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12/11/2019 | FRANCE | N°18NC03525

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre, 12 novembre 2019, 18NC03525


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 23 février 2018 par lequel le préfet de la Moselle a refusé de l'admettre au séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il sera renvoyé.

Par un jugement n° 1803804 du 11 octobre 2018, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 26 décembre 2

018, régularisée le 25 janvier 2019, M. B..., représenté par Me A..., demande à la cour :

1°) d'ann...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 23 février 2018 par lequel le préfet de la Moselle a refusé de l'admettre au séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il sera renvoyé.

Par un jugement n° 1803804 du 11 octobre 2018, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 26 décembre 2018, régularisée le 25 janvier 2019, M. B..., représenté par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 11 octobre 2018 ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 23 février 2018 du préfet de la Moselle ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Moselle, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation administrative dans un délai déterminé, le cas échéant sous astreinte ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à son conseil, sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

S'agissant de la décision de refus de titre de séjour :

- les premiers juges ont commis une erreur de droit et une erreur d'appréciation en estimant que le préfet ne s'est pas senti lié pour refuser de l'admettre au séjour ;

- la décision de refus de séjour a été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 6-5 de l'accord franco-algérien ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

S'agissant de l'obligation de quitter le territoire français :

- contrairement à ce qu'ont considéré les premiers juges, le préfet s'est estimé à tort en situation de compétence liée pour l'obliger à quitter le territoire français ;

- elle méconnait les stipulations des articles 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.

Par un mémoire en défense, enregistré le 3 octobre 2019, le préfet de la Moselle conclut au rejet de la requête.

Il soutient, en se référant au mémoire présenté en première instance, que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 18 décembre 2018.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale des droits de l'enfant ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Antoniazzi, premier conseiller,

- et les observations de Me A..., représentant M. B....

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., ressortissant algérien né le 14 mai 1981, est entré régulièrement en France en avril 2017. Le 22 août 2017, il a sollicité la délivrance d'un certificat de résidence algérien en faisant valoir sa situation familiale. Par un arrêté du 23 février 2018, le préfet de la Moselle a rejeté sa demande, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné d'office à l'expiration de ce délai. M. B... fait appel du jugement du 11 octobre 2018 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la légalité de la décision portant refus de séjour :

2. En premier lieu, contrairement à ce que soutient M. B... et comme l'ont relevé à bon droit les premiers juges, le préfet de la Moselle, après avoir constaté que l'intéressé ne disposait pas du visa de long séjour requis et d'un contrat de travail visé pour bénéficier d'un titre de séjour portant la mention " salarié ", a recherché s'il y avait lieu, eu égard aux éléments en sa possession, de régulariser sa situation et a estimé qu'il n'y avait pas lieu de faire usage de son pouvoir discrétionnaire pour délivrer à M. B... un titre de séjour.

3. En deuxième lieu, aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention "vie privée et familiale" est délivré de plein droit (...) 5) au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus ".

4. M. B..., né en 1981, résidait en France depuis dix mois à la date de la décision attaquée. S'il se prévaut de la présence en France de ses trois enfants nés en 2005, 2007 et 2011, il ressort des pièces du dossier que ces derniers vivent auprès de l'épouse du requérant, qui a entrepris une procédure de divorce en décembre 2017. En outre, M. B... n'établit pas l'intensité de ses liens avec ses trois enfants, dont il a vécu séparé pendant de nombreuses années, en se bornant à produire quelques factures d'achat d'articles pour enfants et deux attestations émises par son fils aîné et son actuelle concubine, alors qu'il ressort de l'ordonnance de non conciliation du tribunal de grande instance de Metz, rendue en l'absence de comparution et de représentation de M. B..., que ce dernier " ne cherche pas à voir ses enfants ". Par ailleurs, il ne justifie ni de l'intensité, ni de l'ancienneté de la relation qu'il entretient avec sa compagne, de nationalité française, qui déclare l'héberger. Enfin, il n'établit pas être dépourvu d'attaches familiales en Algérie où il a vécu jusqu'à l'âge de trente-six ans. Dans ces conditions, M. B... n'est pas fondé à soutenir que le préfet a porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels il a refusé de lui délivrer un titre de séjour. Dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 6 § 5 de l'accord franco-algérien ne peut qu'être écarté.

5. En dernier lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier, notamment eu égard à ce qui a été dit au point précédent, que le préfet a entaché sa décision d'une erreur manifeste dans l'appréciation de la situation du requérant.

Sur la légalité de la décision obligeant l'intéressé à quitter le territoire français :

6. En premier lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de la Moselle se serait estimé, à tort, en situation de compétence liée pour obliger l'intéressé à quitter le territoire français.

7. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir d'ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

8. Pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point n°4, le requérant n'établit pas que le préfet a porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels il l'a obligé à quitter le territoire français. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées ne peut qu'être écarté.

9. En dernier lieu, aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". Il résulte de ces stipulations que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant.

10. Ainsi qu'il a été dit au point n°4, M. B... ne démontre pas l'intensité des liens qu'il entretient avec ses trois enfants, avec lesquels il n'a pratiquement jamais vécu. Par suite, il n'est pas fondé à soutenir que la décision litigieuse porte atteinte à l'intérêt supérieur de ses enfants. Le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations citées ci-dessus doit ainsi être écarté.

11. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et d'astreinte ainsi que celles présentées sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ne peuvent qu'être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de la Moselle.

2

N° 18NC03525


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 18NC03525
Date de la décision : 12/11/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. DEVILLERS
Rapporteur ?: Mme Sandrine ANTONIAZZI
Rapporteur public ?: M. LOUIS
Avocat(s) : DOLLÉ

Origine de la décision
Date de l'import : 16/12/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2019-11-12;18nc03525 ?
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