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27/12/2019 | FRANCE | N°18NC00769

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre, 27 décembre 2019, 18NC00769


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... D... et Mme B... E... ont demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne de condamner le département des Ardennes à verser à M. D... une somme de 2 842,70 euros, de désigner un expert médical pour procéder à l'évaluation des préjudices corporels de Mme E... et de condamner le département à verser à cette dernière une somme provisionnelle de 5 000 euros.

Par un jugement n° 1700190 du 25 janvier 2018, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne, après avoir reconnu le

département des Ardennes responsable des conséquences dommageables des accidents subi...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... D... et Mme B... E... ont demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne de condamner le département des Ardennes à verser à M. D... une somme de 2 842,70 euros, de désigner un expert médical pour procéder à l'évaluation des préjudices corporels de Mme E... et de condamner le département à verser à cette dernière une somme provisionnelle de 5 000 euros.

Par un jugement n° 1700190 du 25 janvier 2018, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne, après avoir reconnu le département des Ardennes responsable des conséquences dommageables des accidents subis par M. D... et Mme E..., l'a condamné à verser à M. D... une somme de 2 842,70 euros en réparation de son préjudice matériel et a ordonné avant-dire-droit une expertise afin d'estimer le préjudice subi par Mme E....

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 20 mars 2018, le département des Ardennes, représenté par la Selas Devarenne Associés Grand Est, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne du 25 janvier 2018 ;

2°) de rejeter les demandes présentées par M. D... et Mme E... devant le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne ;

3°) de mettre à la charge de M. D... et de Mme E... le versement d'une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, sa responsabilité pour défaut d'entretien normal de la chaussée n'est pas engagée ;

- M. D... et Mme E... ne produisent aucun élément de nature à établir que leur chute serait liée à une dégradation de la chaussée ;

- aucun défaut d'entretien normal de la chaussée ne saurait lui être reproché ;

- le phénomène de " verglas d'été ", y compris lorsqu'il n'a pas été signalé, ne saurait être regardé comme constitutif d'un défaut d'entretien normal de la voie publique ;

- M. D..., conducteur du véhicule, aurait dû se prémunir de ce phénomène naturel ;

- les autres accidents dont se prévalent M. D... et Mme E... sont postérieurs à leur accident et ne sauraient démontrer un défaut d'entretien normal de la chaussée, ni que la voie présentait des dangers exceptionnels ;

- la circonstance que le département a réalisé des travaux postérieurement à l'accident ne révèle pas une reconnaissance implicite de responsabilité ;

- la zone où l'accident s'est produit était signalée comme dangereuse ;

- s'agissant du préjudice indemnisé par le tribunal, il n'est pas établi que M. D... n'aurait perçu aucune indemnité de son assureur automobile.

Par un mémoire en défense, enregistré le 17 mai 2018, M. D... et Mme E..., représentés par Me C..., concluent au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge du département des Ardennes le versement d'une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- le lien de causalité entre les dommages subis et le défaut d'entretien de la voie publique est établi ;

- l'état de la chaussée est à l'origine de leur accident ;

- à la suite de deux autres accidents, le département a renforcé la signalisation et a procédé à des travaux de raclement de la chaussée ;

- M. D... n'a commis aucune imprudence ;

- le " verglas d'été " est de nature à caractériser un danger exceptionnel sur la voie ;

- la signalisation n'était pas suffisante ;

- il a justifié en première instance n'avoir reçu aucune indemnisation de son assureur automobile.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Devillers, président,

- les conclusions de M. Michel, rapporteur public,

- et les observations de Me F..., représentant le département des Ardennes.

Considérant ce qui suit :

1. M. D... et Mme E..., ressortissants belges, ont été victimes d'un accident de la route le 12 juillet 2015 alors qu'ils circulaient à moto sur la route départementale n° 7 entre les communes de Willerzie et Hargnies. Par un jugement du 25 juillet 2018, dont le département des Ardennes relève appel, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne, après avoir reconnu le département des Ardennes responsable des conséquences dommageables de l'accident subi par ces derniers, l'a condamné à verser à M. D... une somme de 2 842,70 euros en réparation de son préjudice matériel et, avant-dire-droit, a ordonné une expertise afin d'évaluer le préjudice corporel subi par Mme E....

