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24/09/2020 | FRANCE | N°19NC03003

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2ème chambre, 24 septembre 2020, 19NC03003


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. F... D... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg, d'une part, d'annuler la décision du 12 juin 2015 par laquelle l'évêque de Metz l'a licencié ainsi que les décisions implicites de rejet de ses recours gracieux et hiérarchique, d'autre part, d'enjoindre à la mense épiscopale de le réintégrer dans ses fonctions et, enfin, de supprimer un passage qu'il estimait diffamatoire dans les écritures en défense.

Par un jugement n° 1506561 du 15 novembre 2017, le tribunal administratif de St

rasbourg a, d'une part, annulé la décision du 12 juin 2015 et les décisions rejeta...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. F... D... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg, d'une part, d'annuler la décision du 12 juin 2015 par laquelle l'évêque de Metz l'a licencié ainsi que les décisions implicites de rejet de ses recours gracieux et hiérarchique, d'autre part, d'enjoindre à la mense épiscopale de le réintégrer dans ses fonctions et, enfin, de supprimer un passage qu'il estimait diffamatoire dans les écritures en défense.

Par un jugement n° 1506561 du 15 novembre 2017, le tribunal administratif de Strasbourg a, d'une part, annulé la décision du 12 juin 2015 et les décisions rejetant les recours gracieux et hiérarchique formés par M. D..., d'autre part, enjoint à l'évêque de Metz de procéder à la réintégration et à la reconstitution des droits de M. D... et, enfin, rejeté le surplus de la demande de M. D....

Par un arrêt n°s 17NC03112, 17NC03113 du 27 décembre 2018, la cour administrative d'appel de Nancy a rejeté l'appel formé par l'évêque de Metz contre ce jugement et a prononcé un non-lieu à statuer sur ses conclusions tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution dudit jugement.

Par une décision du 28 février 2020, le Conseil d'Etat statuant au contentieux a, saisi d'un pourvoi présenté pour l'Evêque de Metz, annulé l'arrêt de la cour administrative d'appel de Nancy du 27 décembre 2018 et a renvoyé l'affaire devant la même cour.

Procédure devant la cour :

I. ) Par une requête et des mémoires complémentaires, enregistrés sous le n° 20NC00532, les 26 décembre 2017, 5 avril 2018 et 6 août 2020, l'évêque de Metz, représenté par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 15 novembre 2017 en tant qu'il a annulé la décision du 12 juin 2015 ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. D... devant le tribunal administratif de Strasbourg ;

3°) de mettre à la charge de M. D... une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le tribunal administratif n'était pas compétent pour se prononcer sur la demande de M. D... ; en effet, la juridiction administrative n'est pas compétente pour statuer sur ce type de litige ;

- c'est à tort que le tribunal administratif a considéré que la commission consultative paritaire prévue à l'article 1-2 du décret du 17 janvier 1986 aurait dû être consultée ; les dispositions de ce décret ne s'appliquent pas aux agents rémunérés par l'Etat ; M. D... n'était pas un agent de la mense épiscopale ; une telle commission n'avait pas été constituée et ne pouvait pas l'être ; il s'agit d'une formalité impossible ;

- les autres moyens invoqués par M. D... ne sont pas fondés ; le principe du contradictoire a été respecté ; les faits reprochés à M. D... sont établis et sont de nature à justifier son licenciement ; M. D... n'établit pas le harcèlement moral dont il aurait été victime.

Par des mémoires, enregistrés les 2 février 2018 et 13 mai 2020, M. D..., représenté par Me G..., demande à la cour :

1°) de rejeter la requête de l'évêque de Metz ;

2°) en cas d'annulation du jugement du 15 novembre 2017 :

- à titre principal, d'annuler la décision du 12 juin 2015 ainsi que les décisions implicites de rejet de ses recours gracieux et hiérarchique ;

- à titre subsidiaire, " d'appliquer l'article R. 771-2 du code de justice administrative et de demander au juge judiciaire " d'annuler la décision du 12 juin 2015 et la décision implicite rejetant son recours gracieux ;

- d'enjoindre à l'évêque de Metz de le réintégrer dans ses fonctions ;

- d'enjoindre à l'évêque de Metz et au ministre de l'intérieur de reconstituer sa carrière ;

3°) de mettre à la charge de l'évêque de Metz ou de la mense épiscopale une somme de 3 185 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- les moyens invoqués en appel par l'évêque de Metz ne sont pas fondés ;

- la juridiction administrative était bien compétente pour statuer sur sa demande ;

- si la cour décidait de voir dans la décision litigieuse une décision religieuse, il ne pourrait pas bénéficier d'un recours effectif devant un tribunal impartial pour contester cette décision ;

- son contrat relève de la loi du 31 mars 1873 relative au statut des fonctionnaires d'Empire ;

- il a été privé de la possibilité de faire un recours afin que son traitement soit maintenu à la suite de la décision de licenciement puisqu'aucune décision d'arrêt de versement du salaire ne lui a été notifiée ;

- seul le ministre de l'intérieur était compétent pour prendre la décision de retrait d'emploi en application des articles 69 et 84 de la loi du 31 mars 1873 ;

- le ministre n'était pas en situation de compétence liée pour suspendre son salaire ;

