une des entreprises suivantes : 1° Les entreprises qui satisfont à la définition des micro, petites et moyennes entreprises donnée à l'annexe I au règlement (UE) n° 651/2014 de la Commission du 17 juin 2014 déclarant certaines catégories d'aides compatibles avec le marché intérieur en application des articles 107 et 108 du traité ". Aux termes de l'article 244 quater C du même code : "I. - Les entreprises imposées d'après leur bénéfice réel (...) peuvent bénéficier d'un crédit d'impôt ayant pour objet le financement de l'amélioration de leur compétitivité à travers notamment des efforts en matière d'investissement, de recherche, d'innovation, de formation, de recrutement, de prospection de nouveaux marchés, de transition écologique et énergétique et de reconstitution de leur fonds de roulement. L'entreprise retrace dans ses comptes annuels l'utilisation du crédit d'impôt conformément aux objectifs mentionnés à la première phrase./ II. - Le crédit d'impôt mentionné au I est assis sur les rémunérations que les entreprises versent à leurs salariés au cours de l'année civile. Sont prises en compte les rémunérations, telles qu'elles sont définies pour le calcul des cotisations de sécurité sociale à l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale, n'excédant pas deux fois et demie le salaire minimum de croissance calculé pour un an sur la base de la durée légale du travail augmentée, le cas échéant, du nombre d'heures complémentaires ou supplémentaires, sans prise en compte des majorations auxquelles elles donnent lieu. Pour les salariés qui ne sont pas employés à temps plein ou qui ne sont pas employés sur toute l'année, le salaire minimum de croissance pris en compte est celui qui correspond à la durée de travail prévue au contrat au titre de la période où ils sont présents dans l'entreprise./Pour être éligibles au crédit d'impôt, les rémunérations versées aux salariés doivent être retenues pour la détermination du résultat imposable à l'impôt sur le revenu ou à l'impôt sur les sociétés dans les conditions de droit commun et avoir été régulièrement déclarées aux organismes de sécurité sociale ".
3. D'autre part, le règlement (UE) de la Commission du 17 juin 2014 déclarant certaines catégories d'aide compatibles avec le marché commun en application des articles 107 et 108 du traité, entré en vigueur le 1er juillet 2014 définit, en son annexe I, la catégorie des micro, petites et moyennes entreprises (PME). Aux termes de l'article premier de cette annexe, " Est considérée comme entreprise toute entité, indépendamment de sa forme juridique, exerçant une activité économique (...) ". Aux termes de l'article 2 de cette annexe : " 1. La catégorie des micro, petites et moyennes entreprises (" PME ") est constituée des entreprises qui occupent moins de 250 personnes et dont le chiffre d'affaires annuel n'excède pas 50 millions d'euros ou dont le total du bilan annuel n'excède pas 43 millions d'euros. (...) ". En vertu de l'article 3 de cette même annexe, intitulé " Types d'entreprises pris en considération pour le calcul de l'effectif et des montants financiers " : " 1. Est une " entreprise autonome " toute entreprise qui n'est pas qualifiée comme entreprise partenaire au sens du paragraphe 2 ou comme entreprise liée au sens du paragraphe 3. (...) / 3. Sont des " entreprises liées " les entreprises qui entretiennent entre elles l'une ou l'autre des relations suivantes : / a) une entreprise a la majorité des droits de vote des actionnaires ou associés d'une autre entreprise ; / b) une entreprise a le droit de nommer ou de révoquer la majorité des membres de l'organe d'administration, de direction ou de surveillance d'une autre entreprise ; / c) une entreprise a le droit d'exercer une influence dominante sur une autre entreprise en vertu d'un contrat conclu avec celle-ci ou en vertu d'une clause des statuts de celle-ci ; / d) une entreprise actionnaire ou associée d'une autre entreprise contrôle seule, en vertu d'un accord conclu avec d'autres actionnaires ou associés de cette autre entreprise, la majorité des droits de vote des actionnaires ou associés de celle-ci (...) / Les entreprises qui entretiennent l'une ou l'autre des relations visées au premier alinéa à travers une ou plusieurs autres entreprises, ou avec des investisseurs visés au paragraphe 2, sont également considérées comme liées (...) ". Aux termes de l'article 4 de cette annexe : " 1. Les données retenues pour le calcul de l'effectif et des montants financiers sont celles afférentes au dernier exercice comptable clos et sont calculées sur une base annuelle. Elles sont prises en compte à partir de la date de clôture des comptes. Le montant du chiffre d'affaires retenu est calculé hors taxe sur la valeur ajoutée (TVA) et hors droits ou taxes indirects. / 2. Lorsqu'une entreprise, à la date de clôture des comptes, constate un dépassement dans un sens ou dans un autre et sur une base annuelle, des seuils de l'effectif ou des seuils financiers énoncés à l'article 2, cette circonstance ne lui fait acquérir ou perdre la qualité de moyenne, petite ou micro entreprise que si ce dépassement se