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11/06/2020 | FRANCE | N°18NC02424

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre, 11 juin 2020, 18NC02424


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 7 août 2017 par lequel le préfet de la Moselle lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de de trente jours et a fixé le pays de destination, d'enjoindre au préfet de la Moselle, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour, subsidiairement, de réexaminer sa situation et de lui délivrer, dans cette attente, une autorisation provisoire de s

jour et de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 7 août 2017 par lequel le préfet de la Moselle lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de de trente jours et a fixé le pays de destination, d'enjoindre au préfet de la Moselle, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour, subsidiairement, de réexaminer sa situation et de lui délivrer, dans cette attente, une autorisation provisoire de séjour et de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 1 500 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Par un jugement n° 1705091 du 9 janvier 2018, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée sous le n° 18NC02424 le 6 septembre 2018, M. A..., représenté par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 9 janvier 2018 ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 7 août 2017 par lequel le préfet de la Moselle lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Moselle, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour avec autorisation de travail, subsidiairement, de réexaminer sa situation et de lui délivrer, dans cette attente, une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me C... de la somme de 1 500 euros sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- l'arrêté contesté est insuffisamment motivé ;

- le préfet n'a pas recherché quels étaient ses attaches familiales et ses liens personnels sur le territoire national ;

- au regard de sa situation personnelle et familiale, le préfet de la Moselle a méconnu l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et le 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le préfet a entaché son arrêté d'une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de ce refus sur sa situation personnelle ;

- en refusant de lui délivrer un titre de séjour en qualité de salarié, le préfet de la Moselle a méconnu l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Par un mémoire en défense, enregistré le 17 mars 2020, le préfet de la Moselle conclut au rejet de la requête.

Le préfet de la Moselle fait valoir que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision en date du 23 août 2018.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de M. Goujon-Fischer, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant camerounais, entré en France le 3 avril 2011, s'est vu délivrer le 11 juillet 2014 un premier titre de séjour, renouvelé jusqu'au 26 août 2016, en sa qualité de conjoint d'une ressortissante française, dont il a divorcé le 4 février 2016. Le 12 juillet 2016, il a sollicité la délivrance d'un titre de séjour en qualité de salarié. Par un arrêté du 7 août 2017, le préfet de la Moselle lui a refusé ce titre, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination de son éloignement. M. A... relève appel du jugement du 9 janvier 2018 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la légalité de l'arrêté du 9 janvier 2018 :

2. En premier lieu, M. A... reprend en appel le moyen, écarté par le jugement attaqué, tiré de ce que l'arrêté du préfet de la Moselle du 7 août 2017 serait insuffisamment motivé. En l'absence d'élément nouveau développé à l'appui de ce moyen, il y a lieu de l'écarter par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges.

3. En deuxième lieu, si le requérant soutient que le préfet n'a pas recherché quels étaient ses attaches familiales et ses liens personnels sur le territoire national, il ressort de la lecture même de l'arrêté litigieux que ce moyen manque en fait.

4. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Une carte de séjour temporaire, d'une durée maximale d'un an, autorisant l'exercice d'une activité professionnelle est délivrée à l'étranger : / 1° Pour l'exercice d'une activité salariée sous contrat de travail à durée indéterminée, dans les conditions prévues à l'article L. 5221-2 du code du travail. Elle porte la mention " salarié ". (...) ". Aux termes de l'article L. 5221-2 du code du travail : " Pour entrer en France en vue d'y exercer une profession salariée, l'étranger présente : / 1° Les documents et visas exigés par les conventions internationales et les règlements en vigueur ; / 2° Un contrat de travail visé par l'autorité administrative ou une autorisation de travail. ". Aux termes de l'article R. 5221-20 de ce code : " Pour accorder ou refuser l'une des autorisations de travail mentionnées à l'article R. 5221-11, le préfet prend en compte les éléments d'appréciation suivants : (...) 6° Le salaire proposé à l'étranger qui, même en cas d'emploi à temps partiel, est au moins équivalent à la rémunération minimale mensuelle mentionnée à l'article L. 3232-1 ".

5. Il ressort des pièces du dossier que, pour refuser à M. A... la délivrance du titre de séjour en qualité de salarié qu'il avait sollicité, le préfet de la Moselle s'est fondé sur l'avis réservé émis le 22 février 2017 par la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi de la Moselle, selon lequel la rémunération mensuelle brute figurant dans le contrat de travail à temps partiel établi en faveur de l'intéressé par la société Exist, qui l'employait depuis le 4 janvier 2016, s'élevait à 981,41 euros, soit un montant inférieur au salaire minimum interprofessionnel de croissance mensuel brut correspondant à un temps plein. Si M. A... se prévaut des montants de salaire supérieurs à cette somme, figurant dans ses bulletins de salaires des mois de mai à juillet 2017, cette circonstance ne suffit pas à établir que le salaire proposé par son employeur aurait été porté à un montant au moins équivalent à la rémunération minimale mensuelle mentionnée à l'article L. 3232-1 du code du travail. Par suite, le préfet, dont il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il se serait estimé à tort tenu de suivre l'avis de la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi de la Moselle, n'a pas entaché sa décision d'illégalité, quelle qu'ait été la stabilité de la situation professionnelle de M. A..., en refusant d'admettre ce dernier au séjour en qualité de salarié.

6. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) ". Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".

7. M. A... fait valoir qu'il se trouve en France depuis sept ans et demi, qu'il a été marié deux ans avec une ressortissante française aujourd'hui malade, avec laquelle il continue d'entretenir des liens amicaux, qu'il a fait preuve de sa volonté d'insertion en France, notamment par le travail, et qu'il dispose actuellement d'un logement. Toutefois, entré en France à l'âge de 36 ans, il est désormais divorcé de son épouse, dont il n'a pas d'enfants et auprès de laquelle il n'est pas établi que sa présence serait nécessaire. Il ne justifie pas disposer d'autres attaches familiales en France, alors qu'il n'allègue pas en être dépourvu dans son pays d'origine. Il n'établit pas ainsi se trouver dans la situation où, au regard de son droit au respect de sa vie privée et familiale, il était susceptible de bénéficier de plein droit de la carte de séjour temporaire mentionnée au 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et où le préfet ne pouvait, par suite, légalement l'obliger à quitter le territoire français. Pour le même motif, la décision l'obligeant à quitter le territoire français n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et n'est pas davantage entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur sa situation personnelle.

8. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Sur les injonctions :

9. Le présent arrêt de rejet n'implique aucune mesure d'exécution et par suite, les conclusions aux fins d'injonction présentées par M. A... ne peuvent qu'être rejetées.

Sur les frais liés à l'instance :

10. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens, ou à défaut la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ".

11. Ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que le conseil de M. A... demande au titre des dispositions précitées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de la Moselle.

2

N° 18NC02424


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 18NC02424
Date de la décision : 11/06/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. KOLBERT
Rapporteur ?: M. Jean-François GOUJON-FISCHER
Rapporteur public ?: Mme KOHLER
Avocat(s) : ANNIE LEVI-CYFERMAN - LAURENT CYFERMAN

Origine de la décision
Date de l'import : 28/07/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2020-06-11;18nc02424 ?
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