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27/02/2020 | FRANCE | N°18NC02727

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2ème chambre, 27 février 2020, 18NC02727


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société anonyme simplifiée unipersonnelle (SASU) Saint-Laurent Maintenance a demandé au tribunal administratif de Nancy de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des suppléments d'impôt sur les sociétés qui lui ont été assignés au titre des années 2010, 2011 et 2012 ainsi que des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période du 1er novembre 2011 au 31 décembre 2012.

Par un jugement n° 1700843 du 30 juillet 2018, le tribunal adminis

tratif de Nancy, après avoir constaté un non-lieu à statuer dans la mesure des dégrèvemen...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société anonyme simplifiée unipersonnelle (SASU) Saint-Laurent Maintenance a demandé au tribunal administratif de Nancy de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des suppléments d'impôt sur les sociétés qui lui ont été assignés au titre des années 2010, 2011 et 2012 ainsi que des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période du 1er novembre 2011 au 31 décembre 2012.

Par un jugement n° 1700843 du 30 juillet 2018, le tribunal administratif de Nancy, après avoir constaté un non-lieu à statuer dans la mesure des dégrèvements accordés par l'administration en cours d'instance, a rejeté le surplus de cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 10 octobre 2018 ainsi qu'un mémoire complémentaire enregistré le 11 avril 2019, la SARL Saint-Laurent Maintenance, représentée par Me C..., demande à la Cour :

1°) d'annuler l'article 2 du jugement du 30 juillet 2018 rejetant le surplus de sa demande ;

2°) de prononcer la décharge des impositions contestées ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la substitution de motifs invoquée par l'administration à l'appui de la remise en cause du régime d'exonération de l'article 44 octies A du code général des impôts est irrecevable dès lors que les questions de fait relatives à l'implantation matérielle de l'entreprise au sein de la zone franche et de l'emploi d'un salarié n'ont pas été soumises à la commission qui n'a pas pu se prononcer dessus ;

- elle remplit les conditions d'implantation des moyens d'exploitation au sein de la zone franche et sa salariée travaille à plein temps au sein de cette zone ;

- le non-dépôt de l'état du bénéfice exonéré de l'article 49 L de l'annexe III au code général des impôts ne saurait entraîner la remise en cause du régime d'exonération ;

- les dépenses de parrainage d'un voilier de course ont été exposées dans l'intérêt direct de l'exploitation conformément au 7° du 1 de l'article 39 du code général des impôts ;

- les dépenses de cadeaux ont été réintégrées en totalité alors qu'elles sont d'un montant modeste, conforme aux usages des affaires et ont bénéficié à des relations d'affaires dans l'intérêt de l'exploitation.

Par un mémoire enregistré le 14 mars 2019, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- la requête est irrecevable en ce qui concerne les rehaussements de 1 592 euros (frais d'hôtel de l'année 2010), de 464 euros (frais de papeteries de l'année 2012), 4 542 euros (achat d'une bâche) et 1 037,58 euros (ordinateur) dès lors qu'ils n'ont pas fait l'objet de contestation dans le cadre de la réclamation préalable non plus que devant le tribunal administratif ;

- les moyens soulevés ne sont pas fondés ;

- la part des bénéfices des années 2011 et 2012 provenant des produits financiers ne peut bénéficier de l'exonération de l'article 44 octies A du code général des impôts.

Vu :

- les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement convoquées à l'audience publique.

Ont été entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. A... ;

- les conclusions de Mme Peton, rapporteur public ;

- et les observations de Me B... représentant la société requérante.

Une note en délibéré présentée pour la SARL Saint-Laurent Maintenance a été enregistrée au greffe le 30 janvier 2020.

Considérant ce qui suit :

1. La société Saint-Laurent Maintenance a pour activité la maintenance de parcs éoliens. Au cours des années 2010 à 2012 la société comptait cinq clients exploitants de parcs éoliens dans les départements de la Manche et du Calvados. La société Saint-Laurent Maintenance a fait l'objet d'une vérification de comptabilité au titre de la période du 1er janvier 2010 au 31 août 2013 ayant donné lieu à diverses rectifications en matière de taxe sur la valeur ajoutée et d'impôt sur les sociétés. Par un jugement du 30 juillet 2018, le tribunal administratif de Nancy, après avoir constaté un non-lieu à statuer en conséquence des dégrèvements prononcés par l'administration en cours d'instance, a rejeté le surplus de la demande de la société Saint-Laurent Maintenance. Ladite société relève appel de ce jugement en tant qu'il a rejeté le surplus de sa demande.

