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15/10/2020 | FRANCE | N°18NC03339

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2ème chambre, 15 octobre 2020, 18NC03339


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme G... C... a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler la décision du 7 avril 2016 par laquelle le centre hospitalier universitaire de Reims a refusé de renouveler son contrat à durée déterminée.

Par un jugement n° 1601154 du 12 avril 2018, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté la requête.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 12 décembre 2018 et 16 septembre 2020, Mme G... C..., représent

e par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 12 avril 2018 par lequel le tribu...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme G... C... a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler la décision du 7 avril 2016 par laquelle le centre hospitalier universitaire de Reims a refusé de renouveler son contrat à durée déterminée.

Par un jugement n° 1601154 du 12 avril 2018, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté la requête.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 12 décembre 2018 et 16 septembre 2020, Mme G... C..., représentée par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 12 avril 2018 par lequel le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 7 avril 2016 par laquelle le centre hospitalier universitaire de Reims a refusé de renouveler son contrat à durée déterminée ;

2°) d'annuler cette décision du 7 avril 2016 ;

3°) d'enjoindre au centre hospitalier universitaire de Reims de prendre une nouvelle décision en procédant préalablement à son reclassement ;

4°) de condamner le centre hospitalier universitaire de Reims à lui verser une somme de 15 000 euros en réparation du préjudice subi ;

5°) de mettre à la charge du centre hospitalier universitaire de Reims une somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

Sur la régularité du jugement :

- les premiers juges ont omis de statuer sur sa demande de reclassement ;

Sur la légalité de la décision du 7 avril 2016 :

- M. B..., directeur des ressources humaines, était incompétent pour prendre la décision attaquée, faute de délégation de signature régulièrement publiée et affichée conformément aux exigences de l'article R. 6143-38 du code de la santé publique ;

- ayant été déclarée inapte à son poste, le centre hospitalier universitaire de Reims était tenu de suivre la procédure des 17-1, 17-2, 41 et suivants du décret n°91-155 du 6 février 1991 ; la décision est entachée de vices de procédure ;

- le centre hospitalier universitaire de Reims a commis une erreur de droit en prenant une décision de non-renouvellement du contrat à durée déterminée alors que son inaptitude physique préexistait, méconnaissant ainsi les articles 12 et 17 du décret précité ; le non renouvellement de son contrat ne pouvait être envisagé qu'en cas d'impossibilité de la reclasser sur un autre poste ;

- son contrat devait être suspendu jusqu'à sa guérison totale en application de l'article 12 du décret du 6 février 1991 ;

- la décision est entachée d'un détournement de pouvoir ;

- sa demande indemnitaire est recevable dès lors que le défendeur a lié le contentieux ;

- elle a subi des préjudices financiers, matériels, personnels et moraux causés par l'illégalité de la décision attaquée.

Par un mémoire en défense, enregistré le 7 mai 2019, le centre hospitalier universitaire de Reims, représenté par Me H..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de Mme C... une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient les moyens soulevés par Mme C... ne sont pas fondés.

Mme C... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 18 octobre 2018.

Vu :

- les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de la santé publique ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

- le décret n° 91-155 du 6 février 1991

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme D...,

- les conclusions de Mme Haudier, rapporteur public,

- et les observations de Me H... représentant le centre hospitalier universitaire de Reims.

Considérant ce qui suit :

1. Mme C... a été recrutée en qualité d'agent des services hospitaliers (ASH) par le centre hospitalier universitaire (CHU) de Reims sous contrats à durée déterminée successifs du 2 juillet 2012 au 30 juin 2016. Elle a été placée en arrêt de travail à compter du 23 juillet 2015, puis en arrêt de maladie professionnelle à compter du 29 septembre 2015. Le 29 mars 2016, elle a été déclarée inapte à ses fonctions antérieures d'ASH. Par décision du 7 avril 2016, le directeur des ressources humaines du CHU de Reims a informé Mme C... de son refus de renouveler son contrat à durée déterminée à son terme. Mme G... C... relève appel du jugement du 12 avril 2018 par lequel le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision du 7 avril 2016.