- la décision du 12 juin 2015 ne comporte aucune motivation en droit et n'est pas suffisamment motivée ; faute de motivation régulière, il a été privé d'une garantie ;

- la procédure disciplinaire prévue par le règlement du 18 avril 1880 n'a pas été respectée ; les articles 72 et 83 de la loi du 31 mars 1873 sont toujours en vigueur ;

- la commission consultative paritaire prévue à l'article 1-2 du décret du 17 janvier 1986, applicable rétroactivement, n'a pas été consultée ; l'évêque de Metz n'établit pas que cette consultation constituait une formalité impossible ;

- les droits de la défense et le principe d'égalité des armes, garantis par l'article 7 de la convention OIT n° 158, l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et un principe général du droit, ont été méconnus ; les rapports des audits réalisés ne lui ont pas été communiqués alors qu'ils pouvaient et auraient dû l'être ; les personnes qui ont initié la procédure n'étaient pas impartiales ;

- son dossier administratif n'était pas complet et comportait des notes manuscrites qui ne sauraient être prises en compte faute d'horodatage des pièces tel que prévu par le décret du 17 janvier 1986 ;

- contrairement à ce que soutient l'évêché, son contrat ne s'est pas terminé au 1er novembre 2010 mais s'est poursuivi jusqu'au 13 juin 2015 sous la forme de deux contrats dont l'un portant à compter du 1er novembre 2010 sur un poste des cultes ; il a continué d'occuper son emploi de responsable informatique et téléphonie et non un emploi de secrétaire des évêchés comme mentionné à tort sur ses fiches de paie afin que son salaire soit partiellement pris en charge par l'Etat ;

- il a été convoqué à un entretien préalable le 4 mai 2015 alors que le rapport disciplinaire n'est daté que du 5 mai 2015 ;

- les faits qui lui sont reprochés relatifs aux logiciels et systèmes informatiques et à ses prétendues incompétences et manquements ne sont pas établis ; l'évêque produit des faux pour justifier ses allégations ;

- il n'est pas établi qu'il aurait commis une faute lourde ;

- la mesure est en lien avec ses activités syndicales ;

- dès lors que la mise à pied conservatoire doit être requalifiée en mise à pied disciplinaire, il a été sanctionné deux fois pour les mêmes faits ;

- la suppression de son salaire qui lui était versé par la mense épiscopale est illégale et constitutive de faits de harcèlement moral ;

- la décision de licenciement a été prise avant son entretien préalable puisque la personne le remplaçant sur son poste a été nommée dès le 25 mars 2015 ;

- s'il a proposé de démissionner en échange du versement du salaire payé par la mense épiscopale sur une certaine période, il se prévaut de l'état de nécessité dans lequel il se trouvait ;

- il a été victime de faits de harcèlement moral.

II. ) Par une ordonnance en date du 17 octobre 2019, la présidente de la cour a décidé l'ouverture d'une procédure juridictionnelle.

Par des mémoires, enregistrés sous le n°19NC03003, les 8 novembre, 16 et 28 décembre 2019, et 6 janvier 2020 M. D... demande à la cour :

1°) d'enjoindre, sous astreinte de deux euros par jour de retard, à l'évêque de Metz de prendre les mesures qu'implique l'exécution du jugement n° 1506561 du 15 novembre 2017 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a annulé la décision du 12 juin 2015 et les décisions rejetant les recours gracieux et hiérarchique formés par M. D... et enjoint à l'évêque de Metz de procéder à la réintégration et à la reconstitution des droits de M. D... ;

2°) de mettre à la charge de l'évêque de Metz une somme de cent euros et de cinquante euros à la charge de l'Etat en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que les mesures prises par l'évêque de Metz ne permettent pas d'assurer l'exécution complète du jugement du tribunal administratif.

Par des mémoires en date du 3 décembre 2019 et 9 janvier 2020, l'évêque de Metz, représenté par Me A..., conclut au rejet de la demande de M. D... et à ce qu'il soit mis à sa charge une somme de 1 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que les moyens soulevés par M. D... ne sont pas fondés.

Vu :

- les autres pièces des dossiers ;

Vu :

- la convention OIT n° 158 ;

- la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention du 26 messidor an IX et ses articles organiques ;

- la loi du 18 germinal an X ;

- la loi du 1er juin 1924 mettant en vigueur la législation civile française dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle ;

- la loi du 31 mars 1873 relative au statut des fonctionnaires d'Empire ;

- la loi d'Alsace-Lorraine du 23 décembre 1873 ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public dont les dispositions ont été reprises par le code des relations entre le public et l'administration ;

- l'ordonnance du 1er septembre 1911 relative aux traitements et pensions des employés de secrétariat des autorités supérieures des cultes reconnus

- le décret n° 86-83 du 17 janvier 1986 ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme E...,

- les conclusions de M. Michel, rapporteur public,

- et les observations de Me A..., représentant l'évêque de Metz.

Une note en délibéré, enregistrée le 3 septembre 2020, a été présentée par M. D....