Sur la recevabilité de la requête :

2. La société Saint-Laurent Maintenance ne soumet pas à la cour de conclusions relatives aux frais d'hôtel et de restaurant, de papeterie, à l'acquisition d'une bâche et d'un ordinateur et n'en a d'ailleurs présenté ni dans sa réclamation ni dans sa demande au tribunal administratif. Par suite, le ministre de l'action et des comptes publics n'est pas fondé à soutenir que la requête de la société requérante ne serait pas recevable en tant qu'elle comporterait de telles conclusions, nouvelles en appel.

Sur le bénéfice des dispositions de l'article 44 octies A du code général des impôts :

3. Aux termes de l'article 44 octies A du code général des impôts dans sa version applicable au litige : " I.-Les contribuables qui, entre le 1er janvier 2006 et le 31 décembre 2014, créent des activités dans les zones franches urbaines définies au B du 3 de l'article 42 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995 d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire, ainsi que ceux qui, entre le 1er janvier 2006 et le 31 décembre 2011, exercent des activités dans les zones franches urbaines définies au deuxième alinéa du B du 3 de l'article 42 de la même loi sont exonérés d'impôt sur le revenu ou d'impôt sur les sociétés à raison des bénéfices provenant des activités implantées dans la zone jusqu'au 31 décembre 2010 pour les contribuables qui y exercent déjà une activité au 1er janvier 2006 ou, dans le cas contraire, jusqu'au terme du cinquante-neuvième mois suivant celui du début de leur activité dans l'une de ces zones. Ces bénéfices sont soumis à l'impôt sur le revenu ou à l'impôt sur les sociétés à concurrence de 40 %, 60 % ou 80 % de leur montant selon qu'ils sont réalisés respectivement au cours des cinq premières, de la sixième et septième ou de la huitième et neuvième périodes de douze mois suivant cette période d'exonération. Pour bénéficier de l'exonération, l'entreprise doit répondre cumulativement aux conditions suivantes : (...) Lorsque l'activité non sédentaire d'un contribuable est implantée dans une zone franche urbaine mais est exercée en tout ou partie en dehors d'une telle zone, l'exonération s'applique si ce contribuable emploie au moins un salarié sédentaire à temps plein ou équivalent, exerçant ses fonctions dans les locaux affectés à l'activité, ou si ce contribuable réalise au moins 25 % de son chiffre d'affaires auprès de clients situés dans les zones franches urbaines (...) IV.- Les obligations déclaratives des personnes et organismes auxquels s'applique l'exonération sont fixées par décret ". Aux termes de l'article 49 L de l'annexe III au code général des impôts : " Le contribuable qui peut bénéficier des dispositions de l'article 44 octies ou de l'article 44 octies A du code général des impôts doit joindre à la déclaration du résultat de la période d'imposition considérée un document conforme à un modèle établi par l'administration comportant les éléments nécessaires à la détermination du bénéfice ouvrant droit à exonération ".

4. La société Saint-Laurent Maintenance s'est placée sous le bénéfice de ce régime d'exonération des bénéfices au titre des trois années litigieuses. L'administration, afin de remettre en cause le bénéfice du régime de faveur, après avoir dans un premier temps estimé que la société requérante exerçait une activité sédentaire s'est fondée devant le tribunal administratif de Nancy sur un nouveau motif tiré de ce qu'elle ne remplissait pas les conditions prévues dans le cas de l'exercice d'une activité non sédentaire.

En ce qui concerne la substitution de motifs :

5. Si l'administration peut, à tout moment de la procédure, invoquer un nouveau motif de droit propre à justifier l'imposition, une telle substitution ne saurait avoir pour effet de priver le contribuable de la faculté, prévue par les articles L. 59 et L. 59 A du livre des procédures fiscales, de demander la saisine de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires, lorsque celle-ci est compétente pour connaître du différend relatif à une question de fait dont la solution commande le bien-fondé du nouveau motif invoqué par l'administration.

6. Il résulte clairement du mémoire présenté par la société Saint-Laurent Maintenance à la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires qu'elle a soumis à cette instance les questions de fait relatives à son implantation au sein d'une zone franche urbaine ainsi qu'à l'emploi à plein temps au sein de son siège social de sa salariée. De son côté le rapport présenté par l'administration devant cet organisme, qui corrobore d'ailleurs les éléments indiqués dans la réponse aux observations du contribuable, examine également ces questions de fait. Dans ces conditions, la demande de substitution de motifs de l'administration n'a pas eu pour effet de priver la société requérante de la faculté de demander la saisine de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires, compétente pour connaître du différend relatif à ces questions de fait dont la solution commandait le bien-fondé du nouveau motif invoqué par l'administration devant le tribunal administratif de Nancy. Par suite, c'est à juste titre que le tribunal administratif de Nancy a admis que l'administration pouvait régulièrement se fonder sur le nouveau motif invoqué par elle.

