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01/10/2019 | FRANCE | N°19NC00461

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre, 01 octobre 2019, 19NC00461


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... B... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 24 juillet 2018 par lequel le préfet de la Moselle a refusé de renouveler son attestation de demandeur d'asile, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement no 1806232 du 14 novembre 2018, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :<

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Par une requête, enregistrée le 15 février 2019, Mme D... B..., représentée par Me C.....

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... B... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 24 juillet 2018 par lequel le préfet de la Moselle a refusé de renouveler son attestation de demandeur d'asile, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement no 1806232 du 14 novembre 2018, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 15 février 2019, Mme D... B..., représentée par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 14 novembre 2018 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 24 juillet 2018 par lequel le préfet de la Moselle a refusé de renouveler son attestation de demandeur d'asile, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination ;

3°) d'enjoindre à titre principal au préfet de la Moselle de lui délivrer un titre de séjour assorti d'une autorisation de travail, ou subsidiairement de réexaminer sa situation et, dans cette attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros, à verser à son conseil, en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'arrêté attaqué est insuffisamment motivé en droit et en fait et ne fait pas ressortir un examen particulier de sa situation ;

- la décision contestée ne peut être fondée sur le 6° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'elle avait déposé une demande de titre de séjour ;

- la décision contestée méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

Par un mémoire, enregistré le 7 août 2019, le préfet de la Moselle conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Mme B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 15 janvier 2019.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. A... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme B..., ressortissante angolaise, née en 1977, est entrée irrégulièrement en France, selon ses déclarations, en 2014, en vue de solliciter l'asile. Sa demande a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides du 12 mai 2016, confirmée par une décision de la Cour nationale du droit d'asile du 17 mars 2017. Parallèlement, l'intéressée a déposé une demande de titre de séjour en qualité de parent d'un enfant malade qui, en raison d'un dossier incomplet, a été classée sans suite par les services préfectoraux. Par un arrêté du 24 juillet 2018, le préfet de la Moselle a refusé de renouveler l'attestation de demande d'asile de la requérante, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Par un jugement du 14 novembre 2018, dont Mme B... fait appel, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur le bien-fondé du jugement :

2. En premier lieu, l'arrêté attaqué, après avoir visé notamment les articles L. 743- 1 et L. 743-3 et le 6° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que les articles 8 et 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, rappelle les conditions d'entrée de Mme B... sur le territoire français, la demande d'asile qu'elle a présentée et les décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et de la Cour nationale du droit d'asile ayant définitivement refusé de lui accorder l'asile, mettant ainsi fin à son droit de se maintenir sur le territoire, la demande de titre de séjour qu'elle a présentée en qualité de parent d'un enfant malade, classée sans suite, en raison du caractère incomplet de son dossier malgré les demandes qui lui avaient été adressées par les services de la préfecture. Il ressort également des termes de cet arrêté que le préfet a vérifié qu'une mesure d'éloignement ne portera pas une atteinte disproportionnée au droit de la requérante à une vie privée et famille et ne l'exposera pas à des risques en cas de retour dans son pays d'origine. Si Mme B... reproche au préfet de ne pas avoir mentionné l'ensemble des éléments relatifs à sa situation familiale, et notamment la présence en France de ses trois autres enfants, dont l'un suit une formation, elle n'établit pas avoir porté à sa connaissance de tels éléments lors de sa demande de titre de séjour. L'arrêté contesté, qui au demeurant n'a pas à énoncer tous les éléments concernant la situation de la requérante, comporte ainsi une motivation suffisante tant en droit qu'en fait. Il s'ensuit que le moyen tiré de l'insuffisance de motivation doit être écarté.

3. En deuxième lieu, aux termes du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) 6° Si la reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé à l'étranger ou si l'étranger ne bénéficie plus du droit de se maintenir sur le territoire français en application de l'article L. 743-2, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité (...) / L'obligation de quitter le territoire français fixe le pays à destination duquel l'étranger est renvoyé en cas d'exécution d'office ".

4. Il ressort des pièces du dossier que la demande d'asile présentée par Mme B... a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides du 12 mai 2016, confirmée par une décision de la Cour nationale du droit d'asile du 17 mars 2017, notifiée le 30 mars suivant. Si l'intéressée fait valoir qu'elle avait déposé une demande de titre de séjour en qualité d'accompagnant d'un enfant malade que le préfet aurait dû instruire, cette circonstance ne s'opposait pas au prononcé d'une mesure d'éloignement dès lors qu'à la date de l'arrêté contesté, elle ne disposait d'aucun droit au séjour en France. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du 6° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.

5. En troisième lieu, si Mme B... fait valoir qu'elle avait déposé une demande de titre de séjour en qualité d'accompagnant d'un enfant malade, il ressort des pièces du dossier que le préfet lui a demandé de compléter son dossier par la production de l'acte de décès du père de l'enfant. Cette demande a d'ailleurs été reçue par l'intéressée qui a sollicité, par un courrier du 4 septembre 2017, un délai pour produire ce document. Le préfet soutient, sans être utilement contredit, que Mme B... ne lui a pas adressé ce document antérieurement à l'édiction de l'arrêté en litige. Par ailleurs, il ressort d'une lettre du 10 juillet 2018 que de Mme B... a reçu, contrairement à ce qu'elle allègue, le courrier du 22 juin 2018 par lequel le préfet l'a informée qu'en l'absence de production du document sollicité, il considérait qu'elle avait renoncé à sa demande de titre de séjour. Ainsi, à la date à laquelle il a pris l'arrêté litigieux, le préfet de la Moselle ne pouvait pas être regardé comme saisi d'une demande de titre de séjour sur un autre fondement que celui tiré de la qualité de demandeur d'asile de Mme B.... En outre, l'intéressée ne produit aucun élément de nature à établir qu'un titre de séjour de plein droit devrait lui être délivré. Par suite, en prenant une mesure d'éloignement à l'encontre de Mme B..., le préfet n'a pas commis d'erreur de droit au regard des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

6. En quatrième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

7. Si Mme B... se prévaut de son intégration, de la scolarisation de ses enfants, dont l'un majeur poursuit une formation, elle n'établit pas être dépourvue d'attaches dans son pays d'origine où elle a vécu jusqu'à l'âge de trente-sept ans et où demeure encore l'une de ses soeurs. Elle n'apporte aucun élément qui s'opposerait à ce que ses enfants mineurs poursuivent leur scolarité dans son pays d'origine. Si elle justifie d'une promesse d'embauche en qualité d'agent d'entretien, celle-ci est postérieure à la décision contestée. Quant à son fils, majeur, il fait également l'objet d'une mesure d'éloignement. La circonstance qu'elle s'investit activement dans plusieurs associations caritatives, ainsi qu'en témoignent les nombreuses attestations qu'elle a produites, n'est pas de nature à lui conférer un droit à un titre de séjour. Dans ces conditions, nonobstant les efforts d'intégration de la requérante, la décision en litige n'a pas porté une atteinte disproportionnée au droit au respect de sa vie privée et familiale. Par suite, elle n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

8. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions présentées à fin d'injonction, ainsi que celles présentées sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent qu'être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... B... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée pour information au préfet de la Moselle.

N° 19NC00461 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 19NC00461
Date de la décision : 01/10/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. WURTZ
Rapporteur ?: M. Stéphane BARTEAUX
Rapporteur public ?: Mme SEIBT
Avocat(s) : ANNIE LEVI-CYFERMAN - LAURENT CYFERMAN

Origine de la décision
Date de l'import : 11/02/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2019-10-01;19nc00461 ?
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