Considérant ce qui suit :

1. M. D... a été recruté le 7 juin 2010 par la mense épiscopale du diocèse de Metz, dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée, en qualité de responsable de la mission informatique et nouvelles technologies de l'évêché de Metz puis il a exercé les mêmes fonctions en étant affecté à compter du 1er novembre 2010 sur un poste de secrétaire des cultes et rémunéré par l'Etat. Par une décision du 12 juin 2015, l'évêque de Metz l'a licencié pour faute. Par un jugement du 15 novembre 2017, le tribunal administratif de Strasbourg a annulé cette décision, ainsi que les décisions implicites de rejet des recours gracieux et hiérarchique formés par M. D... et a enjoint à la mense épiscopale de procéder à la réintégration et à la reconstitution des droits de M. D.... L'intéressé a saisi la cour d'une demande d'exécution de ce jugement du 15 novembre 2017. L'évêque de Metz a quant à lui relevé appel de ce jugement devant la cour administrative d'appel de Nancy, qui par un arrêt du 27 décembre 2018, a rejeté sa demande. Sur pourvoi de l'évêque de Metz, le Conseil d'Etat statuant au contentieux a annulé cet arrêt par décision du 28 février 2020 et a renvoyé l'affaire devant la même cour.

2. Les requêtes n°19NC03003 et 20NC00532 respectivement présentées par M. D... et l'évêque de Metz présentent à juger les mêmes questions et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.

Sur la régularité du jugement :

3. La mense épiscopale de Metz, organe du culte catholique reconnu d'Alsace-Moselle, est un établissement public du culte chargé de gérer, sous l'autorité de l'évêque de Metz, les biens du diocèse. Les agents rémunérés par l'Etat et recrutés par l'évêque en vue d'administrer, sous sa direction, les biens du diocèse sont des agents de droit public, sauf s'ils sont affectés à une activité qui constitue un service public industriel et commercial.

4. En l'espèce, si M. D... était rémunéré par l'Etat et a signé une déclaration d'obédience à l'évêque de Metz, il a été recruté, ainsi qu'il a été dit au point 1, afin d'exercer les fonctions de responsable de la " mission informatique et nouvelles technologies " du diocèse de Metz. Il ne peut être regardé comme ayant été affecté à une activité qui constitue un service public industriel et commercial. En outre, contrairement à ce que soutient l'évêque de Metz en appel, ni la décision d'employer M. D... en qualité de " secrétaire d'évêché " rémunéré par l'Etat, ni celle de mettre fin à ses fonctions ne peuvent être regardées comme constituant des actes d'organisation du culte. Ces décisions ont été prises par l'évêque non en sa qualité d'autorité religieuse mais en tant qu'autorité gestionnaire du service public du culte catholique et sont dès lors des mesures d'administration du service public du culte catholique. Le tribunal administratif de Strasbourg était, par suite, compétent pour statuer sur les demandes présentées par M. D....

Sur la légalité de la décision de licenciement du 12 juin 2015 et des décisions subséquentes :

En ce qui concerne le motif d'annulation retenu par le tribunal :

5. En premier lieu, le décret du 17 janvier 1986 relatif aux dispositions applicables aux agents non titulaires de l'Etat pris pour l'application de l'article 7 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat pose les règles applicables aux agents non titulaires de l'Etat et de ses établissements publics à caractère administratif. Ainsi que l'a jugé le Conseil d'Etat statuant au contentieux par sa décision n° 383412 du 22 juillet 2016, la mense épiscopale de Metz, qui a le statut d'établissement public du culte, doit être regardée, pour l'application de ce décret, comme un établissement public de l'Etat à caractère administratif. Il en résulte que les agents publics de la mense épiscopale sont régis par ses dispositions et que le pouvoir disciplinaire de l'évêque s'exerce dans le cadre qu'elles définissent.

6. Aux termes de l'article 1-2 du décret du 17 janvier 1986 : " Dans toutes les administrations de l'Etat et dans tous les établissements publics de l'Etat, il est institué, par arrêté du ministre intéressé ou par décision de l'autorité compétente de l'établissement public, une ou plusieurs commissions consultatives paritaires comprenant en nombre égal des représentants de l'administration et des représentants des personnels mentionnés à l'article 1er. / Lorsque les effectifs d'agents contractuels d'un établissement sont insuffisants pour permettre la constitution d'une commission consultative paritaire en son sein, la situation des personnels concernés est examinée par une commission consultative paritaire du département ministériel correspondant désignée par arrêté du ministre intéressé. / Ces commissions sont obligatoirement consultées sur les décisions individuelles relatives aux licenciements intervenant postérieurement à la période d'essai au non-renouvellement du contrat des personnes investies d'un mandat syndical et aux sanctions disciplinaires autres que l'avertissement et le blâme (...) ".

7. Ainsi que l'a jugé le Conseil d'Etat statuant au contentieux par sa décision n° 428441 du 28 février 2020, à la date du licenciement de M. D..., intervenu le 12 juin 2015, les personnels des menses épiscopales n'étaient pas, en l'absence de décision du Conseil d'Etat ayant clarifié les règles juridiques applicables aux personnels administratifs des cultes dans les départements du Haut-Rhin, du Bas-Rhin et de la Moselle, alors que les juridictions du fond avaient pris sur ce point des positions différentes, considérés comme étant soumis au décret du 17 janvier 1986 relatif aux agents non titulaires de l'Etat, qui ne vise d'établissements publics que ceux de l'Etat. En conséquence, aucune commission consultative paritaire compétente pour ces établissements n'était alors constituée. Eu égard à ces circonstances particulières, qui, en l'espèce, rendaient alors impossible la mise en oeuvre de la procédure prévue à l'article 1-2 du décret du 17 janvier 1986 précité, la consultation de la commission consultative paritaire prévue à l'article 1-2 du décret du 17 janvier 1986 constituait une formalité impossible.