En ce qui concerne l'implantation en zone franche urbaine :

7. Il appartient au juge de l'impôt d'apprécier, au vu de l'instruction, si les opérations réalisées par le contribuable entrent dans le champ d'application de l'exonération d'impôt sur le revenu ou d'impôt sur les sociétés prévue par les dispositions précitées. L'implantation d'une activité en zone franche urbaine s'apprécie, pour le bénéfice de l'exonération prévue par l'article 44 octies A du code général des impôts, au regard de tous éléments pertinents, notamment de la situation des locaux et des moyens d'exploitation utiles à cette activité et de son lieu d'exercice effectif, sans que fasse obstacle à l'application de cet article la seule circonstance qu'une partie de l'activité, en raison de sa nature, doive s'exercer chez les clients de ce contribuable.

8. Il résulte de l'instruction que la société requérante a pris en location au sein de la zone franche urbaine du quartier du Haut-Lièvre à Nancy un local de trois pièces muni de matériel, de mobilier de bureau ainsi que de matériel informatique au sein duquel elle assure sa gestion administrative, comptable et commerciale et à partir duquel elle a refacturé, au titre de l'année 2010, des prestations de nature administrative, comptable et de secrétariat au profit de ses clients. Par suite, la société Saint-Laurent Maintenance doit être regardée, pour l'exercice de son activité non-sédentaire d'entretien de parcs éoliens, comme implantée au sein d'une zone franche urbaine.

En ce qui concerne l'emploi d'un salarié :

9. Il résulte de l'instruction que la société Saint-Laurent Maintenance a recruté à compter de l'année 2008 une secrétaire à plein-temps sur la base d'un contrat de travail à durée indéterminée. Il n'est pas contesté que cette salariée réalise pour le compte de la société requérante des tâches de secrétariat et de comptabilité dans les locaux situés dans la zone franche urbaine. Il n'est pas non plus contesté que cette salariée a exécuté les prestations de services facturées aux clients de la société requérante au cours de l'année 2010. Toutefois, à compter du 1er janvier 2011, ces prestations de services ont été facturées par la société DPE, dont le siège social se trouve dans les mêmes locaux que ceux de la société requérante, cette dernière ayant cessé de les facturer. Si la société requérante conteste que sa secrétaire ait continué à exécuter les tâches correspondant à ces prestations de services à compter de cette date, elle n'indique pas à quelles nouvelles fonctions son employeur l'aurait alors affectée, la prise en charge du secrétariat de Saint-Laurent Maintenance n'étant pas de nature à l'occuper à plein temps compte tenu du faible volume de facturation et de comptabilité à prendre en charge. Il résulte de l'instruction que les lignes téléphoniques des clients preneurs des prestations de services étaient les mêmes que celles de la société requérante. Il est constant également que la secrétaire de la société avait pris en charge la réponse au droit de communication exercé par le vérificateur auprès de ces clients, une telle circonstance postérieure à la période vérifiée étant de nature à porter un éclairage sur la période antérieure. Il se déduit de ces éléments que la secrétaire de Saint-Laurent Maintenance a continué à assurer la réalisation des prestations de services au profit des clients. Ces prestations n'ayant pas été refacturées au titre des années 2011 et 2012, l'administration est fondée à soutenir que la secrétaire de la société requérante n'a pas travaillé à plein temps pour son compte. Par suite, au titre des années 2011 et 2012, la société Saint-Laurent Maintenance ne satisfait pas à la condition relative à l'emploi à plein temps d'un salarié sédentaire exerçant ses fonctions dans les locaux affectés à l'activité. Dès lors c'est à juste titre que l'administration a remis en cause le régime de faveur sous lequel la société s'était placée au titre de ces deux années.

10. En revanche, concernant l'année 2010, si l'administration soutient que la salariée de la société requérante n'a pas accompli ses fonctions de manière sédentaire au sein de la zone franche urbaine, il ne résulte pas de l'instruction que cette employée se serait déplacée deux fois par mois à Epinal, ainsi que le soutient le service, ni qu'elle aurait effectué d'autres déplacements vers les parcs d'éoliennes dans la Manche et le Calvados. Contrairement à ce que soutient le ministre, aucun frais de déplacement n'a été remboursé à l'intéressée ainsi qu'en attestent les fiches de paye de cette salariée produites par la société requérante pour toute la période litigieuse. La réalisation de déplacements ponctuels en dehors de la zone franche urbaine, afin d'effectuer des achats de fournitures ou d'assister à un colloque et en admettant même l'existence de déplacements auprès des clients, ne saurait remettre en cause le caractère sédentaire de l'emploi de l'interessée au siège de la société. Par suite, l'employée de la société Saint-Laurent Maintenance ayant accompli ses fonctions à plein temps pour le compte de son employeur, en assurant son secrétariat et en réalisant les prestations de services facturées aux clients, la société requérante doit être regardée comme remplissant les conditions de fond prévues par les dispositions ci-dessus reproduites de l'article 44 octies A du code général des impôts en faveur des entreprises non-sédentaires implantées en zone franche urbaine au titre de l'année 2010.

