Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. D... A... a demandé au tribunal administratif de Nancy, d'une part, d'annuler la décision du 1er octobre 2015 par laquelle la commune de Thaon-les-Vosges a implicitement rejeté sa demande indemnitaire, d'autre part, de condamner cette commune à lui verser les sommes de 22 734,99 euros au titre de son préjudice financier, de 8 000 euros au titre de son préjudice moral, et de 5 000 euros au titre d'une perte de ses droits à la retraite.
Par un jugement n° 1600215 du 20 juin 2017, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire enregistrés les 26 juillet 2017 et 12 décembre 2017, M. A..., représenté par Me C..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nancy du 20 juin 2017 ;
2°) d'annuler la décision implicite de rejet du 1er octobre 2015 ;
3°) de condamner la commune de Thaon-les-Vosges à lui verser les sommes de 22 734,99 euros au titre de son préjudice financier, de 8 000 euros au titre de son préjudice moral et de 5 000 euros au titre d'une perte de ses droits à la retraite ;
4°) de mettre à la charge de la commune de Thaon-les-Vosges le versement de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la responsabilité délictuelle de la commune est engagée ;
- la commune n'a pas respecté toutes les conditions financières prévues lors de son détachement auprès de la société Lyonnaise des Eaux ;
- la convention de détachement se réfère à l'article 14 du contrat d'exploitation de la station d'épuration qui prévoit un salaire majoré de 15 % et non de 5 % ;
- la majoration de 15 % du salaire annuel net lui a été versée uniquement de juillet 2007 à mars 2008 ;
- la commune n'a jamais communiqué à la société Lyonnaise des Eaux les éléments permettant de lui faire bénéficier de la majoration de salaire de 15 puis 20 %.
Par des mémoires en défense enregistrés les 28 septembre 2017 et 26 janvier 2018, la commune de Capavenir Vosges, anciennement commune de Thaon-les-Vosges, représentée par Me B..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 1 500 euros soit mise à la charge de M. A... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative;
Elle soutient que :
- le requérant n'a pas contesté les trois arrêtés de détachement ;
- la commune n'étant pas partie au contrat d'exploitation conclu entre le syndicat intercommunal d'assainissement et la Lyonnaise des eaux, ses stipulations ne lui sont pas opposables ;
- l'article 14 du contrat d'exploitation ne prévoit pas une augmentation de la rémunération de 15 %., et la convention de détachement du 12 juillet 2007 ne renvoie à l'article 14 que pour l'intégration en position de détachement ;
- M. A... ne peut faire état d'aucun préjudice ;
- la circonstance que M. A... ait perçu, par erreur, une rémunération supérieure à celle mentionnée par la convention du 12 juillet 2007 est sans incidence.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;
- le décret n° 86-88 du 13 janvier 1986 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Steinmetz-Schies, président,
- les conclusions de Mme Kohler, rapporteur public,
- et les observations de Me B..., représentant la commune de Capavenir Vosges.
Considérant ce qui suit :
1. La commune de Thaon-les-Vosges a confié au syndicat intercommunal d'assainissement (SIA) de Thaon-Igney-Girmont la gestion de sa station d'épuration. Par contrat du 2 juillet 2007, le SIA a confié l'exploitation de cette station d'épuration à la société Lyonnaise des Eaux. M. A..., agent technique principal de 2ème classe de la commune, en poste à la station d'épuration depuis 1999, a alors été placé en position de détachement auprès de la société exploitante, dans le cadre d'une convention du 12 juillet 2007, plusieurs fois renouvelée. Il a ainsi fait l'objet d'arrêtés de détachement les 11 juillet 2007, 25 mars 2013 et 31 décembre 2013. S'estimant lésé par le niveau de la rémunération qui lui a été versée pendant la durée de son détachement auprès de la Lyonnaise des Eaux, il a saisi la commune de Thaon-les-Vosges, le 29 septembre 2015 d'une demande préalable tendant au versement d'une somme totale de 35 734,99 euros qui a été implicitement rejetée. M. A... relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la commune à lui verser les sommes de 22 734,99 euros au titre de son préjudice financier, 8 000 euros au titre de son préjudice moral et 5 000 euros au titre de la perte de droits à la retraite.
