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24/09/2020 | FRANCE | N°18NC03502-18NC03504

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2ème chambre, 24 septembre 2020, 18NC03502-18NC03504


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité limitée (SARL) Financière Stanvin a demandé au tribunal administratif de Strasbourg de fixer le déficit reportable de l'année 2013, imputable sur les bénéfices soumis à l'impôt sur les sociétés, à une somme de 96 498,71 euros.

M. A... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg de prononcer la décharge en droits et pénalités du supplément d'impôt sur le revenu et de contributions sociales qui lui a été assigné au titre de l'année 2013.

Par un

jugement n°s 1606014, 1702529 et 1606015 du 2 octobre 2018, le tribunal administratif de Strasbourg...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité limitée (SARL) Financière Stanvin a demandé au tribunal administratif de Strasbourg de fixer le déficit reportable de l'année 2013, imputable sur les bénéfices soumis à l'impôt sur les sociétés, à une somme de 96 498,71 euros.

M. A... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg de prononcer la décharge en droits et pénalités du supplément d'impôt sur le revenu et de contributions sociales qui lui a été assigné au titre de l'année 2013.

Par un jugement n°s 1606014, 1702529 et 1606015 du 2 octobre 2018, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté ces demandes.

Procédure devant la cour :

I. Par une requête enregistrée le 21 décembre 2018, sous le numéro 18NC03502, ainsi que des mémoires complémentaires enregistrés le 4 janvier 2019 et le 21 août 2020, la SARL Financière Stanvin, représentée par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n°s 1606014, 1702529 et 1606015 du 2 octobre 2018 en ce qu'il a rejeté sa demande ;

2°) de fixer le déficit reportable de l'année 2013, imputable sur les bénéfices soumis à l'impôt sur les sociétés, à une somme de 96 498,71 euros ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- c'est à tort que l'administration a estimé que la réalité de sa dette vis-à-vis de M. A... son associé n'était pas justifiée au motif que le formalisme propre aux cessions de créance n'avait pas été respecté alors qu'une telle cession est parfaite dès l'accord des parties sans qu'y fasse obstacle la circonstance que le débiteur, en l'occurrence la SCI La Montagne, n'en aurait pas été informée dans les conditions fixées par l'article 1690 du code civil ;

- en tout état de cause, la constatation qu'a faite l'administration du caractère injustifié de la créance de M. A... à son égard impliquait nécessairement celle du caractère injustifié de l'actif constitué par la créance détenue par elle sur la SCI La Montagne ; en conséquence, un déficit reportable doit être constaté à la clôture de l'exercice 2013.

Par un mémoire enregistré le 25 juillet 2019, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés ne sont pas fondés.

II. Par une requête enregistrée le 21 décembre 2018, sous le numéro 18NC03504, ainsi qu'un mémoire complémentaire enregistré le 21 août 2020, M. A..., représenté par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n°s 1606014, 1702529 et 1606015 du 2 octobre 2018 en ce qu'il a rejeté sa demande ;

2°) de prononcer la décharge en droits et pénalités des suppléments d'impôt sur le revenu et de contributions sociales qui lui ont été assignés au titre de l'année 2013 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761 1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- c'est à tort que l'administration a estimé que la réalité de sa créance vis-à-vis de la société Financière Stanvin n'était pas justifiée au motif que le formalisme propre aux cessions de créance n'avait pas été respecté alors qu'une telle cession est parfaite dès l'accord des parties sans qu'y fasse obstacle la circonstance que le débiteur, en l'occurrence la SCI La Montagne, n'en aurait pas été notifié ; c'est dès lors à tort que l'administration a imposé le montant de cette créance comme un revenu distribué ;

- la situation de trésorerie de la société au titre de l'exercice 2013 faisait obstacle à ce qu'il puisse disposer des sommes inscrites en compte courant à l'exception d'une somme de 2 365,63 euros seules disponibilités de la société Stanvin.

Par un mémoire enregistré le 25 juillet 2019 le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens invoqués ne sont pas fondés.

Vu :

- les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code civil ;

- le code monétaire et financier ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement convoquées à l'audience publique.

Ont été entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. B...,

- les conclusions de Mme Haudier, rapporteur public,

- et les observations de Me C..., représentant la SARL Financière Stanvin et M. A....