Sur la régularité du jugement :

2. Il ressort des motifs du jugement attaqué, et notamment du point 7, que le tribunal administratif, qui n'était pas tenu de répondre à tous les arguments avancés par les parties, a suffisamment précisé les motifs pour lesquels il a écarté le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 17 du décret n° 91-155 du 6 février 1991 comme étant inopérant. Par suite, les premiers juges ont répondu au moyen tiré de ce que la requérante devait au regard de ces dispositions se voir proposer un reclassement préalablement à son licenciement. D'ailleurs, il ne ressort pas des écritures de première instance de Mme C... que cette dernière ait formulé une demande de reclassement. Dans ces conditions, le moyen tiré de défaut de réponse à un moyen ne peut qu'être écarté. Il s'ensuit que le jugement est régulier.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

3. En premier lieu, aux termes de l'article D. 6143-33 du code de la santé publique : " Dans le cadre de ses compétences définies à l'article L. 6143-7, le directeur d'un établissement public de santé peut, sous sa responsabilité, déléguer sa signature ". L'article R. 6143-38 du code de la santé publique, qui s'applique sans préjudice des obligations de publication prévues par d'autres dispositions du même code, prévoit que les décisions réglementaires des directeurs des établissements publics de santé " sont affichées sur des panneaux spécialement aménagés à cet effet et aisément consultables par les personnels et les usagers. Lorsque ces décisions ou délibérations font grief à d'autres personnes que les usagers et les personnels, elles sont, en outre, publiées au bulletin des actes administratifs de la préfecture du département dans lequel l'établissement a son siège (...) ".

4. D'une part, la décision contestée a été signée par M. E... B..., directeur des ressources humaines à qui Mme F..., directrice générale du CHU de Reims a, par une décision du 2 mars 2015 accordé une délégation de signature pour signer, notamment, " (...) tous actes de gestion ou d'organisation, décisions ou courriers relatifs aux personnels non médicaux à l'exclusion des sanctions disciplinaires. (...) ".

5. D'autre part, il ressort des pièces du dossier que la délégation de signature concernant le signataire de la décision en litige a été publiée au recueil des actes administratifs de la préfecture de la Marne. En outre, le CHU de Reims a produit devant les premiers juges une attestation du directeur des ressources humaines du 28 novembre 2017 qui certifie sur l'honneur que les délégations de compétence et de signature le concernant ont toutes été publiées au recueil des actes administratifs de la préfecture de la Marne, ce qui est en effet confirmé par l'examen dudit recueil, comme il vient d'être dit, et qu'elles ont été en outre " régulièrement affichées sur des panneaux du centre hospitalier universitaire de Reims aménagés à cet effet, rendant chaque délégation consultable. " En se bornant à soutenir que cette attestation ne présente pas un caractère suffisamment probant, Mme C... n'apporte pas d'élément permettant de contredire utilement les déclarations sur l'honneur du directeur des ressources humaines. Il s'ensuit qu'en l'espèce, le CHU doit être regardé comme justifiant d'une publication régulière de la délégation de signature consentie au directeur des ressources humaines.

6. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de la décision attaquée manque en fait et doit être écarté.

