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25/02/2020 | FRANCE | N°18NC00843

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre, 25 février 2020, 18NC00843


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... G... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler la décision du 19 juin 2015 par laquelle le ministre de la défense a rejeté le recours qu'il a adressé à la commission de recours des militaires tendant au retrait de la décision du 11 février 2015 lui refusant le bénéfice de l'indemnité pour charges militaires au taux particulier n°1 et à la régularisation de sa situation.

Par un jugement n° 1504685 du 24 janvier 2018, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté s

a demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés l...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... G... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler la décision du 19 juin 2015 par laquelle le ministre de la défense a rejeté le recours qu'il a adressé à la commission de recours des militaires tendant au retrait de la décision du 11 février 2015 lui refusant le bénéfice de l'indemnité pour charges militaires au taux particulier n°1 et à la régularisation de sa situation.

Par un jugement n° 1504685 du 24 janvier 2018, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 22 mars 2018 et 31 janvier 2019, M. G..., représenté par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 24 janvier 2018 du tribunal administratif de Strasbourg ;

2°) de prononcer la nullité de la décision du 19 juin 2015 du ministre des armées ;

3°) d'annuler la décision implicite du 19 juin 2015 du ministre des armées ;

4°) d'enjoindre au ministre des armées de lui verser l'indemnité pour charges militaires au taux particulier n°1 pour la période du 4 juin 2014 au 3 juin 2016 ;

5°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 500 euros au titre des dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait de l'illégalité de la décision du ministre des armées ;

6°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

7°) d'ordonner l'exécution provisoire de l'arrêt à intervenir.

Il soutient que :

- le principe de l'égalité de traitement entre les couples mariés et ceux qui sont liés par un pacte civil de solidarité (PACS) a été méconnu ;

- la durée minimale de deux ans d'union imposée aux couples liés par un PACS instaure une différence de traitement disproportionnée avec l'indemnité pour frais de changement de résidence des fonctionnaires civils du ministère de la défense et avec les couplés mariés ;

- il a droit au versement à titre rétroactif de l'indemnité pour charges militaires au taux particulier n°1 pour la période du 4 juin 2014 au 3 juin 2016 ;

- il a droit à l'indemnisation du préjudice moral qu'il a subi en raison de l'illégalité de la décision de la ministre des armées.

Par un mémoire en défense, enregistré le 7 novembre 2018, la ministre des armées conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que :

- le requérant ne peut bénéficier de l'indemnité pour charges militaires au taux particulier n°1 qu'à compter du 3 juin 2016, deuxième anniversaire de son PACS ;

- la différence de traitement entre les couples mariés et les couples liés par un PACS n'est pas manifestement disproportionnée par rapport à leur différence de situation ;

- M. G... n'a pas adressé de demande indemnitaire préalable pour demander des dommages-intérêts ;

- elle n'a commis aucune faute de nature à engager sa responsabilité.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code civil ;

- la loi n° 99-944 du 15 novembre 1999 relative au pacte civil de solidarité ;

- le décret n°59-1193 du 13 octobre 1959 fixant le régime de l'indemnité pour charges militaires ;

- le décret n°90-437 du 28 mai 1990 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme C..., présidente rapporteur,

- et les conclusions de M. Michel, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. G... est militaire de carrière au sein de l'armée de terre avec le grade de sergent instructeur. Il a conclu un pacte civil de solidarité avec Mme D... A..., le 3 juin 2014. Le 24 janvier 2015, il a demandé le versement de l'indemnité pour charges militaires au taux particulier n°1 au centre expert des ressources et de la solde (CEHRS) de Nancy. Sa demande a été rejetée, le 5 février 2015. M. G... a alors adressé un recours administratif préalable obligatoire à la commission de recours des militaires. Le ministre de la défense a rejeté sa demande, le 19 juin 2015. Par un jugement du 24 janvier 2018, dont M. G... relève appel, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Sur les conclusions à fin d'annulation de la décision du 19 juin 2015 :

2. En premier lieu, aux termes de l'article 1er du décret du 13 octobre 1959 fixant le régime de l'indemnité pour charges militaires : " 1. L'indemnité représentative de frais dite indemnité pour charges militaires est attribuée aux officiers et militaires non officiers à solde mensuelle, ainsi qu'aux volontaires dans les armées, pour tenir compte des diverses sujétions spécifiquement militaires, et notamment de la fréquence des mutations d'office. / 2. Cette indemnité est acquise : / Aux officiers, sous-officiers de carrière et militaires non officiers à solde mensuelle en activité de service (...) / 3. L'indemnité pour charges militaires varie en fonction du grade, de la situation de famille et des conditions de logement des militaires. ". L'article 3 du même décret énonce que : " Les militaires visés à l'article 1er bénéficient, quelle que soit leur situation de famille, d'un taux de base. / Sous réserve du quatrième alinéa du présent article, les militaires mariés ou liés par un pacte civil de solidarité, conclu depuis au moins deux ans ou ayant un ou deux enfants à charge ou vivant avec leur mère veuve, sous condition qu'elle réside habituellement sous leur toit et ne soit pas assujettie à l'impôt sur le revenu, peuvent bénéficier en plus du taux de base d'un taux particulier correspondant à cette situation de famille (...) ".

