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27/12/2019 | FRANCE | N°19NC01168

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre, 27 décembre 2019, 19NC01168


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... D... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 21 décembre 2018 du préfet de la Côte-d'Or en tant qu'il lui interdit de circuler sur le territoire français pendant une durée de deux ans.

Par un jugement n° 1808081 du 14 mars 2019, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 13 avril 2019, M. D..., représenté par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler le

jugement du 14 mars 2019 du tribunal administratif de Strasbourg ;

2°) d'annuler l'arrêté du 21 décemb...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... D... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 21 décembre 2018 du préfet de la Côte-d'Or en tant qu'il lui interdit de circuler sur le territoire français pendant une durée de deux ans.

Par un jugement n° 1808081 du 14 mars 2019, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 13 avril 2019, M. D..., représenté par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 14 mars 2019 du tribunal administratif de Strasbourg ;

2°) d'annuler l'arrêté du 21 décembre 2018 du préfet de la Côte-d'Or en tant qu'il lui interdit de circuler sur le territoire français pendant une durée de deux ans ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- l'arrêté du 21 décembre 2018 n'est pas suffisamment motivé ;

- il ne présente pas une menace réelle, actuelle et grave pour l'ordre public, une seule condamnation ayant été prononcée à son encontre en 2012 ;

- l'arrêté attaqué est entaché d'erreur de droit.

Par un mémoire en défense, enregistré le 31 octobre 2019, le préfet de la région Bourgogne - Franche Comté, préfet de la Côte-d'Or, conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun des moyens soulevés par M. D... n'est fondé.

Un mémoire, enregistré le 29 novembre 2019, présenté pour M. D... n'a pas été communiqué.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code pénal ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme C..., présidente assesseur, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. D..., ressortissant roumain, réside en Espagne. Il exploite une entreprise de transport international. Il a été interpellé en France, le 21 décembre 2018 lors d'un trajet entre Valence et Rotterdam. Par un arrêté du 21 décembre 2018, le préfet de la Côte-d'Or l'a obligé à quitter le territoire français et lui a interdit de circuler sur le territoire français pendant une durée de deux ans. M. D... ne conteste cet arrêté qu'en tant qu'il prononce une interdiction de circuler sur le territoire français d'une durée de deux ans. M. D... a été placé en rétention. Cette mesure a cependant été annulée par la cour d'appel de Colmar, le 26 décembre 2018. Par un jugement du 14 mars 2019, dont M. D... relève appel, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'interdiction de circuler en France d'une durée de deux ans.

2. En premier lieu, l'arrêté du 21 décembre 2018, qui énonce les considérations de droit sur lesquelles il se fonde, rappelle les antécédents judiciaires de M. D.... Il précise que M. D... a été reconnu par les forces de l'ordre comme étant l'auteur de plusieurs délits, que son comportement personnel constitue une menace réelle, actuelle et suffisamment grave pour les intérêts fondamentaux de la société française et qu'il présente, en outre, un risque de récidive. Il mentionne, en outre, la situation privée et familiale de M. D... et relève qu'il n'a pas de liens anciens et stables avec la France, pays dans lequel il ne réside pas habituellement. Par suite, l'arrêté du 21 décembre 2018 est suffisamment motivé.

3. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 511-3-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative compétente peut, par décision motivée, obliger un ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse, ou un membre de sa famille à quitter le territoire français lorsqu'elle constate : (...) / 3° Ou que son comportement personnel constitue, du point de vue de l'ordre public ou de la sécurité publique, une menace réelle, actuelle et suffisamment grave à l'encontre d'un intérêt fondamental de la société. / L'autorité administrative compétente tient compte de l'ensemble des circonstances relatives à sa situation, notamment la durée du séjour de l'intéressé en France, son âge, son état de santé, sa situation familiale et économique, son intégration sociale et culturelle en France, et de l'intensité de ses liens avec son pays d'origine (...) ". Selon l'article L. 511-3-2 du même code : " L'autorité administrative peut, par décision motivée, assortir l'obligation de quitter le territoire français prononcée en application des 2° et 3° de l'article L. 511-3-1 d'une interdiction de circulation sur le territoire français d'une durée maximale de trois ans (...) ".