En ce qui concerne le respect des obligations déclaratives :

11. Si les dispositions, de caractère réglementaire, ci-dessus reproduites de l'article 49 L de l'annexe III au code général des impôts prévoient que le contribuable doit joindre à sa déclaration de résultat un état des bénéfices ouvrant droit à exonération, elles ne sauraient compte tenu des termes de l'article 44 octies A précité, avoir pour effet de lui interdire de régulariser sa situation dans le délai de réclamation prévu aux articles R. 196-1 et R. 196-3 du livre des procédures fiscales, dans le cas où il n'aurait pas joint ce document à sa liasse fiscale.

12. Si la société Saint-Laurent Maintenance n'a pas joint à sa déclaration de résultat de l'année 2010 l'état du bénéfice exonéré prévu par les dispositions de l'article 49 L de l'annexe III au code général des impôts, il n'est pas contesté qu'elle a régularisé cette omission dans le délai de réclamation en joignant à sa réclamation préalable ce document. Par suite, le ministre de l'action et des comptes publics n'est pas fondé à soutenir que l'omission initiale du dépôt de l'état des bénéfices exonérés serait de nature à priver la société du bénéfice du régime d'exonération prévu par l'article 44 octies A du code général des impôts.

Sur les dépenses de parrainage et publicité :

13. Aux termes de l'article 39 du code général des impôts rendu applicable en matière d'impôt sur les sociétés par l'article 209 du même code : "1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant, sous réserve des dispositions du 5, notamment :/ 7° Les dépenses engagées dans le cadre de manifestations de caractère philanthropique, éducatif, scientifique, social, humanitaire, sportif, familial, culturel ou concourant à la mise en valeur du patrimoine artistique, à la défense de l'environnement naturel ou à la diffusion de la culture, de la langue et des connaissances scientifiques françaises, lorsqu'elles sont exposées dans l'intérêt direct de l'exploitation ".

14. Il résulte de l'instruction que la société DPE a facturé à la société Saint-Laurent Maintenance au titre des exercices 2011 et 2012, à hauteur de 10 000 euros, des frais de participation à, d'une part, des opérations de communication et publicité, d'autre part, des dépenses de parrainage sportif, ayant consisté à apposer le logo " SL Energies Groupe " sur un voilier de course ayant participé à des régates de compétition. La société Saint-Laurent Maintenance a également déduit des achats de fournitures se rapportant à ces manifestations sportives à hauteur de 1 088 euros au titre de l'année 2011 et 1 160 euros au titre de l'année 2012. Afin de refuser la déduction de ces dépenses, l'administration s'est fondée sur le seul motif que la dénomination de la société requérante n'apparaissait pas dans ce logo. Il ressort cependant du site internet https://sfougeres.wordpress.com/about/ que les sociétés du groupe informel dirigé par le gérant de la société requérante, spécialisé dans la production d'énergies renouvelables, électricité éolienne, hydraulique et biogaz, sont regroupées sous la bannière " SL Energies Groupe ", fédérant diverses entreprises aux domaines d'activité complémentaires, et qu'au nombre de ces sociétés figure la société Saint-Laurent Maintenance. En réponse à la mesure d'instruction ordonnée par la cour, la société requérante justifie n'avoir inscrit en charges au titre de chacun des exercices litigieux que la seule quote-part des frais de parrainage lui incombant, fixée à 45 % de l'ensemble des frais de communication et de parrainage supportés par la société DPE et refacturés par elle aux différentes sociétés du groupe à proportion de l'intérêt qu'elles en ont tiré compte tenu de la nature de leur activité. Dans ces conditions, la société Saint-Laurent Maintenance s'est trouvée suffisamment identifiée au travers de ces actions de communication et parrainage pour que les participations qu'elle a versées à ce titre puissent être regardées comme ayant été exposées dans l'intérêt direct de son exploitation et dans cette mesure. Par suite, elle est fondée à soutenir que c'est à tort que l'administration lui a refusé la déduction de ces sommes.

