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03/10/2019 | FRANCE | N°17NC01492

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre, 03 octobre 2019, 17NC01492


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... A... a demandé au tribunal administratif de Besançon de condamner le centre hospitalier de Lons-le-Saunier à lui verser une somme de 31 747,59 euros, assortie des intérêts au taux légal, en réparation du préjudice subi du fait du retard de sa réintégration, et de lui enjoindre de reconstituer sa carrière.

Par un jugement n° 1500686 du 25 avril 2017, le tribunal administratif de Besançon a fait partiellement droit à sa demande en condamnant le centre hospitalier de Lons-le-Saunier à l

ui verser une somme de 16 500 euros augmentée des intérêts au taux légal à compter ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... A... a demandé au tribunal administratif de Besançon de condamner le centre hospitalier de Lons-le-Saunier à lui verser une somme de 31 747,59 euros, assortie des intérêts au taux légal, en réparation du préjudice subi du fait du retard de sa réintégration, et de lui enjoindre de reconstituer sa carrière.

Par un jugement n° 1500686 du 25 avril 2017, le tribunal administratif de Besançon a fait partiellement droit à sa demande en condamnant le centre hospitalier de Lons-le-Saunier à lui verser une somme de 16 500 euros augmentée des intérêts au taux légal à compter du 31 décembre 2014, une somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et a rejeté le surplus de sa demande

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 25 juin 2017, Mme C... A..., représentée par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Besançon du 25 avril 2017 en tant qu'il a rejeté le surplus de ses conclusions ;

2°) de condamner le centre hospitalier de Lons-le-Saunier à lui verser la somme de 9 433,04 euros en réparation du préjudice financier subi, la somme de 1 814,55 euros au titre de la perte de prime de service pour l'année 2010, la somme de 4 000 euros au titre de son préjudice moral, lesdites sommes assorties des intérêts au taux légal ;

3°) de mettre à la charge du centre hospitalier de Lons-le-Saunier le versement de la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'illégalité fautive des décisions des 8 janvier 2010, 20 mai 2010, 5 octobre 2010, 15 novembre 2010 et 8 décembre 2010 est de nature à engager la responsabilité du centre hospitalier ;

- elle a droit au versement des primes d'astreintes ;

- elle a droit au versement de la prime de service ;

- elle a subi un préjudice moral important.

Par une ordonnance du 11 avril 2018, la clôture de l'instruction est intervenue le 17 mai 2018.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 ;

- le décret n° 88-976 du 13 octobre 1988 ;

- le décret n° 2002-550 du 19 avril 2002 ;

- le code de la santé publique ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Steinmetz-Schies, président,

- les conclusions de Mme Kohler, rapporteur public,

- et les observations de Me B..., représentant Mme A....

Une note en délibéré a été enregistrée le 24 septembre 2019 pour Mme A....

Considérant ce qui suit :

1. Mme A... infirmière de bloc opératoire diplômée d'Etat au centre hospitalier de Lons-le-Saunier, a été placée à sa demande en disponibilité du 1er octobre 2009 au 30 septembre 2010. Elle a sollicité sa réintégration anticipée au 28 décembre 2009. Le directeur du centre hospitalier a refusé, par deux décisions des 8 janvier 2010 et 20 mai 2010 de faire droit à sa demande, motifs pris de l'absence de poste vacant. Par une décision du 5 octobre 2010, Mme A... a été placée en disponibilité d'office. Le 27 novembre 2010, elle a refusé l'emploi qui lui avait été proposé le 15 novembre 2010. Le 1er février 2011, elle a été réintégrée sur un poste correspondant à son grade. Elle a demandé la condamnation du centre hospitalier de Lons-le-Saunier à lui verser une somme de 31 747,59 euros en réparation du préjudice subi du fait du retard pris à sa réintégration. Par un jugement du 25 avril 2017, le tribunal administratif de Besançon a fait partiellement droit à sa demande en mettant à la charge du centre hospitalier de Lons-le-Saunier la somme de 16 500 euros augmentée des intérêts au taux légal, et a rejeté le surplus de sa demande. Mme A... fait appel en tant que le tribunal administratif a rejeté le surplus de ses conclusions indemnitaires.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

S'agissant de la légalité des décisions des 20 mai 2010 et 5 octobre 2010 :

