La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

17/03/2020 | FRANCE | N°19NC01907

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre, 17 mars 2020, 19NC01907


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... B..., épouse D... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 20 décembre 2018 par lequel le préfet du Bas-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1900559 du 21 mai 2019, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 17 juin 2019,

Mme D..., représentée par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal admin...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... B..., épouse D... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 20 décembre 2018 par lequel le préfet du Bas-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1900559 du 21 mai 2019, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 17 juin 2019, Mme D..., représentée par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 21 mai 2019 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 20 décembre 2018 par lequel le préfet du Bas-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination ;

3°) d'enjoindre au préfet du Bas-Rhin de réexaminer sa situation et de lui délivrer, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour, le tout dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'arrêté du 20 décembre 2018 n'est pas suffisamment motivé ;

- le refus de titre de séjour porte une atteinte disproportionnée à son droit à une vie privée et familiale normale ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français est entachée d'une incompétence de l'auteur de l'acte ;

- elle est illégale par voie de conséquence de l'illégalité du refus de titre de séjour qui lui a été opposé ;

- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation.

Une mise en demeure a été adressée, le 9 décembre 2019, au préfet de la région Grand-Est, préfet du Bas-Rhin, qui n'a pas produit de mémoire en défense.

Mme D... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 19 septembre 2019.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour des ressortissants algériens et de leurs familles ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme E..., présidente assesseur, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme D..., ressortissante algérienne née le 24 juin 1959, est entrée en France, le 14 mars 2016, sous couvert d'un visa de court séjour Schengen afin de rendre visite à l'un de ses fils qui vit à Strasbourg. Par un arrêté du 20 décembre 2018, le préfet du Bas-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Par un jugement du 21 mai 2019, dont Mme D... relève appel, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur le refus de titre de séjour :

2. En premier lieu, l'arrêté du 20 décembre 2018 fait état de la présence en France de l'un des fils de la requérante qui a la nationalité française ainsi que de celle de deux de ses frères et d'une soeur. Il précise également que son époux réside en Algérie ainsi que deux de ses enfants, que deux autres de ses enfants résident en Espagne et un dernier au Canada. Il mentionne que la requérante déclare être séparée de son époux. L'arrêté litigieux, qui fait état des considérations de droit sur lesquelles il se fonde, est ainsi également suffisamment motivé en fait. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de l'arrêté du 20 décembre 2018 doit être écarté.

3. En second lieu, l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales stipule que : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) ". Selon le 5 de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) / 5) au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...) ".

4. Mme D... réside chez son fils, né en 1981, sa belle-fille et leurs trois enfants, qui ont tous la nationalité française, depuis son arrivée en France, le 14 mars 2016. Elle fait valoir qu'elle a fui l'Algérie en raison du comportement violent de son époux et que son fils lui apporte une aide financière et psychologique. Elle relève qu'elle s'occupe de ses trois petits-enfants, ce qui est confirmé par une attestation d'une amie de sa belle-fille. Cependant, alors même que Mme D... serait particulièrement proche de son fils et de sa belle-fille qui résident en France, il ne ressort pas des pièces du dossier que sa présence à leurs côtés serait indispensable. Mme D... a six enfants, dont deux résident en Algérie. Elle allègue, sans toutefois l'établir, qu'elle n'a plus de liens avec ses deux filles qui résident en Algérie. Elle soutient, en outre, être séparée de son époux en raison du comportement violent de ce dernier, sans qu'aucun élément du dossier ne permette cependant de corroborer ses allégations. Alors même qu'elle respecte les valeurs de la République et apprend le français, ces circonstances ne permettent pas d'établir que la requérante, qui a vécu en Algérie jusqu'à l'âge de 56 ans, aurait désormais l'essentiel de ses attaches privées et familiales en France où elle résidait depuis un peu plus de deux ans et demi seulement à la date de l'arrêté du 20 décembre 2018. Il ne ressort pas davantage des pièces du dossier qu'elle ne pourrait pas bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine pour prendre en charge les problèmes de santé dont elle souffre, alors même qu'ils nécessitent un suivi et une prise en charge réguliers. La demande de titre de séjour qu'elle a effectué en 2017 pour raisons de santé a d'ailleurs été rejetée et une obligation de quitter le territoire français lui a été notifiée le 24 mai 2017, à laquelle elle n'a pas déféré. Par suite, le refus de titre de séjour qui a été opposé à Mme D... ne porte pas une atteinte disproportionnée à son droit à une vie privée et familiale normale et ne méconnaît pas l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et le paragraphe 5 de l'article 6 de l'accord franco-algérien.

5. Il résulte de ce qui précède que les conclusions de Mme D... tendant à l'annulation de l'arrêté du 20 décembre 2018 en ce qu'il refuse de lui délivrer un titre de séjour doivent être rejetées.

Sur l'obligation de quitter le territoire français :

6. En premier lieu, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte doit être écarté par les mêmes motifs que ceux mentionnés au point 6 du jugement attaqué.

7. En deuxième lieu, le moyen, soulevé par voie d'exception, tiré de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour doit être écarté, ainsi qu'il est dit au point 5 du présent arrêt.

8. En dernier lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'obligation de quitter le territoire français édictée à l'encontre de Mme D..., qui est arrivée en France à l'âge de 56 ans, n'y résidait que depuis un peu plus de deux ans et demi à la date de la décision litigieuse, n'a pas déféré à une précédente obligation de quitter le territoire français et n'est pas isolée dans son pays d'origine, aurait des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur sa situation privée et familiale et serait, en conséquence, entachée d'erreur manifeste d'appréciation.

9. Il résulte de tout ce qui précède que Mme D... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 20 décembre 2018 du préfet du Bas-Rhin. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte ainsi que celles qu'elle présente sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de Mme D... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... B..., épouse D... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée pour information au préfet de la région Grand Est, préfet du Bas-Rhin.

2

N° 19NC01907


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 19NC01907
Date de la décision : 17/03/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. DEVILLERS
Rapporteur ?: Mme Christine GRENIER
Rapporteur public ?: M. MICHEL
Avocat(s) : YAHI

Origine de la décision
Date de l'import : 05/05/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2020-03-17;19nc01907 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award