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20/10/2020 | FRANCE | N°20NC01051

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre, 20 octobre 2020, 20NC01051


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler les arrêtés du 6 décembre 2019 par lesquels le préfet du Bas-Rhin, d'une part, lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai de départ volontaire et a fixé le pays de destination de cette mesure d'éloignement, d'autre part, a prononcé son assignation à résidence.

Par un jugement n° 1909146, 1909149 du 19 décembre 2019, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Strasbourg a annu

lé la décision du 6 décembre 2019 portant refus d'octroi d'un délai de départ volontai...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler les arrêtés du 6 décembre 2019 par lesquels le préfet du Bas-Rhin, d'une part, lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai de départ volontaire et a fixé le pays de destination de cette mesure d'éloignement, d'autre part, a prononcé son assignation à résidence.

Par un jugement n° 1909146, 1909149 du 19 décembre 2019, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Strasbourg a annulé la décision du 6 décembre 2019 portant refus d'octroi d'un délai de départ volontaire, ainsi que l'arrêté du même jour portant assignation à résidence et a rejeté le surplus des conclusions à fin d'annulation présentée par M. C....

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 7 mai 2020, M. E..., représenté par Me D..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1909146, 1909149 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Strasbourg du 19 décembre 2019 en tant qu'il rejette ses conclusions à fin d'annulation dirigées contre les décisions du 6 décembre 2019 portant obligation de quitter le territoire français et fixation du pays de destination ;

2°) d'annuler les décisions du 6 décembre 2019 portant obligation de quitter le territoire français et fixation du pays de destination ;

3°) d'enjoindre au préfet du Bas-Rhin de lui délivrer une carte temporaire de séjour dans un délai d'un mois suivant la notification de l'arrêt à intervenir ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans un délai de quinze jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 1 500 euros en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 3 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, relative à l'aide juridique.

Elle soutient que :

- la décision portant obligation de quitter le territoire français est insuffisamment motivée ;

- la décision en litige méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et du premier paragraphe de l'article 3 de la convention internationale des droits de l'enfant ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- elle est illégale en raison de l'illégalité de la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour.

Par un mémoire en défense, enregistré le 23 septembre 2020, la préfète du Bas-Rhin conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que la requête est irrecevable et, subsidiairement, qu'elle n'est pas fondée.

M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 14 mai 2020.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale des droits de l'enfant ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. B... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. E... est un ressortissant brésilien, né le 3 août 1981. Il a déclaré être entré irrégulièrement en France, en dernier lieu, en décembre 2016, accompagné de son épouse et de leur fils mineur, né à Strasbourg le 17 juillet 2015. Interpellé le 6 décembre 2019 par les services du peloton motorisé de la gendarmerie de Schwindratzheim en possession d'une fausse pièce d'identité mentionnant une nationalité portugaise et d'un faux permis de conduire portugais, il a été placé en retenue administrative aux fins de vérification de situation administrative. Par un arrêté du 6 décembre 2019, le préfet du Bas-Rhin lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai de départ volontaire et a fixé le pays de destination de cette mesure d'éloignement. Par un arrêté du même jour, il a prononcé à son encontre une assignation à résidence dans le département du Bas-Rhin pour une durée de quarante-cinq jours. M. C... a saisi le tribunal administratif de Strasbourg d'une demande tendant à l'annulation des arrêtés préfectoraux du 6 décembre 2019. Il relève appel du jugement n° 1909146, 1909149 du 19 décembre 2019 en tant qu'il rejette ses conclusions à fin d'annulation dirigées contre les décisions préfectorales du 6 décembre 2019 portant obligation de quitter le territoire français et fixation du pays de destination.

Sur le bien-fondé du jugement :

2. Aux termes du deuxième alinéa du premier paragraphe de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée. ". Il ressort des pièces du dossier que la décision portant obligation de quitter le territoire français du 6 décembre 2019, qui énonce, dans ses visas et motifs, l'ensemble des considérations de droit et de fait sur lesquelles elle se fonde, est suffisamment motivée. La circonstance que le préfet du Bas-Rhin, qui n'était nullement tenu de faire état de tous les éléments concernant la situation personnelle de l'intéressé, n'ait pas indiqué que M. C... exploite en France une entreprise de maçonnerie, n'est pas de nature à affecter la régularité de cette motivation. Par suite, le moyen manque en fait et ne peut, dès lors, qu'être écarté.

3. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes du premier paragraphe de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ".

4. M. C... se prévaut de ce qu'il séjourne fréquemment en France depuis 2007, qu'il y exploite une entreprise de maçonnerie, que son fils aîné, atteint d'un kyste arachnoïdien encéphalique, y est scolarisé et que son épouse a accouché de leur second enfant le 23 décembre 2019. Toutefois, il est constant que le requérant est entré en dernier lieu, de façon irrégulière, sur le territoire français en décembre 2016, en se faisant passer pour un ressortissant portugais, et qu'il n'a jamais cherché à régulariser sa situation. Il ne ressort pas des pièces du dossier que M. C... et son épouse, dont l'obligation de quitter le territoire français, également prononcée à son encontre le 6 décembre 2019, n'a été annulée par le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Strasbourg que pour un vice de procédure, seraient dans l'impossibilité de reconstituer leur cellule familiale au Brésil, ni que leur fils aîné ne pourrait y poursuivre une scolarité normale et y bénéficier effectivement d'un traitement approprié à sa pathologie. Par suite et alors que les intéressés n'établissent pas être isolés dans leur pays d'origine, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de libertés fondamentales et de celles du premier paragraphe de l'article 3 de la convention internationale des droits de l'enfant doivent être écartés.

5. En troisième lieu, pour les raisons qui viennent d'être exposées, M. C... n'est pas fondé à soutenir que la décision portant obligation de quitter le territoire français serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.

6. En quatrième et dernier lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet du Bas-Rhin, qui n'a été saisi d'aucune demande en ce sens, a prononcé à l'encontre de M. C... un refus de délivrance de titre de séjour. Par suite, le requérant ne saurait utilement exciper de l'illégalité de la décision portant refus de séjour à l'encontre des décisions attaquées.

7. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée en défense par la préfète du Bas-Rhin, que M. C... n'est pas fondé à demander l'annulation des décisions préfectorales du 6 décembre 2019 portant obligation de quitter le territoire français et fixation du pays de destination. Par suite, il n'est pas davantage fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Strasbourg a rejeté les conclusions à fin d'annulation dirigées contre ces décisions. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et ses conclusions à fin d'application des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent qu'être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet du Bas-Rhin.

N° 20NC01051 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 20NC01051
Date de la décision : 20/10/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme VIDAL
Rapporteur ?: M. Eric MEISSE
Rapporteur public ?: Mme SEIBT
Avocat(s) : GOLDBERG

Origine de la décision
Date de l'import : 05/11/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2020-10-20;20nc01051 ?
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