3. A la date de la décision du 19 juin 2015, M. G... ne satisfaisait pas aux conditions fixées par l'article 3 du décret du 13 octobre 1959 fixant le régime de l'indemnité pour charges militaires pour avoir droit à l'application, en sus du taux de base à l'indemnité pour charges militaires, du taux particulier n°1 pour les militaires mariés ou liés par un pacte civil de solidarité conclu depuis au moins deux ans, dès lors qu'il ne remplissait pas la condition de durée prévue par ces dispositions.

4. En deuxième lieu, le principe d'égalité ne s'oppose pas à ce que l'autorité investie du pouvoir réglementaire règle de façon différente des situations différentes ni à ce qu'elle déroge à l'égalité pour des raisons d'intérêt général, pourvu que, dans l'un comme dans l'autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport avec l'objet de la norme qui l'établit et ne soit pas manifestement disproportionnée au regard des différences de situation susceptibles de la justifier.

5. D'une part, en subordonnant le bénéfice de l'indemnité pour charges militaires à la conclusion d'un pacte civil de solidarité depuis au moins deux ans, les dispositions de l'article 3 du décret du 13 octobre 1959 fixant le régime de l'indemnité pour charges militaires citées au point 2 n'instituent pas une différence de traitement entre couples liés par un PACS et couples mariés manifestement disproportionnée à leur différence de situation.

6. D'autre part, M. G... relève que les fonctionnaires civils liés par un PACS bénéficient de l'indemnité pour frais de changement de résidence, dès la conclusion de ce dernier, contrairement aux militaires qui n'ont droit au versement de l'indemnité pour charges militaires au taux particulier n°1 que s'ils sont liés par un PACS conclu depuis au moins deux ans. Toutefois, la rémunération d'agents publics relevant de corps, de cadres d'emploi voire de fonctions publiques différents ne peut être appréciée que globalement. Les régimes indemnitaires peuvent nécessairement différer selon les corps, cadres d'emplois et fonctions publiques et ne peuvent être pris en considération isolément. Par conséquent, un agent public ne peut utilement contester la rupture d'égalité qui existerait entre lui et des agents publics relevant de corps, cadres d'emploi ou fonctions publiques différents au regard des conditions d'accès à une indemnité particulière. Par suite, M. G... ne peut utilement invoquer une disproportion manifeste entre la situation des fonctionnaires civils qui bénéficient de cette indemnité dès la conclusion de leur pacte civil de solidarité sans condition de durée et celle des militaires, pour lesquels une condition de durée est fixée pour le versement de l'indemnité pour charges militaires au taux particulier n°1.

7. Il résulte de ce qui précède que la décision du 19 juin 2015 par laquelle le ministre de la défense a rejeté la demande de M. G... tendant au versement de l'indemnité pour charges militaires au taux particulier n°1 n'est pas entachée d'illégalité. Les conclusions de M. G... tendant à ce que la nullité de cette décision soit constatée et à ce que cette décision soit annulée ne peuvent qu'être rejetées.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

8. Ainsi qu'il est dit au point précédent, la décision du 19 juin 2015 du ministre de la défense n'est pas entachée d'illégalité. Les conclusions de M. G... tendant au versement de l'indemnité pour charges militaires au taux particulier n°1 pour la période du 3 juin 2014 au 3 juin 2016, date du deuxième anniversaire de la conclusion de son pacte civil de solidarité, ne peuvent, en conséquence, qu'être rejetées.

Sur les conclusions indemnitaires :

9. Sans qu'il soit besoin d'examiner leur recevabilité, les conclusions de M. G... tendant au versement de dommages et intérêts à hauteur de 500 euros en réparation du préjudice moral qu'il a subi ne peuvent qu'être rejetées, en l'absence de faute de nature à engager la responsabilité de l'Etat.

Sur les conclusions tendant à l'exécution provisoire du présent arrêt :

10. Dès lors que les décisions de justice sont exécutoires selon l'article L. 11 du code de justice administrative, les conclusions tendant à l'exécution provisoire du présent arrêt sont sans objet et doivent être rejetées.

11. Il résulte de tout ce qui précède que M. G... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande. Les conclusions qu'il présente au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, en conséquence, qu'être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. G... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... G... et à la ministre des armées.

2

18NC00843


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 18NC00843
Date de la décision : 25/02/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

08-01-01-06 Armées et défense. Personnels militaires et civils de la défense. Questions communes à l'ensemble des personnels militaires. Soldes et avantages divers.


Composition du Tribunal
Président : Mme GRENIER
Rapporteur ?: Mme Christine GRENIER
Rapporteur public ?: M. MICHEL
Avocat(s) : CLAUSSE

Origine de la décision
Date de l'import : 03/03/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2020-02-25;18nc00843 ?
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