7. En deuxième lieu, aux termes de l'article 14 du décret n° 91-155 du 6 février 1991 relatif aux dispositions générales applicables aux agents contractuels des établissements mentionnés à l'article 2 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière : " L'agent contractuel cessant ses fonctions pour raison de santé, pour maternité, adoption, paternité ou accueil d'un enfant, qui se trouve, en raison de temps de service insuffisant, sans droit à congé rémunéré : 1° Est, en cas de maladie, placé en congé sans traitement pendant une durée maximale d'une année si l'incapacité d'exercer les fonctions est temporaire et, si l'incapacité de travail est définitive, bénéficie des dispositions des articles 17-1 et 17-2 ; (...) ". Aux termes de l'article 17 du même décret : " L'agent contractuel temporairement inapte pour raison de santé à reprendre son service à l'issue d'un congé de maladie, (...) est placé en congé sans traitement pour une durée maximale d'un an, (...). / A l'issue de ses droits à congé sans traitement prévus au premier alinéa du présent article et à l'article 14 du présent décret, l'agent non titulaire inapte physiquement à reprendre son service est licencié selon les modalités fixées aux articles 17-1 et 17-2. ". Aux termes de l'article 17-1 du même décret : " I.- Lorsqu'à l'issue d'un congé prévu au présent titre, il a été médicalement constaté par le médecin agréé qu'un agent se trouve, de manière définitive, atteint d'une inaptitude physique à occuper son emploi, l'autorité investie du pouvoir de nomination convoque l'intéressé à l'entretien préalable prévu à l'article 43 et selon les modalités définies au même article. (...) " Aux termes de l'article 17-2 du même décret : " I.- Lorsque, à l'issue du délai prévu au III de l'article 17-1, le reclassement n'est pas possible ou lorsque l'agent refuse le bénéfice de la procédure de reclassement ou s'il n'a pas formulé de demande écrite dans le délai indiqué au deuxième alinéa de l'article 17-1, l'agent est licencié au terme du préavis prévu à l'article 42. (...) ".

8. La décision en litige du 7 avril 2016 a eu pour objet de ne pas reconduire au-delà de son terme le contrat à durée déterminée de Mme C... et non de la licencier avant le terme de son contrat. Il s'ensuit que Mme C... ne peut utilement se prévaloir des dispositions du 1° de l'article 14 du décret du 6 février 1991 dès lors que l'intéressée n'a pas cessé ses fonctions pour raisons de santé au sens de cet article et n'a pas été licenciée au sens de l'article 17 de ce même décret. Par suite, Mme C... n'est pas fondée à soutenir qu'elle a été privée des garanties prévues aux articles 17-1 et 17-2 de ce décret et n'est pas davantage fondée à soutenir que le CHU était tenu de la licencier pour inaptitude physique et de procéder à son reclassement. De même, aucune disposition législative ou réglementaire ni aucun principe général du droit n'imposent, à peine d'illégalité, que les décisions portant refus de renouvellement de contrat soient précédées d'un entretien préalable et que l'agent concerné soit invité à prendre connaissance de son dossier, dès lors que la mesure ne revêt pas un caractère disciplinaire.

9. En troisième lieu, aux termes de l'article 41 du décret du 6 février 1991 : " Lorsque l'agent contractuel a été recruté par un contrat à durée déterminée susceptible d'être renouvelé en application des dispositions législatives ou réglementaires qui lui sont applicables, l'autorité signataire du contrat notifie à l'intéressé son intention de renouveler ou non le contrat, au plus tard : / (...) 3° Deux mois avant le terme de l'engagement pour l'agent recruté pour une durée supérieure à deux ans. (...) / La notification de la décision doit être précédée d'un entretien lorsque le contrat est susceptible d'être reconduit pour une durée indéterminée ou lorsque la durée du contrat ou de l'ensemble des contrats conclus pour répondre à un besoin permanent est supérieure ou égale à trois ans. / (...) Lorsqu'il lui est proposé de renouveler son contrat, l'agent dispose d'un délai de huit jours pour faire connaître, le cas échéant, son acceptation. Faute de réponse dans ce délai, l'intéressé est présumé renoncer à l'emploi. ".