produit pour deux exercices consécutifs. / 3. Dans le cas d'une entreprise nouvellement créée et dont les comptes n'ont pas encore été clos, les données à considérer font l'objet d'une estimation de bonne foi en cours d'exercice ". Enfin, aux termes de l'article 6 de cette annexe : " 1. Dans le cas d'une entreprise autonome, la détermination des données, y compris de l'effectif, s'effectue uniquement sur la base des comptes de cette entreprise. / 2. Les données, y compris l'effectif, d'une entreprise ayant des entreprises partenaires ou liées, sont déterminées sur la base des comptes et autres données de l'entreprise, ou - s'ils existent - des comptes consolidés de l'entreprise, ou des comptes consolidés dans lesquels l'entreprise est reprise par consolidation. / Aux données visées au premier alinéa sont agrégées les données des éventuelles entreprises partenaires de l'entreprise considérée, situées immédiatement en amont ou en aval de celle-ci. L'agrégation est proportionnelle au pourcentage de participation au capital ou des droits de vote (le plus élevé de ces deux pourcentages). En cas de participation croisée, le plus élevé de ces pourcentages s'applique. / Aux données visées aux premier et deuxième alinéas sont ajoutées 100 % des données des éventuelles entreprises directement ou indirectement liées à l'entreprise considérée et qui n'ont pas déjà été reprises dans les comptes par consolidation (...) ".
4. Il résulte des dispositions précitées que la créance détenue par une société au titre du crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi n'est immédiatement remboursable à cette société que si celle-ci satisfait à la définition des micro, petites et moyennes entreprises donnée à l'annexe I au règlement (UE) n° 651/2014 de la Commission du 17 juin 2014.
5. Il n'est pas contesté que la SAS TCP Développement, qui détient 100% du capital social de la SAS TCP Logistique, a acquis 100% du capital social de la SAS Sotraro à compter du 16 janvier 2017 et que cette acquisition a conduit pour ces trois sociétés à un dépassement, au titre de leur exercice clos le 31 décembre 2017, des seuils de personnels et de bilan annuel fixés au 1 de l'article 2 de l'annexe I au règlement (UE) n° 651/2014 de la Commission du 17 juin 2014 pour la qualification de PME. Il résulte, toutefois, du paragraphe 2 de l'article 4 de cette même annexe que le dépassement des seuils d'effectif et financier n'a pour effet de faire perdre ou acquérir la qualité de PME que si ce dépassement se produit pour deux exercices consécutifs. Par suite, en ce qui concerne la demande de restitution du crédit d'impôt au titre de l'année 2017, les trois sociétés pouvaient encore se prévaloir de leur qualité de PME au sens des dispositions ci-dessus reproduites.
6. Le ministre de l'action et des comptes publics se prévaut, il est vrai, de la décision n° 2012/838/UE, Euratom du 18 décembre 2012, par laquelle la Commission européenne a précisé, en annexe I, que la règle prévue à l'article 4 paragraphe 2 de l'annexe de la recommandation 2003/361/CE ne s'applique pas si une PME fusionne ou est rachetée par un plus grand groupe, auquel cas la PME perd son statut immédiatement à compter de la date de la transaction. Cependant, cette décision, intervenue dans le cadre du traité Euratom ci-dessus visé et qui ne pourrait dès lors s'imposer qu'à ses destinataires, n'a pas été reprise par la Commission européenne dans le cadre de l'annexe I au règlement (UE) n° 651/2014 de la Commission du 17 juin 2014 et se trouve ainsi dépourvue de valeur règlementaire. Est également dépourvu de caractère règlementaire le guide des utilisateurs édité par la commission en 2015 qui reprend les termes de cette décision. Par suite, le ministre de l'action et des comptes publics n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne n'a pas fait application aux sociétés TCP Développement, TCP Logistique et Sotraro de cette solution.
7. Il résulte de ce qui précède que le ministre de l'action et des comptes publics n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement du 20 juin 2019, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a fait droit aux demandes de restitution des crédits d'impôt compétitivité emploi présentées devant lui par les sociétés TCP Développement, TCP Logistique et Sotraro. Par suite, les requêtes ci-dessus visées du ministre doivent être rejetées.
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
8. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à chacune des sociétés TCP Développement, TCP Logistique et Sotraro de la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par elles dans la présente instance.
D E C I D E :
Article 1er : Les requêtes ci-dessus visées du ministre de l'action et des comptes publics sont rejetées.
Article 2 : L'Etat versera à chacune des sociétés TCP Développement, TCP Logistique et Sotraro la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SAS TCP Développement, la SAS TCP Logistique et à la SAS Sotraro et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.
N°s 19NC02371, 1902372 et 1902373
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