Sur les dépenses de cadeaux :

15. Aux termes de l'article 271 du code général des impôts : " I. 1. La taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé les éléments du prix d'une opération imposable est déductible de la taxe sur la valeur ajoutée applicable à cette opération ". Aux termes de l'article 205 de l'annexe II au même code : " La taxe sur la valeur ajoutée grevant un bien ou un service qu'un assujetti à cette taxe acquiert, importe ou se livre à lui-même est déductible à proportion de son coefficient de déduction ". Aux termes de l'article 206 de la même annexe : " I. - Le coefficient de déduction mentionné à l'article 205 est égal au produit des coefficients d'assujettissement, de taxation et d'admission/(...) IV. - 1. Le coefficient d'admission d'un bien ou d'un service est égal à l'unité, sauf dans les cas décrits aux 2 à 4. /2. Le coefficient d'admission est nul dans les cas suivants :/ 1° Lorsque le bien ou le service est utilisé par l'assujetti à plus de 90 % à des fins étrangères à son entreprise (...) 3° Lorsque le bien est cédé sans rémunération ou moyennant une rémunération très inférieure à son prix normal, notamment à titre de commission, salaire, gratification, rabais, bonification, cadeau, quelle que soit la qualité du bénéficiaire ou la forme de la distribution, sauf quand il s'agit de biens de très faible valeur". Aux termes enfin de l'article 39 du code général des impôts : "5. Sont également déductibles les dépenses suivantes :/e. Les cadeaux de toute nature, à l'exception des objets de faible valeur conçus spécialement pour la publicité (...) / Les dépenses ci-dessus énumérées peuvent également être réintégrées dans les bénéfices imposables dans la mesure où elles sont excessives et où la preuve n'a pas été apportée qu'elles ont été engagées dans l'intérêt direct de l'entreprise ".

16. La société Saint-Laurent Maintenance, qui ne tient pas même compte des factures admises par l'administration lors du dégrèvement qu'elle a prononcé au cours de l'instance devant le tribunal administratif, ne présente aucun élément, en dehors de considérations d'ordre général, de nature à démontrer que les dépenses de cadeaux qu'elle a exposées au cours des années 2010, 2011 et 2012 auraient été engagées dans son intérêt direct et qu'elles auraient été utilisées pour moins de 90 % à des fins étrangères à son entreprise. Par suite, elle n'est pas fondée à demander la décharge des suppléments d'impôt sur les sociétés et de taxe sur la valeur ajoutée laissés à sa charge à raison de ces dépenses de cadeaux.

17. Il résulte de tout ce qui précède que la société Saint-Laurent Maintenance est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy a refusé de faire droit à sa demande tendant à la décharge du supplément d'impôt sur les sociétés consécutif à la remise en cause du régime de l'article 44 octies A du code général des impôts concernant l'année 2010 et de ceux résultant de la réintégration des frais de publicité, communication et de parrainage sportif des années 2011 et 2012.

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

18. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions de la société Saint-Laurent Maintenance tendant à ce qu'il soit mis à la charge de l'Etat une somme au titre des frais exposés par elle dans la présente instance.

D E C I D E :

Article 1er : La société Saint-Laurent Maintenance est déchargée du supplément d'impôt sur les sociétés et des majorations qui lui ont été assignés au titre de l'année 2010 en conséquence de la remise en cause du régime d'exonération de l'article 44 octies A du code général des impôts.

Article 2 : Il est déduit des bénéfices imposables à l'impôt sur les sociétés de la société Saint-Laurent Maintenance la somme de 11 088,63 euros au titre de l'année 2011 et celle de 11 160,10 euros au titre de l'année 2012 s'agissant des frais de publicité, de communication et de parrainage sportif.

Article 3 : La société Saint-Laurent Maintenance est déchargée de l'impôt sur les sociétés et des majorations en conséquence des réductions de base d'imposition décidées à l'article 2 ci-dessus.

Article 4 : Le jugement du tribunal administratif de Nancy du 30 juillet 2018 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à la société Saint-Laurent Maintenance et au ministre de l'action et des comptes publics.

N° 18NC02727

2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 18NC02727
Date de la décision : 27/02/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Analyses

19-04-02-01-01-03 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. Bénéfices industriels et commerciaux. Personnes et activités imposables. Exonération de certaines entreprises nouvelles (art. 44 bis et suivants du CGI).


Composition du Tribunal
Président : M. MARTINEZ
Rapporteur ?: M. Marc AGNEL
Rapporteur public ?: Mme PETON
Avocat(s) : DILLENSCHNEIDER FAVARO et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 03/03/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2020-02-27;18nc02727 ?
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