2. En premier lieu, aux termes de l'article 64 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 : " Le détachement est la position du fonctionnaire placé hors de son cadre d'emplois, emploi ou corps d'origine mais continuant à bénéficier, dans ce cadre d'emplois, emploi ou corps, de ses droits à l'avancement et à la retraite. / Il est prononcé sur la demande du fonctionnaire. / Le détachement est de courte ou de longue durée. (...) / Le fonctionnaire détaché est soumis aux règles régissant la fonction qu'il exerce par l'effet de son détachement ". Aux termes de l'article 2 du décret n° 86-88 du 13 janvier 1986 : " Le détachement d'un fonctionnaire ne peut avoir lieu que dans l'un des cas suivants : (...) / 5° Détachement auprès d'une entreprise privée assurant des missions d'intérêt général, notamment auprès d'une entreprise titulaire d'un traité de concession, d'affermage, de gérance ou de régie intéressée d'un service public d'une collectivité publique, sous réserve de l'approbation préalable, par la collectivité ou l'établissement dont relève l'agent, du projet de contrat et de ses avenants éventuels ". Aux termes de l'article 6 de ce décret, dans sa rédaction applicable jusqu'au 5 juillet 2008 : " Le détachement ne peut être accordé que lorsque la rémunération afférente à l'emploi de détachement n'excède pas la rémunération globale perçue dans l'emploi d'origine, majorée, le cas échéant, de 15 p. 100. (...) " et dans sa rédaction applicable du 5 juillet 2008 au 20 mai 2011, date de son abrogation par le décret n° 2011-541 du 20 mai 2011 : " Le détachement a lieu à indice égal ou, à défaut, à indice immédiatement supérieur lorsque le corps, le cadre d'emplois ou l'emploi d'accueil ouvre droit à pension de la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales ou à pension du code des pensions civiles et militaires de retraite de l'Etat ".
3. Contrairement à ce que soutient M. A..., ces dispositions n'ont ni pour objet ni pour effet d'ouvrir aux fonctionnaires concernés le droit de voir la rémunération globale qu'ils percevaient dans leur corps d'origine majorée forfaitairement de 15 % mais instituent seulement un plafonnement de la rémunération de l'emploi d'accueil au-delà duquel le détachement ne peut pas être prononcé.
4. En deuxième lieu, l'article 14 du contrat d'exploitation conclu entre le syndicat intercommunal de Thaon-Chavegnot-Igney-Girmont et la société Lyonnaise des Eaux stipule que : " Le titulaire s'engage à reprendre la personne affectée au service de la ville de Thaon-les-Vosges pour l'exploitation de l'ancienne station, à la veille de l'entrée en vigueur du présent contrat. Cet agent sera placé par la ville de Thaon-les-Vosges en position de détachement dans la société du titulaire pour la durée du contrat. Le titulaire assurera à l'agent ainsi détaché une situation en matière de traitements et d'indemnités, au moins équivalente à celle qu'il détient actuellement, avec les mêmes perspectives de carrière, notamment en ce qui concerne l'incidence des avancements dont les intéressés bénéficieront en qualité d'agents détachés, dans leur corps d'origine. Le salaire net annuel sans charge est de 20 557 euros auquel s'ajoute une prime de 5 % liée à l'obtention des objectifs fixés en début d'année. Une convention est établie entre la ville de Thaon-les-Vosges et le titulaire sur la base de la proposition de convention fournie dans l'offre ".
5 Les tiers à un contrat administratif ne peuvent en principe se prévaloir des stipulations de ce contrat, à l'exception de ses clauses réglementaires. M. A... n'étant pas signataire du contrat d'exploitation du 2 juillet 2007, ne saurait donc se prévaloir des stipulations précitées de l'article 14 de ce contrat à l'appui de sa demande tendant à la mise en jeu de la responsabilité quasi-délictuelle de la commune de Thaon-les-Vosges, laquelle n'était, au surplus, pas elle-même signataire de ce contrat.
6. En troisième lieu, si les stipulations de l'article 2 de la convention de détachement du 12 juillet 2007 et des conventions qui lui ont succédé, conclues entre la commune de Thaon-les-Vosges et la société Lyonnaise des Eaux et relatives aux conditions du détachement de M. A..., prévoient que la rémunération de M. A... comprendra le traitement indiciaire de base, régulièrement notifié à l'exploitant par l'administration municipale, les indemnités et primes fixes qu'elle lui communiquera également, ainsi qu'une prime majorant de 5 % le traitement indiciaire de base, aucune d'elles ne prévoit que le traitement de l'intéressé serait forfaitairement majoré de 15 %. Il en résulte, et en tout état de cause, que la commune n'a manqué à aucune de ses obligations contractuelles en s'abstenant de communiquer à la société Lyonnaise des Eaux, les éléments permettant de servir à M. A..., pendant son détachement, une rémunération majorée de 15 %.
7. En dernier lieu, il ne résulte pas de l'instruction que la commune aurait pris, à l'égard de M. A..., l'engagement de lui faire verser une rémunération augmentée de 15 % pour obtenir son accord sur son détachement. Alors que l'intéressé n'a jamais contesté les arrêtés qui l'ont placé en position de détachement auprès de la société Lyonnaise des Eaux, il n'est pas fondé à demander l'indemnisation des préjudices qu'il soutient avoir subis du fait d'engagements non tenus par la commune.
8. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande.
9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Capavenir Vosges, anciennement Thaon-les-Vosges, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme dont M. A... demande le versement au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. A... le versement à la commune de Capavenir Vosges la somme demandée sur le même fondement.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par la commune de Capavenir Vosges sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... A... et à la commune de Capavenir Vosges.
N° 17NC01884 2