Sur la responsabilité :

2. Pour obtenir réparation, par le maître de l'ouvrage, des dommages qu'il a subis à l'occasion de l'utilisation d'un ouvrage public, l'usager de cet ouvrage doit démontrer devant le juge, d'une part, la réalité de son préjudice, d'autre part, l'existence d'un lien de causalité direct entre l'ouvrage et le dommage. Pour s'exonérer de la responsabilité qui pèse ainsi sur elle, il incombe à la collectivité maître d'ouvrage soit d'établir qu'elle a normalement entretenu l'ouvrage, soit que le dommage est imputable à une faute de la victime ou à un cas de force majeure.

3. Il résulte de l'instruction et notamment du procès-verbal de gendarmerie du 1er août 2015 relatant les constatations effectuées le jour de l'accident que celui-ci résulte exclusivement d'un phénomène dénommé " verglas d'été ", produit par la dilution dans l'eau de pluie, après une période de sécheresse, des résidus d'hydrocarbures provenant de la circulation et incrustés dans le revêtement de la chaussée. Si M. D... et Mme E... soutiennent que leur accident résulte également d'une dégradation du revêtement de la chaussée, les pièces versées à l'instance et en particulier les photographies, ne permettent pas de l'établir. Compte tenu de sa nature et de ses caractéristiques, le phénomène de " verglas d'été ", qui n'a pas à faire l'objet d'une signalisation spéciale, est au nombre de ceux contre lesquels il appartient aux usagers de se prémunir, hormis le cas où la voie présenterait à cet égard des dangers exceptionnels. Il résulte de l'instruction qu'un accident mortel impliquant un deux roues a eu lieu le 26 juillet 2015 au même endroit et qu'un nouvel accident impliquant également une moto s'est produit le 15 août 2015, ce qui a conduit le département des Ardennes à renforcer la signalisation et à procéder à la réfection de la chaussée par des premiers travaux de raclement. Toutefois, eu égard au caractère contingent du phénomène ayant causé l'accident de M. D... et Mme E... et en l'absence, ainsi qu'il a été précédemment exposé, de dégradation de la chaussée, la voie départementale ne saurait être regardée comme présentant des dangers exceptionnels. Par suite, l'accident dont M. D... et Mme E... ont été victimes ne saurait engager la responsabilité du département des Ardennes.

4. Il résulte de tout ce qui précède que le département des Ardennes est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne l'a condamné à verser à M. D... une somme de 2 842,70 euros en réparation de son préjudice matériel et a ordonné avant-dire-droit une expertise afin d'estimer le préjudice subi par Mme E.... Les demandes présentées par M. D... et Mme E... devant le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne doivent, en conséquence, être rejetées.

Sur les frais liés à l'instance :

5. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge du département des Ardennes, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que M. D... et Mme E... demandent au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu en revanche de mettre à la charge de M. D... et Mme E... le versement au département des Ardennes d'une somme de 1 500 euros sur le fondement des mêmes dispositions.

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 1700190 du 25 janvier 2018 du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne est annulé.

Article 2 : Les demandes présentées par M. D... et Mme E... devant le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne sont rejetées.

Article 3 : M. D... et Mme E... verseront au département des Ardennes une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Les conclusions de M. D... et de Mme E... présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié au département des Ardennes, à M. A... D... et à Mme B... E....

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N° 18NC00769


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 18NC00769
Date de la décision : 27/12/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

67-03-01-01 Travaux publics. Différentes catégories de dommages. Dommages sur les voies publiques terrestres. Entretien normal.


Composition du Tribunal
Président : M. DEVILLERS
Rapporteur ?: M. Alexis MICHEL
Rapporteur public ?: M. MICHEL
Avocat(s) : STUBBE

Origine de la décision
Date de l'import : 07/01/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2019-12-27;18nc00769 ?
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