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22/09/2020 | FRANCE | N°19NC02135

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre, 22 septembre 2020, 19NC02135


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... D... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté, en date du 14 janvier 2019, par lequel le préfet du Bas-Rhin a rejeté sa demande de délivrance d'un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1901203 du 12 juin 2019, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 5 juille

t 2019, Mme D..., représentée par la Selarl Berard-Jemoli-Santelli-Burkatzki, demande à la cour :...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... D... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté, en date du 14 janvier 2019, par lequel le préfet du Bas-Rhin a rejeté sa demande de délivrance d'un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1901203 du 12 juin 2019, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 5 juillet 2019, Mme D..., représentée par la Selarl Berard-Jemoli-Santelli-Burkatzki, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 12 juin 2019 ;

2°) d'annuler l'arrêté, en date du 14 janvier 2019, par lequel le préfet du Bas-Rhin a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination ;

3°) d'enjoindre au préfet du Bas-Rhin de lui délivrer un titre de séjour temporaire dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard et de lui délivrer, dans cette attente, une autorisation provisoire de séjour sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 500 euros à verser à son avocat au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- le jugement attaqué est entaché d'erreur de fait et d'insuffisance de motivation, dès lors qu'en l'absence de tout mémoire en défense, le préfet est réputé avoir acquiescé aux faits selon lesquels elle a déposé une demande de titre de séjour sur le fondement des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 et de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; les premiers juges ne pouvaient en conséquence retenir l'inopérance des moyens tirés de la méconnaissance des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 et de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; de même, il ne résulte d'aucune des pièces du dossier que les membres de sa famille feraient l'objet d'une mesure d'éloignement ;

- l'arrêté attaqué a été pris par une autorité incompétente dès lors qu'il ne vise pas la délégation de signature du signataire ;

- il a méconnu les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 et de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- il est entaché d'un défaut d'examen particulier de sa situation personnelle ;

- il a méconnu les dispositions de l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, un étranger ayant poursuivi sa scolarité en France depuis l'âge de 16 ans pouvant être dispensé du visa de long séjour ;

- il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation.

Par un mémoire en défense, enregistré le 28 août 2020, la préfète du Bas-Rhin conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que les moyens soulevés par Mme D... ne sont pas fondés.

Mme D... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 19 septembre 2019.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n°91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le décret n°91-1266 du 19 décembre 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme G... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme D..., ressortissante kosovare née le 27 octobre 2000, a demandé au préfet du Bas-Rhin la délivrance d'un titre de séjour portant la mention " étudiant " sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par arrêté en date du 14 janvier 2019, le préfet du Bas-Rhin a refusé de lui délivrer le titre demandé, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Par un jugement du 12 juin 2019, dont Mme D... relève appel, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la régularité du jugement :

2. En premier lieu, il résulte des motifs mêmes du jugement que le tribunal administratif de Strasbourg a expressément répondu aux moyens soulevés dans la requête introduite par la requérante. Par suite, Mme D... n'est pas fondée à soutenir que le jugement serait entaché d'irrégularité en raison d'une insuffisance de motivation.

3. En second lieu, si la requérante soutient que c'est à tort que les premiers juges ont écarté les moyens tirés de la méconnaissance des articles L. 313-11, 7° et L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile au motif de leur caractère inopérant et de ce qu'ils auraient inexactement apprécié la situation de sa famille au regard de son droit au séjour, ces moyens se rattachent au bien-fondé du jugement de première instance et non à sa régularité.

