Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme D... B... a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne de condamner la commune de Châlons-en-Champagne à lui verser la somme de 111 302,64 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter de la réception de sa demande préalable, avec capitalisation des intérêts, au titre des préjudices qu'elle estime avoir subis du fait de son licenciement pour inaptitude physique.
Par un jugement n° 1602208 du 17 avril 2018, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire enregistrés le 17 juin 2018 et le 30 août 2018, Mme B..., représentée par Me A... demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne du 17 avril 2018 ;
2°) de condamner la commune de Châlons-en-Champagne à lui verser la somme de 111 302,64 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter de la réception de sa demande préalable, avec capitalisation des intérêts, au titre des préjudices qu'elle estime avoir subis du fait de son licenciement pour inaptitude physique ;
3°) de mettre à la charge de la commune de Châlons-en-Champagne le versement de la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la requête, déposée grâce à l'application Télérecours, est recevable et est suffisamment motivée;
- la rémunération à prendre en compte pour le calcul de son indemnité de licenciement doit tenir compte de son ancienneté de huit ans et elle en justifie par deux certificats de travail ne faisant mention d'aucune interruption de son temps de travail;
- l'arrêté la licenciant pour inaptitude physique est entaché de nombreuses irrégularités ;
- elle avait droit à une recherche de reclassement compte tenu des avis médicaux rendus ;
- elle est recevable et fondée à demander la réparation de ses préjudices économique, moral et des troubles dans ses conditions d'existence.
Par un mémoire en défense enregistré le 25 juillet 2018, la commune de Châlons-en-Champagne, représentée par Me A... conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 1 200 euros soit mise à la charge de Mme B... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient que :
-la requête est irrecevable ;
- la décision de licenciement pour inaptitude physique est régulière ;
- les services accomplis jusqu'en juillet 2011 ne doivent pas être pris en compte pour le calcul de l'indemnité de licenciement, l'intéressée n'étant plus dans les effectifs au cours des deux mois suivants et ayant perçu durant cette période des aides au retour à l'emploi ;
- elle ne se prévaut plus en appel d'irrégularités qui auraient été commises ;
- elle n'est plus recevable à contester la décision de licenciement et le défaut de reclassement ;
- le reclassement professionnel n'était plus possible, la requérante ayant été déclarée inapte à toutes fonctions.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Steinmetz-Schies, président,
- et les conclusions de Mme Kohler, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. Mme B... a été recrutée par la commune de Châlons-en-Champagne en qualité d'adjointe technique de 2ème classe par un contrat à durée déterminée à partir du 2 juillet 2001, plusieurs fois renouvelé, puis, par un contrat à durée indéterminée à compter du 12 mars 2012. A partir du 31 août 2015, elle a été placée en congé de maladie et n'a pas repris ses fonctions. Sur avis du comité médical départemental du 7 juillet 2016, concluant à son inaptitude définitive et absolue à toutes fonctions, sans possibilité de reclassement professionnel, le maire de Châlons-en-Champagne a prononcé son licenciement pour inaptitude physique à compter du 31 août 2016. Mme B... relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande de condamnation de la commune de Châlons-en-Champagne à lui verser la somme de 111 302,64 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter de la réception de sa demande préalable, avec capitalisation des intérêts, au titre des préjudices qu'elle estime avoir subis du fait de son licenciement pour inaptitude physique.
Sur les fins de non-recevoir opposée à la requête :
2. En premier lieu, aux termes de l'article R. 811-13 du code de justice administrative : " Sauf dispositions contraires prévues par le présent titre, l'introduction de l'instance devant le juge d'appel suit les règles relatives à l'introduction de l'instance de premier ressort définies au livre IV. Sont de même applicables les dispositions des livres VI et VII ". L'article R. 611-8-4 du même code prévoit que : " Lorsqu'une partie ou son mandataire adresse un mémoire ou des pièces par voie électronique, son identification selon les modalités prévues par l'arrêté mentionné à l'article R. 414-1 vaut signature pour l'application des dispositions du présent code ". Enfin aux termes de l'article R. 411-5 du même code : " L'introduction de la requête au moyen de l'une des applications mentionnées aux articles R. 414-1 et R. 414-6 emporte désignation de la personne qui l'a introduite comme représentant unique ".
3. La requête d'appel de Mme B... a été introduite auprès de la cour au moyen de l'application informatique " Télérecours " sous les identifiants de Me C..., inscrit au barreau de Reims. Par suite, et en vertu des dispositions précitées, le moyen tiré de ce que la requête ne serait pas signée doit être écarté.
4. En second lieu, la requête d'appel présentée par Mme B... ne se borne pas à reproduire intégralement et exclusivement le texte de son mémoire de première instance et comporte une critique du jugement par lequel le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande. Ainsi, elle satisfait à l'exigence de motivation posée par l'article R. 411-1 du code de justice administrative.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
En ce qui concerne le caractère fautif du licenciement :
5. En premier lieu, il résulte de l'instruction que dans son avis du 7 juillet 2016, le comité départemental de la Marne, a estimé, en s'appuyant sur une expertise médicale faisant état d'une station assise limitée à vingt minutes et une station debout limitée à dix minutes, que Mme B... était inapte définitivement et absolument à toute fonction, sans possibilité de reclassement professionnel. Mme B... ne produit pas plus en appel qu'en première instance d'éléments probants permettant d'infirmer le sens de cet avis émis par trois médecins. Par suite, le maire de Châlons-en-Champagne n'a commis aucune illégalité en décidant le licenciement de Mme B... pour inaptitude physique et sans rechercher, au préalable, à envisager son reclassement.
