Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler l'arrêté du 8 novembre 2018 par lequel le préfet des Ardennes a refusé de l'admettre au séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle sera renvoyée.
Par un jugement n° 1802491 du 12 mars 2019, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 19 mars 2019, Mme B..., représentée par Me C..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne du 12 mars 2019 ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 8 novembre 2018 du préfet des Ardennes ;
3°) d'enjoindre au préfet des Ardennes de lui délivrer une carte de séjour temporaire à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 500 euros par jour de retard et, ou à défaut, de réexaminer sa situation dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 500 euros par jour de retard, et de lui délivrer, pendant cet examen, une autorisation provisoire de séjour.
Elle soutient que :
S'agissant du refus de titre de séjour :
- il n'existe pas de traitement approprié à son état de santé en Arménie ;
S'agissant de l'obligation de quitter le territoire français :
- elle n'a plus d'attaches familiales en Arménie et l'essentiel de ses liens personnels se situent en France ;
- cette décision comporte des conséquences d'une exceptionnelle gravité.
Par un mémoire en défense, enregistré le 2 juillet 2019, le préfet des Ardennes conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.
Mme B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 25 avril 2019.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Antoniazzi, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme B..., ressortissante arménienne née le 26 mars 1961, est entrée irrégulièrement en France le 11 mars 2012, accompagnée de son fils majeur, afin d'y solliciter la reconnaissance du statut de réfugiée. Sa demande d'asile a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) du 22 mai 2013, confirmée par la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) le 16 décembre 2014. Le 19 mars 2018, elle a sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par arrêté du 8 novembre 2018, le préfet des Ardennes a rejeté cette demande, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle sera éloignée. Mme B... fait appel du jugement du 12 mars 2019 par lequel le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur la légalité de la décision portant refus de séjour :
2. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention 'vie privée et familiale' est délivrée de plein droit :(...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. (...) La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. ".
3. Sous réserve des cas où la loi attribue la charge de la preuve à l'une des parties, il appartient au juge administratif, au vu des pièces du dossier, et compte-tenu, le cas échéant, de l'abstention d'une des parties à produire les éléments qu'elle est seule en mesure d'apporter et qui ne sauraient être réclamés qu'à elle-même, d'apprécier si l'état de santé d'un étranger nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié.
4. La partie qui justifie d'un avis du collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) qui lui est favorable doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour. Dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il pourrait ou non y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires. En cas de doute, il lui appartient de compléter ces échanges en ordonnant toute mesure d'instruction utile.
5. Il ressort des pièces du dossier que par un avis émis le 17 août 2018, le collège des médecins de l'OFII a estimé que si l'état de santé de Mme B... nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont elle est originaire, elle peut y bénéficier effectivement d'un traitement approprié et qu'au vu des éléments du dossier et à la date de l'avis, son état de santé peut lui permettre de voyager sans risque vers son pays d'origine.
6. Mme B... souffre d'hypertension artérielle et de la " fièvre méditerranéenne familiale ", nécessitant la prise d'un traitement médicamenteux, dont la requérante reconnaît qu'il est disponible dans son pays d'origine. Si elle fait valoir que ce traitement doit être associé à une prise en charge pluridisciplinaire coordonnée par son médecin traitant et des médecins spécialistes, elle n'établit pas, par les pièces qu'elle produit, qu'elle bénéficie d'un tel accompagnement, ni, en tout état de cause, que cet accompagnement ne pourrait pas être dispensé dans son pays d'origine, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé de ce pays. Dans ces conditions, Mme B... ne remet pas utilement en cause l'appréciation portée tant par le préfet des Ardennes que par le collège des médecins de l'OFII quant à la possibilité pour elle de bénéficier effectivement de soins adaptés en Arménie. Dès lors, le moyen tiré de ce que la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour méconnaîtrait les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.
Sur la légalité de la décision obligeant l'intéressée à quitter le territoire français :
7. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...). 2. Il ne peut y avoir d'ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
8. Il ressort des pièces du dossier que Mme B..., entrée en France à l'âge de cinquante-et-un ans, est veuve et sans enfant à charge. Si deux de ses fils résident en France, en compagnie de leurs épouses, l'un d'eux n'est titulaire d'aucun titre de séjour en France. De plus, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'elle serait dépourvue d'attaches familiales dans son pays d'origine où elle a elle-même vécu la majeure partie de sa vie. Par suite, eu égard aux conditions et à la durée du séjour de Mme B... en France, la décision portant obligation de quitter le territoire français n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise. Dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées doit être écarté. Pour les mêmes motifs, le préfet n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de la requérante.
9. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et d'astreinte ne peuvent qu'être rejetées.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet des Ardennes.
2
N° 19NC00825