Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme C... A... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 13 décembre 2018 par lequel le préfet du Haut-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.
Par un jugement no 1900317 du 16 mai 2019, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 20 juin 2019, Mme C... A..., représentée par Me B..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif du 16 mai 2019 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 13 décembre 2018 par lequel le préfet du Haut-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination ;
3°) d'enjoindre au préfet du Haut-Rhin de lui délivrer un titre de séjour, et subsidiairement de réexaminer sa situation, sous astreinte dans l'un et l'autre cas de 100 euros par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros à verser à son conseil en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
En ce qui concerne la décision portant refus de titre de séjour :
- la décision contestée méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la décision contestée méconnaît les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :
- elle est illégale en raison de l'illégalité du refus de titre de séjour.
En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :
- elle est illégale en raison de l'illégalité du refus de titre de séjour.
Par un mémoire, enregistré le 4 décembre 2019, le préfet du Haut-Rhin conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.
Mme A... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 19 septembre 2019.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. D... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme A..., ressortissante russe, née en 1949, est entrée en France le 25 mai 2013, sous couvert d'un visa " Schengen " en cours de validité, en vue de rejoindre sa fille déjà présente sur le territoire depuis l'année 2000. L'intéressée a alors sollicité un titre de séjour le 20 juin suivant pour raison de santé que le préfet du Haut-Rhin a refusé de lui délivrer par un arrêté du 30 septembre 2013. Par un nouvel arrêté du 25 août 2014, le préfet du Haut-Rhin a refusé de faire droit à une seconde demande de titre de séjour présentée par la requérante. Le 16 octobre 2018, Mme A... a sollicité un titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-14 et du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 13 décembre 2018, le préfet du Haut-Rhin a rejeté sa demande, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de 30 jours et a déterminé le pays de destination. Mme A... fait appel du jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 16 mai 2019 qui a rejeté son recours tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur le bien-fondé du jugement :
En ce qui concerne la décision portant refus de titre de séjour :
2. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...)/ 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ; (...) ".
3. Mme A... fait valoir qu'elle réside sur le territoire français de façon continue depuis cinq ans à la date de l'arrêté attaqué avec sa fille, qui s'occupe d'elle, et ses petits-enfants, et qu'elle est isolée en Russie. Toutefois, il est constant qu'elle a vécu dans son pays d'origine jusqu'à l'âge de soixante-quatre ans, dont près de 13 ans après le départ de sa fille pour la France. Si l'intéressée établit avoir obtenu des visas pour l'Allemagne, où résident deux autres de ses enfants, elle n'apporte aucun élément de nature à justifier des liens qu'elle a entretenus avec sa fille et ses petits-enfants au cours de ces treize années où ils résidaient déjà en France. Par ailleurs, les certificats médicaux produits par Mme A..., notamment du 18 mai 2018 et du 29 mai 2019, qui se bornent à mentionner qu'elle souffre d'hypertension, de polyarthrose et d'un état anxio-dépressif et que son état nécessite une aide à domicile ainsi qu'une aide-ménagère avec une assistance médicale spécialisée en urologie, ne permettent pas d'établir que sa présence en France est indispensable pour qu'elle puisse bénéficier de l'aide quotidienne de sa fille, laquelle d'ailleurs travaille. En outre, la présence de la requérante en France est relativement récente à la date de la décision en litige. Si elle justifie suivre des cours de français depuis septembre 2016, à raison de deux fois par semaine, cette circonstance n'est pas suffisante pour démontrer son insertion dans la société française alors que le préfet a pu relever, sans être contredit, qu'elle ne s'exprimait pas en français lorsqu'elle s'est présentée pour solliciter un titre de séjour. Enfin, quand bien même les enfants de Mme A... ont quitté la Russie, cette circonstance n'est pas de nature à établir qu'elle serait dépourvue de toute attache dans son pays d'origine où elle a vécu l'essentiel de sa vie. La circonstance que sa fille soit en mesure de subvenir à ses besoins est sans incidence sur la légalité de la décision contestée. Compte tenu de l'ensemble de ces éléments, Mme A... n'est pas fondée à soutenir que la décision de refus de titre de séjour méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
4. Aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2. (...) " ;
5. Si Mme A... se prévaut de la dégradation de son état de santé et de l'absence de prise en charge en Russie des médicaments et soins dont elle a besoin, les certificats médicaux qu'elle a produits établissent seulement qu'elle prend un traitement à base d'hypertenseur, sans apporter de précisions sur les conséquences d'un défaut de soins, ni sur l'inexistence d'un traitement approprié dans son pays d'origine. Quant à sa vie familiale en France, elle s'est constituée récemment dans les conditions rappelées au point 3. En outre, l'intéressée n'apporte aucun élément, en dehors du suivi de cours de français, démontrant son intégration. Ainsi, ces circonstances ne constituent pas, en l'espèce, des considérations humanitaires ou des motifs exceptionnels justifiant l'admission au séjour de la requérante. Dès lors, le préfet du Haut-Rhin n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en refusant de délivrer à Mme A... un titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :
6. Il résulte de ce qui précède que Mme A... n'a pas établi l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision portant obligation de quitter le territoire français doit être annulée par voie de conséquence doit être écarté.
En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :
7. Il résulte de ce qui précède que Mme A... n'a pas établi l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision fixant le pays de destination doit être annulée par voie de conséquence doit être écarté.
8. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, les conclusions présentées par la requérante à fin d'injonction et d'astreinte et sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... A... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée pour information au préfet du Haut-Rhin.
N° 19NC01953 2