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22/10/2019 | FRANCE | N°17NC02053

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre, 22 octobre 2019, 17NC02053


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... C... a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler la décision du 2 février 2016 par laquelle le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social a annulé la décision de l'inspecteur du travail du 29 septembre 2015 la déclarant inapte à son poste actuel et à tout poste au sein de la société Brake France Service.

Par un jugement n° 1601019 du 13 juin 2017, le tribunal administratif de Nancy a fait droit à sa demande.

Procédure devant

la cour :

Par une requête, enregistrée le 11 août 2017, et un mémoire, enregistré le ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... C... a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler la décision du 2 février 2016 par laquelle le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social a annulé la décision de l'inspecteur du travail du 29 septembre 2015 la déclarant inapte à son poste actuel et à tout poste au sein de la société Brake France Service.

Par un jugement n° 1601019 du 13 juin 2017, le tribunal administratif de Nancy a fait droit à sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 11 août 2017, et un mémoire, enregistré le 25 septembre 2019, la société Brake France Service, puis la société Sysco France, venant aux droits de la société Brake France Service, représentée par la SCP Joseph Aguera et associés, demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nancy du 13 juin 2017 ;

2°) de rejeter la demande présentée par Mme C... devant le tribunal administratif de Nancy ;

3°) de mettre à la charge de Mme C... une somme de 4 000 euros, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La société soutient que :

- le ministre a pu légalement considérer que la demande de Mme C... était sans objet à la date de la décision de l'inspecteur du travail ;

- les autres moyens invoqués par Mme C... en première instance n'étaient pas fondés.

Par un mémoire, enregistré le 8 septembre 2019, Mme C..., représentée par Me D..., conclut au rejet de la requête et demande à la cour de mettre à la charge de la société Sysco France une somme de 2 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle reprend les moyens qu'elle a invoqués en première instance et fait valoir que les moyens invoqués par la société Sysco France ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code du travail ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme B...,

- les conclusions de Mme Seibt, rapporteur public,

- et les observations de Me D... pour Mme C....

Considérant ce qui suit :

1. Mme A... C... qui exerçait les fonctions de chef de secteur au sein de la société Brake France Service, a subi plusieurs arrêts de travail. Le 1er juin 2015, lors de la visite de reprise à l'issue de son dernier arrêt de travail, le médecin du travail a émis un avis favorable sous réserve. Il a indiqué que la salariée était " apte au poste de chef de secteur " mais a précisé qu'elle ne pouvait " plus travailler sur Jarny ". A la suite de cet avis, la société Brake France Service a proposé deux postes à Mme C... qui les a refusés. La société a considéré qu'en refusant ces postes qui avaient été validés par le médecin du travail la salariée avait commis une faute grave et l'a licenciée. Le 31 juillet 2015, postérieurement à son licenciement, Mme C... a contesté l'avis du médecin du travail devant l'inspecteur du travail, lequel a, par une décision du 29 septembre 2015, annulé l'avis d'aptitude du 1er juin 2015 et a déclaré Mme C... inapte à reprendre son poste au sein de l'agence de Jarny, ainsi qu'à tout autre poste au sein de la société Brake France Service. Le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social, saisi d'un recours de la société, a annulé cette décision par une décision du 2 février 2016. La société Brake France Service, puis la société Sysco France, venant aux droits de la société Brake France Service, relèvent appel du jugement du 13 juin 2017 par lequel le tribunal administratif de Nancy a annulé cette dernière décision.

2. Aux termes de l'article L. 1226-2 du code du travail dans sa rédaction alors en vigueur : " Lorsque, à l'issue des périodes de suspension du contrat de travail consécutives à une maladie ou un accident non professionnel, le salarié est déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités. Cette proposition prend en compte les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu'il formule sur l'aptitude du salarié à exercer l'une des tâches existantes dans l'entreprise. (...) " . Aux termes des dispositions alors en vigueur de l'article L. 4624-1 du même code : " Le médecin du travail est habilité à proposer des mesures individuelles telles que mutations ou transformations de postes, justifiées par des considérations relatives notamment à l'âge, à la résistance physique ou à l'état de santé physique et mentale des travailleurs (...) L'employeur est tenu de prendre en considération ces propositions et, en cas de refus, de faire connaître les motifs qui s'opposent à ce qu'il y soit donné suite. / En cas de difficulté ou de désaccord, l'employeur ou le salarié peut exercer un recours devant l'inspecteur du travail. Il en informe l'autre partie. L'inspecteur du travail prend sa décision après avis du médecin inspecteur du travail. "

3. Pour annuler la décision de l'inspecteur du travail, le ministre a considéré que le licenciement de Mme C..., qui avait été prononcé pour un motif étranger à l'aptitude médicale de la salariée, avait pour conséquence de priver la décision de l'inspecteur du travail de tout effet et que, la contestation de Mme C... étant dès lors dépourvue d'objet, l'inspecteur du travail était tenu de la rejeter.

4. Toutefois, d'une part, la contestation, présentée par un salarié devant l'inspecteur du travail, sur le fondement de l'article L. 4624-1 du code du travail, de l'avis émis par le médecin du travail sur son aptitude à occuper son emploi peut être introduite après que le licenciement du salarié déclaré inapte a pris effet, dès lors que, comme en l'espèce, elle l'est dans le délai de deux mois prévu à l'article R. 4624-35 du code du travail, dans sa rédaction applicable en l'espèce. D'autre part, et en tout état de cause, dès lors que le licenciement de Mme C... est motivé par son refus des deux postes de reclassement qui lui avait été proposés à la suite de l'avis du médecin du travail, ledit licenciement ne peut pas être regardé comme ayant été prononcé pour un motif étranger à l'aptitude médicale de la salariée. Dans ces conditions, en considérant que la contestation de Mme C... était dépourvue d'objet et que l'inspecteur du travail était tenu de rejeter sa demande, le ministre chargé du travail a commis une erreur de droit.

5. Il résulte de tout ce qui précède que la société Sysco France n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy a annulé la décision du 2 février 2016.

Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

6. Ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de Mme C..., qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme demandée par la société Sysco France au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de la société Sysco France une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par Mme C... et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la société Sysco France est rejetée.

Article 2 : La société Sysco France versera à Mme C... une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société Sysco France, à Mme A... C... et à la ministre du travail.

2

N° 17NC02053


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 17NC02053
Date de la décision : 22/10/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

66-01-01-02 Travail et emploi. Institutions du travail. Administration du travail. Inspection du travail.


Composition du Tribunal
Président : M. WURTZ
Rapporteur ?: Mme Guénaëlle HAUDIER
Rapporteur public ?: Mme SEIBT
Avocat(s) : BALMITGERE P. E. 162

Origine de la décision
Date de l'import : 30/10/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2019-10-22;17nc02053 ?
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