6. En second lieu, si Mme B... indique avoir démontré en première instance les irrégularités de forme dont serait entachée la décision de licenciement, elle ne reproduit pas ces moyens en cause d'appel et n'y renvoie pas de manière explicite. En tout état de cause, elle ne démontre pas que le préjudice économique, le préjudice moral et les troubles dans ses conditions d'existence dont elle réclame réparation au titre de son absence de reclassement seraient directement imputables à l'irrégularité des conditions de forme et de procédure qui ont précédé la décision de licenciement prise à son encontre.
7. Il résulte de ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté ses conclusions tendant à l'indemnisation des préjudices qu'elle impute à l'illégalité de son licenciement.
En ce qui concerne le calcul de l'indemnité de licenciement :
8. Aux termes de l'article 46 du décret du 15 février 1988 : " L'indemnité de licenciement est égale à la moitié de la rémunération de base définie à l'article précédent pour chacune des douze premières années de services, au tiers de la même rémunération pour chacune des années suivantes, sans pouvoir excéder douze fois la rémunération de base. (...) / Pour l'application de cet article, toute fraction de service égale ou supérieure à six mois sera comptée pour un an ; toute fraction de service inférieure à six mois n'est pas prise en compte ". Aux termes de l'article 48 de ce même décret : " L'ancienneté prise en compte pour le calcul de l'indemnité de licenciement définie à l'article 46 est décomptée à partir de la date à laquelle le contrat a été initialement conclu jusqu'à la date d'effet du licenciement, compte tenu, le cas échéant, des droits à congés annuels restant à courir et de la durée du préavis. Lorsque plusieurs contrats se sont succédé sans interruption ou avec une interruption n'excédant pas deux mois et que celle-ci n'est pas due à une démission de l'agent, la date initiale à prendre en compte est la date à laquelle le premier contrat a été conclu. (...) / Toute période durant laquelle les fonctions ont été exercées à temps partiel est décomptée proportionnellement à la quotité de travail effectué ".
9. Pour calculer le montant de l'indemnité de licenciement qu'elle a versée à Mme B..., la commune de Châlons-en-Champagne n'a pas pris en compte la période antérieure au 1er juillet 2011 en estimant qu'elle n'était plus dans les effectifs de la commune entre cette date et le 5 septembre 2011, date de prise d'effet de son nouvel engagement par un contrat à durée déterminée. Or, et alors qu'aucune des parties n'a produit les contrats à durée déterminée qui auraient été conclus entre elles depuis le premier engagement de Mme B..., cette dernière fournit à l'instance deux attestations de la directrice des ressources humaines de la commune des 30 juin 2014 et 29 août 2016 indiquant qu'elle a été employée par la commune sur contrat à durée déterminée du 2 juillet 2001 au 12 mars 2012 puis sur contrat à durée indéterminée de cette date jusqu'à son licenciement. Si la commune se prévaut de deux fiches de calcul de l'aide au retour à l'emploi établies en août et novembre 2011, et portant pour la première sur la période du 1er au 31 août 2011, et pour la seconde du 8 juillet au 31 juillet 2011, ainsi que des fiches de salaire pour les mois de juillet et août 2011 comportant la mention " aide au retour à l'emploi " ainsi que des décomptes d'heures effectuées, il résulte de l'instruction que plusieurs bulletins de salaire, dont ceux de juillet, août et septembre 2010, comportaient déjà cette mention " aide au retour à l'emploi " alors que la requérante était regardée comme bénéficiant d'un contrat à durée déterminée et que dans ces conditions, ces éléments ne permettent pas d'établir la réalité d'une interruption de l'engagement de Mme B... entre juillet et septembre 2011. Il s'ensuit que les services accomplis par l'intéressée jusqu'au 5 septembre 2011 devaient être pris en compte au titre de son ancienneté pour le calcul de l'indemnité de licenciement à laquelle elle avait droit.
10. Il résulte de ce qui précède que le montant de l'indemnité de licenciement à laquelle Mme B... avait droit s'élève, en tenant compte de ses différentes périodes d'emploi à temps incomplet, à la somme non contestée de 5 102,64 euros et que la requérante est donc fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant au versement d'une somme de 3 382, 64 euros en complément de l'indemnité déjà versée en septembre 2016.
En ce qui concerne les intérêts :
11. Mme B... a droit, sur le montant lui restant dû de son indemnité de licenciement, aux intérêts au taux légal, à compter du 3 novembre 2016, date de sa réclamation préalable. Elle a, en outre, demandé la capitalisation des intérêts et il y a lieu de faire droit à cette demande à compter du 3 novembre 2017, date à laquelle était due au moins une année d'intérêts, ainsi qu'à chaque échéance annuelle ultérieure à compter de cette date.
Sur les frais liés au litige :
12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de Mme B... qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme dont la commune de Châlons-en-Champagne demande le versement au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Il y a lieu, par contre, de mettre à la charge de la commune de Châlons-en-Champagne le versement à Mme B... d'une somme de 1 500 euros sur le même fondement.
DECIDE :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne du 17 avril 2018 est annulé en tant qu'il a rejeté les conclusions de Mme B... tendant au versement d'un complément d'indemnité de licenciement.
Article 2 : La commune de Châlons-en-Champagne est condamnée à verser à Mme B... un complément d'indemnité de licenciement d'un montant de 3 382,64 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 3 novembre 2016, ainsi que de la capitalisation de ces intérêts à compter du 3 novembre 2017 et de chaque échéance annuelle ultérieure.
Article 3 : La commune de Châlons-en-Champagne versera une somme de 1 500 euros à Mme B... sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... B... et à la commune de Châlons-en-Champagne.
Copie en sera adressée au préfet de la Marne.
N° 18NC01742 2