Considérant ce qui suit :

1. La SARL Financière Stanvin, ayant une activité de holding, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité ayant concerné la période du 1er janvier 2012 au 31 janvier 2013. A cette occasion le vérificateur a constaté que, par écriture d'opérations diverses du 31 décembre 2013, avait été inscrite au crédit du compte courant d'associé de M. A..., gérant et associé, une somme de 96 498,71 euros par le débit du compte 467000 " Débiteurs divers " ouvert au nom de la SCI La Montagne dont la société détient 99 % des parts sociales. Estimant qu'en l'absence des formalités prévues en cas de cession de créance par les dispositions de l'article 1690 du code civil la réalité d'un apport de M. A... à la SARL n'était pas établie, le service a considéré que cette somme de 96 498,71 constituait un revenu distribué par cette société par mise à disposition sur le compte courant de l'intéressé en application du 2° du 1 de l'article 109 du code général des impôts. En conséquence l'administration, suivant la procédure contradictoire de rectification, a imposé M. A... sur le montant de cette somme dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers. La réclamation préalable de M. A... ayant été rejetée par l'administration le 15 septembre 2016, ce dernier a saisi le tribunal administratif de Strasbourg d'une demande tendant à la décharge de ces impositions supplémentaires. De son côté, la SARL Financière Stanvin, qui n'a pour sa part pas fait l'objet d'une rectification de son résultat de l'année 2013 à raison de cette écriture, a saisi l'administration d'une réclamation tendant à ce que soit constaté à la clôture de l'exercice 2013 un déficit reportable à hauteur de la créance détenue par elle sur la SCI La Montagne, estimant que le service a en avait remis en cause l'existence. Cette réclamation ayant été rejetée le 20 septembre 2016, la SARL Financière Stanvin a saisi le tribunal administratif de Strasbourg d'une demande tendant aux mêmes fins. Par le jugement attaqué du 2 octobre 2018, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté ces demandes. La SARL Financière Stanvin et M. A... relèvent appel de ce jugement par les deux requêtes ci-dessus visées qui présentent à juger la même question et qu'il y a lieu de joindre afin de statuer par un seul arrêt.

Sur le résultat fiscal de la SARL Financière Stanvin :

2. D'une part, aux termes du 2 de l'article 38 du code général des impôts, rendu applicable en matière d'impôt sur les sociétés par l'article 209 du même code : "2. Le bénéfice net est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l'impôt diminuée des suppléments d'apport et augmentée des prélèvements effectués au cours de cette période par l'exploitant ou par les associés. L'actif net s'entend de l'excédent des valeurs d'actif sur le total formé au passif par les créances des tiers, les amortissements et les provisions justifiés ".

3. D'autre part, aux termes de l'article L. 511-5 du code monétaire et financier : "Il est, en outre, interdit à toute personne autre qu'un établissement de crédit de recevoir à titre habituel des fonds remboursables du public ou de fournir des services bancaires de paiement ".

4. La société requérante a expliqué l'écriture comptable ci-dessus analysée par la nécessité pour la SCI La Montagne de transférer sa dette envers M. A..., constituée par le solde créditeur de son compte courant, à sa société mère afin de ne pas se trouver en contravention avec les prescriptions ci-dessus reproduites de l'article L. 511-5 du code monétaire et financier. Mais, aucune pièce n'est produite de nature à établir l'existence d'une telle convention de reprise de dette entre la SCI La Montagne et sa société mère la SARL Financière Stanvin, tandis que la mise à disposition de fonds par un associé, fût-il très minoritaire, à sa société ne saurait s'analyser comme la collecte à titre habituel par celle-ci de fonds remboursables auprès du public de nature à caractériser l'exercice illégal de la profession de banquier. Si la société entend également soutenir en appel que l'écriture litigieuse correspondrait à la cession par M. A... de sa créance envers la SCI La Montagne aucune pièce n'est produite tendant à établir l'existence d'une telle convention conclue avec son gérant et en particulier sa notification au débiteur dans les conditions prévues par l'article 1690 du code civil alors applicable. Par suite, c'est à juste titre que l'administration a estimé que la société Financière Stanvin n'était pas devenue titulaire d'une créance envers la SCI La Montagne à la suite d'un transfert de la dette de cette dernière à l'égard de M. A... non plus qu'à la suite d'une cession par ce dernier de sa créance.