8. Il résulte de ce qui précède que l'évêque de Metz est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement du 15 novembre 2017, le tribunal administratif de Strasbourg s'est fondé, pour annuler sa décision du 12 juin 2015 par laquelle il a licencié M. D... pour faute ainsi que les décisions implicites de rejet des recours gracieux et hiérarchique formés par ce dernier, sur le moyen de M. D... tiré de ce que la procédure était irrégulière en l'absence de consultation de la commission consultative paritaire, cette irrégularité ayant privé l'intéressé d'une garantie.

9. Toutefois, il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. D... devant le tribunal administratif de Strasbourg et devant la cour.

En ce qui concerne les autres moyens de M. D... :

S'agissant du cadre juridique du litige :

10. Aux termes de l'article 1er de la loi d'Empire du 31 mars 1873 relative au statut des fonctionnaires d'Empire, maintenue en vigueur dans les départements du Bas Rhin, du Haut Rhin et de Moselle : " Est fonctionnaire d'Empire, au sens de la présente loi, tout fonctionnaire nommé par l'Empereur, ou tenu, aux termes de la Constitution de l'Empire, d'obéir aux ordres de l'Empereur ". Aux termes de l'article premier de la loi d'Alsace-Lorraine du 23 décembre 1873 relative au statut des fonctionnaires et des maîtres de l'enseignement : " La loi d'Empire ci-annexée du 31 mars 1873 relative au statut des fonctionnaires d'Empire est introduite en Alsace-Lorraine. / Elle règle le statut des fonctionnaires d'Alsace-Lorraine qui touchent des émoluments sur le Trésor d'Alsace-Lorraine, ainsi que les maîtres et maîtresses de l'enseignement public. (...) ". Aux termes de l'article 8 de l'ordonnance d'Empire du 1er septembre 1911 : " Les autorités supérieures des cultes sont tenues à notifier au ministère la nomination et la révocation des employés de secrétariat (...) ".

11. D'une part, les agents publics rémunérés par l'Etat et employés par la mense épiscopale de Metz, établissement public du culte en vertu du droit local maintenu en vigueur, sont recrutés par l'évêque et chargés d'administrer, sous sa direction, les biens du diocèse. Eu égard à leurs conditions de recrutement et d'emploi, sous l'autorité de l'évêque, ils ne sont pas régis par les dispositions de la loi du 31 mars 1873 qui ne s'appliquent qu'à un " fonctionnaire nommé par l'Empereur ou tenu (...) d'obéir à ses ordres ".

12. D'autre part, comme il a été dit au point 5, la mense épiscopale de Metz, qui a le statut d'établissement public du culte, doit être regardée, pour l'application du décret 17 janvier 1986 précité, comme un établissement public de l'Etat à caractère administratif. Il en résulte que les agents publics de la mense épiscopale sont régis par ses dispositions et que le pouvoir disciplinaire de l'évêque s'exerce dans le cadre qu'elles définissent.

13. Il s'ensuit que M. D... ne saurait se prévaloir des dispositions de la loi d'Alsace-Lorraine du 23 décembre 1873 dès lors qu'il relève du décret du 17 janvier 1986.

S'agissant de la légalité externe de la décision litigieuse du 12 juin 2015 :

14. En premier lieu, aux termes de l'article 1er de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 alors en vigueur : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : (...) - infligent une sanction (...) " ; aux termes de l'article 43-2 du décret du 17 janvier 1986 : " Les sanctions disciplinaires susceptibles d'être appliquées aux agents contractuels sont les suivantes : (...) 4° Le licenciement, sans préavis ni indemnité de licenciement. La décision prononçant une sanction disciplinaire doit être motivée. ".

15. Si M. D... soutient que la décision de licenciement ne satisfait pas aux exigences de motivation posées par la loi susvisée n° 79-587 du 11 juillet 1979, il ressort des pièces du dossier que la décision du 12 juin 2015 de l'évêque de Metz mettant fin sans délai aux fonctions de M. D..., qui se réfère à l'article 8 de l'ordonnance du 1er septembre 1911, énonce avec précision et de façon circonstanciée l'ensemble des griefs reprochés à l'intéressé en indiquant les considérations de fait qui fondent la sanction disciplinaire prononcée à son encontre. Il s'ensuit que le moyen tiré du défaut de motivation de la décision de licenciement doit être écarté sans que l'intéressé puisse utilement invoquer, s'agissant de la régularité formelle de l'acte attaqué, le caractère inapplicable du texte mentionné.

16. En deuxième lieu, M. D... soutient que la procédure de licenciement est entachée de partialité faute d'avoir pu obtenir la communication des audits cités dans la décision de licenciement.