Sur le bien-fondé du jugement :

4. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que la décision en litige a été signée, " pour le préfet et par délégation ", par Mme C... A..., faisant fonction de directrice des migrations et de l'intégration à la préfecture du Bas-Rhin. Par un arrêté du 28 décembre 2018, régulièrement publié le jour même au recueil des actes administratifs de la préfecture, le préfet du Bas-Rhin a consenti à l'intéressée une délégation de signature à l'effet notamment de signer tous arrêtés et décisions relevant des attributions dévolues à la direction des migrations et de l'intégration, à l'exception de certaines catégories d'actes au nombre desquelles ne figurent pas les décisions relatives au séjour et à l'éloignement des étrangers. La circonstance que l'arrêté contesté ne vise pas l'arrêté du 28 décembre 2018 susmentionné est sans influence sur l'appréciation de la compétence de son signataire. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence de la signataire de l'acte manque en fait et ne peut qu'être écarté.

5. En deuxième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que la requérante ait fait une demande de titre de séjour sur le fondement des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 et de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. En conséquence, d'une part, l'arrêté en litige qui fait état de la scolarité de la requérante et de sa vie privée et familiale au regard de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales n'est pas entaché d'un défaut d'examen. D'autre part, les moyens tirés de la méconnaissance de ces dispositions, sur lesquelles le préfet ne s'est pas fondé en l'absence de demande tendant à leur bénéfice, sont, comme l'ont jugé à juste titre les premiers juges, inopérants.

6. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. - La carte de séjour temporaire accordée à l'étranger qui établit qu'il suit en France un enseignement ou qu'il y fait des études et qui justifie qu'il dispose de moyens d'existence suffisants porte la mention " étudiant ". En cas de nécessité liée au déroulement des études ou lorsque l'étranger a suivi sans interruption une scolarité en France depuis l'âge de seize ans et y poursuit des études supérieures, l'autorité administrative peut accorder cette carte de séjour sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée et sous réserve d'une entrée régulière en France (...) ".

7. Il est constant que la requérante est entrée irrégulièrement en France et il ne ressort pas des pièces du dossier qu'elle poursuivrait des études supérieures. Dès lors, elle n'est pas fondée à soutenir que c'est en méconnaissance de l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que le préfet lui a opposé le défaut de visa de long séjour. Ainsi, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne peut qu'être rejeté.

8. En dernier lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

9. Pour refuser à Mme D... la délivrance d'un titre de séjour, le préfet a examiné sa situation personnelle et familiale et a considéré qu'elle ne résidait en France que depuis décembre 2015 sans autre attache que ses parents, son frère et sa soeur, eux-mêmes également en situation irrégulière, sa deuxième soeur résidant au Kosovo. Si l'intéressée se prévaut de sa scolarisation en France en classe UPEA2A puis en certificat d'aptitude professionnelle (CAP) commercialisation et services en hôtel-café-restaurant au lycée professionnel de Schiltigheim, les appréciations de ses professeurs, lesquelles mentionnent de manière récurrente un manque d'assiduité et d'investissement, ne révèlent pas une insertion particulière. La circonstance qu'elle a obtenu finalement son CAP en 2019, postérieurement à l'édiction de l'arrêté contesté, demeure sans incidence sur la légalité de ce dernier. Ainsi, eu égard à la durée et aux conditions du séjour en France de Mme D..., le préfet n'a pas, en prenant l'arrêté attaqué, porté une atteinte excessive à son droit au respect de sa vie privée et familiale. Dans ces conditions, cet arrêté ne méconnaît pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et n'est, pour les mêmes motifs, pas entaché d'une erreur manifeste d'appréciation des conséquences qu'il emporte pour la requérante.

10. Il résulte de tout ce qui précède que Mme D... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte ainsi que celles tendant à l'application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article 108 du décret du 19 décembre 1991 ne peuvent qu'être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de Mme D... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... D... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée à la préfète du Bas-Rhin.

2

N° 19NC02135


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 19NC02135
Date de la décision : 22/09/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : Mme GHISU-DEPARIS
Rapporteur ?: Mme Mariannick BOURGUET-CHASSAGNON
Rapporteur public ?: M. MICHEL
Avocat(s) : BURKATZKI

Origine de la décision
Date de l'import : 24/02/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2020-09-22;19nc02135 ?
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