La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

23/07/2020 | FRANCE | N°19NC02117

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre, 23 juillet 2020, 19NC02117


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... E... a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler l'arrêté du 27 mai 2019 par lequel le préfet de la Moselle l'a obligé à quitter le territoire français sans délai et a fixé le pays à destination duquel il sera renvoyé.

Par un jugement n° 1901545 du 5 juin 2019, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 4 juillet 2019, M. E..., représenté par Me

C..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 5 juin 2019 ;

2°) d'annuler, pour excès de ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... E... a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler l'arrêté du 27 mai 2019 par lequel le préfet de la Moselle l'a obligé à quitter le territoire français sans délai et a fixé le pays à destination duquel il sera renvoyé.

Par un jugement n° 1901545 du 5 juin 2019, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 4 juillet 2019, M. E..., représenté par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 5 juin 2019 ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 27 mai 2019 ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Moselle de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour sous astreinte de 150 euros par jour de retard à compter de l'expiration d'un délai de quinze jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- l'obligation de quitter le territoire français n'est pas motivée ;

- le préfet n'a pas pris en compte sa situation personnelle ;

- il est de nationalité française ;

- les articles 3, 4, 5, 6 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doivent s'appliquer à sa situation ;

- il ne peut pas être renvoyé au Cameroun dès lors qu'il est français.

Par un mémoire en défense, enregistré le 22 juin 2020, le préfet de la Moselle conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

M. E... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 8 août 2019.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code civil ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative et l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 modifiée.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Antoniazzi, premier conseiller,

- et les observations de Me C... pour M. E....

Considérant ce qui suit :

1. M. E..., né le 25 avril 1998, de nationalité camerounaise, déclare être entré en France en août 2015. Interpellé par les services de la police aux frontières de Forbach alors qu'il circulait à bord d'un bus, le préfet de la Moselle a pris à son encontre, le 27 mai 2019, un arrêté portant obligation de quitter le territoire français, refus de délai de départ volontaire et a fixé le Cameroun comme pays à destination duquel il sera éloigné. M. E... relève appel du jugement du 5 juin 2019 par lequel le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

2. En premier lieu, la décision contestée comporte les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. Le préfet, qui n'avait pas à reprendre expressément et de manière exhaustive, la situation personnelle de l'intéressé, a cité les éléments pertinents dont il avait connaissance et qui fondent sa décision. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation doit être écarté.

3. En deuxième lieu, il ressort des motifs de la décision de refus de séjour litigieuse que le préfet de la Moselle a procédé à un examen approfondi de la situation de M. E.... Par suite, le moyen tiré du défaut d'examen particulier doit être écarté.

4. En troisième lieu, aux termes de l'article R. 771-2 du code de justice administrative : " Lorsque la solution d'un litige dépend d'une question soulevant une difficulté sérieuse et relevant de la compétence de la juridiction judiciaire, la juridiction administrative initialement saisie la transmet à la juridiction judiciaire compétente. Elle sursoit à statuer jusqu'à la décision sur la question préjudicielle ". Aux termes de l'article 29 du code civil : " La juridiction civile de droit commun est seule compétente pour connaître des contestations sur la nationalité française ou étrangère des personnes physiques. / Les questions de nationalité sont préjudicielles devant toute autre juridiction de l'ordre administratif ou judiciaire (...) ". L'exception de nationalité française ne constitue, en vertu des dispositions précitées, une question préjudicielle que si elle présente une difficulté sérieuse.

5. Aux termes de l'article L. 111-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sont considérées comme étrangers au sens du présent code les personnes qui n'ont pas la nationalité française, soit qu'elles aient une nationalité étrangère, soit qu'elles n'aient pas de nationalité ". Aux termes de l'article 18 du code civil : " Est français l'enfant dont l'un des parents au moins est français ". Il résulte, enfin, de l'article 30 du code civil que la charge de la preuve, en matière de nationalité française, incombe à celui dont la nationalité est en cause, sauf s'il est titulaire d'un certificat de nationalité française.

6. M. E... soutient qu'il est français par filiation, dès lors que son père, de nationalité française, l'a reconnu le 21 mai 2011. Il produit à cet effet la copie intégrale de l'acte de reconnaissance. Toutefois, le requérant a indiqué dans ses écritures de première instance avoir engagé des démarches pour se voir reconnaître la nationalité française, qui n'ont pas abouti en raison du refus opposé par les autorités consulaires de transcrire son acte de naissance. Il n'établit pas davantage qu'à la date de l'acte de reconnaissance du 21 mai 2011, son père avait acquis la nationalité française, en se bornant à produire la carte d'identité délivrée à ce dernier le 25 octobre 2011, postérieurement à cet acte. Par suite, il ne ressort pas des pièces du dossier que la contestation soulevée par M. E... sur sa nationalité présente un caractère sérieux.

7. En dernier lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. "

8. M. E..., célibataire et sans enfant, est entré régulièrement en France, à l'âge de dix-sept ans, en août 2015, quatre ans avant la date de la décision contestée. S'il fait valoir que des membres de sa famille résident en France, notamment son frère, sa soeur et son père, de nationalité française, il n'établit cependant pas être dépourvu de toutes attaches familiales dans son pays d'origine. Dans ces conditions, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce et notamment de la durée et des conditions d'entrée et de séjour de M. E... en France, et en dépit de ses efforts d'intégration, la décision contestée n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels elle a été prise. Dès lors, elle ne méconnaît pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

9. En dernier lieu, les moyens tirés de la méconnaissance des articles 3, 4, 5 et 6 de[BN1] la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne sont pas assortis des précisions suffisantes permettant d'en apprécier le bien-fondé.

Sur la décision fixant le pays de destination :

10. Pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 6, M. E... n'est pas fondé à soutenir que le préfet ne pouvait pas fixer le Cameroun, pays dont il a la nationalité, comme pays de destination.

11. Il résulte de tout ce qui précède que M. E... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte ainsi que celles présentées sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ne peuvent qu'être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. E... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... E... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de la Moselle.

[BN1]Son avocat parle des articles 3, 4, 5, 6 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doivent s'appliquer à sa situation ;

Vous ne parlez pas du point 8

2

N° 19NC02117


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 19NC02117
Date de la décision : 23/07/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme GRENIER
Rapporteur ?: Mme Sandrine ANTONIAZZI
Rapporteur public ?: M. MICHEL
Avocat(s) : POUGEOISE

Origine de la décision
Date de l'import : 15/08/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2020-07-23;19nc02117 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award