17. D'une part, les stipulations de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales relatives au droit de toute personne à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial, qui sont applicables qu'aux procédures contentieuses suivies devant les juridictions lorsqu'elles statuent sur des droits et obligations de caractère civil ou sur des accusations en matière pénale, ne peuvent être invoquées pour critiquer la procédure en cause, alors même qu'elle conduirait au prononcé d'un licenciement pour motif disciplinaire d'un agent de droit public, dès lors qu'il s'agit d'une procédure administrative dépourvue de caractère juridictionnel et qu'en tout état de cause, il n'est pas même allégué que le déroulement de cette procédure ait pu porter atteinte au caractère équitable de la procédure contentieuse ultérieurement engagée devant le juge de l'excès de pouvoir. Par ailleurs, les agents des menses épiscopales ne sont pas des " travailleurs salariés " au sens de l'article 2 de la convention OIT n° 158, mais des agents publics relevant d'un régime propre. Par suite, M. D... ne peut utilement se prévaloir des stipulations de cette convention OIT et ne saurait pas davantage invoquer l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

18. D'autre part, aux termes de l'article 44 du décret du 17 janvier 1986 : " (...) L'agent non titulaire à l'encontre duquel une sanction disciplinaire est envisagée a droit à la communication de l'intégralité de son dossier individuel et de tous documents annexes et à se faire assister par les défenseurs de son choix. / L'administration doit informer l'intéressé de son droit à communication du dossier. ".

19. Il ressort des pièces du dossier que, par procès-verbal du 18 mai 2015, l'évêché de Metz a communiqué à M. D... copie de son dossier administratif. L'intéressé a sollicité la communication des audits cités dans le rapport d'huissier du 30 avril 2015 figurant à la cote C16 de son dossier administratif. Par courrier du 19 mai 2015, l'évêché a informé M. D... que les éléments de cet audit le concernant ont été constatés dans le rapport d'huissier, les autres informations ne pouvant lui être communiquées en raison de leur caractère confidentiel. Il ressort de ce constat d'huissier du 30 avril 2015 que l'évêché a présenté à l'huissier des audits réalisés les 20 août et 4 novembre 2014, et les 24 mars et 13 avril 2015. L'huissier en a établi une synthèse notamment quant aux problèmes constatés sur le système informatique de l'évêché, permettant à l'agent de discuter utilement de ces éléments. Quant à l'audit général d'avril 2014 portant la cote C3, le procès-verbal du 18 mai 2015 vise ce document dans la liste des éléments communiqués à l'intéressé. Par ailleurs, dans son avis du 7 janvier 2016, la commission d'accès aux documents administratifs, saisie par M. D..., a considéré qu'eu égard à la nature des informations que ces quatre audits pourraient révéler et à la vulnérabilité des systèmes d'information de la mense épiscopale, la communication de ces documents était susceptible de porter atteinte à la sécurité publique ou à la sécurité des personnes au sens du d) du 2 de l'article L. 311-5 du code de relations entre le public et l'administration. De surcroit, il ressort des pièces du dossier que ces audits ont été réalisés afin de repérer les dysfonctionnements des systèmes d'information de l'évêché et d'y remédier, mais non d'évaluer le travail personnel de M. D.... Enfin, il ressort du procès-verbal du 18 mai 2015 que M. D... a obtenu la communication du rapport disciplinaire du 5 mai 2015 indiquant avec précision l'intégralité des griefs. Dans ces conditions, à supposer même que M. D... n'ait pas eu la communication intégrale des audits réalisés au sein de la mense épiscopale et par suite des constations d'ordre technique qu'ils comportaient, l'intéressé a néanmoins effectivement eu communication en temps utile de l'ensemble des griefs finalement retenus à son encontre et propres à apprécier son comportement et à sa manière de servir . Dès lors, le moyen de M. D... tiré de ce que la communication de son dossier aurait été faite en méconnaissance de ses droits de la défense doit être écarté.

20. En troisième lieu, aux termes de l'article 1-1 du décret du 17 janvier 1986 : " I. - Le dossier des agents mentionnés à l'article 1er doit comporter toutes les pièces intéressant leur situation administrative, enregistrées, numérotées et classées sans discontinuité. (...) ".

21. La circonstance, à la supposer établie, que le dossier administratif de M. D... aurait été reconstitué à la suite de sa demande de communication et ne comporterait pas des pièces numérotées et classées sans discontinuité, est sans incidence sur la légalité de la décision de licenciement dès lors qu'il est ci-dessus établi que la communication intégrale de son dossier a été satisfaite et que les droits de la défense ont été respectés.

22. En quatrième lieu, la lettre du 4 mai 2015, convoquant M. D... à un entretien préalable au licenciement disciplinaire, précise que l'intéressé peut se faire assister ou représenter par un défenseur de son choix tout au long de la procédure, conformément à l'article 44 du décret du 17 janvier 1986 cité au point 18. Il s'ensuit que l'évêque de Metz a, dans les faits, respecté la procédure contradictoire prévue par ces dispositions. M. D... ne peut utilement se prévaloir des dispositions du code du travail, lesquelles, en raison de sa qualité d'agent de droit public, ne lui sont pas applicables. Par ailleurs, la circonstance que cette lettre du 4 mai 2015 est antérieure au rapport disciplinaire daté du 5 mai 2015 est sans incidence sur la légalité de la décision de licenciement du 12 juin 2015.