10. Mme C... ne justifie pas que son contrat était susceptible d'être reconduit pour une durée indéterminée ou que la durée de l'ensemble de ces contrats conclus pour répondre à un besoin permanent est supérieure ou égale à trois ans au sens des dispositions précitées de l'article 41 du décret du 6 février 1991. Par ailleurs, le CHU a respecté le délai fixé au premier alinéa de l'article 41 du décret du 6 février 1991 en informant la requérante par courrier du 7 avril 2016 du non renouvellement de son contrat à son terme le 30 juin 2016. En outre, les articles 41-2 et suivants de ce même décret dont se prévaut Mme C..., relatifs au licenciement des agents contractuels, ne sont pas applicables à sa situation comme il a déjà été dit au point 8. Il s'ensuit que le moyen tiré de la méconnaissance de l'ensemble de ces dispositions doit être écarté.

11. En quatrième lieu, aux termes de l'article 12 du décret du 6 février 1991 : " L'agent contractuel en activité bénéficie en cas d'accident du travail ou de maladie professionnelle d'un congé pendant toute la période d'incapacité de travail jusqu'à la guérison complète, la consolidation de la blessure ou le décès. ". Il résulte de ces dispositions que la circonstance qu'un agent contractuel soit en congé pour accident de service ou pour maladie professionnelle à la date d'échéance de son contrat à durée déterminée ne fait pas obstacle à ce que ce contrat cesse de produire ses effets à cette date. Le moyen tiré de la suspension du contrat à durée déterminée de Mme C... doit être par suite écarté.

12. En dernier lieu, le titulaire d'un contrat à durée déterminée ne saurait se prévaloir d'un droit au renouvellement de ce contrat et l'administration peut toujours, pour des motifs tirés de l'intérêt du service, décider de ne pas renouveler et de mettre fin aux fonctions de l'agent recruté sur son fondement. Lorsque l'agent a saisi le juge d'une demande tendant à ce que soit constatée l'illégalité de la décision de non-renouvellement de son contrat et conteste qu'elle a été prise dans l'intérêt du service, il appartient à l'administration, lorsqu'ils ne sont pas mentionnés dans la décision, de faire connaître au juge les motifs qui justifient, selon elle, de ne pas renouveler le contrat d'un agent.

13. Mme C... soutient que la décision en litige est entachée d'un détournement de pouvoir et a eu en réalité pour but de ne pas la faire bénéficier d'un licenciement pour inaptitude physique.

14. Il ressort des pièces du dossier que dans ses écritures en appel, le CHU indique qu'il a tiré toutes les conséquences de l'avis du médecin du travail du 29 mars 2016, qui déclare Mme C... inapte à ses fonctions antérieures d'ASH, en décidant de ne pas la renouveler dans ses fonctions. Les contrats à durée déterminée conclus avec l'intéressée étaient justifiés " par l'attente du pourvoi du poste par voie statutaire ". Dans ces conditions, il ne ressort pas des pièces du dossier que la décision de ne pas renouveler le contrat de Mme C... soit fondée sur des motifs étrangers au service. Par suite, le détournement de pouvoir allégué n'est pas établi.

15. Il résulte de tout ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande.

Sur les conclusions indemnitaires :

16. Compte tenu des développements précédents qui admettent la légalité de la décision attaquée, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par l'intimé, les conclusions présentées par Mme C... tendant au versement d'une indemnité doivent être rejetées par voie de conséquence.

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

17. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du CHU de Reims qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que Mme C... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de Mme C... la somme demandée par le CHU de Reims au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par le CHU de Reims sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme G... C... et au CHU de Reims.

2

N° 18NC03339


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 18NC03339
Date de la décision : 15/10/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-12-03-02 Fonctionnaires et agents publics. Agents contractuels et temporaires. Fin du contrat. Refus de renouvellement.


Composition du Tribunal
Président : M. MARTINEZ
Rapporteur ?: Mme Stéphanie LAMBING
Rapporteur public ?: Mme HAUDIER
Avocat(s) : GABON

Origine de la décision
Date de l'import : 27/01/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2020-10-15;18nc03339 ?
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