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08/04/2020 | FRANCE | N°19NC00404

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2ème chambre, 08 avril 2020, 19NC00404


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... D... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 31 mai 2018 par lequel le préfet du Bas-Rhin a refusé de renouveler son titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n°1803884 du 23 octobre 2018, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 12 février 2019, M. D..., représ

enté par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Stra...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... D... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 31 mai 2018 par lequel le préfet du Bas-Rhin a refusé de renouveler son titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n°1803884 du 23 octobre 2018, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 12 février 2019, M. D..., représenté par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 23 octobre 2018 ;

2°) d'enjoindre au préfet du Bas-Rhin de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ", dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 200 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

En ce qui concerne la décision portant refus de séjour :

- l'avis du 29 mars 2018 du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration est irrégulier, faute d'établir que le médecin qui a établi le rapport médical n'a pas siégé au sein du collège de médecins qui a examiné sa situation ;

- le préfet a méconnu les dispositions du 7° de l'article 6 de l'Accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;

- le préfet a également commis une erreur manifeste d'appréciation concernant sa situation personnelle.

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- elle est entachée d'illégalité en raison de l'illégalité du refus de titre de séjour qui lui a été opposé ;

- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation.

En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :

- Elle est entachée d'illégalité en raison de l'illégalité du refus de titre de séjour et de l'obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours qui lui ont été opposés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 9 décembre 2019, le préfet de la région Grand-Est, préfet du Bas-Rhin conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun des moyens soulevés par M. D... n'est fondé.

M. D... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 15 janvier 2019.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- l'arrêté du 5 janvier 2017 fixant les orientations générales pour l'exercice par les médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, de leurs missions, prévues à l'article L. 313-11 (11°) du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme E... C... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. D..., ressortissant algérien né le 12 août 1987, est entré régulièrement en France, le 21 novembre 2013 muni d'un visa de court séjour. Il a obtenu un certificat de résidence en raison de son état de santé valable jusqu'au 16 septembre 2017. Par un arrêté du 31 mai 2018 le préfet du Bas-Rhin a rejeté sa demande de renouvellement de titre de séjour et a assorti sa décision d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être renvoyé. M. D... relève appel du jugement du 23 octobre 2018 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 31 mai 2018.

Sur le refus de titre de séjour :

2. Aux termes du 7 de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit: (...) / 7) au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse pas effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays. ". En vertu de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, applicable aux ressortissants algériens : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé. ". Selon l'article R. 313-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction applicable à la date de l'arrêté du 31 mai 2018 : " (...) Le collège à compétence nationale, composé de trois médecins, émet un avis dans les conditions de l'arrêté mentionné au premier alinéa du présent article. La composition du collège et, le cas échéant, de ses formations est fixée par décision du directeur général de l'office. Le médecin ayant établi le rapport médical ne siège pas au sein du collège. / Le collège peut délibérer au moyen d'une conférence téléphonique ou audiovisuelle (...) ".

3. En premier lieu, le collège de médecins qui a examiné la situation de M. D..., le 29 mars 2018, était composé des Dr. Benazouz, Barennes et Nbomeyo, tous trois signataires de cet avis. Le bordereau transmis par l'Office français de l'immigration et de l'intégration du 5 avril 2018 précise que le Dr. Ricatte a établi le rapport médical au vu duquel le collège de médecins de l'Office s'est prononcé. Ainsi, le médecin, qui a rédigé le rapport médical, n'a pas siégé au sein du collège qui a émis l'avis du 25 février 2018. Par suite, le moyen tiré du vice de procédure doit être écarté.

4. En deuxième lieu, d'une part, par son avis du 29 mars 2018, le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a estimé que si l'état de santé de M. D... nécessitait une prise en charge médicale, le défaut de prise en charge n'était pas susceptible d'entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé. Il précise également que l'intéressé peut voyager sans risque vers son pays d'origine.

5. D'autre part, la partie qui justifie d'un avis du collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration venant au soutien de ses dires doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour. Dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, l'existence ou l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires.

6. Pour contester l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, M. D... produit un certificat médical du Dr Hertzog qui se borne à constater que le requérant souffre d'un stress post-traumatique. Ce seul certificat médical n'est pas de nature à remettre en cause l'appréciation du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, qui avait connaissance des troubles dont est atteint M. D... et s'est prononcé notamment au vu de l'arrêté du 5 janvier 2017 fixant les orientations générales pour l'exercice par les médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, de leurs missions, prévues à l'article L. 313-11 (11°) du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Aucun des éléments produits par M. D... n'est ainsi de nature à remettre en cause l'appréciation du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration sur l'absence de conséquences d'une exceptionnelle gravité d'un défaut de prise en charge médicale de l'intéressé.

7. En estimant que le défaut de prise en charge médicale de M. D... n'aurait pas de conséquences d'une exceptionnelle gravité pour lui et en refusant de lui délivrer un certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale ", le préfet du Bas-Rhin n'a, par suite, pas méconnu le 7 de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968.

Sur l'obligation de quitter le territoire français :

8. En premier lieu, il résulte de ce qui est dit au point précédent que le moyen tiré de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français, par voie de conséquence de l'illégalité du refus de titre de séjour opposé à M. D..., doit être écarté.

9. En second lieu, eu égard à la présence récente de M. D... en France, pays dans lequel il n'a pas d'attaches familiales et en raison du fait que son état de santé ne justifie pas la délivrance d'un certificat de résidence pour ressortissant algérien en application des 5 et 7 de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation entachant la décision portant obligation de quitter le territoire français du 31 mai 2018 ne peut qu'être écarté.

Sur la décision fixant le pays de renvoi :

10. Il résulte de ce qui est dit précédemment que le moyen tiré de l'illégalité de la décision fixant le pays de renvoi par voie de conséquence de l'illégalité du refus de titre de séjour et de l'obligation de quitter le territoire français doit être écarté.

11. Il résulte de tout ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 31 mai 2018 du préfet du Bas-Rhin.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

12. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté attaqué, n'implique aucune mesure particulière d'exécution. Par suite, les conclusions susvisées ne peuvent être accueillies.

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

13. Il résulte des dispositions combinées de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative que l'avocat du bénéficiaire de l'aide juridictionnelle peut demander au juge de condamner la partie perdante à lui verser la somme correspondant à celle qu'il aurait réclamée à son client, si ce dernier n'avait pas eu l'aide juridictionnelle, à charge pour l'avocat qui poursuit, en cas de condamnation, le recouvrement de la somme qui lui a été allouée par le juge, de renoncer à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à la mission d'aide juridictionnelle qui lui a été confiée.

14. L'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans les présentes instances, ne saurait être condamné à verser à l'avocat de M. D... une somme en application de ces dispositions.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. D... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié M. A... D... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée pour information au préfet de la région Grand-Est, préfet du Bas-Rhin.

N° 19NC00404 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 19NC00404
Date de la décision : 08/04/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. MARTINEZ
Rapporteur ?: Mme Laurence STENGER
Rapporteur public ?: Mme PETON
Avocat(s) : SCP KLING ET BARBY

Origine de la décision
Date de l'import : 21/04/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2020-04-08;19nc00404 ?
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