4. Il résulte des dispositions citées au point précédent qu'il appartient à l'autorité administrative, qui ne saurait se fonder sur la seule existence d'une infraction à la loi, d'examiner, d'après l'ensemble des circonstances de l'affaire, si la présence de l'intéressé sur le territoire français est de nature à constituer une menace réelle, actuelle et suffisamment grave pour un intérêt fondamental de la société française, ces conditions étant appréciées en fonction de sa situation individuelle, notamment de la durée de son séjour en France, de sa situation familiale et économique et de son intégration.

5. D'une part, il ressort des pièces du dossier que M. D... réside en Espagne et transite par la France dans le cadre de son activité de transporteur routier. Il a été interpellé, le 21 décembre 2018, pour des faits de vols de carburant dans trois tracteurs commis les 17 et 18 octobre 2018. Il a admis être l'auteur de cette infraction lors de son audition par les services de police, le 21 décembre 2018. Il précise que le prix des carburants étant plus cher en France qu'ailleurs, il lui arrive de dérober du gazoil à d'autres chauffeurs routiers lorsqu'un seul plein est insuffisant pour ses trajets. Il reconnaît également interrompre, par moment, le chronotachygraphe de son véhicule afin de contourner la réglementation relative au temps de conduite et au temps de repos des transporteurs routiers. Le 13 mars 2019, le tribunal correctionnel de Dijon l'a condamné à une amende de 5 000 euros pour les infractions des 17 et 18 octobre 2018.

6. D'autre part, il ressort également des pièces du dossier que M. D... a commis des faits de vol en janvier 1997 et de vol à main armée à feu en avril 1997. M. D... a été condamné à une peine d'emprisonnement ferme en 1999. Ces infractions, aussi graves soient-elles, sont anciennes. Cependant, M. D... a également commis des faits d'escroquerie du 4 octobre 2013 au 27 mars 2014 et des faits de vol aggravé par deux circonstances et obstacle au contrôle des conditions de travail en avril 2017. M. D... a d'ailleurs été condamné à une amende de 4 000 euros pour les infractions d'avril 2017 par le tribunal correctionnel de Bourg-en-Bresse, le 29 juin 2017, dont la décision a été confirmée, le 5 avril 2018 par la cour d'appel de Lyon.

7. Les faits d'escroquerie d'octobre 2013 à mars 2014 pouvaient être pris en compte à la date de l'arrêté attaqué, eu égard à leur durée et à leur caractère encore suffisamment récent. M. D... a d'ailleurs été condamné à une amende et à une interdiction de séjour sur le territoire français d'une durée de deux ans pour ces faits par un jugement du 25 mars 2015 du tribunal correctionnel de Mont-de-Marsan. Les vols de gazoil des 10 avril 2017 et 17 et 18 octobre 2018 et les infractions aux conditions de travail s'imposant aux transporteurs routiers et au contrôle de celles-ci sont également récents. Les infractions commises par M. D... présentent, en outre, un caractère répété et grave.

8. Par ailleurs, M. D..., qui ne vit pas en France et dont la famille réside en Espagne, ne justifie pas d'un séjour ancien et stable sur le territoire français. Il transite cependant fréquemment par la France dans le cadre de son activité de transporteur routier et présente, eu égard à son comportement sur la route, notamment au blocage des modalités de contrôle de son temps de conduite et, surtout, aux importantes infractions qu'il commet avec régularité sur le territoire français lors de ses séjours, aussi brefs soient-ils, une menace réelle, actuelle et suffisamment grave à l'encontre d'un intérêt fondamental de la société au sens des dispositions visées au point 3.

9. Il résulte de ce qui précède que le préfet de la Côte d'Or a pu, sans commettre d'erreur de droit, ni entacher sa décision d'erreur d'appréciation, édicter à l'encontre de M. D... une interdiction de circuler sur le territoire français pendant une durée de deux ans.

10. Il résulte de tout ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 21 décembre 2018 du préfet de la Côte-d'Or. Il y a lieu, en conséquence, de rejeter sa requête, y compris les conclusions qu'il présente au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. D... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié M. A... D... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée pour information au préfet la région Bourgogne - Franche Comté, préfet de la Côte-d'Or.

2

N° 19NC01168


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 19NC01168
Date de la décision : 27/12/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

15-05-01-01 Communautés européennes et Union européenne. Règles applicables. Libertés de circulation. Libre circulation des personnes.


Composition du Tribunal
Président : M. DEVILLERS
Rapporteur ?: Mme Christine GRENIER
Rapporteur public ?: M. MICHEL
Avocat(s) : BADESCU

Origine de la décision
Date de l'import : 07/01/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2019-12-27;19nc01168 ?
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