23. En cinquième lieu, il est constant que M. D... a effectivement bénéficié d'une procédure contradictoire préalablement à l'édiction de la décision contestée sous la forme d'un entretien qui a eu lieu le 28 mai 2015. Le requérant soutient néanmoins que la décision de le licencier a été prise avant même cet entretien dès lors qu'une remplaçante à son poste a été nommée dès le 25 mars 2015 et que les coordonnées de cette dernière ont été communiquées aux utilisateurs le 20 mai 2015. M. D... se prévaut à cet effet d'un courriel du 30 mars 2015 adressé par le vicaire général au personnel de la mense épiscopale caractérisant selon lui la nomination de sa remplaçante. Il ressort cependant des termes même de ce courrier qu'une collègue de M. D... a été désignée en tant que " référente des questions informatiques " en raison de l'absence pour maladie de M. D... jusqu'au 12 avril 2015. Cette date correspond au terme de l'arrêt pour congés de maladie transmis par l'intéressé à l'évêché. Il résulte de ces éléments que l'évêché a été contraint de pallier l'absence de M. D... afin d'assurer la continuité du service informatique et de communiquer ainsi les coordonnées de la personne pouvant assurer le dépannage des utilisateurs. Dans ces conditions, il n'est pas établi que la décision de licenciement aurait été prise avant l'entretien préalable. Par suite, le moyen tiré de l'irrégularité de la procédure au regard du principe général des droits de la défense ne peut qu'être écarté.

24. En sixième lieu, M. D... soutient que la procédure de licenciement est entachée de partialité dès lors que l'évêque et l'abbé C..., vicaire général, ont déclaré dans un courrier du 30 mars 2015 se sentir menacés par l'attitude de l'intéressé. L'engagement de la procédure de licenciement par l'évêque et la participation à l'entretien préalable de licenciement du vicaire général ont, selon le requérant, entaché d'irrégularité la procédure. Il conteste également l'impartialité de M. B... et de la société Cebéa qui ont réalisé des audits.

25. Il ressort des pièces du dossier que l'évêque de Metz, en sa qualité d'autorité supérieure du culte catholique au sens de l'article 8 de l'ordonnance d'Empire du 1er septembre 1911 précité, était compétent pour engager les poursuites disciplinaires à l'encontre de M. D.... Par ailleurs, la circonstance que l'entretien préalable se soit déroulé sous la conduite de l'abbé C..., supérieur hiérarchique de l'intéressé, lors de l'entretien préalable du 28 mai 2015, n'était pas, en l'absence de disposition législative ou réglementaire particulière contraire, de nature à vicier la procédure disciplinaire. Enfin il n'est pas établi, par la seule production de la lettre du 30 mars 2015 et du courrier de suspension à titre conservatoire du 9 avril 2015, que l'évêque de Metz et le vicaire général auraient manifesté une animosité personnelle révélant un défaut d'impartialité envers M. D..., qui a pu s'exprimer librement et assurer sa défense tel que cela ressort du compte-rendu de la réunion du 28 mai 2015. S'agissant de M. B... et de la société Cebéa, par ses seules allégations, M. D... n'établit pas les manquements au devoir d'impartialité dont seraient entachés les audits qu'ils ont réalisés au sein de la mense épiscopale. Par suite, le moyen susmentionné tiré du défaut d'impartialité de la procédure de licenciement doit être écarté.

26. En septième lieu, aux termes de l'article L. 2411-1 du code du travail dans sa rédaction applicable au présent litige : " Bénéficie de la protection contre le licenciement prévue par le présent chapitre, y compris lors d'une procédure de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaire, le salarié investi de l'un des mandats suivants : / 1° Délégué syndical ; (...) ".

27. Il ressort des pièces du dossier, ainsi qu'il a été dit plus haut, que M. D... était affecté à compter du 1er novembre 2010 sur un poste de secrétaire des cultes rémunéré par l'Etat et exerçait ses fonctions dans le cadre de l'administration du service public administratif géré par la mense épiscopale. Dans ces conditions, en sa qualité d'agent contractuel participant à l'activité du service public administratif assumée par la mense épiscopale, il était un agent de droit public et ne relevait pas des dispositions du code du travail. Il s'ensuit que M. D... ne bénéficie pas de la protection des salariés légalement investis de fonctions représentatives prévue par les dispositions des articles L. 2411-1 et suivants du code du travail et par suite le moyen tiré de la violation de ces dispositions ne peut qu'être écarté comme inopérant.

28. En dernier lieu, pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point précédent, M. D... ne saurait pas davantage utilement se prévaloir de la prescription des faits fondant le licenciement disciplinaire contesté en application de l'article L. 1332-4 du code du travail.

S'agissant de la légalité interne :

29. En premier lieu, M. D... soutient que la décision du 9 avril 2015 le suspendant à titre conservatoire constitue une sanction déguisée et qu'il est sanctionné ainsi deux fois pour les mêmes faits.

