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11/06/2020 | FRANCE | N°18NC00822

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre, 11 juin 2020, 18NC00822


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler la décision du directeur interrégional des services pénitentiaires Centre-Est-Dijon du 20 janvier 2016 confirmant la sanction disciplinaire du 31 décembre 2015 prise par la commission de discipline du centre de détention de Villenauxe-la-Grande et de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil de la somme de 2 000 euros, au titre des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la

loi du 10 juillet 1991.

Par un jugement n° 1600482 du 25 janvier 2018...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler la décision du directeur interrégional des services pénitentiaires Centre-Est-Dijon du 20 janvier 2016 confirmant la sanction disciplinaire du 31 décembre 2015 prise par la commission de discipline du centre de détention de Villenauxe-la-Grande et de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil de la somme de 2 000 euros, au titre des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Par un jugement n° 1600482 du 25 janvier 2018, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a annulé la décision du 20 janvier 2016 et mis à la charge de l'Etat le versement à Me B..., avocat de M. A... de la somme de 1 500 euros, en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que ce dernier renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 22 mars 2018, la garde des sceaux, ministre de la justice demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne du 25 janvier 2018 ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. A... devant le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne.

Elle soutient que :

- c'est à tort, en fait comme en droit, que le tribunal a jugé que le bâtonnier n'avait pas été informé par l'administration pénitentiaire de l'indisponibilité de l'avocat choisi par M. A..., dès lors que l'administration pénitentiaire avait adressé une convocation au bâtonnier, sans attendre la réponse de l'avocat désigné et avait ainsi rempli ses obligations en mettant l'intéressé à même d'être assisté d'un avocat ;

- l'administration pénitentiaire n'était pas tenue, en l'absence de l'avocat régulièrement contacté, de reporter la réunion de la commission de discipline ou de demander au bâtonnier la désignation d'un autre avocat ;

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de procédure pénale ;

- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Goujon-Fischer, premier conseiller,

- et les conclusions de Mme Kohler, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Par une décision du 31 décembre 2015, le président de la commission de discipline du centre pénitentiaire de Villenauxe-la-Grande (Aube) a prononcé à l'encontre de M. A..., détenu, la sanction de mise en cellule disciplinaire pour une durée de quatorze jours. Par une décision du 20 janvier 2016, le directeur interrégional des services pénitentiaires Centre-Est-Dijon a confirmé cette sanction. Le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne, sur la demande de M. A..., a annulé cette décision par un jugement du 25 janvier 2018, dont la ministre de la justice relève appel.

2. Aux termes de l'article R. 57-7-16 du code de procédure pénale, dans sa rédaction applicable à l'espèce : " En cas d'engagement des poursuites disciplinaires, les faits reprochés ainsi que leur qualification juridique sont portés à la connaissance de la personne détenue. Le dossier de la procédure disciplinaire est mis à sa disposition. / La personne détenue est informée de la date et de l'heure de sa comparution devant la commission de discipline ainsi que du délai dont elle dispose pour préparer sa défense. Ce délai ne peut être inférieur à vingt-quatre heures. / Elle dispose de la faculté de se faire assister par un avocat de son choix ou par un avocat désigné par le bâtonnier de l'ordre des avocats et peut bénéficier à cet effet de l'aide juridique. / Si la personne détenue est mineure, elle est obligatoirement assistée par un avocat. A défaut de choix d'un avocat par elle ou par ses représentants légaux, elle est assistée par un avocat désigné par le bâtonnier. ". En application de ces dispositions, il appartient à l'administration pénitentiaire d'assurer la mise en oeuvre, au profit d'un détenu qui en fait la demande, de la possibilité de se faire assister d'un avocat dans le cadre de poursuites disciplinaires engagées à son encontre.

3. Il ressort des pièces du dossier qu'informé de la réunion de la commission de discipline du centre de détention de Villenauxe-la-Grande, programmée le 31 décembre 2015 à 14 heures en vue de l'examen des suites à donner à un incident du 29 décembre 2015, M. A... a demandé, au moyen d'un formulaire, à être assisté devant cette commission par son avocat, Me B..., ou, en cas d'indisponibilité de ce dernier, par un avocat désigné par le bâtonnier. Me B... a fait connaître son indisponibilité par une télécopie transmise le 31 décembre 2015 à 9 heures 59, confirmant l'information qu'il avait déjà donnée en ce sens par téléphone, à 9 heures le même jour. Si, par une télécopie transmise à 9 heures 22, le centre de détention de Villenauxe-la-Grande avait déjà communiqué au bâtonnier le formulaire mentionnant le souhait de M. A... de se faire assister par un avocat désigné par ce dernier en cas d'indisponibilité de son avocat, il est constant qu'il n'a pas, à cette occasion, complété cet envoi par l'information, pourtant connue, relative à l'indisponibilité de Me B... et seule de nature à mettre à la charge du bâtonnier la désignation d'un avocat de substitution. Eu égard à la brièveté des délais inhérents à la convocation de la commission de discipline, cette omission était de nature à compromettre la possibilité pour M. A... de se faire assister d'un avocat et elle a donc eu pour effet de vicier la procédure disciplinaire en le privant d'une garantie.

4. Il résulte de ce qui précède que la ministre de la justice n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a annulé la décision du directeur interrégional des services pénitentiaires Centre-Est-Dijon du 20 janvier 2016 confirmant la sanction disciplinaire prise le 31 décembre 2015 par la commission de discipline du centre de détention de Villenauxe-la-Grande.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la garde des sceaux, ministre de la justice est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la garde des sceaux, ministre de la justice et à M. C... A....

2

N° 18NC00822


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 18NC00822
Date de la décision : 11/06/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Actes législatifs et administratifs - Validité des actes administratifs - violation directe de la règle de droit - Principes généraux du droit - Principes intéressant l'action administrative - Respect des droits de la défense.

Répression - Domaine de la répression administrative Régime de la sanction administrative - Régularité.


Composition du Tribunal
Président : M. KOLBERT
Rapporteur ?: M. Jean-François GOUJON-FISCHER
Rapporteur public ?: Mme KOHLER

Origine de la décision
Date de l'import : 28/07/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2020-06-11;18nc00822 ?
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