2. Aux termes de l'article 62 de la loi du 9 janvier 1986 susvisée : " La disponibilité est la position du fonctionnaire qui, placé hors de son établissement, cesse de bénéficier, dans cette position, de ses droits à l'avancement et à la retraite. / La disponibilité est prononcée soit à la demande de l'intéressé, soit d'office (...) ". Aux termes de l'article 37 du décret du 13 octobre 1988 : " Deux mois au moins avant l'expiration de la période de disponibilité en cours, le fonctionnaire doit solliciter soit le renouvellement de sa disponibilité soit sa réintégration. (...) / (...) la réintégration est de droit à la première vacance lorsque la disponibilité n'a pas excédé trois ans. (...) / Le fonctionnaire qui ne peut être réintégré faute de poste vacant est maintenu en disponibilité jusqu'à sa réintégration et au plus tard jusqu'à ce que trois postes lui aient été proposés. (...)". Il résulte des dispositions précitées que le droit à réintégration à la première vacance dont bénéficie un fonctionnaire lorsque sa disponibilité n'a pas excédé 3 ans, s'il n'oblige pas l'administration à réintégrer l'intéressé dans le poste même qu'il occupait avant sa mise en disponibilité et s'il ne lui interdit pas non plus de s'opposer à sa demande de réintégration sur ce poste pour des motifs tirés des nécessités du service, lui impose en revanche d'examiner en priorité cette demande.

3. En premier lieu, il ressort de la motivation de la décision du 20 mai 2010 que, pour rejeter la nouvelle demande de réintégration formée par Mme A..., le directeur du centre hospitalier de Lons-le-Saunier lui a opposé le motif tiré de ce qu'il n'existait pas de poste vacant correspondant à son grade au sein du centre hospitalier. Toutefois, ce faisant, le centre hospitalier de Lons-le-Saunier n'allègue pas que les nécessités de service lui imposaient de nommer Mlle D... infirmière stagiaire au 1er avril 2010 sur l'emploi d'infirmière de bloc opératoire, supprimant ainsi la vacance de cet emploi alors que Mme A... avait formulé une demande de réintégration après mise en disponibilité. Par suite, la décision de refus de réintégration du 20 mai 2010, fondée sur l'absence de poste vacant, est illégale.

4. En second lieu, si Mme A... n'avait aucun droit à être réintégrée sur l'emploi qu'elle occupait avant son départ en disponibilité, l'emploi d'infirmière diplômée d'Etat en bloc opératoire, d'une part, n'a pas été supprimé dès lors qu'il a été occupé irrégulièrement par Mlle D..., infirmière stagiaire, d'autre part, il n'est pas contesté qu'au cours de l'année 2010, deux autres postes du même grade ont été rendus disponible par prise d'un congé parental et d'une mise en disponibilité pour convenance personnelle. Par suite, la décision du 5 octobre 2010 est illégale.

S'agissant de la légalité des décisions des 15 novembre et 8 décembre 2010 :

5. Aux termes de l'article R. 4311-11 du code de la santé publique : " L'infirmier ou l'infirmière titulaire du diplôme d'Etat de bloc opératoire ou en cours de formation préparant à ce diplôme, exerce en priorité les activités suivantes : 1° Gestion des risques liés à l'activité et à l'environnement opératoire ; 2° Elaboration et mise en oeuvre d'une démarche de soins individualisée en bloc opératoire et secteurs associés ; 3° Organisation et coordination des soins infirmiers en salle d'intervention ; 4° Traçabilité des activités au bloc opératoire et en secteurs associés ; 5° Participation à l'élaboration, à l'application et au contrôle des procédures de désinfection et de stérilisation des dispositifs médicaux réutilisables visant à la prévention des infections nosocomiales au bloc opératoire et en secteurs associés. (...) Il est habilité à exercer dans tous les secteurs où sont pratiqués des actes invasifs à visée diagnostique, thérapeutique, ou diagnostique et thérapeutique dans les secteurs de stérilisation du matériel médico-chirurgical et dans les services d'hygiène hospitalière ".

