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30/06/2020 | FRANCE | N°18NC03224

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre, 30 juin 2020, 18NC03224


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg de condamner la ville de Mulhouse à lui verser la somme de 20 000 euros en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis.

Par un jugement n° 1506986 du 28 juin 2018, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 28 novembre 2018 et le 30 juillet 2019, M. A..., représenté par Me D..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce

jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 28 juin 2018 ;

2°) d'annuler la décision implic...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg de condamner la ville de Mulhouse à lui verser la somme de 20 000 euros en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis.

Par un jugement n° 1506986 du 28 juin 2018, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 28 novembre 2018 et le 30 juillet 2019, M. A..., représenté par Me D..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 28 juin 2018 ;

2°) d'annuler la décision implicite de rejet du maire de Mulhouse ;

3°) de condamner la ville de Mulhouse à lui verser la somme de 20 000 euros ;

4°) de mettre à la charge de la ville de Mulhouse la somme de 1 800 euros à verser à son conseil en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

Il soutient que :

- il a été victime pendant plusieurs années d'humiliations et de violences verbales et physiques de la part de ses collègues de travail, constitutives d'un harcèlement moral ;

- le traumatisme psychologique qu'il subit est en lien direct avec ces faits de violence ;

- le préjudice moral subi doit être évalué à 20 000 euros.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 2 mai et 28 octobre 2019, la ville de Mulhouse, représentée par Me B..., conclut, à titre principal, au rejet de la requête d'appel, et à titre subsidiaire, au rejet de la demande de M. A... et à ce que soit mis à la charge de M. A... la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- eu égard au comportement de l'intéressé, le tribunal n'a pas commis d'erreur d'appréciation en estimant qu'il n'avait pas été victime de faits de harcèlement moral ;

- le requérant ne démontre pas une altération de sa santé physique ou mentale liée aux prétendus faits de harcèlement moral dénoncés ;

- elle a pris toutes les mesures nécessaires en l'espèce et n'a commis aucune faute dans la gestion de la carrière de M. A... ;

- le montant du préjudice réclamé n'est pas justifié.

Par une ordonnance du 28 octobre 2019, la clôture de l'instruction a été fixée 12 novembre 2019.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 27 septembre 2018.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative et l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 modifiée.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Antoniazzi, premier conseiller,

- les conclusions de M. Michel, rapporteur public,

- et les observations de Me B..., représentant la commune de Mulhouse.

Considérant ce qui suit :

1. M. A... était agent d'entretien titulaire employé par la commune de Mulhouse depuis 1998. Par un arrêté du 24 novembre 2014, le maire de Mulhouse l'a licencié pour insuffisance professionnelle. Par lettre du 8 juillet 2015, M. A... a sollicité de la commune la réparation des préjudices qu'il estime avoir subis à raison d'agissements constitutifs d'un harcèlement moral dont il aurait été victime de la part de ses anciens collègues de travail. Cette demande a été implicitement rejetée. M. A... relève appel du jugement du 28 juin 2018 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la ville de Mulhouse à lui verser la somme de 20 000 euros au titre des préjudices qu'il estime avoir subis.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article 6 quinquiès de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires : " Aucun fonctionnaire ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ". Il appartient à un agent public, qui soutient avoir été victime d'agissements constitutifs de harcèlement moral, de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence d'un tel harcèlement. Il incombe à l'administration de produire, en sens contraire, une argumentation de nature à démontrer que les agissements en cause sont justifiés par des considérations étrangères à tout harcèlement. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si les agissements de harcèlement sont ou non établis, se détermine au vu de ces échanges contradictoires, qu'il peut compléter, en cas de doute, en ordonnant toute mesure d'instruction utile.

3. Pour apprécier si des agissements dont il est allégué qu'ils sont constitutifs d'un harcèlement moral revêtent un tel caractère, le juge administratif doit tenir compte des comportements respectifs de l'administration auquel il est reproché d'avoir exercé de tels agissements et de l'agent qui estime avoir été victime d'un harcèlement moral. Pour être qualifiés de harcèlement moral, ces agissements doivent être répétés et excéder les limites de l'exercice normal du pouvoir hiérarchique. Dès lors qu'elle n'excède pas ces limites, une simple diminution des attributions justifiée par l'intérêt du service, en raison d'une manière de servir inadéquate ou de difficultés relationnelles, n'est pas constitutive de harcèlement moral.

4. M. A... soutient avoir été victime, pendant plusieurs années, d'actes répétés d'humiliations et de violences physique et verbale, constitutifs de harcèlement moral, dans le cadre de l'exercice de ses fonctions à la ville de Mulhouse.

5. Il résulte de l'instruction, et notamment des rapports établis par les supérieurs hiérarchiques de M. A... les 7 et 21 novembre 2012, que ce dernier a fait l'objet d'insultes de la part de ses collègues de travail et a été bousculé physiquement à quelques reprises lorsqu'il était affecté au service des travaux publics de la commune de Mulhouse. Toutefois, ces agissements sont intervenus en réaction aux propres agissements persistants de M. A..., qui par sa désinvolture et son non-respect fréquent des consignes, en dépit des mises en garde continuelles qui lui étaient adressées, a mis à plusieurs reprises les personnes travaillant dans son service en situation de danger. En outre, il est démontré que la commune de Mulhouse a pris les mesures de transfert de service nécessitées par le comportement de l'intéressé, destinées à éviter des représailles contre ce dernier, en le changeant d'équipe dès le 13 novembre 2012 et en l'affectant au service des eaux à compter du 12 août 2013. Toutefois, en dépit de ces mesures, il est démontré que M. A... a continué à adopter un comportement inapproprié, générant des tensions avec les collègues de travail des différents services qu'il a pu côtoyer, justifiant son licenciement pour insuffisance professionnelle le 24 novembre 2014. Dans ces conditions, il est établi que l'administration a pris les mesures nécessaires destinées à mettre fin aux violences dont M. A... a été victime au cours de l'année 2012 de la part de ses collègues de travail, en raison de son propre comportement délibérément provocateur, et a mis en mesure ce dernier de poursuivre sa carrière dans un autre service et d'améliorer ses états de service. Par suite, M. A... n'est pas fondé à soutenir que la ville de Mulhouse a commis une faute de nature à engager sa responsabilité à son égard en l'exposant à des agissements constitutifs d'un harcèlement moral.

6. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Sur les frais liés à l'instance :

7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Mulhouse, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme dont M. A... demande le versement au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. En outre, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. A... le versement de la somme que la commune de Mulhouse demande sur le même fondement.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la ville de Mulhouse présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A... et à la commune de Mulhouse.

2

N° 18NC03224


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 18NC03224
Date de la décision : 30/06/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

36-13-03 Fonctionnaires et agents publics. Contentieux de la fonction publique. Contentieux de l'indemnité.


Composition du Tribunal
Président : M. DEVILLERS
Rapporteur ?: Mme Sandrine ANTONIAZZI
Rapporteur public ?: M. MICHEL
Avocat(s) : WOLDANSKI

Origine de la décision
Date de l'import : 28/07/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2020-06-30;18nc03224 ?
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