30. Il ressort des pièces du dossier que, par une décision du 9 avril 2015, l'évêque de Metz a décidé de prononcer à son encontre une suspension à titre conservatoire et provisoire avec effet immédiat à son retour de congé maladie à la suite de " graves manquements professionnels " et afin de permettre de mener une enquête interne. Eu égard aux termes mêmes de ce courrier et alors qu'une procédure disciplinaire venait d'être engagée à l'encontre de M. D... pour des faits de manquements aux devoirs d'obéissance et de loyauté, la décision le suspendant de ses fonctions à titre conservatoire, prise dans le but exclusif de préserver le bon fonctionnement du service public, ne revêt pas le caractère d'une sanction disciplinaire déguisée. Dès lors, le requérant n'est pas fondé à soutenir que la décision de licenciement ne pouvait légalement se fonder sur ces mêmes griefs. En outre, à supposer que M. D... ait entendu exciper de l'illégalité de la décision de suspension à titre conservatoire, un tel moyen, qui ne se rapporte pas à la légalité de la décision attaquée, ni à celle d'un acte dont cette dernière pourrait être regardée comme une mesure d'application, doit être écarté comme inopérant.

31. En deuxième lieu, il appartient au juge de l'excès de pouvoir, saisi de moyens en ce sens, de rechercher si les faits reprochés à un agent public ayant fait l'objet d'une sanction disciplinaire constituent des fautes de nature à justifier une sanction et si la sanction retenue est proportionnée à la gravité de ces fautes.

32. Pour prononcer le licenciement de M. D..., l'évêque de Metz s'est fondé sur son refus de collaborer à l'amélioration et à la sécurisation du système informatique, sur son refus de dialoguer avec son supérieur hiérarchique et sur les menaces et chantage à l'égard du vicaire général et du modérateur de la curie. Pour établir les faits reprochés, l'évêque de Metz produit des attestations et courriels de l'économe, de la remplaçante de l'intéressé durant ses absences pour congé ou maladie et de l'assistante du vicaire qui mentionnent notamment l'impossibilité d'obtenir des informations écrites sur les procédures informatiques ou les programmes et de disposer des autorisations nécessaires pour accéder aux programmes ou pour assurer le dépannage des utilisateurs. M. D... conteste la véracité de ces attestations sans apporter cependant d'éléments probants à l'appui de ses allégations. M. D... produit notamment une attestation d'un prestataire externe qui précise avoir pu disposer des informations nécessaires pour intervenir en dépannage et être responsable de l'établissement de la documentation des logiciels Visual Fox Pro et Navision. Toutefois, il n'est pas reproché à M. D..., dans la décision attaquée, de ne pas avoir établi de documentation technique pour ces logiciels spécifiques, mais de ne pas avoir réalisé notamment un plan d'ensemble du réseau et des fiches de procédure écrites, missions qui relèvent de son poste, ainsi qu'il ressort de la fiche des missions établie par l'évêché et produite en appel par les deux parties. En outre, l'évêché reproche à M. D... d'avoir chiffré son ordinateur professionnel le rendant inaccessible et d'avoir refusé de manière répétée de communiquer à son supérieur hiérarchique les codes de la société OVH, hébergeuse du site internet de l'évêché. L'évêque a produit les demandes des 10 décembre 2014, 28 et 30 janvier, et 25 mars 2015 du vicaire général adressée à M. D... pour obtenir ces codes. Il n'est pas contesté que les documents déposés dans le coffre-fort par l'intéressé étaient obsolètes. L'économe atteste également que M. D... a refusé de collaborer avec lui pour conduire le projet de réforme du système informatique, notamment en ne lui communiquant pas le plan d'ensemble et ces mêmes codes OVH. M. D... ne saurait se prévaloir des obligations imposées par la commission nationale de l'informatique et des libertés pour justifier son refus répété de communiquer des informations à son supérieur hiérarchique. Par ailleurs, il ressort d'un courriel du 5 mai 2015 que la société Cebéa a constaté que le disque dur de l'ordinateur professionnel de M. D... a été, sans autorisation, crypté à l'aide d'un logiciel, ne permettant pas l'accès aux données de ce poste. Le requérant, en se bornant à nier avoir eu recours au chiffrement de son ordinateur, n'apporte aucun élément justifiant que ses collègues ou son supérieur hiérarchique pouvaient avoir accès à ses données professionnelles durant ses absences afin d'assurer la continuité des activités du service. Ce refus de collaborer a eu nécessairement des incidences sur l'organisation de la mense épiscopale. Contrairement à ce que soutient M. D..., il a été à plusieurs reprises interpellé par son supérieur hiérarchique à propos de ces divers manquements au devoir d'obéissance hiérarchique, comme cela ressort notamment d'un courrier du 24 avril 2014 adressé par l'évêque au vicaire général, dont l'intéressé a eu copie, qui mentionne les remarques négatives d'un rapport d'audit, ainsi que du compte-rendu d'une réunion de travail du 8 décembre 2014. Enfin, la décision de licenciement se réfère également aux situations conflictuelles liées au comportement général de M. D..., celui-ci ayant notamment tenu des propos menaçants à l'égard de ses interlocuteurs lors des entretiens des 28 janvier et 10 févier 2015. Si le contexte de travail s'est dégradé en raison de désaccords quant aux modalités de rémunération et aux horaires de travail, ces circonstances ne sauraient pas davantage justifier l'attitude non coopérative de l'agent et son manque de loyauté envers ses supérieurs hiérarchiques. Il résulte de ce qui précède que les faits reprochés à M. D..., qui sont matériellement établis, sont constitutifs de fautes disciplinaires de nature à justifier une sanction disciplinaire. Eu égard à la gravité des fautes commises, l'autorité disciplinaire n'a pas pris une sanction disproportionnée en prononçant le licenciement de l'intéressé.