5. Il résulte de ces éléments qu'après avoir estimé à juste titre que l'écriture litigieuse ne recouvrait ni une augmentation de son actif, en l'absence d'acquisition de la créance de M. A... envers la SCI La Montagne, ni une augmentation de son passif, en l'absence de justification d'une dette envers son gérant en contrepartie, l'administration, laquelle n'a pas pour mission de procéder à la rectification des comptabilités mais uniquement des impositions des redevables le cas échéant, n'a effectué aucun redressement du bénéfice imposable de la SARL Financière Stanvin. Par suite, la SARL Financière Stanvin n'est pas fondée à demander que soit déduite de son bénéfice imposable de l'année 2013 la somme de 96 498,71 euros de nature à constituer un déficit reportable.

Sur les revenus de capitaux mobiliers de M. A... :

6. D'une part, aux termes de l'article 109 du code général des impôts : " 1. Sont considérés comme revenus distribués : / 2° Toutes les sommes ou valeurs mises à la disposition des associés, actionnaires ou porteurs de parts et non prélevées sur les bénéfices. / (...) ". Il résulte de ces dispositions que les sommes inscrites au crédit d'un compte courant d'associé d'une société soumise à l'impôt sur les sociétés ont, sauf preuve contraire apportée par l'associé titulaire du compte, le caractère de revenus imposables dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers.

7. D'autre part, il résulte des dispositions combinées de l'article 12 et du 3° de l'article 158 du code général des impôts que les sommes à retenir, au titre d'une année déterminée, pour l'assiette de l'impôt sur le revenu dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers sont celles qui, au cours de ladite année, ont été mises à la disposition du contribuable, soit par voie de paiement, soit par voie d'inscription à un compte courant sur lequel l'intéressé a opéré, ou aurait pu, en droit ou en fait, opérer un prélèvement au plus tard le 31 décembre de l'année d'imposition.

8. Il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que la réalité de l'apport par M. A... à la SARL Financière Stanvin de la créance qu'il détenait sur la SCI La Montagne n'est pas établie. Par suite, c'est à bon droit que l'administration a réintégré dans son revenu imposable dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers la somme de 96 498,71 euros en application des règles ci-dessus rappelées. M. A... ne saurait ainsi utilement soutenir que l'application de ces règles serait " inique " ou encore invoquer une erreur comptable de la société Fiancière Stanvin.

9. Il est vrai que M. A... soutient, dans ses ultimes écritures en appel, que la situation de trésorerie de la SARL Financière Stanvin rendait impossible tout prélèvement de sa part sur les sommes inscrites à son compte courant hormis une somme de 2 363,63 euros, correspondant aux seules disponibilités bancaires de cette société. Il ne ressort toutefois pas du bilan de la SARL Financière Stanvin, compte tenu de son actif net, et en dépit d'un résultat déficitaire, que sa situation financière ait rendu impossible au 31 décembre 2013 tout prélèvement de M. A... sur son compte courant d'associé au-delà du solde des comptes bancaires.

10. Il résulte de tout ce qui précède que la SARL Financière Stanvin et M. A... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leurs demandes. Par suite, leurs requêtes d'appel doivent être rejetées en toutes leurs conclusions y compris celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

Article 1er : Les requêtes de la SARL Financière Stanvin et de M. A... sont rejetées.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL Financière Stanvin, à M. D... A... et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

N°s 18NC03502 et 18NC03504

2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 18NC03502-18NC03504
Date de la décision : 24/09/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Analyses

Contributions et taxes - Impôts sur les revenus et bénéfices - Revenus et bénéfices imposables - règles particulières - Bénéfices industriels et commerciaux - Évaluation de l'actif - Créances.

Contributions et taxes - Impôts sur les revenus et bénéfices - Revenus et bénéfices imposables - règles particulières - Revenus des capitaux mobiliers et assimilables - Revenus distribués - Notion de revenus distribués - Imposition personnelle du bénéficiaire.


Composition du Tribunal
Président : M. MARTINEZ
Rapporteur ?: M. Marc AGNEL
Rapporteur public ?: Mme HAUDIER
Avocat(s) : HUBLER

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2020-09-24;18nc03502.18nc03504 ?
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