6. Mme A... fait valoir que le poste proposé le 15 novembre 2010 ne recouvre pas l'intégralité des missions d'une infirmière titulaire du diplôme d'Etat de bloc opératoire dès lors qu'il ne s'exerce pas au sein du bloc opératoire et que la plupart des missions indiquées relèvent du cadre de service. Il résulte toutefois de l'instruction, et notamment de la fiche de poste produite, que l'infirmier ainsi embauché est affecté sur le pôle de chirurgie, qu'il aura pour missions de prendre en charge le patient, de prévenir le risque infectieux, de gérer les risques et d'évaluer les pratiques, d'assurer une mission de formation, et de communiquer ses connaissances aux équipes du service. Si de telles missions ne recouvrent pas l'intégralité des activités mentionnées par les dispositions précitées, aucun élément ne permet d'établir qu'elle n'aurait pas exercé au sein du bloc opératoire. La circonstance que cet emploi n'a pas été pourvu après le refus de Mme A... n'établit pas qu'il ne correspondait pas au grade d'infirmier titulaire du diplôme d'Etat de bloc opératoire. Par suite, les décisions des 15 novembre 2010 et 8 décembre 2010 ne sont pas illégales.

7. Par conséquent, il résulte de ce qui précède aux points 3 et 4 que le centre hospitalier de Lons-le-Saunier a commis à ce titre une faute de nature à engager sa responsabilité à l'égard de Mme A....

Sur la condamnation du centre hospitalier prononcée par le tribunal :

S'agissant de la détermination de la période de responsabilité :

8. Il résulte de ce qui a été dit aux points 3, 4 et 7 que Mme A... est en droit d'obtenir la réparation des conséquences de son maintien illégal en disponibilité à compter du 8 janvier 2010, date du premier refus de réintégration qui lui a été opposé suite à sa demande et le 15 novembre 2010, date à laquelle lui a été proposé un poste correspondant à son grade, ainsi que l'a jugé à juste titre le tribunal.

S'agissant du préjudice indemnisable :

9. En vertu des principes généraux qui régissent la responsabilité de la puissance publique, un agent public irrégulièrement évincé a droit à la réparation intégrale du préjudice qu'il a effectivement subi du fait de la mesure illégalement prise à son encontre. Il en résulte que sont ainsi indemnisables les préjudices de toute nature avec lesquels l'illégalité commise présente, compte tenu de l'importance respective de cette illégalité et, le cas échéant, des fautes relevées à l'encontre de l'intéressé, un lien direct de causalité. Pour l'évaluation du montant de l'indemnité due, doivent être prises en compte la perte du traitement ainsi que celle des primes et indemnités dont l'intéressé avait, pour la période en cause, une chance sérieuse de bénéficier, à l'exception de celles qui, eu égard à leur nature, à leur objet et aux conditions dans lesquelles elles sont versées, sont seulement destinées à compenser des frais, charges ou contraintes liés à l'exercice effectif des fonctions. Enfin, il y a lieu de déduire, le cas échéant, le montant des rémunérations que l'agent a pu se procurer par son travail au cours de la période d'éviction.

10. En premier lieu, en se bornant à affirmer qu'elle aurait dû bénéficier, d'une part de la prime de service correspondant à 7,5% de celui-ci dès lors qu'elle la percevait avant sa mise en disponibilité, et d'autre part des heures d'astreinte, en se prévalant de leur caractère obligatoire, Mme A... n'établit pas plus en appel que devant les premiers juges que le refus illégal de sa réintégration qui lui a été opposé du 8 janvier 2010 au 15 novembre 2010 l'aurait privée d'une chance sérieuse de bénéficier de ces prime et heures d'astreinte. Dès lors, ses conclusions tendant à la réformation du jugement sur ce point doivent être rejetées.

11. En second lieu, il résulte de l'instruction que Mme A... a subi, compte tenu de l'incertitude quant à son avenir professionnel dans laquelle elle a été placée au cours de la période litigieuse, un préjudice moral dont les premiers juges n'ont pas fait une évaluation erronée en lui allouant une somme de 1 000 euros.

12. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Besançon n'a fait que partiellement droit à sa demande.

Sur les frais liés au litige :

13. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du centre hospitalier de Lons-le-Saunier qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme dont Mme A... demande le versement au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... A... et au centre hospitalier de Lons-le-Saunier.

N° 17NC01492 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 17NC01492
Date de la décision : 03/10/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

36-05-04-01-03 Fonctionnaires et agents publics. Positions. Congés. Congés de maladie. Accidents de service.


Composition du Tribunal
Président : Mme STEINMETZ-SCHIES
Rapporteur ?: Mme Marie-Pierre STEINMETZ-SCHIES
Rapporteur public ?: Mme KOHLER
Avocat(s) : BASCIAK

Origine de la décision
Date de l'import : 15/10/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2019-10-03;17nc01492 ?
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