33. En troisième lieu, dans un contexte de dégradation du fonctionnement du service mentionné au point précédent, la réduction des attributions de M. D..., sa non-participation à la commission informatique et la mise en place d'un intérim dès le premier jour de son arrêt maladie le 25 mars 2015 ne sont pas constitutifs de faits de harcèlement moral de la part de son employeur. L'état de santé de M. D..., dont au demeurant le lien avec son emploi n'est pas établi, ne saurait pas davantage justifier à lui seul l'existence d'un harcèlement moral.

34. En quatrième lieu, M. D... soutient que la décision de licenciement du 12 juin 2015 intervient consécutivement à la création d'un syndicat au sein de l'évêché le 1er mars 2015. En sa qualité de délégué syndical, il a sollicité le 11 mai 2015 la tenue d'élections syndicales et a reçu la notification de la convocation à son entretien préalable au licenciement le même jour, deux heures plus tard. Cette seule chronologie des faits ne permet nullement d'établir un lien entre la mesure de licenciement et la procédure de création d'un syndicat. En outre, des dysfonctionnements du système informatique avaient été relevés dans des audits avant le 1er mars 2015. Par suite, M. D... n'est pas fondé à soutenir que la décision attaquée traduit l'existence d'une discrimination.

35. En dernier lieu, si M. D... soutient qu'il n'a pas pu contester la décision prononçant l'interruption du versement de son traitement prise par le ministre de l'intérieur consécutivement à la mesure de licenciement, cette circonstance est sans incidence sur la légalité de la décision prononçant son licenciement. Par suite, le moyen doit être écarté comme inopérant.

36. Il résulte de tout ce qui précède que l'évêque de Metz est fondé, d'une part, à soutenir que c'est à tort que, par le jugement contesté, le tribunal administratif de Strasbourg a annulé la décision du 12 juin 2015 par laquelle il a mis fin aux fonctions de M. D... ainsi que les décisions rejetant les recours gracieux et hiérarchique formés par ce dernier et lui a enjoint de procéder à la réintégration et à la reconstitution des droits de M. D... et, d'autre part, à demander l'annulation dans cette mesure de ce jugement.

Sur les conclusions présentées par M. D... tendant à l'exécution du jugement :

37. Il résulte de ce qui a été dit au point 36 ci-dessus que le jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 15 novembre 2017 doit être annulé. Par suite, il n'y a pas lieu de statuer sur la demande d'exécution de ce jugement présentée par M. D....

Sur les conclusions présentées par l'évêque de Metz aux fins de sursis à exécution du jugement :

38. Par le présent arrêt, la cour se prononce sur l'appel de l'évêque de Metz formé contre le jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 15 novembre 2017. Par suite, les conclusions aux fins de sursis à exécution de ce jugement sont devenues sans objet et il n'y a pas lieu d'y statuer.

Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

39. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'évêque de Metz, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, les sommes que M. D... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de M. D... la somme demandée par l'évêque de Metz au titre de ces mêmes dispositions.

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Strasbourg n° 1506561 du 15 novembre 2017 est annulé en tant qu'il annule la décision du 12 juin 2015 et les décisions rejetant les recours gracieux et hiérarchique formés par M. D... et qu'il enjoint à l'évêque de Metz de procéder à la réintégration et à la reconstitution des droits de M. D....

Article 2 : Le surplus de la demande présentée par M. D... devant le tribunal administratif ainsi que ses conclusions d'appel présentées dans la requête n° 20NC00532 sont rejetés.

Article 3 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de l'évêque de Metz tendant à ce qu'il soit sursis à exécution du jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 15 novembre 2017.

Article 4: Il n'y a pas lieu de statuer sur la requête de M. D... tendant à l'exécution du jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 15 novembre 2017.

Article 5 : L'ensemble des conclusions présentées par l'évêque de Metz sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. F... D... et à l'évêque de Metz.

2

N° 19NC03003, 20NC00532


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 19NC03003
Date de la décision : 24/09/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Exécution décision justice adm

Analyses

Actes législatifs et administratifs - Validité des actes administratifs - violation directe de la règle de droit - Principes généraux du droit - Principes intéressant l'action administrative - Respect des droits de la défense.

Alsace-Moselle - Enseignement et cultes.

Cultes - Régime concordataire d'Alsace-Moselle.


Composition du Tribunal
Président : M. MARTINEZ
Rapporteur ?: Mme Stéphanie LAMBING
Rapporteur public ?: M. MICHEL
Avocat(s) : SOCIETE D'AVOCATS FIDAL DE METZ

Origine de la décision
Date de l'import : 20/07/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2020-09-24;19nc03003 ?
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