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30/06/2020 | FRANCE | N°19NC01282

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre, 30 juin 2020, 19NC01282


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... A... B... a demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler l'arrêté du 14 juin 2018 par lequel le préfet du Doubs a refusé de l'admettre au séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il sera renvoyé.

Par un jugement n° 1801871 du 17 janvier 2019, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 28 avril 2019, M. A

... B..., représenté par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal adminis...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... A... B... a demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler l'arrêté du 14 juin 2018 par lequel le préfet du Doubs a refusé de l'admettre au séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il sera renvoyé.

Par un jugement n° 1801871 du 17 janvier 2019, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 28 avril 2019, M. A... B..., représenté par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Besançon du 17 janvier 2019 ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 14 juin 2018 du préfet du Doubs ;

3°) d'enjoindre au préfet du Doubs de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", ou à défaut, mention " salarié " ou " étudiant ", dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler dans un délai de cinq jours ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation administrative dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et de lui délivrer, pendant cet examen, une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son avocat d'une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- le tribunal a, à tort, écarté le moyen tiré de l'erreur de fait dès lors qu'il établit être né le 17 octobre 1998 ;

- il est fondé à se prévaloir des dispositions de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le tribunal aurait dû accueillir les moyens tirés de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation des conséquences de l'arrêté sur sa situation personnelle.

Par un mémoire en défense, enregistré le 7 août 2019, le préfet du Doubs conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

M. A... B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 28 mars 2019.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code civil ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative et l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 modifiée.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Antoniazzi, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A... B..., ressortissant angolais, est entré irrégulièrement en France le 5 mai 2015. Il a été confié aux services de l'aide sociale à l'enfance du Doubs, le 12 mai 2015. Le 6 septembre 2017, il a sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 14 juin 2018, le préfet du Doubs a rejeté sa demande et l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours. M. A... B... fait appel du jugement du 17 janvier 2019 par lequel le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

2. En premier lieu, d'une part, aux termes de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " A titre exceptionnel et sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire prévue aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 portant la mention " salarié " ou la mention " travailleur temporaire " peut être délivrée, dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire, à l'étranger qui a été confié à l'aide sociale à l'enfance entre l'âge de seize ans et l'âge de dix-huit ans et qui justifie suivre depuis au moins six mois une formation destinée à lui apporter une qualification professionnelle, sous réserve du caractère réel et sérieux du suivi de cette formation, de la nature de ses liens avec sa famille restée dans le pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil sur l'insertion de cet étranger dans la société française. Le respect de la condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigé. ".

3. D'autre part, l'article L. 111-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile prévoit, en son premier alinéa, que la vérification des actes d'état civil étrangers doit être effectuée dans les conditions définies par l'article 47 du code civil. L'article 47 du code civil dispose quant à lui que : " Tout acte de l'état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité ". Il résulte de ces dispositions que la force probante d'un acte d'état civil établi à l'étranger peut être combattue par tout moyen susceptible d'établir que l'acte en cause est irrégulier, falsifié ou inexact. En cas de contestation par l'administration de la valeur probante d'un acte d'état civil établi à l'étranger, il appartient au juge administratif de former sa conviction au vu de l'ensemble des éléments produits par les parties. Pour juger qu'un acte d'état civil produit devant lui est dépourvu de force probante, qu'il soit irrégulier, falsifié ou inexact, le juge doit en conséquence se fonder sur tous les éléments versés au dossier dans le cadre de l'instruction du litige qui lui est soumis. Ce faisant, il lui appartient d'apprécier les conséquences à tirer de la production par l'étranger d'une carte consulaire ou d'un passeport dont l'authenticité est établie ou n'est pas contestée, sans qu'une force probante particulière puisse être attribuée ou refusée par principe à de tels documents.

La demande de titre de séjour présentée par M. A... B... sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile a été rejetée au motif que l'intéressé était âgé de plus de dix-neuf ans lorsqu'il a été confié aux services de l'aide sociale à l'enfance. Il ressort des pièces du dossier que, pour justifier de sa minorité lors de son entrée sur le territoire français, M. A... B... a produit une déclaration du ministère de la justice et droits de l'homme de la direction nationale des registres et du notariat relative à la copie intégrale de son acte de naissance et une photocopie de cet acte de naissance indiquant qu'il est né le 17 octobre 1998. S'il est vrai, ainsi que le fait valoir le requérant, que le rapport d'examen technique documentaire du 29 mai 2018, établi par la cellule de lutte contre la fraude documentaire et à l'identité de la direction interdépartementale de la police aux frontières de Pontarlier, se contente d'émettre un avis défavorable en raison de l'absence de légalisation, il est constant, en revanche, que les vérifications des empreintes digitales de l'intéressé dans le système Visabio ont révélé que ce dernier s'est vu délivrer un visa, en mars 2015, auprès des autorités portugaises en Angola sous le nom de " E... B..., né le 17 octobre 1992 ". Dans ces conditions, alors que la carte d'identité consulaire produite par M. A... B..., au demeurant établie sur la base de documents dont l'authenticité est contestée, a pour vocation d'attester de la résidence à l'étranger d'un ressortissant et ne saurait équivaloir à un document d'identité, le préfet du Doubs a pu légalement considérer que les éléments dont il disposait étaient suffisants pour écarter comme dépourvus de valeur probante les actes d'état civil fournis par le requérant et renverser la présomption simple résultant de l'article 47 du code civil. Il a pu ainsi en déduire que, en l'absence de certitude sur sa date de naissance véritable, l'intéressé ne démontrait pas qu'il avait été confié aux services de l'aide sociale à l'enfance du département du Doubs entre l'âge de seize ans et celui de dix-huit ans. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne peut être accueilli. Pour les mêmes motifs, le moyen tiré de l'erreur de fait relative à l'âge de l'intéressé doit également être écarté.

4. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

5. Il ressort des pièces du dossier que M. A... B... n'est présent sur le territoire français que depuis le 5 mai 2015 et qu'il a bénéficié d'une prise en charge en qualité de mineur étranger isolé sur la base d'actes d'état civil dont l'authenticité a été remise en cause. Célibataire et sans enfant à charge, il ne justifie pas d'attaches familiales sur le territoire français. En revanche, il n'est pas isolé dans son pays d'origine, où vivent notamment sa mère et ses soeurs. Dans ces conditions et alors même que le requérant, inscrit en terminale pour l'obtention d'un baccalauréat professionnel option " systèmes électroniques et numériques ", obtient de bons résultats scolaires et que ses enseignants soulignent son sérieux et son assiduité, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations en cause ne peut qu'être écarté.

6. En dernier lieu, pour les mêmes motifs que précédemment, le préfet du Doubs, en prenant la décision en litige, n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation de la situation personnelle de l'intéressé. Par suite, le moyen doit être écarté.

7. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ne peuvent qu'être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. A... B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... A... B... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet du Doubs.

2

N° 19NC01282


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 19NC01282
Date de la décision : 30/06/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. DEVILLERS
Rapporteur ?: Mme Sandrine ANTONIAZZI
Rapporteur public ?: M. MICHEL
Avocat(s) : DRAVIGNY

Origine de la décision
Date de l'import : 28/07/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2020-06-30;19nc01282 ?
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